jeudi 18 juin 2009

Les origines de la langue française suite

3) L’INFLUENCE DU GERMANIQUE
La Gaule romaine connaît d’abord une période de stabilité et de prospérité. Mais, dès la fin du siècle des Antonins (192), la vie sociale commence à se disloquer.
Cette tendance s’accentue à partir du IIIe siècle, avec les incursions des Germains : du IIIe au IVe siècles, ils déferlent sur le pays qu’ils se partagent en plusieurs royaumes, wisigoth, burgonde, alaman, franc rhénan et franc salien, tandis que les Gallo-Romains sont cantonnés dans le bassin parisien et la Bretagne.
Menés par Clovis, l’un de ces peuples germaniques, les Francs Saliens, occupe le royaume gallo-romain en 486, bat les Wisigoths en 507 et absorbe le royaume des Burgondes, en 534. Il se produit alors un fait linguistique assez rare : contrairement à ce qui s’est passé lors de la colonisation latine, c’est la langue dominée, le latin, qui demeure la langue officielle.
Les raisons de son maintien sont religieuses et peut-être politiques : pour se concilier les évêques dans la lutte qu’il voulait entreprendre contre les Wisigoths, de religion arienne, ou par conviction personnelle, Clovis se convertit au christianisme, religion officielle des Romains depuis 312. Ce faisant, les Francs obtiennent l’appui des Gallo-Romains, mais ils acceptent aussi le latin comme langue religieuse.
Des raisons culturelles expliquent aussi l’adoption du latin.
La vieille civilisation latine est supérieure à la civilisation dominante et, malgré les troubles de l’époque, elle se maintient encore : dans les royaumes des Burgondes et des Wisigoths, l’administration romaine subsiste ; chez les Francs, les Gallo-Romains conservent leurs biens ; au IVe et au Ve siècles, malgré les invasions, il y a encore des écoles et des bibliothèques où l’on continue à lire et à étudier en latin.
Ayant adopté la culture et la religion romaine, les Francs calquent leur administration sur celle des vaincus et rédigent leurs lois en latin. Pendant une longue période, il s’établit dans les zones conquises une sorte de bilinguisme, pour les Francs comme pour certains Gallo-Romains.
Les Francs ont transmis une partie de leur lexique à la langue qu’ils ont adoptée. On compte plus de 400 mots d’origine francique dans le vocabulaire français. Ainsi, la coexistence de deux aristocraties, gallo-romane et franque, explique le caractère bilingue de la terminologie guerrière et administrative :
épée est gallo-roman, mais brand, qui signifiait “épée” et sur lequel est formé le verbe brandir, est francique.
roi, duc, comte sont gallo-romans, mais marquis, baron, chambellan, maréchal, sénéchal, échanson sont franciques.
Le reste du lexique d’origine franque concerne la vie rurale – les Francs étaient davantage agriculteurs et chasseurs que citadins : gerbe, blé, jardin, haie, aulne, houx, cresson, troène, frêne, tilleul, saule, bois, forêt, troupeau, épervier, mésange, freux, hanneton.
D’autres mots dépeignent les sentiments ou le caractère : orgueil, honte, honnir, hardi, laid. L’armement et la guerre : fourreau, heaume, haubert, guerre, trêve. Les couleurs : blanc, bleu, gris, blond.

Le bilinguisme entraîna surtout la forte évolution phonétique qui fait la spécificité du français par rapport aux autres langues romanes
: réduction du mot, évolution des voyelles, disparition de certaines consonnes intervocaliques. Par exemple, un mot latin comme sudare devient suer en français, mais reste sudar en espagnol : nous avons vu que les Gaulois sont responsables du changement de prononciation de la lettre u, et les Francs ont supprimé le d intervocalique et transformé en e le a accentué en latin.
La zone de colonisation franque – c’est à dire la France du Nord, où les Francs émigrent en nombre important – correspond au français d’oïl, tandis que le français d’oc a beaucoup moins évolué.
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