Le 15 décembre 533, à Constantinople, l'empereur Justinien donne force de loi aux Pandectes (d'un mot grec qui signifie «qui contient tout»). Ce volumineux recueil de lois est plus connu sous son nom latin Digeste.
C'est l'oeuvre majeure de Justinien et l'héritage le plus durable de Rome. Il inspire encore très largement notre droit.
Jean-François Zilbermann.
Un despote légiste
Très cultivé, passionné de théologie et de droit, soucieux aussi de
consolider son autorité, l'empereur d'Orient a voulu après son avènement
mettre de l'ordre et de la clarté dans le droit chaotique élaboré par
Rome au fil d'un millénaire.
Dès 528, Justinien confie à l'avocat Tribonien le soin de superviser cette tâche gigantesque.
Dans un premier temps, la commission de spécialistes présidée par Tribonien regroupe des codes connus sous le nom de Grégorien, Hermogénien et Théodosien
ainsi que des anciennes constitutions impériales. Elle en expurge les
contradictions et les vieilleries et le résultat est un code de lois
publié en 529 sous le nom de Code Justinien.
Mais l'empereur ne s'en tient pas là. Il demande à Tribonien de s'attaquer au droit privé et à la jurisprudence.
La commission dépouille 1500 livres de droit et pioche dans l'oeuvre
de quelques grands jurisconsultes de l'époque classique. Elle adapte les
prescriptions aux conditions du moment, dans l'empire romain
d'Orient...
Cette compilation débouche enfin sur la publication du Digeste. C'est un recueil de 50 livres divisés en titres, chacun étant consacré à un sujet de droit (le Code Civil napoléonien ne se présentera pas autrement).
Les juristes complètent leur travail par la publication, la même année, des Institutes.
Il s'agit d'un manuel à l'usage des étudiants en droit. Ajoutons pour
être complet la publication dans les années suivantes des Novelles, c'est-à-dire des mises à jour et des lois récentes.
Un héritage durable
L'ensemble du Code Justinien (lois), du Digeste (jurisprudence civile), des Institutes (manuel de droit) et des Novelles (mises à jour) constitue le «droit justinien».
Oublié dans l'anarchie des siècles suivants, le droit justinien a été
remis à l'honneur au XIe siècle dans les cercles savants d'Italie. Il
est pour une bonne part à l'origine du Code Civil napoléonien et de nos propres lois !
Quelques formules savoureuses sont passées à la postérité. Par exemple : «Pater autem is est quem nuptiae demonstrant» (Le père est celui que le mariage désigne ; autrement dit, en cas de filiation douteuse d'un enfant, le père est réputé être le conjoint de la mère).
Notons que Justinien, son initiateur, fut par ailleurs un conquérant
heureux... et le dernier des grands empereurs romains ! Il est mort en
565, soit cinq ans avant la naissance de Mahomet dans une obscure oasis
arabe.
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