mardi 28 septembre 2010

1914-1918 : Guerre raciale ?

Et si l’absence quasi absolue de commémorations de la Grande Guerre était due au fait que, décidément, Il est impossible d’évoquer cette effroyable tuerie européenne sans montrer qu’elle fut purement et simplement inspirée par des considérations raciales auxquelles adhéraient, sans l’ombre d’un complexe, toutes les intelligences du temps, quelle que fût leur position politique ?

Quelque temps après la défaite de 1870, Gambetta écrivait dans une lettre inédite à son ami Arthur Ranc, alors réfugié à Bruxelles :

« A une époque de civilisation raffinée comme la nôtre, on ne conquiert pas les peuples malgré eux. La conquête morale n’a jamais suivi la conquête matérielle. Et là, en Alsace-Lorraine, les populations annexées, formées par ce qu’il y a de plus chevaleresque, de plus séduisant dans la culture française, résistent aux attraits de la germanisation, attraits de brutalité, d’esclavage, qu’elles ne comprennent pas (…) Ils ont meurtri le coeur de l’Europe. Tant qu’ils n’auront pas réparé cette faute, personne ne déposera les armes. La paix du monde, si nécessaire à tous les peuples, restera toujours à la merci d’un incident. »

Maurice Barrès racontait dans un article publié par Le Matin (8 mai 1915) qu’une famille restée en Alsace avait reçu d’un de ses fils qui, n’ayant pu s’évader, avait été enrôlé dans les rangs allemands, une lettre datée d’une ville du Nord dans laquelle se trouvait le passage suivant :

« Chère maman, nous manquons de pain, mais je suis en vie. Dis à père que j’ai tenu parole : je n’ai pas tiré un seul coup de fusil sur un soldat français. »

Et Barrès ajoutait qu’en travers de la carte et d’une écriture brutale, à l’encre rouge, le contrôle allemand avait ajouté ces mots : « L’auteur de cette carte a été fusillé le 10 mars par ordre de ses chefs. »

Un diplomate grec, M. Zographos, alors ministre des Affaires étrangères à Athènes, dans une interview recueillie par M. Gaston de Maizières pour Le Petit Parisien (17 avril 1915) expliquait :

« … D’où vient cette guerre (…) cette guerre satanique ? Qui l’a déchaînée ? Ce n’est pas tel prétexte fortuit, telle ambition personnelle : c’est la même force supérieure qui impose tôt où tard la réparation d’une injustice, comme elle veut que dans un corps sain les lèvres d’une plaie béante, d’elles-mêmes, se rapprochent. L’Europe entière se bat pour l’Alsace-Lorraine ; cette guerre, c’est la blessure de la France qui se ferme. »

Beau rêve dont on connaît le réveil amer.

Mais beau rêve qui fut celui de toute une génération.

Les frères Tharaud rapportaient que Jules Ferry, le politicien de gauche à qui Paul Déroulède, l’homme de droite, exposait la colère et le dégoût qu’il éprouvait à voir l’aventure coloniale détourner les âmes et les forces de l’indispensable oeuvre de revanche, s’étonnait :

« Monsieur Déroulède, vous finirez par me faire croire que vous préférez l’Alsace-Lorraine à la France. Ne pensez-vous pas qu’il serait sage de sacrifier les provinces perdues et de prendre des compensations ailleurs ? »

A quoi Déroulède répondit sèchement :

« C’est ça : j’ai perdu deux enfants et vous m’offrez vingt domestiques ! »

Le peuple entier pensait ainsi. Le Germain était un homme inachevé, d’une civilisation inférieure, brutale parce que brute, et le Nègre était un domestique plus encore qu’un enfant.

Et cette conviction était partagée par les meilleurs esprits.

