En
1991, Pierre Pujo répondait à une enquête du Centre Charlier sur
l’identité française et une éventuelle “identité européenne”. Ce texte
conserve toute sa valeur au moment où le projet de Nicolas Sarkozy de
créer un “ministère de l’Immigration et de l’Identité nationale” soulève
une controverse passionnée. Nous le publions ci-dessous.
QUESTION. - Y a-t-il une identité française ?
PIERRE PUJO. - L’identité française est l’ensemble des caractères qui résultent de l’appartenance à la nation française. La France ne s’identifie pas à une race : elle est historiquement un composé de races. Celtes, Gaulois, Romains, Germains se sont fondus au cours des siècles avec beaucoup d’autres dans un même creuset. Aujourd’hui, avec ses prolongements d’outre-mer, la France est pluriethnique. Qui refuserait aux Antillais, français depuis 350 ans, ou aux Mahorais, français depuis 1841, la qualité de Français, même s’ils ont la peau noire ?
La France ne s’identifie pas non plus à une religion, même si l’Église a joué un rôle capital dans notre histoire et si le catholicisme a profondément imprégné nos moeurs et notre civilisation. On peut être français et protestant, musulman ou juif.
La France ne s’identifie pas à une langue. L’aire de la langue française déborde de beaucoup nos frontières. Sur le sol national, des langues régionales, langue d’oc, provençal, breton, basque, sans parler des langues locales d’outre-mer, subsistent à côté du français.
Ce qui constitue l’appartenance à la nation française, c’est une longue histoire commune, avec ses heurs et ses malheurs. De par leur naissance, les Français sont les héritiers d’un immense capital matériel, intellectuel, spirituel, accumulé par les générations successives, qu’ils ont le devoir de maintenir et de développer. Les étrangers qui choisissent de devenir français s’engagent à assumer cet héritage et à remplir ce devoir.
Le miracle de la monarchie capétienne a été de rassembler tant de peuples divers pour en faire une nation. Sans roi la France se défait et la conscience française tend à s’estomper.
Q. – Y a-t-il une identité européenne ?
P.P. – Il existe une unité géographique de l’Europe, encore que, vers l’Est, ses limites soient incertaines. En dehors de cela, il n’y a en Europe que diversité d’histoires, de civilisations et d’intérêts. Les tentatives de réaliser l’unité européenne ont échoué, celles de Napoléon et de Hitler ont fait le malheur des peuples. Le communisme n’a même pas réussi à unifier entre eux les pays de l’Est où le nationalisme est plus vivace que jamais. L’Europe des douze est celle des technocrates et des marchands, sans plus. Elle n’a pas de bases politiques car il n’existe pas de nation européenne. Le grand marché unique prévu en 1993 exacerbe la concurrence, la compétition, les occasions de frictions entre les peuples. C’est se payer de mots que de parler de l’Europe comme d’une puissance économique mondiale. Les réalités politiques et économiques fondamentales demeurent les nations.
Persistance des nations
Q. – Les deux sont-elles compatibles ?
P.P. – Au Congrès de Vienne en 1815, Talleyrand se flattait d’être : « bon européen » parce qu’il défendait le principe de légitimité, facteur d’ordre et de paix en Europe après les bouleversements de Napoléon. On peut être conscient de son appartenance nationale et désireux de la sauvegarder et en même temps être “bon européen”. Mais cela ne saurait conduire à accepter un démantèlement de notre souveraineté nationale. Pour un trop grand nombre de nos politiciens, être “européen”, c’est vouloir confier à des autorités étrangères le soin de régler des problèmes, d’opérer des réformes qu’ils sont incapables de traiter sur le plan français. Cette attitude équivaut à une démission nationale.
Il est bon de travailler à rapprocher les peuples européens, à les faire coopérer dans tous les domaines où des accords réciproquement profitables peuvent être conclus. Mais il faut d’abord rendre la France plus forte sur tous les plans : économique, militaire, social, politique, diplomatique. Cela suppose une réforme intellectuelle qui tourne le dos aux funestes principes de 1789 tout comme un changement des institutions politiques, cause principale de tous les retards accumulés par notre pays.
Avec une France faible, l’Allemagne se lancera de nouveau dans la voie de dangereuses aventures. La France doit être assez forte pour maintenir l’équilibre européen, gage de paix. Au moment où les pays de l’Est commencent à secouer leurs chaînes, son rôle pourrait être considérable.
Par ailleurs, pour capitales que soient les questions européennes, la France ne saurait oublier la place importante qu’elle tient encore en Afrique. Pour cela aussi, elle doit conserver son identité et refuser de se laisser englober dans un ensemble européen où elle subirait la loi de l’étranger.
