Sadi Carnot, victime de l’anarchisme
Élu en 1887, Sadi Carnot est un président de la République française empêtré, en cette fin tourmentée du XIXe siècle, dans de nombreux scandales, dont celui de Panama. Il a dû, par ailleurs, lutter contre de nombreux mouvements politiques parmi lesquels le boulangisme mais aussi l’anarchisme, qui se répandait tel un cancer dans toute l’Europe. Dans ce contexte, Carnot n’hésita pas à faire voter des lois dites « scélérates », en 1893, afin de limiter les actions de ce mouvement chaotique (ces textes seront abrogés en 1992). Mais la réaction des anarchistes se fera dans la violence.
Ainsi, le 24 juin 1894, lors d’un déplacement de Sadi Carnot venu voir, à Lyon, l’Exposition universelle, un jeune anarchiste italien âgé de 20 ans, Sante Geronimo Caserio, s’avance dans la foule qui entoure la voiture du Président. Profitant de la cohue qui s’installe, il monte sur le marchepied du véhicule et, d’un poignard affûté, frappe mortellement le chef de l’État. La victime est immédiatement amenée auprès des chirurgiens et des médecins qui tentent d’arrêter l’hémorragie. Malgré leurs soins, le président de la République s’éteint le 25 juin, à 0h40. Son meurtrier, arrêté sur les lieux même de son crime, est emprisonné, jugé puis condamné à mort le 16 août 1894.
Devenu martyr de la lutte contre l’anarchisme, Sadi Carnot est inhumé au Panthéon après des funérailles à Notre-Dame de Paris. Unique président de la République française à avoir eu cet honneur, il ne sera pourtant pas le dernier des chefs d'État assassinés dans l’exercice de leurs fonctions.
Paul Doumer, une longue vie mais un court mandat
Membre du Parti radical, Paul Doumer est élu à la présidence de la République en 1931, âgé de 74 ans. Ses fonctions sont surtout honorifiques, en hommage à sa longue carrière au service de la France comme gouverneur général de l’Indochine, député, ministre et, enfin, sénateur. Mais cette récompense pour bons et loyaux services envers notre pays ne dure guère longtemps. Le 6 mai 1932, Paul Doumer se rend à l’hôtel Salomon de Rothschild, à Paris, afin d’inaugurer un salon des anciens combattants. Lui-même a perdu quatre fils lors de la Grande Guerre et partage donc avec ces soldats une peine et une souffrance. Lors de cet événement, un émigré russe, Paul Gorgulov, s’infiltre dans la propriété. Repérant le président de la République, il sort son pistolet et tire à deux reprises. Blessé, Paul Doumer tombe dans le coma et décède à l’aube du 7 mai 1932. Son meurtrier est jugé rapidement. Il justifiera son geste, commis selon lui en représailles contre une France trop complaisante avec l’URSS. Condamné à mort, il est guillotiné le 14 septembre 1932.
Paul Doumer est pleuré par tous en raison de la violence de l’attentat dont il a été la victime. Après un passage à Notre-Dame, puis au Panthéon pour un hommage plus républicain, l’ancien Président est inhumé au cimetière de Vaugirard. Le chef du Conseil, André Tardieu, proclame alors : « Pour la seconde fois en soixante et un ans, la République a la douleur de conduire au tombeau son chef assassiné. Crime odieux ; crime absurde, et par la fonction qu'il vise, et par l'homme qu'il atteint ; car la fonction était d'arbitrage et de conciliation ; l'homme était de paix, de sagesse et de bonté. […] Paul Doumer, pour trois quarts de siècle, fut le vivant témoignage de ce qu’est et de ce que peut la démocratie. Fils du peuple, c’est le peuple entier qu’il représentait. Et c’est aussi le peuple entier qu’ont frappé les balles qui l’ont tué […] Il nous lègue deux devoirs […] celui d’aider les siens […] celui d’aider la France à remplir son destin par les vertus de l’union et les vertus de l’action. »
Sadi Carnot comme Paul Doumer ont payé de leur vie leur attachement à la démocratie, à la République et à la France, rappelant que les responsabilités politiques peuvent mener jusqu'au sacrifice de sa vie.
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