par Serge de Beketch Le Libre Journal de la France Courtoise - n° 106

lundi 27 septembre 2010

Le “massacre” serbe de Racak n’a jamais eu lieu

Le prétexte qui a justifié le bombardement de la Yougoslavie était un énorme mensonge
La Dr Helena Ranta, responsable de l'équipe d'enquêteurs sur le terrain, révèle comment elle a été obligée de confirmer la version officielle d'une sinistre mise en scène.
Helena Ranta, une spécialiste finlandaise de médecine légale de renommée mondiale, âgée de 62 ans, vient de publier sa biographie à Helsinki, écrite avec l’aide de Kaius Niemi, un des directeurs du journal Helsingin Sanomat. Elle était la responsable de l’équipe d’enquêteurs internationaux chargée sur place du rapport sur les événements qui s’étaient déroulés dans le village de Racak, au Kosovo, où 45 cadavres avaient été découverts en 1999. La sinistre trouvaille avait été immédiatement transformée par les médias occidentaux en un massacre de civils albanais attribué aux Serbes, suscitant l’indignation mondiale, et servant de prétexte justificatif du bombardement de la Yougoslavie. Dans son livre, Helena Ranta fait des révélations spectaculaires sur les pressions qu’elle a subies pour accréditer la fausse version de la culpabilité serbe, faisant ainsi voler en éclats un des plus grands mensonges de la guerre dans les Balkans.
Elle y raconte que William Walker, le chef américain de la mission de l’OSCE au Kosovo pendant l’hiver 1998-1999, a brisé son crayon en bois et lancé les morceaux à sa figure, furieux des conclusions de son rapport, qui n’avaient pas utilisé “un langage suffisamment convaincant” à propos des atrocités serbes. Elle y décrit les pressions de trois fonctionnaires du ministère finlandais des Affaires étrangères qui exigeaient d’elle “des conclusions plus approfondies”. “J’ai conservé leurs e-mails” a-t-elle dit à son éditeur à Helsinki.
Une déclaration imposée
En 1999, elle avait été obligée de déclarer à la presse “oui, il s’agit d’un crime cotre l’humanité”. Mais le journaliste finlandais Ari Rusila, expert pour les Balkans, écrit dans un article sur le livre d’Helena Ranta que, pendant son enquête, elle avait voulu que ses résultats ne soient en faveur ni des uns ni des autres et avait essayé de se soustraire aux influences politiques, mais que, dès le début, elle travaillait sous une intense pression de sa hiérarchie et des médias. Les autorités voulaient qu’elle prouve que les coups de feu ayant tué les victimes étaient les coups de grâce d’une exécution. L’objectif de Walker était d’aider l’UCK et de mettre en scène un massacre attribué aux Serbes permettant l’intervention militaire des Occidentaux, qui s’est produite au printemps 1999.
Ranta précise que le chef à l’époque de la section politique du ministère, Pertti Torstila, aujourd’hui secrétaire d’Etat, lui a demandé de retirer de son rapport un commentaire “modérément critique” de la politique du gouvernement. Torstila a démenti cette affirmation en se prétendant “stupéfait”.
L’intérêt de ces révélations est qu’elles confirment de façon définitive des doutes qui se manifestaient déjà à l’époque. Un article du 1er février 2001 de FAIR (Fairness & Accuracy in Reporting – Equité et exactitude dans le reportage) fait état du black-out des médias à leur propos. Il revient sur le déroulement des faits.
Un “horrible massacre”
En janvier 1999, William Walker annonce que les soldats serbes ont massacré 45 Albanais du village de Racak. Il qualifie la tuerie d’“horrible massacre”, précisant que les victimes étaient toutes des civils, brutalement exécutés, certains d’entre eux même mutilés après leur mort.
Une fois l’histoire du massacre évoquée dans ses plus bouleversants détails par les grands médias du monde entier, la poussée vers la guerre s’est intensifiée et les alliés européens hésitants ont fait un pas décisif en ce qui concernait l’autorisation de frappes aériennes. Selon un article du Washington Post du 18 avril 1999, “Racak a transformé la politique balkanique de l’Occident comme peu d’événements isolés ont pu le faire.”
Des doutes font surface
Des questions troublantes ont pourtant vite vu le jour, mettant le massacre en doute et évoquant la possibilité que l’incident ait été manipulé pour pousser l’OTAN à la guerre, mais elles ont été complètement ignorées par les médias américains de l’époque.
Des articles importants de correspondants chevronnés en Yougoslavie s’interrogeant sur la version de William Walker ont pourtant été publiés par des journaux français comme Le Figaro (“Nuages noirs sur un massacre”, 20/1/99), et Le Monde (“Les morts de Racak ont-ils réellement été massacrés de sang-froid ?”, 21/1/99). Le quotidien allemand Berliner Zeitung a rapporté, le 13/3/99, que plusieurs gouvernements, dont l’Allemagne et l’Italie, demandaient à l’OSCE de renvoyer William Walker, à la lumière d’informations reçues de contrôleurs de l’OSCE au Kosovo selon lesquelles les corps de Racak “n’étaient pas – comme le prétend Walker – des victimes d’un massacre serbe de civils” mais ceux de combattants de l’UCK tués au combat.
Un rapport occulté pendant deux ans
Le Sunday Times de Londres (12/3/99) a écrit que l’équipe d’observateurs américains de Walker travaillait secrètement avec la CIA pour pousser l’OTAN à la guerre. Selon le journal, “Les diplomates européens collaborant à l’époque avec l’OSCE affirment avoir été trahis par une politique américaine rendant les frappes aériennes inévitables.”
Après le massacre, l’Union européenne a embauché l’équipe de scientifiques finlandais dirigée par Ranta pour enquêter sur les morts. Son rapport a été gardé secret pendant deux ans. Les médias US l’ont ignoré, malgré le fait que le rapport ait conclu qu’il y avait eu en effet des morts à Racak, mais qu’il n’y avait aucune preuve de massacre.
Selon le Berliner Zeitung du 16/1/01, les enquêteurs finlandais n’ont pas pu établir que les victimes étaient des civils, s’ils étaient de Racak, ni où ils avaient été tués. De plus, ils n’ont trouvé qu’un seul cadavre montrant des traces d’exécution, et aucune preuve que des corps aient été mutilés. Le journal précise que ces conclusions avaient été finalisées en juin 2000, mais qu’elles ont été occultées par l’ONU et l’UE. Aucun journal américain n’en a parlé.
Un second article de FAIR, daté du 18 juillet 2001, soulève à nouveau des questions.
De nouvelles informations sur l’incident de Racak ont vu le jour.
Des douilles introuvables
Selon le documentaire de la Canadian Broadcasting Company, “La route de Racak” (The World at Six, 29/5/2000), quand l’envoyé spécial du Figaro Renaud Girard est arrivé au village, il a été surpris de voir que William Walker n’avait pas isolé la scène du crime pour permettre l’enquête. Il s’est également étonné de ne trouver pratiquement aucune douille sur le sol. “C’était étrange, a-t-il dit à la CBC. Peut-être quelqu’un les avait ramassées.” De retour à Pristina le même jour, il a parlé à son confrère Christophe Chatelot du Monde de l’apparente absence de douilles. Chatelot a demandé à l’un des observateurs de Walker, un capitaine de l’armée américaine, pourquoi on n’en avait pas trouvées. “C’est parce que je les ai prises, a répondu le capitaine, j’en fais collection.” Le capitaine “a déclaré à Chatelot qu’il avait ramassé toutes les douilles en arrivant sur la scène.”
Intrigué, Chatelot est retourné à Racak le lendemain. Quand il a essayé de trouver le capitaine américain, celui-ci était “tout à coup introuvable”. Chatelot affirme que la mission de l’OSCE lui a dit : “Nous ne le connaissons pas. Il n’a jamais été ici.” Quand il a demandé à parler aux quatre contrôleurs qui étaient présents à Racak et dans ses environs le jour de la tuerie, on lui a dit que leurs noms étaient subitement devenus un secret “classé confidentiel”. “C’est très curieux”, a-t-il dit à la CBC.
Des agents de la CIA
Plus tard, il est apparu que l’équipe d’observateurs américains de Walker était en grande partie composée d’agents secrets appartenant à la CIA.
Dans son discours à la nation du 19 mars 1999, annonçant la décision de l’OTAN de lancer les frappes aériennes sur la Yougoslavie, le président Bill Clinton a dit : “Au moment où nous nous préparons à agir, nous devons nous rappeler des leçons apprises dans les Balkans. Nous devons nous souvenir de ce qui est arrivé dans le village de Racak en janvier – des hommes innocents, des femmes et des enfants ont été arrachés à leurs foyers, amenés dans un ravin, forcés à s’agenouiller dans la boue et mitraillés – pas pour quelque chose qu’ils auraient fait, mais simplement pour ce qu’ils étaient.”
Tout récemment, le Byzantine Blog a marqué le neuvième anniversaire de l’affaire de Racak en rappelant que le jour de Noël 1993, 49 civils serbes avaient été massacrés dans le village bosniaque de Kravice par des troupes musulmanes basées à Srebrenica, un épisode qui n’a entraîné qu’une prudente condamnation des responsables internationaux, bien loin de l’impitoyable bombardement de 78 jours qui a suivi la mort à Racak de 45 Albanais armés.
Le site en profite pour rappeler quelques détails supplémentaires que nos grands médias ont passé sous silence.
Une brigade sur place de l’UCK
Dès son arrivée sur place, Walker a accusé la police serbe du massacre, alors que c’était une police yougoslave multiethnique qui menait les actions antiterroristes au Kosovo. Ses opérations ont été suivies par les contrôleurs de l’OSCE, deux équipes de télévision étrangères et un grand nombre d’envoyés spéciaux de différents pays : aucun d’entre n’a assisté à un massacre avant que Walker n’en ait vu un. Au début de janvier 1999, le poste de commandement d’une brigade de l’UCK de 126 hommes avait été installé à Racak. Parmi eux se trouvait la famille Mujota, connue pour avoir assassiné six policiers serbes. Les villages environnants de Petrovo, Luzak et Rance étaient sous le contrôle de l’UCK.
Une opération contrôlée par l’OSCE
La police yougoslave a informé la mission de l’OSCE de son intention de lancer un raid anti-terroriste sur le village de Racak. L’action a débuté à 8 heures. Selon Renaud Girard, la police n’avait rien à cacher, puisqu’à 8 h 30 elle a invité une équipe de TV (deux reporters d’Associated Press) à filmer l’opération. Des membres de l’OSCE étaient présents et des contrôleurs ont observé le village pendant toute la journée à partir d’une vallée voisine.
A 15 h, un rapport de la police a été rendu public par le International Press Center de Pristina, qui précisait qu’au cours des combats à Racak, 15 terroristes de l’UCK avaient été tués, et qu’une quantité significative d’armes avait été confisquée. A 15 h 30, les forces de police, accompagnée par l’équipe de TV d’Associated Press, ont quitté le village, emportant une pièce lourde d’artillerie de calibre 12,7 mm, deux engins d’artillerie portables, deux fusils de snipers et 30 kalashnikovs fabriqués en Chine. A 16 h 30, un reporter français a traversé le village en voiture, et y a vu trois véhicules oranges de l’OSCE. Les contrôleurs internationaux parlaient tranquillement avec trois adultes albanais en civil. Ils cherchaient des civils éventuellement blessés. En retournant au village à 18 h, le reporter les a vus emmener deux femmes et deux vieillards légèrement atteints.
126 terroristes et 4 instructeurs
Au centre du village, dans une maison où avait été installée la base de l’UCK, la police a trouvé un ordinateur contenant des informations sur la brigade de l’UCK et la liste de ses 126 membres, dont faisaient partie quatre personnes avec des noms anglo-saxons, qui ont été considérées comme des instructeurs étrangers.
Quand les policiers yougoslaves ont investi le village, et commencé à sécuriser les routes et les tranchées, ils ont été attaqués par les Albanais à partir du Lake Mountain (Jezerska planina) et des villages avoisinants. Pris sous le feu d’une forte offensive et placés en contre-bas, ils ont du se replier. C’est alors qu’a eu lieu la grande mise en scène destinée à impressionner le monde entier.
Des cadavres déplacés et rhabillés
Les membres de l’UCK revenus dans Racak ont récupéré dans les ravins et vallons les corps des Albanais tués pendant le combat et les ont rassemblés dans un champ où auparavant il n’y en avait aucun. L’équipe de TV d’AP qui était entrée plus tôt dans le village avec la police a certifié que le champ où on avait empilé les cadavres des victimes soi-disant exécutées était à ce moment vide. Les Albanais ont rhabillé en civils une quarantaine de morts, et ont emmené les autres cadavres en uniforme à Budakovo, où ils les ont probablement enterrés.
Le lendemain matin tôt, Walker est arrivé au champ pour indiquer comment les corps devaient être disposés pour faire croire à un massacre. La mise en place achevée, il a fait venir les équipes de TV et les journalistes. La description détaillée de l’épisode figure dans le livre du reporter Milorad Drecun intitulé “La seconde bataille du Kosovo”, au chapitre “Le mensonge de Racak”.
Les frappes “humanitaires”
L’agence Tanjug rappelle, à l’occasion de cet anniversaire, que la secrétaire d’Etat US de l’époque, Madeleine Albright, avait dit à CBS que “des dizaines de personnes avaient été égorgées à Racak” et que la seule solution était “des frappes aériennes humanitaires sur la Yougoslavie”.
Dossier préparé par Louis MAGNIN.
B. I. n° 138, décembre 2008.
Mondialisation.ca

jeudi 23 septembre 2010

La Russie médiévale (1/2) Le temps des princes

Ce sont des Vikings, les Varègues, qui ont rassemblé au IXe siècle les populations slaves autour de Kiev dans le cadre du premier Etat russe, la Kiévie. Un Etat presque constamment affaibli par les luttes internes et par les menaces extérieures. Mais un Etat qui a trouvé sa cohésion dans la religion orthodoxe, à laquelle s’est converti Vladimir en 988.

La Russie médiévale s’étend, au nord, du golfe de la Baltique et du lac Ladoga, au sud, jusqu’aux rives nord-ouest de la mer Noire. [1] C’est ce territoire au climat rude qu’occupaient les Slaves orientaux, divisés en tribus, à partir du VIe siècle. Ils vivaient principalement de l’agriculture et s’étaient constitués de petits centres d’échanges qui étaient autant d’embryons de villes. Voisins de l’empire byzantin au sud, ils étaient considérés, par celui-ci, comme des barbares. Leur langue est à l’origine des langues slaves actuelles, notamment le russe, le serbe, le polonais ou encore le tchèque. Elle est écrite à l’aide des alphabets glagolitique et cyrillique, tous deux adaptés de l’alphabet grec. C’est en cyrillique qu’écrivent encore de nos jours les Russes.

La principauté de Kiev, le premier Etat russe
À partir des VIIIe et IXe siècles, ces populations slaves subissent l’influence des Varègues, des marchands et guerriers vikings. En effet, les cours d’eau, nombreux, notamment la Volga, le Dniepr et le Don, sont utilisés, dès le VIIIe siècle, par ces Normands qui traversent le continent pour commercer avec les Byzantins et les Arabes. De cette manière, les Normands s’imposèrent comme chefs militaires dans les tribus slaves et s’installent en maîtres dans les principales villes, telles que Novgorod et Kiev. La Chronique russe originelle, rédigée au XIIe siècle, imagine même un « appel aux Varègues » des Slaves en 862, qui est ainsi formulé : « Notre pays est riche et immense, mais il est en proie au désordre. Venez gouverner et régner chez nous. » [2] En réalité, il existait déjà, chez les Slaves, des confédérations de tribus, des villes et des systèmes d’organisation élaborés.
Mais toujours est-il qu’à la fin du IXe siècle, une dynastie scandinave s’établit à Kiev et y fonde le premier Etat russe, d’où le nom donné à celui-ci de Kiévie ou principauté de Kiev. C’est l’embryon de ce que sera la Russie dans les siècles à venir. Cette dynastie des Rurikides tire son nom de son ancêtre mythique, Rurik. Ce nouvel Etat est un domaine familial dans la mesure où chacun des fils du souverain reçoit une part de l’héritage sur lequel il règne. Évidemment, à la mort du prince, il est courant que l’Etat soit déchiré par des luttes fratricides pour la succession. Et ce qui affaiblit encore la Kiévie, ce sont les invasions auxquelles elle doit faire face, celles des Petchénègues et des Khazars, venus d’Asie centrale, celles des Vikings venus du Nord, ainsi que les affrontements avec l’empire byzantin au sud. D’ailleurs, Sviatoslav, petit-fils du prince Oleg, qui règne de 879 à 912, est tué en 972, par des Petchenègues qui lui avaient tendu une embuscade.
Deux princes sont parvenus à instaurer une unité solide à la principauté de Kiev, en éliminant leurs rivaux : Vladimir, qui règne de 980 à 1015, et Jaroslav le Sage (1019-1054). Ce dernier noue avec les autres Etats d’Europe des relations diplomatiques scellées par des mariages. C’est ainsi, par exemple, que sa fille Anne épouse le roi de France Henri Ier en 1051. Mais après la mort de Jaroslav, de nouveau la Kiévie est secouée par les guerres entre frères et cousins. Le morcellement du territoire s’accentue avec l’émergence de petites principautés héréditaires qui, à leur tour, sont partagées à chaque génération. Cependant, à Novgorod, ce sont les hommes libres qui choisissent, parmi les différentes branches rurikides, le prince qui les gouvernera. Il est chargé par ceux-ci de défendre ce carrefour commercial important entre la Baltique et le sud de la Russie.
En 1196, le prince de Rostov-Souzdal, André de Bogolioubovo, prend Kiev – la « mère des villes russes » – et la pille. Kiev devient dès lors un centre secondaire. Elle n’a pas le temps de retrouver son ancienne prospérité : elle est prise et détruite par les Mongols en 1240 tandis que, à l’ouest, l’ordre Teutonique conquiert des territoires correspondant à la Prusse et aux pays baltes.

