Plus de 2500 prêtres ont été détenus à Dachau entre 1938 et 1945.
En décembre 1938, le père Otto Neururer, curé de Götzens, au Tyrol, est arrêté pour avoir dissuadé une de ses paroissiennes d’épouser un notable nazi. Inculpé de « diffamation du mariage germanique », il est interné au camp de Dachau, en mars 1939, puis transféré à Buchenwald. C’est là que, surpris en train d’exercer son ministère interdit, en mai 1940, enfermé au cachot, dénudé et pendu par les pieds, il meurt après trente-quatre heures d’agonie. Le mois suivant, ses cendres sont enterrées dans son village. Ayant publié une nécrologie révélant le lieu de sa mort, le provicaire du diocèse d’Innsbruck, le père Carl Lampert, depuis longtemps cible des nazis, est arrêté à son tour, en juillet 1940, et envoyé à Dachau. Transféré à Sachsenhausen, ramené à Dachau, libéré puis de nouveau arrêté, il sera décapité à Halle, dans la Saxe, en novembre 1944, après avoir refusé de renier sa foi.
A Dachau ont été détenus, entre 1938 et 1945, 2579 prêtres, religieux et séminaristes catholiques, dont 447 Allemands et Autrichiens, 1780 Polonais et 156 Français. Plus d’un millier y laissèrent la vie. Installé près de Munich, dès 1933, afin d’interner des opposants au régime hitlérien, ce camp eut pour caractéristique, à la suite d’un compromis arraché aux autorités du IIIe Reich par la diplomatie vaticane, en 1940, de regrouper, dans deux ou trois baraques, plusieurs centaines de prêtres auxquels on mêla une centaine de pasteurs et de popes.
Journaliste et historien, Guillaume Zeller raconte le drame particulier de ces hommes de Dieu pris dans la tragédie de la déportation. Par rapport aux autres prisonniers, ils disposaient d’un lieu de consolation : une chapelle, mais dont l’accès était aléatoire. Pour le reste, faim, froid et maladie étaient leur lot quotidien, et ils n’échappaient pas à l’ordre SS : punitions, brimades, torture pour les récalcitrants, expériences médicales dont ils étaient les cobayes. Cinquante-six ecclésiastiques morts dans ce camp, dont 47 Polonais, ont été béatifiés par l’Eglise catholique, mais de nombreux cas sont encore à l’étude. Dachau fut le théâtre d’atroces dérélictions, mais aussi d’élévations spirituelles qu’évoque avec émotion cet ouvrage poignant.
Jean Sévillia
La Baraque des prêtres. Dachau, 1938-1945, de Guillaume Zeller, Tallandier, 314 p., 20,90 €.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire