Pour 10 millions de dollars, la planète a bien failli s'offrir une guerre mondiale. Une chaîne de télévision allemande l'a révélé : c'est une agence de pub américaine qui, pour le compte de l'émir du Koweït, a inventé l'histoire des bébés koweïtiens arrachés de leurs couveuses. Et déclenché la guerre contre l'Irak.
Devant le Comité des droits de l'homme du Conseil de sécurité de l'Organisation des Nations unies, une femme pleure. L'horreur de ce qu'elle a vu est insupportable. Elle sanglote, elle s'essuie les yeux, puis elle reprend sa déposition :
« J'ai vu les soldats irakiens. Ils sont entrés dans l'hôpital et ont enlevé les bébés des couveuses. Ils ont emporté les couveuses et laissé les bébés mourir sur le sol glacial. C'était horrible ! »
Un chirurgien koweïtien, le docteur Ibrahim, confirme les faits devant la même instance :
« Le plus dur était d'enterrer les bébés. Moi-même j'ai enterré quarante nouveau-nés qui avaient été enlevés des couveuses par les soldats. »
Deux jours plus tard, le Conseil de sécurité des Nations unies vote en faveur de l'emploi de la force militaire contre l'Irak, bientôt suivi par le Congrès américain. Le processus de guerre est enclenché, rien ne l'arrêtera plus.
La chaîne de télévision allemande ARD vient de décortiquer l'incroyable manipulation médiatique. Dans un reportage diffusé le 8 avril dernier, et qu'aucun organe de presse français (hormis la Revue d'histoire révisionniste) n'a repris, ni même mentionné, ARD révèle que ces deux témoignages étaient faux et que l'affaire des bébés koweïtiens arrachés à leurs couveuses par des soldats irakiens avait été inventée de toutes pièces.
DEUX FAUX TÉMOINS
La réalisation de cette (super) supercherie revient à l'agence de publicité américaine Hill & Knowlton. La mission qui lui avait été fixée par l'émir du Koweït était ambitieuse : convaincre la population américaine de la nécessité de l'envoi de troupes américaines dans le Golfe. Budget de l'opération : 10 millions de dollars. A bon publicitaire - terme désormais synonyme de manipulateur, qu'on le sache une fois pour toutes - rien d'impossible.
Hill & Knowlton s'est attaché, comme lorsqu'elle travaille pour un candidat à une élection politique, à déterminer ce à quoi l'opinion américaine est la plus sensible. Les ordinateurs ont apporté une réponse. Un employé d'Hill & Knowlton raconte :
« Le Koweït nous avait demandé de déterminer ce qui inspirait le plus d' horreur aux Américains ; la réponse a été le meurtre commis sur des bébés. Ainsi est née la légende des couveuses. »
« Le meilleur moyen, poursuit-il, de créer cette émotion était de persuader les gens que Saddam Hussein était un fou dangereux capable des pires massacres. » Mais les témoins ?
Le reportage réalisé par ARD ne nous dit pas si la jeune femme si émue, Nayirah, fut payée. Sans doute pas. La Koweïtienne a fait ça pour la cause. Pour papa aussi, qu'elle a omis de présenter à l'auditoire : n'était-elle pas la fille de l'ambassadeur du Koweït aux Etats-Unis ? Bonne fille, elle a menti aussi pour le bien de sa famille : elle appartient à celle de l'émir AI Sabah.
MITTERRAND DUPÉ OU COMPLICE ?
Quant au prétendu chirurgien Ibrahim, il est dentiste et se nomme en réalité Behbehani. La guerre achevée, le remords l'a pris et il s'est rétracté. A la question : « Alors, vous n'avez rien vu ? », le docteur Behbehani a avoué : « Non, rien. » Amnesty International, en revanche, n'a pas démenti. Son rapport, n'établissait-il pas, lui aussi, le meurtre de 312 bébés ?
A 10 millions de dollars les 312 bébés, et au cours actuel du dollar, ça va chercher dans les 170 000 F... le bébé mort. Pardon pour ce décompte morbide. Il veut juste faire ressortir l'élégance de l'opération.
A la question de la chaîne ARD : « Croyez-vous que le paiement par le Koweït de 10 millions de dollars à Hill & Knowlton ait été un bon investissement », Thomas Ross, de Hill & Knowlton, a répondu: « Un investissement des plus intelligents. »
Terrible est alors l'image de George Bush, exhumée par ARD, s'adressant à ses soldats sur le sol saoudien pour leur expliquer le sens de leur combat :
« Les bébés ont été arrachés à des couveuses et jetés sur le sol comme du bois à brûler. »
On ne fera pas l'injure à George Bush, président des Etats-Unis, et ancien patron de la CIA, de faire semblant de croire qu'il n'était pas au courant de la manipulation. Pour ce qui concerne les alliés, et particulièrement la France, l'histoire dira peut-être si François Mitterrand fut dupé... , ou complice. L'affaire des couveuses, finalement, n'est rien d'autre que l'adaptation, amplifiée par les moyens techniques, de la légende des Allemands qui coupaient la main des enfants durant la guerre de 1914. Quant au silence absolu de la presse française sur les révélations de ses confrères allemands...