La religion orthodoxe : facteur d’unité
L’un des événements les plus importants des premiers siècles de l’histoire russe se situe en 988 : c’est la conversion du prince Vladimir, qui sera surnommé « le Saint », au christianisme orthodoxe. En fait, à cette date, le christianisme concurrençait déjà le paganisme.
À l’origine, les populations slaves adoraient une multitude de dieux qu’ils représentaient sous des traits humains. Chaque divinité avait son domaine de compétence : Iarilo était le Soleil, Volos le dieu des bestiaux… Selon les croyances slaves, les lieux étaient habités par des esprits, bénéfiques ou maléfiques, comme le domovoï, dieu du foyer, ou le beregovoï, celui de la rive. Au IXe siècle, les évêques de Salonique Cyrille et Méthode, sont envoyés depuis Byzance évangéliser les Slaves. Ce sont leurs disciples qui mettront au point l’alphabet cyrillique… Aux IXe et Xe siècles, le christianisme progresse parmi les Russes, si bien que les sources distinguent les Russe chrétiens des Russes païens.
Mais les progrès de la religion chrétienne ne s’expliquent pas seulement par les missions envoyés par les Occidentaux ou les Byzantins. Nous l’avons noté, l’Etat kiévien est aux prises avec les luttes fratricides qui l’affaiblissent et morcellent son territoire. Vladimir a donc eu l’idée d’instaurer une religion qui permette de donner une cohésion idéologique à son Etat. C’est pourquoi il met d’abord en place le culte public organisé autour d’un panthéon, ou même d’un dieu unique, Peroun, divinité de la foudre et du tonnerre. Mais c’est un culte éphémère. Pour se rapprocher de Byzance, il se convertit au christianisme orthodoxe en 988. Il oblige son peuple à faire de même et à se faire baptiser dans les eaux du Dniepr. Cette conversion est une décision éminemment politique. En effet, dans la foulée de son baptême, Vladimir reçoit un clergé appelé à diriger la nouvelle Eglise, un clergé autonome vis-à-vis de Byzance, ayant autorité sur les fidèles, très hiérarchisé. Ainsi, la Kiévie, par sa religion nationale, reçoit un facteur important d’unité et de soumission au pouvoir.

L’« âge d’or » : le XIe siècle
Si, du IXe au XIIIe siècles la principauté de Kiev a été baignée dans un climat de guerres et de violences, cela ne l’a pas empêché de développer une activité économique. L’économie kiévienne est principalement agricole. Le grand prince de Kiev est le propriétaire éminent de la terre. Il est entouré de ses boyards, ses amis et compagnons d’armes qui composent une force armée, la droujina, que le grand prince doit entretenir. Pour fidéliser ses boyards, le grand prince décide de les doter de domaines fonciers et forestiers. C’est aussi un moyen de percevoir un tribut des paysans qui travaillent la terre. Au Moyen Age, les paysans russes sont, dans leur écrasante majorité, libres. Mais la pression fiscale, l’endettement lié aux guerres incessantes qui doivent être financées, et l’arbitraire des boyards qui possèdent la force armée font évoluer la condition des paysans petit à petit vers le servage, qui sera légalisé en 1649.
Cependant, les princes tirent aussi une part de leurs revenus des villes, qui sont fortifiées par un kremlin. Elles sont nombreuses : on en compte environ 300 au moment de l’invasion mongole. Les plus importantes sont Kiev, Novgorod, Pskov. Depuis Kiev, les Russes exportent à Byzance des esclaves, de la cire et des fourrures.
Les revenus des princes, des boyards et de l’Eglise ont permis de financer la construction de nombreux monuments religieux réalisés par des architectes grecs. La plupart datent du XIe siècle, période de l’« âge d’or » de la principauté de Kiev. Pour ne prendre qu’un seul exemple, mentionnons l’église Sainte-Sophie de Kiev, érigée à la demande de Jaroslav sur le modèle de Sainte-Sophie de Constantinople. Achevée vers 1046, elle compte cinq nefs, chacune prolongée par une abside. Sur trois côtés, elle est entourée d’un péristyle, c’est-à-dire d’une galerie à colonnade. Douze petites coupoles entourent une treizième plus grande : ces dômes rappellent ainsi le Christ entouré des douze apôtres. L’intérieur de la cathédrale est décoré de mosaïques et de fresques dont l’une d’elles représente Jaroslav en compagnie de sa famille. Au XIIe siècle, des villes de la Russie centrale connaissent un essor comparable à celui de Kiev et voient aussi la construction d’édifices religieux.
Ainsi, la période qui court de la fin du IXe au début du XIIIe siècle a vu l’émergence et l’essor du premier Etat russe indépendant, malgré les conflits nombreux qui l’ont déchiré. Surtout, la conversion au christianisme orthodoxe a donné à la Russie une unité forte, à tel point qu’elle est l’un des piliers de l’identité russe. Cet Etat kiévien perd son indépendance avec l’invasion de peuples d’Asie centrale au XIIIe siècle qui ouvre une nouvelle période, celle de la domination mongole.
http://thucydide.over-blog.net
Aller plus loin :
ARRIGNON, Jean-Pierre, La Russie médiévale, Paris, Belles Lettres, « Guide des civilisations », 2003.
CHANNON, John, Atlas historique de la Russie. Puissance et instabilité d’un empire européen, asiatique et arctique, Paris, Autrement, 1995.
ECK, Alexandre, Le Moyen Âge russe, Paris, Maison du livre étranger, 1933.
FERRO, Marc et MANDRILLON, Marie-Hélène (dir.), Russie, peuples et civilisations, Paris, La Découverte, 2005.
HELLER, Michel, Histoire de la Russie et de son empire, Paris, Flammarion, 1999.
KLUTCHEVSKI, B., Histoire de Russie, tome I Des origines au XIVe siècle, traduit par Constantin Andronikof, Paris, Gallimard,1956.
KONDRATIEVA, Tamara, La Russie ancienne, Paris, PUF, « Que sais-je ? », 1996.
VODOFF, Vladimir, Princes et principautés russes, Xe-XVIIe siècle, Northampton, Variorum Reprints, 1989.

[1] Cf. les cartes illustrant La formation du territoire russe.
[2] Cité par COHAT, Yves, Les Vikings. Rois des mers, Paris, Gallimard, « Découvertes », p. 62.

La Russie médiévale (2/2) La domination tatare

À partir du XIIIe siècle commence la domination des Tatars. Elle durera jusqu’au XVIe siècle. Ces trois siècles n’ont pas été que négatifs pour la Russie qui a su bénéficier de certains apports de l’envahisseur. Et aujourd’hui, les Tatars sont encore présents sur le sol russe.
La Russie médiévale (2 sur 2)Au XIIIe siècle, s’ouvre une période longue de trois siècles au cours de laquelle la Russie subit le « joug tatar » ou mongol. En fait, les Tatar et les Mongols constituent deux peuples bien différents, notamment par leur langue. Ce sont les sources occidentales et russes qui les désignent, indifféremment, « Tatars » ou « Tartares ». Ces peuples vivaient en Mongolie orientale. En 1206, une assemblée de chefs de clans élit comme chef Gengis Khan, qui signifie « Seigneur Océan ». C’est lui qui, ayant rassemblé derrière lui Tatars et Mongols, conquiert un vaste empire qui s’étend de la Corée à l’Europe de l’est, en passant par la Chine, la Sibérie et l’Iran.