Pierre Pujo L’Action Française 2000 du 5 au 18 avril 2007
QUESTION. - Y a-t-il une identité française ?
PIERRE PUJO. - L’identité française est l’ensemble des caractères qui résultent de l’appartenance à la nation française. La France ne s’identifie pas à une race : elle est historiquement un composé de races. Celtes, Gaulois, Romains, Germains se sont fondus au cours des siècles avec beaucoup d’autres dans un même creuset. Aujourd’hui, avec ses prolongements d’outre-mer, la France est pluriethnique. Qui refuserait aux Antillais, français depuis 350 ans, ou aux Mahorais, français depuis 1841, la qualité de Français, même s’ils ont la peau noire ?
La France ne s’identifie pas non plus à une religion, même si l’Église a joué un rôle capital dans notre histoire et si le catholicisme a profondément imprégné nos moeurs et notre civilisation. On peut être français et protestant, musulman ou juif.
La France ne s’identifie pas à une langue. L’aire de la langue française déborde de beaucoup nos frontières. Sur le sol national, des langues régionales, langue d’oc, provençal, breton, basque, sans parler des langues locales d’outre-mer, subsistent à côté du français.
Ce qui constitue l’appartenance à la nation française, c’est une longue histoire commune, avec ses heurs et ses malheurs. De par leur naissance, les Français sont les héritiers d’un immense capital matériel, intellectuel, spirituel, accumulé par les générations successives, qu’ils ont le devoir de maintenir et de développer. Les étrangers qui choisissent de devenir français s’engagent à assumer cet héritage et à remplir ce devoir.
Le miracle de la monarchie capétienne a été de rassembler tant de peuples divers pour en faire une nation. Sans roi la France se défait et la conscience française tend à s’estomper.
Q. – Y a-t-il une identité européenne ?
P.P. – Il existe une unité géographique de l’Europe, encore que, vers l’Est, ses limites soient incertaines. En dehors de cela, il n’y a en Europe que diversité d’histoires, de civilisations et d’intérêts. Les tentatives de réaliser l’unité européenne ont échoué, celles de Napoléon et de Hitler ont fait le malheur des peuples. Le communisme n’a même pas réussi à unifier entre eux les pays de l’Est où le nationalisme est plus vivace que jamais. L’Europe des douze est celle des technocrates et des marchands, sans plus. Elle n’a pas de bases politiques car il n’existe pas de nation européenne. Le grand marché unique prévu en 1993 exacerbe la concurrence, la compétition, les occasions de frictions entre les peuples. C’est se payer de mots que de parler de l’Europe comme d’une puissance économique mondiale. Les réalités politiques et économiques fondamentales demeurent les nations.
Persistance des nations
Q. – Les deux sont-elles compatibles ?
P.P. – Au Congrès de Vienne en 1815, Talleyrand se flattait d’être : « bon européen » parce qu’il défendait le principe de légitimité, facteur d’ordre et de paix en Europe après les bouleversements de Napoléon. On peut être conscient de son appartenance nationale et désireux de la sauvegarder et en même temps être “bon européen”. Mais cela ne saurait conduire à accepter un démantèlement de notre souveraineté nationale. Pour un trop grand nombre de nos politiciens, être “européen”, c’est vouloir confier à des autorités étrangères le soin de régler des problèmes, d’opérer des réformes qu’ils sont incapables de traiter sur le plan français. Cette attitude équivaut à une démission nationale.
Il est bon de travailler à rapprocher les peuples européens, à les faire coopérer dans tous les domaines où des accords réciproquement profitables peuvent être conclus. Mais il faut d’abord rendre la France plus forte sur tous les plans : économique, militaire, social, politique, diplomatique. Cela suppose une réforme intellectuelle qui tourne le dos aux funestes principes de 1789 tout comme un changement des institutions politiques, cause principale de tous les retards accumulés par notre pays.
Avec une France faible, l’Allemagne se lancera de nouveau dans la voie de dangereuses aventures. La France doit être assez forte pour maintenir l’équilibre européen, gage de paix. Au moment où les pays de l’Est commencent à secouer leurs chaînes, son rôle pourrait être considérable.
Par ailleurs, pour capitales que soient les questions européennes, la France ne saurait oublier la place importante qu’elle tient encore en Afrique. Pour cela aussi, elle doit conserver son identité et refuser de se laisser englober dans un ensemble européen où elle subirait la loi de l’étranger.
Pierre Pujo L’Action Française 2000 du 5 au 18 avril 2007
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