C’est un monument de la pensée
française, dans toutes les acceptions de qualité, allons, ne nous
privons pas, de supériorité de celle-ci, supériorité non en ce qu’elle
est « de chez nous », mais en ce qu’elle touche à l’universel, dans le temps et dans l’espace, et qu’elle proclame le Vrai, le Beau et le Bien. Il mériterait à lui seul une brève par semaine sur votre blog préféré.
Il s’agit de Charles Maurras.
Nous n’avons pas ici la place de convoquer toute l’expertise nécessaire
pour faire justice des esprits chagrins ou à courte vue qui l’ont
vilipendé, et tout particulièrement de ceux qui aujourd’hui comme hier
essaient de glisser le venin d’une soi-disant incompatibilité
essentielle entre la doctrine de Maurras et l’orthodoxie catholique
(aussi bien chez Golias qu’à la FSSPX).
Il est tout aussi évident qu’inévitable
que dans les milliers et milliers de pages écrites par lui ou sous sa
direction, dans un combat quotidien contre les forces de dilution de la
France, comme de l’Eglise, dans une lutte sans merci, lui et ses disciples aient pu avoir des excès de plume, et dans le maelstrom des évènements, aient pu adopter des positions contestables (comme le ralliement temporaire à la dictature jacobine pendant la 1ère Guerre Mondiale, position éreintée par Jean de Viguerie dans « Les deux patries »).
L’objet de notre rubrique « en relisant
nos maîtres » n’étant pas d’être exhaustif, mais de donner le goût au
lecteur de revenir aux sources, nous vous proposons quelques citations
symboliques du Maître de Martigues, sur quelques sujets essentiels, et
d’éminente actualité.
Sur la question fondamentale de la laïcité, des rapports entre Dieu et César.
« Il faut définir les lois de la
conscience pour poser la question des rapports de l'homme et de la
société ; pour la résoudre, il faut constituer des autorités vivantes
chargées d'interpréter les cas conformément aux lois. Ces deux
conditions ne se trouvent réunies que dans le catholicisme. Là et là seulement, l'homme obtient ses garanties, mais la société conserve les siennes :
l'homme n'ignore pas à quel tribunal ouvrir son cœur sur un scrupule ou
se plaindre d'un froissement, et la société trouve devant elle un grand
corps, une société complète avec qui régler les litiges survenus entre
deux juridictions semblablement quoique inégalement compétentes. L'Église
incarne, représente l'homme intérieur tout entier ; l'unité des
personnes est rassemblée magiquement dans son unité organique. L'État,
un lui aussi, peut conférer, traiter, discuter et négocier avec elle.
Que peut-il contre une poussière de consciences individuelles, que les
asservir à ses lois ou flotter à la merci de leur tourbillon ? » (La démocratie religieuse, 1921)
Sur la lutte de la culture de vie contre la culture de mort, et finalement du Bien contre l’absence de Bien qu’on appelle Mal.
« Tout désormais s'explique par une différence, la plus claire du monde et la plus sensible : un oui, un non.
Ceux-là ne veulent pas, ceux-ci veulent, désirent. Quoi donc ? Que
quelque chose soit, avec les conditions nécessaires de l'Être. Les uns conspirent à la vie et à la durée : les autres souhaitent, plus ou moins nettement, que ce qui est ne soit bientôt plus, que ce qui se produit avorte, enfin que ce qui tend à être ne parvienne jamais au jour. Ces derniers constituent la vivante armée de la mort :
ils sont l'inimitié jurée, directe, méthodique, de ce qui est, agit,
recrute, peuple : on peut les définir une contradiction, une critique
pure, formule humaine du néant. (…) Le positif est catholique et le négatif ne l'est pas. Le négatif
tend à nier le genre humain comme la France et le toit domestique comme
l'obscure enceinte de la conscience privée ; ne le croyez pas s'il
soutient qu'il nie uniquement le frein, la chaîne, la délimitation, le
lien : il s'attaque à ce que ces négations apparentes ont de positif.
Comme il ne saurait exister de figure sans le trait qui la cerne et la
ligne qui la contient, dès que l'Être commence à s'éloigner de son
contraire, dès que l'Être est, il a sa forme, il a son ordre, et c'est
cela même dont il est borné qui le constitue. Quelle existence est sans
essence ? Qu'est-ce que l'Être sans la loi ? À tous les degrés de l'échelle, l'Être faiblit quand mollit l'ordre ;
il se dissout pour peu que l'ordre ne le tienne plus. Les déclamateurs
qui s'élèvent contre la règle ou la contrainte au nom de la liberté ou
du droit, sont les avocats plus ou moins dissimulés du néant.