La conquête du pays russe par les Tatars
Les Mongols et les Tatars montent des petits chevaux rapides et endurants, sont capables de tirer à l’arc en restant en selle et se nourrissent de viande séchée, ce qui leur permet de parcourir de grandes distances car les moments d’approvisionnement sont rares. En outre, leur système élaboré de courrier leur fournit des communications rapides et efficaces.
C’est au XIIIe siècle qu’ils s’attaquent à l’Europe. Une première vague d’invasion s’abat sur la Russie en 1223 : le 31 mai, les princes russes sont écrasés. Mais les envahisseurs ne poussent pas plus loin leur avance et font demi-tour.
En 1227, Gengis Khan meurt. Deux ans plus tard, son successeur est élu. Il s’appelle Ogoday. Celui-ci confie à son neveu – qui est aussi le petit-fils de Gengis Khan –, Batu, la tâche de conquérir le pays russe. Il faut dire que ce dernier représente une proie facile pour le chef mongol : divisé par les querelles internes, chaque prince utilise, face aux envahisseurs, sa force armée à sa façon. Les armées russes ne sont donc jamais totalement utilisées contre les « Tatars ».
Batu lance son offensive en 1237 à partir de Riazan, qui tombe le 21 décembre. Vladimir est prise en février 1238 et ses défenseurs sont massacrés. Puis, Batu progresse vers le nord, jusqu’à cent kilomètres de Novgorod. Là, il prend la direction du sud. Un second assaut est lancé en 1239 : Tchernigov tombe le 18 octobre et d’autres villes sont à leur tour pillées et détruites. En 1240, Kiev est attaquée. Elle tombe en décembre. En 1241, toute la Kiévie est passée sous domination tatare, à l’exception de la principauté de Novgorod, qui reste indépendante. Batu continue jusqu’à l’Adriatique avant de retourner s’installer sur le cours inférieur de la Volga où il fonde la ville de Saraï (Saraj). Elle est la capitale de la Horde d’Or. La Horde d’Or désigne la zone de l’empire mongol située dans la steppe et d’où le khan – appelé tsar dans les sources russes – contrôle les principautés russes qui lui sont soumises. L’or rappelle la couleur jaune, couleur impériale du khan. Dans cette zone, les Tatars sont majoritaires. Désormais, les principautés russes sont les vassales de la Horde d’Or.
Cette domination, qui va durer plus de trois siècles, elle s’explique par trois facteurs. Le premier réside, nous l’avons vu, dans la supériorité militaire des Tatars. Il faut ajouter que les frontières orientales et méridionales de la Kiévie ont toujours été très poreuses. Le deuxième facteur est que la supériorité tatare a été acceptée par les princes eux-mêmes comme un éléments pouvant influer dans leurs luttes entre eux. Enfin, la dernière explication tient à la tolérance religieuse dont ont fait preuve les Tatars. Ces derniers, en effet, n’avaient pas de fois homogène : ils étaient chrétiens, musulmans, bouddhistes ou taoïstes. C’est seulement au XIVe siècle qu’ils s’islamisent véritablement.
La domination tatare revêt plusieurs caractères. Les Russes doivent verser un tribut, le vykhod, d’abord en fourrure, ensuite en argent. Ils sont contraints aussi de fournir des troupes auxiliaires et de payer des droits de passage sur les marchandises. Des corvées de transport et au service de poste, dans tout l’empire mongol, sont également exigées. Enfin, et surtout, les princes doivent se rendre périodiquement à Saraï pour chercher le jarlyk : le jarlyk est le privilège que possède le khan tatar de confirmer les princes russes dans leur pouvoir sur leurs terres et de décerner le titre de grand-prince de Vladimir. Ce n’est pas rien car c’est le grand-prince de Vladimir qui est chargé de collecter le tribut du aux Mongols. Il est donc, en quelque sorte, le « fermier général » du khan. Cette domination n’est pas toujours bien acceptée et aux XIIIe et XIVe siècles, plusieurs princes rebelles sont exécutés. À Kiev, à partir de 1249, c’est un gouverneur tatar qui détient l’autorité. Ainsi, l’ancienne principauté de Kiev est devenue en quelques années seulement la marche occidentale de l’immense empire eurasien mongol.

L’affirmation de Moscou
Les rivalités entre les princes, notamment pour obtenir le titre de grand-prince de Vladimir, entraîne donc des conflits entre pro et anti-Tatars. Ainsi, Alexandre Nevski, prince de Novgorod [1], se voit décerner ce titre en 1252 grâce au soutien des troupes tatares qui l’ont aidé à battre son frère. Alexandre s’est voulu réaliste : plutôt que de gaspiller des énergies dans une guerre sans espoir contre les envahisseurs, il a préféré se concilier les Tatars pour mieux défendre les intérêts de la Russie. Sa politique n’est bien sûr pas acceptée par tous les princes et il doit faire face à plusieurs révoltes, comme celles de Novgorod en 1255 et 1257, et celle, généralisée, de 1262. Il meurt le 14 novembre 1263.
Son fils cadet, Daniel, devient prince de Moscou. Il défend et agrandit son territoire face à ses autres frères et cousins. Il décède en 1303 et l’un de ses fils épouse une sœur du khan pour obtenir le titre de grand-prince en 1317. Après près d’un siècle d’affrontements avec leurs rivaux, les princes de Moscou réussissent à transmettre, de manière héréditaire non seulement la principauté de Moscou, mais encore le titre de grand-prince de Vladimir. Par ailleurs, ils exercent une tutelle sur Novgorod. C’est le début de l’affirmation de la maison moscovite. De plus, en 1328, le métropolite (chef de l’Église russe) a quitté Vladimir pour s’installer à Moscou : celle-ci est devenue le centre politique et religieux de la région.
L’un des princes de Moscou, Dmitri Donskoï, remporte une victoire contre les Tatars en 1380 à la bataille de Koulikovo, le « champ des bécasses », sur le Don – d’où le surnom de Dmitri. Cette victoire est, dans l’esprit de beaucoup de Russes, l’un des moments fondateurs de la nation. Or, en réalité, Dmitri a affronté un usurpateur tatar et deux ans plus tard il fuit devant le khan légitime et continue de payer le tribut. En outre, tous les princes russes n’ont pas participé à la bataille de Koulikovo.

Ivan III
C’est au XVe siècle que les princes de Moscou et l’Église russe deviennent ouvertement hostiles aux Tatars. C’est à cette époque que commence à se diffuser des textes évoquant la grande bataille de Koulikovo destiné à glorifier l’héroïsme des Russes contre l’occupant tatar. Le changement survient en 1419, à la mort du khan Edighey. Sa succession posant problème, la Horde d’Or est divisée en trois khanats : ceux de Kazan, d’Astrakhan et de Sibérie. Dès lors, les Russes vont jouer de ces divisions. Basile II, prince de Moscou de 1425 à 1462, voit des princes tatars passer à son service. Par exemple, le khanat de Kasimov, territoire octroyé à l’un d’eux par Basile, est vassal de Moscou.
Le fils de Basile II, Ivan III, qui règne de 1462 à 1505, élargit ses territoires. Il impose son autorité à Novgorod, annexe la plupart des pays russes du nord-est et prend le titre de « prince de toute la Russie ». Par ailleurs, en 1476, il refuse le tribut du aux Tatars et inflige à ceux-ci une lourde défaite en 1480. Ainsi, il affirme l’indépendance du nouvel Etat moscovite. Il pose aussi les fondations d’un Etat centralisé en appliquant le Code administratif et judiciaire en 1497 et en créant un corps de fonctionnaires d’Etat. Son œuvre est poursuivie par son fils Vassili III (1505-1533). C’est Ivan IV, dit Ivan le Terrible, qui met fin à la domination tatare en faisant tomber, en 1552, le dernier bastion mongol, le khanat de Kazan.

Bilan et héritage de la présence tatare
Cette période de trois siècles tatars est l’objet de polémiques concernant l’identité russe. En effet, pour beaucoup d’historiens qui défendent le caractère européen de la Russie, la présence tatare a abouti à la destruction, à la servitude et au retard économique et culturel du pays. En revanche, pour un courant révisionniste qualifié d’eurasien et qui insiste sur les liens des Russes avec l’Asie, la Russie est le fruit d’une synthèse entre les civilisations européenne et asiatique. Qu’en est-il vraiment ?
Il est certain que la conquête tatare a stoppé net le développement des villes en raison des pillages et des destructions. Par ailleurs, le tribut a pesé lourdement sur l’économie et beaucoup d’artistes et d’artisans russes étaient réquisitionnés pour travailler en Mongolie. Donc, un certain retard a été imposé à la Russie.
Mais à partir de la fin du XIVe siècle, un renouveau démographique et économique a lieu, qui s’exprime dans les migrations de paysans, les défrichements, la multiplication de « villes » – en fait de gros bourgs fortifiés par un kreml’ de bois ou de pierre – et l’animation du commerce. Une liste de villes datant de la fin du XIVe siècle en mentionne cent trente. Au XVe siècle, des marchands russes sont présents sur les marchés étrangers. En 1465, le marchand Nikitine voyage jusqu’en Inde.
L’apport des Tatars à la Russie est multiple. C’est d’abord la formation d’un empire multiethnique à partir d’Ivan le Terrible qui intègre, en faisant la conquête des khanats tatars, des populations non orthodoxes et non russes. Cet héritage se poursuivra au XIXe siècle avec la conquête de l’Asie centrale par l’empire russe.
L’influence militaire des Tatars est également certaine. L’armée russe, jusqu’en 1600, est construite sur le modèle tatar en privilégiant la cavalerie. Les cosaques, qui doivent surveiller les frontières ouest et sud de la Russie, mènent des raids rapides et destructeurs avant de se replier grâce à leur cavalerie légère.
Le service de poste est conservé et développé durant tout l’Ancien Régime. Le tribut également, qui est étendu aux populations de Sibérie. Quant à l’apport humain, une partie de l’élite russe des XVI et XVIIe siècles est composée de familles tatares qui se sont converties à l’orthodoxie.
De nos jours, il existe encore des populations tatares au sein de la Fédération de Russie, en Crimée et dans les deux républiques autonomes du Tatarstan et du Bachkortostan. De fortes communautés tatares sont aussi implantées dans les grandes villes comme Moscou et Saint-Pétersbourg. Les Tatars, à majorité musulmans, se rassemblent autour d’une communauté ethnique et linguistique – leur langue appartient à la famille des langues turques. Les Tatars de Crimée, eux, se souviennent en plus des persécutions subies pendant la Seconde Guerre mondiale : ils ont été déportés massivement par Staline qui les avait accusé d’avoir collaboré avec les Allemands. Ils n’ont réussi qu’avec peine et en petit nombre à se réimplanter dans leur région d’origine.
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Aller plus loin :
ARRIGNON, Jean-Pierre, La Russie médiévale, Paris, Belles Lettres, « Guide des civilisations », 2003.
ECK, Alexandre, Le Moyen Âge russe, Paris, Maison du livre étranger, 1933.
FERRO, Marc et MANDRILLON, Marie-Hélène (dir.), Russie, peuples et civilisations, Paris, La Découverte, 2005.
HELLER, Michel, Histoire de la Russie et de son empire, Paris, Flammarion, 1999.
KLUTCHEVSKI, B., Histoire de Russie, tome I Des origines au XIVe siècle, traduit par Constantin Andronikof, Paris, Gallimard,1956.
KONDRATIEVA, Tamara, La Russie ancienne, Paris, PUF, « Que sais-je ? », 1996.
VODOFF, Vladimir, Princes et principautés russes, Xe-XVIIe siècle, Northampton, Variorum Reprints, 1989.
[1] Alexandre avait déjà affronté d’autres envahisseurs une dizaine d’années auparavant. En 1241, il a défait les Suédois qui, profitant de l’affaiblissement de la Russie, avaient tenté de l’envahir. La bataille eut lieu sur la Neva, d’où le surnom, Nevski, donné au prince. En 1242, il a également remporté une victoire sur les chevaliers de l’ordre teutonique qui tentaient d’imposer aux Russes la foi catholique. Il les força à se battre sur le lac gelé des Tchoudes afin que le poids de leurs chevaux et de leurs armures fasse céder la glace amincie par le redoux du printemps.

