Le Figaro Magazine - 28/03/2009
La polémique sur le préservatif a occulté l'essentiel du message que le pape était venu délivrer au continent noir.
Le week-end dernier, un journaliste des Dépêches de Brazzaville notait que le voyage du pape, au Cameroun et en Angola, avait commencé dans la polémique, mais « surtout hors d'Afrique ». Quel contraste, en effet, entre les commentaires entendus en France et l'événement tel qu'il a été vécu sur place. 60 000 fidèles à la messe finale à Yaoundé, un demi-million à Luanda : les foules africaines ont réservé à Benoît XVI l'accueil festif, coloré et chaleureux qu'elles offraient jadis à Jean-Paul II. De l'avis de tous les commentateurs africains, hors le terrible accident du stade de Luanda (deux jeunes filles étouffées dans un mouvement de foule), cette première visite sur le continent noir a été un succès.
À Paris, en revanche, une unique phrase du Souverain Pontife sur l'utilité du préservatif dans la prévention du sida a déclenché ce que l'AFP a appelé un « tollé planétaire ». Séisme médiatique, en réalité, auquel la proximité du Sidaction n'était pas étrangère, et qui a donné lieu, contre Benoît XVI, à une escalade sans précédent dans la violence verbale. Interrogé par le Talk Orange Le Figaro, Mgr Vingt-Trois, cardinal archevêque de Paris, n'a pas hésité à parler de « lynchage ».
La phrase reprochée au pape, rappelons-le, a été prononcée dans l'avion qui l'emmenait en Afrique. Répondant à un choix de questions posées par des journalistes, Benoît XVI a été interrogé sur la position de l'Église quant à la lutte contre le sida. Une question posée en italien, et à laquelle il a répondu dans la même langue. Disant exactement ceci, si l'on s'en tient à la traduction littérale : « On ne peut vaincre ce problème du sida uniquement avec de l'argent et des slogans publicitaires. S'il n'y a pas l'âme, si les Africains ne s'aident pas, on ne peut résoudre ce fléau en distribuant des préservatifs ; au contraire, ils augmentent le problème ».
Ces mots ne peuvent être isolés de la totalité de la réponse du pape. Dans la phrase précédente, il saluait le travail accompli par les organisations catholiques luttant contre le sida. Et dans les suivantes, il lançait un appel à une « humanisation de la sexualité », à un « nouveau mode de comportement les uns avec les autres », et à « une vraie amitié pour les personnes qui souffrent, une disponibilité, avec des sacrifices, avec des renoncements personnels, pour être avec les souffrants ».
Ajoutons que, lors de son allocution d'arrivée, à l'aéroport de Yaoundé, le Souverain Pontife a demandé que les malades du sida, en Afrique, aient droit gratuitement aux médicaments - information qui n'a été relayée nulle part.
Le pape, doutant de l'efficacité des campagnes de prévention fondées uniquement sur le préservatif, a indiqué un idéal : une sexualité maîtrisée, responsable, respectueuse de l'autre. Un élu de droite y a néanmoins vu « un message de mort » et un parlementaire de gauche des propos « proches du meurtre prémédité »…
Ceux qui opposent un Benoît XVI dur et conservateur à un Jean-Paul II compatissant et ouvert oublient que le pape précédent, dans les années 1990, fut victime de campagnes d'opinion identiques, rigoureusement pour les mêmes raisons, et qu'il fut alors traité de « criminel contre l'humanité ».
« Je demande aux Occidentaux de ne pas nous imposer leur unique et seule façon de voir, a répliqué Mgr Sarr, archevêque de Dakar. Dans des pays comme les nôtres, l'abstinence et la fidélité sont des valeurs qui sont encore vécues et, avec leur promotion, nous contribuons à la prévention contre le sida. »
En France, la polémique a occulté le vrai message que le pape était venu délivrer aux Africains. En seize discours, et à travers le document préparatoire au synode sur l'Afrique qui aura lieu à Rome, à l'automne prochain, Benoît XVI a dénoncé la corruption des élites, le culte de la violence, le tribalisme, et la collusion avec les puissances économiques internationales qui utilisent l'Afrique comme un marché, au détriment de sa culture et au mépris des droits de l'homme et de la démocratie. De vrais sujets qui fâchent, mais qui, manifestement, intéressent moins le Tout-Paris.
Ceux qui opposent un Benoît XVI dur et conservateur à un Jean-Paul II compatissant et ouvert oublient que le pape précédent, dans les années 1990, fut victime de campagnes d'opinion identiques, rigoureusement pour les mêmes raisons, et qu'il fut alors traité de « criminel contre l'humanité ».
« Je demande aux Occidentaux de ne pas nous imposer leur unique et seule façon de voir, a répliqué Mgr Sarr, archevêque de Dakar. Dans des pays comme les nôtres, l'abstinence et la fidélité sont des valeurs qui sont encore vécues et, avec leur promotion, nous contribuons à la prévention contre le sida. »
En France, la polémique a occulté le vrai message que le pape était venu délivrer aux Africains. En seize discours, et à travers le document préparatoire au synode sur l'Afrique qui aura lieu à Rome, à l'automne prochain, Benoît XVI a dénoncé la corruption des élites, le culte de la violence, le tribalisme, et la collusion avec les puissances économiques internationales qui utilisent l'Afrique comme un marché, au détriment de sa culture et au mépris des droits de l'homme et de la démocratie. De vrais sujets qui fâchent, mais qui, manifestement, intéressent moins le Tout-Paris.
Jean Sévillia http://www.jeansevillia.com/
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