C'était l'histoire d'une genèse de la guerre du droit... et de la morale.
✍ Pierre Villedary Le Choc du Mois. Juillet-août 1992
Devant le Comité des droits de l'homme du Conseil de sécurité de l'Organisation des Nations unies, une femme pleure. L'horreur de ce qu'elle a vu est insupportable. Elle sanglote, elle s'essuie les yeux, puis elle reprend sa déposition :
« J'ai vu les soldats irakiens. Ils sont entrés dans l'hôpital et ont enlevé les bébés des couveuses. Ils ont emporté les couveuses et laissé les bébés mourir sur le sol glacial. C'était horrible ! »
Un chirurgien koweïtien, le docteur Ibrahim, confirme les faits devant la même instance :
« Le plus dur était d'enterrer les bébés. Moi-même j'ai enterré quarante nouveau-nés qui avaient été enlevés des couveuses par les soldats. »
Deux jours plus tard, le Conseil de sécurité des Nations unies vote en faveur de l'emploi de la force militaire contre l'Irak, bientôt suivi par le Congrès américain. Le processus de guerre est enclenché, rien ne l'arrêtera plus.
La chaîne de télévision allemande ARD vient de décortiquer l'incroyable manipulation médiatique. Dans un reportage diffusé le 8 avril dernier, et qu'aucun organe de presse français (hormis la Revue d'histoire révisionniste) n'a repris, ni même mentionné, ARD révèle que ces deux témoignages étaient faux et que l'affaire des bébés koweïtiens arrachés à leurs couveuses par des soldats irakiens avait été inventée de toutes pièces.
DEUX FAUX TÉMOINS
La réalisation de cette (super) supercherie revient à l'agence de publicité américaine Hill & Knowlton. La mission qui lui avait été fixée par l'émir du Koweït était ambitieuse : convaincre la population américaine de la nécessité de l'envoi de troupes américaines dans le Golfe. Budget de l'opération : 10 millions de dollars. A bon publicitaire - terme désormais synonyme de manipulateur, qu'on le sache une fois pour toutes - rien d'impossible.
Hill & Knowlton s'est attaché, comme lorsqu'elle travaille pour un candidat à une élection politique, à déterminer ce à quoi l'opinion américaine est la plus sensible. Les ordinateurs ont apporté une réponse. Un employé d'Hill & Knowlton raconte :
« Le Koweït nous avait demandé de déterminer ce qui inspirait le plus d' horreur aux Américains ; la réponse a été le meurtre commis sur des bébés. Ainsi est née la légende des couveuses. »
« Le meilleur moyen, poursuit-il, de créer cette émotion était de persuader les gens que Saddam Hussein était un fou dangereux capable des pires massacres. » Mais les témoins ?
Le reportage réalisé par ARD ne nous dit pas si la jeune femme si émue, Nayirah, fut payée. Sans doute pas. La Koweïtienne a fait ça pour la cause. Pour papa aussi, qu'elle a omis de présenter à l'auditoire : n'était-elle pas la fille de l'ambassadeur du Koweït aux Etats-Unis ? Bonne fille, elle a menti aussi pour le bien de sa famille : elle appartient à celle de l'émir AI Sabah.
MITTERRAND DUPÉ OU COMPLICE ?
Quant au prétendu chirurgien Ibrahim, il est dentiste et se nomme en réalité Behbehani. La guerre achevée, le remords l'a pris et il s'est rétracté. A la question : « Alors, vous n'avez rien vu ? », le docteur Behbehani a avoué : « Non, rien. » Amnesty International, en revanche, n'a pas démenti. Son rapport, n'établissait-il pas, lui aussi, le meurtre de 312 bébés ?
A 10 millions de dollars les 312 bébés, et au cours actuel du dollar, ça va chercher dans les 170 000 F... le bébé mort. Pardon pour ce décompte morbide. Il veut juste faire ressortir l'élégance de l'opération.
A la question de la chaîne ARD : « Croyez-vous que le paiement par le Koweït de 10 millions de dollars à Hill & Knowlton ait été un bon investissement », Thomas Ross, de Hill & Knowlton, a répondu: « Un investissement des plus intelligents. »
Terrible est alors l'image de George Bush, exhumée par ARD, s'adressant à ses soldats sur le sol saoudien pour leur expliquer le sens de leur combat :
« Les bébés ont été arrachés à des couveuses et jetés sur le sol comme du bois à brûler. »
On ne fera pas l'injure à George Bush, président des Etats-Unis, et ancien patron de la CIA, de faire semblant de croire qu'il n'était pas au courant de la manipulation. Pour ce qui concerne les alliés, et particulièrement la France, l'histoire dira peut-être si François Mitterrand fut dupé... , ou complice. L'affaire des couveuses, finalement, n'est rien d'autre que l'adaptation, amplifiée par les moyens techniques, de la légende des Allemands qui coupaient la main des enfants durant la guerre de 1914. Quant au silence absolu de la presse française sur les révélations de ses confrères allemands...
C'était l'histoire d'une genèse de la guerre du droit... et de la morale.
✍ Pierre Villedary Le Choc du Mois. Juillet-août 1992