mardi 21 septembre 2010

De Hugues Capet à Philippe Ier, 987-1108

Au Xe siècle, la dynastie carolingienne s'éteignit lentement, comme nous l'avons vu dans un dossier précédent. En France, sa place fut prise par les Capétiens, qui avaient acquis peu à peu une certaine importance comme comtes de Paris. La dynastie fut fondée par Hugues Capet, élu roi en 987 par les grands du royaume, surtout sur l'initiative du haut clergé, car en France, comme en Allemagne, l'Eglise était le principal défenseur de l'idée monarchique. Hugues Capet n'eut qu'un semblant de pouvoir; lui et ses premiers successeurs furent rois en France, plutôt que rois de France. Grâce au système féodal, les fonctionnaires, naguère destituables, étaient devenus, avec le temps, propriétaires de leurs fiefs et s'étaient pourvus de titres de duc, comte ou vicomte. Plus les Carolingiens perdaient de pouvoir, plus les seigneurs se prenaient pour de petits rois, qui étaient assuré de l'hérédité de leurs fiefs et possédaient leur administration propre, leurs propres finances, leurs propres tribunaux, donc pratiquement la souveraineté sur leur territoire. Ainsi se constituèrent les duchés de Normandie, de Bourgogne, de Guyenne, de Gascogne, et, autour d'eux, une série de comtés, puissants et riches, Flandres, Champagne, Anjou, Bretagne, au sud le margraviat de Narbonne, enfin, la Marche de Barcelone était encore considérée comme un fief français. La puissance effective du roi ne surpassait pas celle des propriétaires de ces fiefs, car elle se limitait au comté de Paris, étroite bande de terre qui reliait la Seine et la Loire et comprenait les villes de Paris et d'Orléans. Et, dans ce domaine, étaient disséminés beaucoup de châteaux-forts qui n'appartenaient pas aux Capétiens, mais qui cherchaient à les braver. Le roi n'avait presque pas d'autorité sur ses vassaux. Enfin, il ne faut pas oublier qu'une grande région de la France actuelle, toute la partie orientale au-delà de la Meuse, de la Saône et du Rhône, faisait partie de l'Empire d'Allemagne.



Ainsi, au début, la couronne ne conféra aux Capétiens qu'un titre, mais d'une grande valeur, car à ce titre se rattachait la vieille conception impériale de la dignité monarchique. L'archevêque de Reims ressuscita l'ancienne coutume de l'onction et du sacre qui avait presque la valeur d'un sacrement et mettait une auréole sainte au front des monarques. Si bien qu'aux yeux du clergé et du peuple, le roi était tenu en grande vénération, comme dépositaire d'une haute dignité. Les Capétiens surent en profiter pour fortifier leur position à l'égard du peuple, afin qu'il les défendît contre les prétentions de la noblesse et contre les attaques des seigneurs pillards. Dès le XIe siècle, ils encouragèrent même le désir d'autonomie qui se manifestait déjà dans les communes urbaines. Le fait que, depuis le début, la couronne de France fut héréditaire favorisa beaucoup le développement de la dynastie capétienne. En théorie, les grands du royaume se réservaient le droit d'élection et Hugues Capet, lui-même, fut un roi élu, mais il sut conserver la couronne dans sa famille en faisant, de son vivant, oindre et couronner son fils comme son successeur. Ce procédé prit la valeur d'un usage durable, sans que les rois aient eu à l'imposer par la force. La chose s'explique par le fait que les Capétiens étaient des princes faibles, qui ne paraissaient pas le moins du monde dangereux à leurs grands vassaux, tout au contraire de ce qui se passa en Allemagne où la jalousie des princes était constamment tenue en éveil par les puissants rois saxons et franconiens, si bien que leur opposition ne se calmait jamais complètement, et qu'ils tenaient beaucoup à leur droit d'élection.
 


La faiblesse des Capétiens eut pour contrepoids la ténacité avec laquelle ils édifièrent leur royaume. Le successeur d'Hugues fut son fils Robert II le Pieux (996-1031) qui avait étudié à l'école de Paris, auprès du célèbre Gerbert, devenu alors pape sous le nom de Sylvestre II. Il a la réputation d'avoir été un prince pieux et bienfaisant, mais il n'en fut pas moins excommunié pour avoir répudié sa femme. Ce n'est qu'après des années de résistance qu'il se soumit enfin aux exigences de l'Eglise. Quant au peu de puissance dont il disposait, on en trouve la preuve dans le fait qu'un de ses grands vassaux a pu parler avec mépris de la « nullité du roi ». Et, pourtant, il avait en vue l'affermissement du pouvoir royal. Il mit des années d'effort à acquérir le duché de Bourgogne. Mais son fils et successeur, Henri Ier (1031-1060), ne sut pas le conserver à la couronne et le céda à un frère, Robert, qui fut le chef d'une nouvelle dynastie du duché de Bourgogne. Il ne sut pas non plus empêcher le royaume d'Arles (vallée du Rhône, comté de Bourgogne, Suisse occidentale) de tomber aux mains du roi d'Allemagne, si bien que ces territoires, purement français pourtant, furent pendant six cents ans perdus pour le royaume de France. C'est sous le règne d'Henri Ier que fut brisée l'amitié qui avait uni jusque-là les Capétiens et les ducs de Normandie. Cette rupture devait avoir des conséquences considérables.

Henri eut pour successeur son fils Philippe Ier (1060-1108), un homme sans consistance et un jouisseur. S'il était seul en cause, son règne ne présenterait aucun intérêt; ce qui lui en confère, c'est l'événement qui prit naissance sur le sol de France: la conquête de l'Angleterre par le duc de Normandie, Guillaume (1066), dont il sera reparlé plus loin. Un grand vassal de la couronne de France créa ainsi un Etat puissant dont l'éclat devait faire pâlir celui du royaume capétien. En effet, le royaume anglo-normand constitua longtemps un grand danger pour la France et devait déterminer ses destinées politiques pendant près de quatre cents ans. Dans le reste de la France, aussi, une humeur aventureuse et guerrière poussait les chevaliers au-delà des Pyrénées à des combats contre les Maures, aux côtés des chrétiens d'Espagne. C'est avec la même vigueur débordante que la noblesse française entreprit la première Croisade. Le roi Philippe ne prit aucune part à ces divers événements. En revanche, il eut à souffrir, pour sa part, de la Querelle des Investitures. Il était contemporain d'Henri IV et guère moins coupable que lui de simonie. Mais il sut éviter que Grégoire VII ne prît contre lui des mesures extrêmes en témoignant une bonne volonté qui ne l'empêchait pas de suivre son propre chemin. Grâce au caractère relativement bénin qu'elle eut en France, la Querelle des Investitures n'entrava pas le développement du royaume des Capétiens, tout au contraire de ce qui se passa en Allemagne où le pouvoir royal sortit affaibli de la lutte. Cependant, Philippe Ier fut excommunié pendant des années pour avoir divorcé.

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dimanche 19 septembre 2010

Ce que Benoît XVI a vraiment dit aux Africains

Le Figaro Magazine - 28/03/2009
La polémique sur le préservatif a occulté l'essentiel du message que le pape était venu délivrer au continent noir.
Le week-end dernier, un journaliste des Dépêches de Brazzaville notait que le voyage du pape, au Cameroun et en Angola, avait commencé dans la polémique, mais « surtout hors d'Afrique ». Quel contraste, en effet, entre les commentaires entendus en France et l'événement tel qu'il a été vécu sur place. 60 000 fidèles à la messe finale à Yaoundé, un demi-million à Luanda : les foules africaines ont réservé à Benoît XVI l'accueil festif, coloré et chaleureux qu'elles offraient jadis à Jean-Paul II. De l'avis de tous les commentateurs africains, hors le terrible accident du stade de Luanda (deux jeunes filles étouffées dans un mouvement de foule), cette première visite sur le continent noir a été un succès.
À Paris, en revanche, une unique phrase du Souverain Pontife sur l'utilité du préservatif dans la prévention du sida a déclenché ce que l'AFP a appelé un « tollé planétaire ». Séisme médiatique, en réalité, auquel la proximité du Sidaction n'était pas étrangère, et qui a donné lieu, contre Benoît XVI, à une escalade sans précédent dans la violence verbale. Interrogé par le Talk Orange Le Figaro, Mgr Vingt-Trois, cardinal archevêque de Paris, n'a pas hésité à parler de « lynchage ».
La phrase reprochée au pape, rappelons-le, a été prononcée dans l'avion qui l'emmenait en Afrique. Répondant à un choix de questions posées par des journalistes, Benoît XVI a été interrogé sur la position de l'Église quant à la lutte contre le sida. Une question posée en italien, et à laquelle il a répondu dans la même langue. Disant exactement ceci, si l'on s'en tient à la traduction littérale : « On ne peut vaincre ce problème du sida uniquement avec de l'argent et des slogans publicitaires. S'il n'y a pas l'âme, si les Africains ne s'aident pas, on ne peut résoudre ce fléau en distribuant des préservatifs ; au contraire, ils augmentent le problème ».
Ces mots ne peuvent être isolés de la totalité de la réponse du pape. Dans la phrase précédente, il saluait le travail accompli par les organisations catholiques luttant contre le sida. Et dans les suivantes, il lançait un appel à une « humanisation de la sexualité », à un « nouveau mode de comportement les uns avec les autres », et à « une vraie amitié pour les personnes qui souffrent, une disponibilité, avec des sacrifices, avec des renoncements personnels, pour être avec les souffrants ».
Ajoutons que, lors de son allocution d'arrivée, à l'aéroport de Yaoundé, le Souverain Pontife a demandé que les malades du sida, en Afrique, aient droit gratuitement aux médicaments - information qui n'a été relayée nulle part.
Le pape, doutant de l'efficacité des campagnes de prévention fondées uniquement sur le préservatif, a indiqué un idéal : une sexualité maîtrisée, responsable, respectueuse de l'autre. Un élu de droite y a néanmoins vu « un message de mort » et un parlementaire de gauche des propos « proches du meurtre prémédité »…
Ceux qui opposent un Benoît XVI dur et conservateur à un Jean-Paul II compatissant et ouvert oublient que le pape précédent, dans les années 1990, fut victime de campagnes d'opinion identiques, rigoureusement pour les mêmes raisons, et qu'il fut alors traité de « criminel contre l'humanité ».
« Je demande aux Occidentaux de ne pas nous imposer leur unique et seule façon de voir, a répliqué Mgr Sarr, archevêque de Dakar. Dans des pays comme les nôtres, l'abstinence et la fidélité sont des valeurs qui sont encore vécues et, avec leur promotion, nous contribuons à la prévention contre le sida. »
En France, la polémique a occulté le vrai message que le pape était venu délivrer aux Africains. En seize discours, et à travers le document préparatoire au synode sur l'Afrique qui aura lieu à Rome, à l'automne prochain, Benoît XVI a dénoncé la corruption des élites, le culte de la violence, le tribalisme, et la collusion avec les puissances économiques internationales qui utilisent l'Afrique comme un marché, au détriment de sa culture et au mépris des droits de l'homme et de la démocratie. De vrais sujets qui fâchent, mais qui, manifestement, intéressent moins le Tout-Paris.

samedi 18 septembre 2010

La dette, la fiscalité ou l’immigration... vues par Marx

L’histoire au sens scientifique a été un peu dure avec Marx. Il me semble que comme Balzac, Zola ou Tocqueville, l’auteur du Capital mérite une relecture qui expliquerait bien des "nouveautés" du temps présent, déjà si présentes aux siècles écoulés. C’est ainsi que l’endettement fantastique des nations, les politiques d’immigration ou l’exubérance irrationnelle des marchés, comme disait ce bon Alan Greenspan, sont ainsi complètement connues et analysées par le grand économiste, historien et aussi journaliste.