Inconscients, ils veulent l'Être sans la condition de l'Être
et, conscients, leur misanthropie naturelle, ou leur perversité
d'imagination, ou quelque idéalisme héréditaire transformé en folie
furieuse les a déterminés à rêver, à vouloir le rien. » (La démocratie religieuse, 1921)
Sur le nationalisme, pour éviter
précisément toute confusion du nationalisme intégral de Maurras, de
l’Action Française et de toute l’école monarchiste française avec les
expressions dévoyées du nationalisme venues de la Gauche et habilement
cataloguées par le Système comme étant de droite : fascisme, nazisme,
qui adhèrent, socialisme originaire oblige à un Etat tout puissant et
centralisateur, en un mot JACOBIN et liberticide.
« Caractère distinctif du nationalisme français : il
est fort éloigné de présenter la nécessité pratique et moderne du cadre
national rigide comme un progrès dans l’histoire du monde ou comme un
postulat philosophique et juridique absolu : il voit au contraire dans la nation une très fâcheuse dégradation de l’unité médiévale, il ne cesse pas d’exprimer un regret profond de l’unité humaine représentée par la république chrétienne (…) ». (L’Action Française, 25 mars 1937)
« Un nationalisme n’est pas un nationalisme exagéré ni mal compris quand il exclut naturellement l’étatisme (…). Quand l’autorité
de l’Etat est substituée à celle du foyer, à l’autorité domestique,
quand elle usurpe sur les autorités qui président naturellement à la vie
locale, quand elle envahit les régulateurs autonomes de la vie des métiers et des professions, quand l’Etat tue ou blesse, ou paralyse les fonctions provinciales indispensables à la vie et au bon ordre des pays, quand il se mêle des affaires de la conscience religieuse
et qu’il empiète sur l’Eglise, alors ce débordement d’un Etat
centralisé et centralisateur nous inspire une horreur véritable : nous ne concevons pas de pire ennemi. » (L’Action Française, du 19 juillet 1938)
Et au soir de sa vie, prisonnier de la
République rétablie dans toutes ses prérogatives de destruction, il
écrivait à Pierre Boutang cette exhortation testamentaire magnifique,
lui, l’agnostique.
"Nous bâtissons l'arche nouvelle, catholique, classique, hiérarchique, humaine,
où les idées ne seront plus des mots en l'air, ni les institutions des
leurres inconsistants, ni les lois des brigandages, les administrations
des pilleries et des gabegies, où revivra ce qui mérite de revivre, en bas les républiques, en haut la royauté et, par-delà tous les espaces, la Papauté ! Même si cet optimisme était en défaut et si, comme je ne crois pas tout à fait absurde de le redouter, si la démocratie était devenue irrésistible, c'est le mal, c'est la mort qui devaient l'emporter, et qu'elle ait eu pour fonction historique de fermer l'histoire et de finir le monde, même en ce cas apocalyptique, il faut que cette arche franco-catholique soit construite et mise à l'eau face au triomphe du Pire et des pires.
Elle attestera, dans la corruption universelle, une primauté invincible
de l'Ordre et du Bien. Ce qu'il y a de bon et de beau dans l'homme ne
se sera pas laissé faire. Cette âme du bien l'aura emporté, tout de
même, à sa manière, et, persistant dans la perte générale, elle aura
fait son salut moral et peut-être l'autre. Je dis peut-être, parce que
je ne fais pas de métaphysique et m'arrête au bord du mythe tentateur,
mais non sans foi dans la vraie colombe, comme au vrai brin d'olivier,
en avant de tous les déluges."
Sur le sujet de la condamnation par Pie XI, Jean Madiran en donne une présentation synthétique ici.
Pour approfondir le sujet, quelques liens :http://bibliothequedecombat.wordpress.com/
http://maurras.net/
http://maurras.net/textes/
http://maurrassianna.free.fr/maurrassianna/
Si vous aviez un livre à lire en premier lieu, nous vous conseillerions « La démocratie religieuse » (téléchargeable gratuitement ici),
dont toute la brillante démonstration résonne comme un écho laïque à la
condamnation du Sillon par Saint Pie X, que nous évoquions ici.
Enfin nous ne pouvons qu’inciter
nos amis Veilleurs à s’approprier ce géant, qui nous parait mille fois
préférable à Antonio Gramsci, par exemple.
Paula Corbulonhttp://lesalonbeige.blogs.com/my_weblog/2014/01/en-relisant-nos-ma%C3%AEtres-charles-maurras.html
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