Concernant l’endettement, qui menace actuellement de ruiner l’Europe ou l’Amérique, Marx écrit ceci (le Capital, Huitième section, chapitre 31) : « Le système du Crédit public, c’est-à-dire de dette publique, envahit l’Europe définitivement pendant l’époque manufacturière. Il n’ y a donc pas à s’étonner de la doctrine moderne que plus un peuple s’endette, plus il s’enrichit. Le crédit public, voilà le credo du capital. » On comprend dès lors pourquoi nos gouvernements occidentaux se précipitent pour nous rendre dépendants des marchés. D’autant que cette politique crée une nouvelle race de profiteurs. Marx ajoute : « La dette publique a donné le branle aux sociétés par actions, aux opérations aléatoires, à l’agiotage, en somme aux jeux de bourse et à la bancocratie moderne [...] Bolingbroke décrit l’apparition soudaine de cette engeance de bancocrates, financiers, rentiers, courtiers, agents de change, brasseurs d’affaires et loups-cerviers. »

Cette obsession maniaque de l’endettement encourage la mondialisation et l’interdépendance des nations : « Avec les dettes publiques naquit un système de crédit international »... avec à chaque fois un pays capitaliste qui prête à une future puissance : Marx évoque Venise, la Hollande, l’Angleterre, les États-Unis... auxquels on pourrait ajouter depuis le Japon d’après 1945 et la Chine de l’après-maoïsme. Et elle encourage aussi la surcharge d’impôts, causée par l’accumulation des dettes contractées par les gouvernements... On a vu que la hausse des impôts dans le Sarkostan décidée à la fin de l’été avait pour but de rassurer les marchés, et que les impôts n’ont baissé ni sous Reagan, Blair ou Thatcher, bien au contraire, et ce même si leur application est différente (les canons plutôt que le beurre social pour les néocons). Marx rappelle le rôle pédagogique d’une forte fiscalité, appliquée avec toujours plus de fermeté dans nos démocraties : « La fiscalité moderne renferme donc en soi un germe de progression automatique. La surcharge des taxes n’est pas un incident, mais le principe... de Witt a exalté l’impôt comme le plus propre à rendre le salarié soumis, frugal, industrieux... et exténué ». Je précise que de Witt en question est le fameux stathouder du grand siècle hollandais. On voit que le politiquement correct qui tend depuis vingt ans à limiter toutes nos libertés ou tous nos vices a de belles origines. Le système est de plus en plus inflexible, si la flexibilité est devenue la norme du salarié.

Un dernier point. Concernant l’immigration et la mondialisation des hommes et non plus seulement des marchandises, Marx remarque (Septième section, chapitre 25) : « À mesure qu’il développe les pouvoirs productifs du travail et fait donc tirer plus de produits de moins de travail, le système capitaliste développe aussi les moyens de tirer plus de travail du salarié, soit en prolongeant sa journée, soit en rendant son labeur plus intense, ou encore d’augmenter en apparence le nombre des travailleurs employés en remplaçant une force supérieure et plus chère par plusieurs forces inférieures et à bon marché, l’homme par la femme, l’adulte par l’adolescent et l’enfant, un Yankee par trois Chinois. Voilà autant de méthodes pour diminuer la demande de travail et en rendre l’offre surabondante, en un mot, pour fabriquer des surnuméraires... »

Vers la même époque, Marx dénonçait l’immigration d’ouvriers... belges en direction de l’Angleterre pour tenter de maintenir à flot une grève locale pour la journée de 9 heures. Aujourd’hui, 150 ans, on y revient, à la journée de neuf heures, et l’on va arriver à la retraite à 70 ans (en attendant mieux). Et si on sait que les enfants ne travaillent plus, on sait que les "investisseurs" Chinois à leur tour tentent de trouver moins cher que leurs propres ouvriers, au Sri Lanka, en Afrique ou ailleurs.

J’ai voulu citer Marx, d’une manière documentaire et non politique pour cette raison : à partir du moment où l’on feint de découvrir ou de dénoncer un problème qui est là depuis toujours, c’est qu’on ne veut pas le traiter. Rien de nouveau sous le sommeil. C’est ainsi que ceux qui dénoncent l’endettement, les excès des marchés, ou l’immigration sans remonter à leur source se moquent du monde. Je reprendrai Marx dans un prochain écrit pour une autre raison : la baisse de notre niveau de vie depuis quarante ou cinquante ans.

par Nicolas Bonnal L'après Libre Journal 17 septembre 2010

mardi 14 septembre 2010

La Grande Guerre : La censure et comment la tourner

Au moment où le gouvernement, acculé à la déroute par le chômage, la récession et la corruption, croit gagner du temps en rétablissant la censure des Idées et des Affaires, il est à la fois cocasse et réconfortant de rappeler ce qu’écrivait le docteur Lucien-Graux dans son copieux ouvrage Les Fausses Nouvelles de la guerre dont il commença la publication dès 1917.
« La censure, tout en faisant de son mieux, n’a pu empêcher que les petits combats de l’arrière ne fussent engagés en permanence et que la guérilla des journaux ne conservât toute son activité malgré les coupures... La censure, pour faire son métier, passa ses nuits à taillader les articles de Clemenceau, d’Hervé, de Jacques Dhur, de Maurras, de Charles Humbert. Chacun de ces hommes représentait une forme d’opinion, un groupe de Français, de points de vue souvent diamétraux.
Almeyreda(1) et Arthur Meyer(2) sentirent entre leurs côtes la même insinuation du fatal ciseau. Ils laissèrent une part deux-mêmes à la chirurgienne mais l’épiderme et les os reconstitués redonnèrent corps, sous des apparences atténuées, aux propos condamnés la veille.
Personne ne s’y méprenait. Chacun avait pris l’habitude de lire entre les lignes. On était exercé (qu’on lût Le Gaulois, ou Le Bonnet Rouge, L’Homme enchaîné ou L’Eveil, Le Journal ou L’Action française, La Victoire ou La Croix) à suppléer par la pensée tout ce qui n’était pas écrit et il est à présumer que plus d’une fois l’imagination du lecteur outrepassa la pensée de l’écrivain.
Ce n’était donc rien entraver du tout que de barrer la route, par un travers de ciseaux, à des idées qui, plus troubles et plus nuisibles que si elles eussent été imprimées, éclataient dans le blanc des "censuré" et résonnaient fréquemment avec plus de vacarme que si elles eussent été épargnées par la grande étouffeuse. »
Et Lucien-Graux ajoute cette précision assez étonnante quand on sait la suite : Clémenceau et son journal, L’Homme enchaîné, avaient été décrétés par la censure « perturbateurs de l’union sacrée ».
Guère ému par cette dénonciation, le futur "Père la Victoire" commença d’envoyer sous pli fermé à ses abonnés, ainsi qu’aux sénateurs et députés, ses articles qui avaient été censurés. « Cette adroite mesure, raconte Lucien-Graux, constitua ainsi une catégorie de "gens bien informés" qui répandaient à travers la ville des informations et des commentaires dont ils avalent seuls connaissance. » Voilà un précédent qui, le Libre Journal l’assure à ses lecteurs, n’est pas tombé dans la cervelle d’un acéphale. Et Monsieur Toubon pourrait bien, avant qu’il soit longtemps, être involontairement le bienfaiteur de la Poste qui aura à acheminer à titre privé les opinions politiquement incorrectes dont la future loi Gayssot empirée Toubon interdira la publication dans les journaux imprimés.
On verra alors si les flics de la pensée oseront ressusciter le sinistre "cabinet noir" où, à en croire les historiens républicains, la censure royale prenait connaissance des correspondances privées.
Mais, pour en revenir à la Grande Guerre, Lucien-Graux met en évidence un effet pervers de la censure : plus elle est pointilleuse, plus elle favorise la multiplication des fausses nouvelles, suivies de démentis qui en augmentent encore le bruît et de contre-démentis qui ajoutent à la confusion. « La censure, par ses excès, agit comme si elle prenait à tâche d’affoler l’opinion. »
Plus encore que maladroite, elle est stupide. Dans Le Figaro du 8 septembre 1916, Polybe écrit : « La censure a supprimé de mon article d’avant-hier le nom de deux généraux qui commandent sur le front de la Somme. Mais hier, les portraits du général Fayolle et du général Micheler illuminent la première page d’un journal alors qu’un autre ne peut encore désigner ces deux admirables chefs de guerre que par leurs initiales. »
Confusion due aux troubles de la belligérance, dira-t-on ? Ce n’est pas aujourd’hui que l’on verrait semblable chose.
C’est sûr. Aujourd’hui, dans la France du XXIe siècle, on ne voit que Toubon promettre en même temps qu’il fera écraser financièrement tout journal suspect d’antisémitisme mais qu’il interdira aux parquets de poursuivre les injures antichrétiennes. Et on laisse les porcs de Charlie Hebdo traiter le Pape de vieux salaud quand on condamne le directeur de Présent parce qu’il a appelé L... L... ?
Et l’on n’est pas en guerre.
Du moins contre les Allemands...
par Serge de Beketch Le Libre Journal de la France Courtoise - n° 107 du 11 octobre 1996

(1) Socialiste pro-allemand, il écrivait au Bonnet Rouge, financé par le ministre Malvy. Débusqué par l’Action française, il fut arrêté et suicidé. Malvy fut condamné à l’indignité nationale.
(2) Directeur du Gaulois. Il se déshonora dans un duel en empoignant, au mépris de la règle, la lame de son adversaire, le polémiste antisémite Drumont.

dimanche 12 septembre 2010

1370 : le Roi et Du Guesclin

Le capitaine Du Guesclin est élevé par Charles V à la dignité de connétable de France. Le roi et son chevalier s'entendent non pour infliger aux Anglais des batailles rangées, mais pour les repousser méthodiquement.
Cette année-là, la sixième de son règne, Charles V, trente-deux ans, soucieux de renvoyer au plus vite les Anglais chez eux, éleva le capitaine Bertrand Du Guesclin à la dignité de connétable de France. Nous avons déjà vu Charles (fils de Jean II le Bon), encore dauphin, quelque peu malingre et dépourvu de panache, rétablir dans le royaume l'ordre et la stabilité monétaire (L'AF 2000 du 5 mars 2009 et du 4 mars 2010). Dès son accession au trône en 1364, il montra sa volonté de ne pas se résigner au traité de Brétigny qui enlevait à la France pratiquement tout le Sud-Ouest.
Pendant seize ans…
Très lettré, grand lecteur d'Aristote, passionné d'astrologie, homme de goût qui embellit Paris, le troisième roi de la lignée des Valois était aussi fort instruit des questions militaires. Il n'eut de cesse de se donner un noyau solide de forces permanentes. Pour y parvenir il s'appliqua à supprimer les guerres particulières, à s'assurer des ressources régulières par la permanences des aides (impôts indirects) et la réglementation des fouages (impôts exceptionnels).
Sa chance fut de rencontrer en Du Guesclin le grand capitaine dont il ne pouvait se passer. Conjonction remarquable pendant seize ans entre deux volontés, que le duc de Lévis Mirepoix décrit ainsi : « Il y a de la joie chez le monarque valétudinaire et sédentaire, d'avoir découvert sous la rude enveloppe du chevalier breton, aux jambes torses, la force morale dans la force physique, l'intelligence dans l'entrain. Comme il était lui-même l'action dans l'intelligence. »
Laideur et brutalité
Du Guesclin était né en 1320 au château de La Motte-Broons, près de Dinan. Jeune, il était surtout connu pour sa laideur physique et sa brutalité, mais il sut assez tôt mettre sa force physique dans de plus nobles actions, notamment dans la constitution, pour son compte, de troupes luttant contre les Anglais. Il se trouva ainsi le défenseur de la ville de Rennes contre le comte de Lancastre. Caché dans les forêts de Paimpont, Bertrand faisait trembler les Anglais. Dès 1360, il était devenu lieutenant de Normandie, d'Anjou et du Maine.
Quatre ans plus tard le voici capitaine général entre Seine et Loire et chambellan de France. C'est alors qu'il eut l'occasion d'offrir à Charles V, quelques jours avant le couronnement de celui-ci, la belle victoire de Cocherel (avril 1364) remportée contre les troupes du roi de Navarre, lequel alors au service des Anglais, n'avait pas cessé de mériter son sobriquet de Charles le Mauvais. Dès lors le roi et son chevalier s'entendirent pour, non pas infliger aux Anglais des batailles rangées, mais pour les repousser méthodiquement, s'emparer point par point de leurs forteresses, redonner confiance aux paysans des provinces occupées. En Du Guesclin les troupes retrouvaient une âme, il ne les engageait pas pour la gloriole, mais, ménageant toujours leur sang, il les exerçait à la ruse, à la guerre d'usure.
Pour débarrasser le territoire des fameuses grandes compagnies qui terrorisaient les campagnes, lui qui savait parler à ce genre de troupiers, en entraîna un bon nombre en Espagne pour y prendre la défense d'Henri de Transtamare contre Pierre le Cruel soutenu par les Anglais. Après bien de péripéties, Henri l'emporta et devint un utile allié de la France. Toutes ces prouesses méritaient amplement le titre de connétable que Charles V lui donna donc en cette année 1370.
Repousser les Anglais chez eux
De son côté le roi savait qu'il fallait aussi enlever aux Anglais la maîtrise de la mer. Il reconstitua donc une marine en flattant les états généraux pour avoir de l'argent.
Il faut ici noter la différence entre la France de Charles V et l'Angleterre d'Édouard III. Chez nous, les populations avaient hâte d'en finir avec le traité de Brétigny pour se retrouver entre Français ; outre-Manche, le régime parlementaire, né de la fameuse grande Charte, on s'en souvient, au temps de Jean sans Terre en 1215, produisait ses effets et l'effort de guerre s'essoufflait. Bientôt des pourparlers de paix furent décidés, puis aussitôt rompus par l'Anglais. La mort de Du Guesclin le 13 juillet 1380 en combattant les grandes compagnies d'Auvergne à Châteauneuf-de-Randon ne ralentit pas l'élan, et tandis que nos marins aidés des troupes de nos alliés espagnols pénétraient jusque sur la Tamise…, les Anglais ne possédaient plus en France à la mort de Charles V que Bayonne, Bordeaux et Calais.
Selon Bainville, « si Charles V avait vécu dix ans de plus, il est probable que Jeanne d'Arc eût été inutile ». Hélas, ce roi sage et avisé, premier initiateur d'une armée royale permanente, mourut le 16 septembre 1380, peu après Du Guesclin. Pour régler au mieux sa succession il avait fixé à quatorze ans la majorité royale.
Hélas, la fortune ne devait guère sourire au successeur, le jeune Charles VI…
Michel Fromentoux L’ACTION FRANÇAISE 2000 – du 18 au 31 mars 2010

jeudi 9 septembre 2010

Le jour où la France faillit devenir anglaise

Monde et Vie a évoqué, dans son numéro 829, les conditions dans lesquelles fut décidée la demande d'armistice de juin 1940. Nous revenons aujourd'hui sur un épisode mal connu de ces journées tragiques : le projet de fusion franco-britannique que proposa alors Winston Churchill au président du Conseil français Paul Reynaud, par l'intermédiaire du général De Gaulle.

Dans son discours du 18 jnin 2010, Nicolas Sarkozy fit allusion à ce projet pour saluer en quelque sorte la naissance de l'idée européiste - non sans quelque raison puisqu'à en croire Me Jacques Isorni (1) cette idée fut soufflée au Premier ministre britannique par l'un des futurs « pères de l'Europe », Jean Monnet.

Les enregistrements, réalisés par la marine·, des conversations téléphoniques passées pendant les journées décisives du 15 au 17 juin, permettent de suivre la progression de cette démarche. C'est De Gaulle, déjà à Londres, qui en parle le premier à Reynaud, chef du gouvernement alors réfugié à Bordeaux, au cours d'un échange daté du 15 juin à 12h30 : « Je viens de voir Churchill, dit-il. Il y a quelque chose d'énorme en préparation au point de vue entité entre les deux pays. Churchill propose la constitution d'un gouvernement unique franco-britannique, et vous, M. le Président, pouvez être président du cabinet de guerre franco-britannique ? » « C'est la seule solution d'avenir, répond Reynaud. Mais il faut faire grand et très vite. C'est une question de minutes. Il y a de l'agitation ici. Je vous donne une demi-heure. Ce serait magnifique.»

Une demi-heure plus tard, nouvel appel de De Gaulle, auquel il est répondu que Reynaud est au Conseil. « Je voulais lui parler d'un événement énorme, répète le futur chef de la France libre. Le conseil des ministres anglais est en séance, préparant le texte d'une déclaration faisant des deux pays une nation commune. Je vais déjeuner avec Churchill et rappellerai aussitôt. Vous pouvez lui dire à l'oreille qu'il peut devenir président du cabinet de guerre franco-britannique. »(2)

Le lendemain 16 juin, à 16 heures, De Gaulle rappelle et annonce à Reynaud « une déclaration sensationnelle » .

- Oui, après 5 heures (de l'après-midi, ndlr), il sera trop tard, répond le président du Conseil. - Je vais tâcher de vous l'apporter de suite par avion, propose De Gaulle.

- Oui, mais ce sera trop tard. La situation s'est beaucoup aggravée depuis tout à l'heure. Il y a eu des événements imprévus.

Une déclaration « sensationnelle »

À 16 h 30, De Gaulle téléphone au président du Conseille texte de ladite déclaration, sensationnelle en effet :

« A l'heure du péril où se décide la destinée du monde moderne, le gouvernement de la République française et celui du Royaume-Uni, dans l'inébranlable résolution de défendre la liberté contre l'asservissement au régime qui réduit l'homme à un automate ou à un esclave, déclarent que désormais la France et la Grande-Bretagne ne sont plus deux nations mais une nation franco-britannique indissoluble. Une constitution de l'Union sera rédigée, prévoyant des organes communs chargés de la politique économique et financière et de la défense de l'Union.

« Chaque citoyen anglais devient citoyen français. Chaque sujet français devient sujet anglais. Les dévastations de la guerre, où qu'elles aient lieu, seront sous la responsabilité commune des deux pays, et les ressources de chacun seront confondues pour la restauration des régions détruites pendant la guerre. Il n'y aura qu'un cabinet de guerre pour la direction de la guerre, qui gouvernera de l'endroit qui sera jugé le plus approprié à la conduite des opérations.

« Les deux parlements seront associés. Toutes les forces de la Grande-Bretagne et de la France seront placées demain sous un commandement suprême. La Grande-Bretagne forme de nouvelles armées ; la France maintiendra ses forces disponibles sur terre, sur mer et dans les airs. L'Union fait appel aux États-Unis pour fortifier les ressources des Alliés et pour apporter leur puissante aide matérielle à la cause commune. Cette unité, cette union concentreront toutes les énergies contre la puissance de l'ennemi où que soit la bataille, et ainsi nous vaincrons. »

« Aux États-Unis, on se demande si vous allez être l'homme de la guerre ou si vous allez faire comme la reine Wilhelmine ou comme Léopold, poursuit De Gaulle après cette lecture. Si vous êtes celui qui se débine pour que les autres capitulent. Mais l'atmosphère de Bordeaux n'est pas celle de l'Europe ni même celle de la France. »

Raisons inavouables de la générosité anglaise

Ni celle de Londres, assurément… Ce même 16 juin, Paul Reynaud démissionne en conseillant au président Albert Lebrun de faire appel au maréchal Pétain, qui adresse aux Allemands une demande d'armistice le 17 juin.

Ni De Gaulle, ni Reynaud ne semblent s'être demandé ce que cachait cette soudaine générosité anglaise, rompant avec l'attitude des Anglais, qui s'étaient gardés au cours des semaines précédentes d'engager pleinement leurs forces, et particulièrement leur aviation, aux côtés de leurs alliés. À Dunkerque, n'avaient-ils pas embarqué prioritairement leurs soldats tandis que les Français défendaient la ville ?(3)

Comment expliquer alors cette soudaine solidarité des Britanniques ? Sans doute par le désir de voir les Français continuer le combat jusqu'à la dernière limite afin de leur permettre de gagner du temps; mais surtout par la crainte que la puissante flotte française ne tombe aux mains des Allemands. L'union aurait permis de contrôler les navires français … L'affaire étant ratée et les Français ayant demandé l'armistice, Churchill trouve une autre solution : le 3 juillet, au lever du jour, les forces anglaises s'emparent par traîtrise des navires français réfugiés dans les ports britanniques de Porsmouth et de Plymouth, et procèdent de même à Alexandrie. Pis : le même jour, une flotte anglaise surprend et bombarde en rade de Mers-el-Kébir les navires français qui ne se méfient pas de leurs alliés d'hier, tuant plus de 1200 marins. Rule, Britannia ! L'Angleterre n'a pas d'amis, elle n'a que des intérêts. Il

Eric Letty monde et vie. 28 août 2010

(1) Jacques lsorni, in Pour en finir sur l'armistice de 40, article publié par Écrits de Paris, numéro d'octobre 1966, L'avocat du maréchal Pétain y a publié les textes des communications téléphoniques citées dans notre article.

(2) La répétition de cette précision montre en quelle estime De Gaulle tenait Reynaud …

(3) Selon Churchill lui-même, sur 165 000 hommes évacués à la date du 31 mai, on ne comptait que 15 000 Français. Au total 335 000 hommes furent évacués dont 115 000 Français.

mercredi 8 septembre 2010

Trotski et les grévistes

« La meilleure place pour un gréviste, ce moustique jaune et nuisible,c’est le CAMP DE CONCENTRATION. »
Trotski, “Pravda”, 12 février 1920
Pour saluer la grève du 7 septembre 2010, et la gauche qui la fomente, ci-dessous le texte le plus dur contre Trotski que j’aie jamais lu. Le plus étonnant, c’est qu’il se trouve depuis 2004 sur le site des amis de… “Lutte ouvrière” !
Evidemment suivi de criailleries…
Patrick Gofman
trotskiste guéri depuis 1979
***
Lev Davidovitch Bronstein est né le 26 octobre 1879 à Lanovka en Ukraine.
Il est le fils d’un fermier juif ukrainien. Ses parents l’envoyèrent à Odessa à 9 ans, chez son oncle pour qu’il le fasse scolariser.
Il fait des études en mathématiques et en droit.
En 1898, il est arrêté pour son activité révolutionnaire puis déporté en Sibérie en 1900.
Il s’évade et rejoint Lénine (Vladimir Ilitch Oulianov) à Londres.
Membre du Parti Ouvrier Social-Démocrate Russe, il adhère en 1903 à la fraction Menchévique (opposée aux bolchéviques de Lénine).
Pendant la révolution de 1905, il préside le Soviet de Saint-Petersbourg. Il est arrêté mais s’échappe et s’exile à Vienne en 1907.
Mai 1917, il revient en Russie, délaisse les Menchéviques pour rallier les Bolchéviques (août 1917) et participe à l’organisation de la révolution d’Octobre.
A ceux qui protestaient contre le putsch bolchévique d’octobre 1917, voici ce que Trotski a répondu, le 25 octobre 1917, au palais Smolny : « Vous êtes de lamentables isolés, vous êtes des banqueroutiers, rendez-vous là où votre classe est désormais : dans la poubelle de l’Histoire. »
Autre signe de son grand coeur, son intervention du 13 décembre 1917 devant le comité exécutif des soviets : « Dans moins d’un mois, la terreur va prendre des formes très violentes, à l’instar de ce qui s’est passé lors de la Grande Révolution Française. Ce ne sera plus seulement la prison, mais la guillotine, cette remarquable invention de la Grande Révolution Française, qui a pour avantage reconnu celui de raccourcir un homme d’une tête, qui sera prête pour nos ennemis ». Là, Trotski , l’intello sanguinaire, faisait dans l’humour noir, mais on a du mal à sourire lorsqu’on pense aux dizaines de millions de sacrifiés sur l’autel du bolchévisme !

1917-1925 : Commissaire du Peuple à la guerre où il crée l’Armée Rouge.
1918-1920 : Chef de l’Armée Rouge pendant la guerre civile (des millions de macchabées).
29 avril 1918 : « Notre parti est pour la guerre civile. La guerre civile, c’est la lutte pour le pain. Vive la guerre civile ! » L. Trotski
1919-1920 : LE CONCEPT DE LA MILITARISATION DU TRAVAIL : Trotski est à l’origine du concept de “militarisation du travail”, théorie qu’il développa devant le IXe congrès du PCUS (mars 1920). Pour Trotski, l’homme est naturellement porté par la paresse. Dans un régime capitaliste, l’ouvrier doit travailler pour survivre, la loi du marché l’empêchant de se relâcher. Mais dans un régime socialiste, « l’utilisation de ressources de travail remplace le marché ». C’est l’état qui doit alors orienter, affecter et encadrer le travailleur. Le travailleur doit donc obéir « comme un soldat » à l’Etat ouvrier qui est censé défendre les intérêts du prolétariat. Sur ces principes, s’établit alors la militarisation du travail dont les bases, qui ne peuvent que réjouir Arlette et ses amis, sont :
- INTERDICTION DES GREVES (considérées comme des désertions) ;
- RENFORCEMENT DE LA DISCIPLINE ET DES POUVOIRS DE LA DIRECTION ;
- SUBORDINATION COMPLETE DES SYNDICATS ;
- INTERDICTION DE QUITTER SON POSTE DE TRAVAIL ;
- SANCTIONS SEVERES CONTRE L’ABSENTEISME ET LES RETARDS.
Pourtant, en 1920, les ouvriers crèvent de faim, pour pouvoir nourrir, eux, et leurs familles, ils sont bien souvent obligés de s’absenter de leur poste de travail pour s’approvisionner.
Mais le concept trotskiste de militarisation du travail DOIT s’appliquer. Devant la dureté du système, les ouvriers débrayent, font grève, manifestent. Trotski est outré devant de tels actes de “sabotage” ; il lance, le 12 février 1920, dans la Pravda (journal qu’il a créé) : « La meilleure place pour un gréviste, ce moustique jaune et nuisible, c’est le CAMP DE CONCENTRATION. »
Dès lors, dans toute la Russie, des dizaines de milliers de “saboteurs” (grévistes et même leurs familles) sont arrêtés, déportés, enfermés dans des “camps de concentration” ou fusillés, à moins qu’ils n’acceptent, si la possibilité leur est donné, comme à TOULA en juin 1920, de s’humilier en signant des papiers abjects, du style : « Je, soussigné, chien puant et criminel, me repens devant le tribunal révolutionnaire et l’Armée rouge, confesse mes fautes et promet de travailler consciencieusement. »
1919-1922 : LA CHASSE AUX “VERTS” : Les Verts, rien à voir avec le parti de Mamère, sont les paysans, ni rouges (communistes), ni blancs (tsaristes) dont le seul objectif était de survivre à la famine en cultivant leurs petites exploitations. Mais voilà les bolcheviques qui arrivent avec leur armée rouge, cette armée en guenilles, création de Trotski, qui sèment la terreur partout où ils passent, et qui feraient passer Attila et ses Huns pour Sainte Blandine et les sept nains. Ils obligent les paysans à s’enrôler dans l’armée, les obligeant à laisser tomber leurs champs que l’état, évidemment s’empresse de garder pour lui ! Si ils ne sont pas capables de gonfler les effectifs de la horde sanglante (trop vieux, etc.), ils subissent des réquisitions inimaginables, les obligeant à donner du grain à l’Etat bien plus qu’ils en avaient produit.
Ces ingrats de verts, incapable de comprendre que l’avenir radieux du Paradis socialiste ne peut se faire qu’avec leur sacrifice, résistèrent en refusant la conscription et les réquisitions (notamment en Ukraine). Mal leur en prit ! Les vampires au pouvoir, Trotski (et son Armée rouge), Dzerjinski (et sa bande de soudards tchékistes), Lénine (et sa syphilis) se mirent à les fusiller (pas méchamment, c’est juste pour l’exemple). Les verts prirent alors les armes, enfin, ce qu’ils avaient sous la main, et luttèrent contre les rouges. La colère du commissaire du peuple à la guerre ne tarda pas à se manifester. Il déclara : « Ces masses bestiales ne peuvent être matées que par la force ! Il faut un BALAI DE FER pour nettoyer l’Ukraine de ses bandes de bandits ! ». L’opération de toilettage dura jusqu’en 1922, avec force charniers de paysans, tués sans distinctions de sexe ou d’âge… L’humanité venait d’oublier vingt siècles de civilisation.
1918-1922 : LE SYSTEME DES OTAGES : Dans sa lutte contre la “vermine blanche”, les “chiens puants” de grévistes et les “masses bestiales” de verts, Trotski et son compère Lénine mirent au point une tactique efficace : Les Otages. Si quelqu’un refusait telle où telle corvée, on emprisonnait toute sa famille, et s’il refusait toujours, on fusillait tout le monde. Otages familiaux, certes, mais aussi otages à l’échelon des villages : un village refusait d’appliquer certains oukases, on prenait les femmes et les enfants du village pour mettre au pas ces insupportables empêcheurs de tourner en rond.
Petit exemple : le 15 février 1919, aux tchékas locales, pour que le déblayage de la neige sur les voies soit plus rapide : « Prenez des otages parmi les paysans […], si le déblayage n’est pas fait, les otages seront passés par les armes. » (Dekrety sovietskoï vlasti, Moscou, 1968).
Edifiant non ?
http://www.france-courtoise.info