jeudi 15 août 2013

25 juin 1950 Début de la guerre de Corée

Dans la nuit du 24 au 25 juin 1950, à 4 heures du matin, 600.000 soldats nord-coréens franchissent la ligne de démarcation du 38e parallèle qui sépare leur État, sous gouvernement communiste, de la Corée du Sud, sous régime pro-occidental.
C'est le début de la guerre de Corée. Trois jours plus tard, Séoul, capitale de la Corée du Sud, tombe entre les mains des communistes. Il va en résulter le conflit le plus meurtrier depuis la capitulation de l'Allemagne et du Japon, avec même la menace d'un bombardement nucléaire.
André Larané

Une Nation, deux États
Colonie japonaise depuis 1910, l'antique royaume de Corée a été libéré conjointement par les Soviétiques et les Américains en 1945. Comme convenu à la conférence de Yalta, les deux vainqueurs partagent le pays en deux zones d'occupation avec une séparation sur le 38e parallèle. Mais la guerre froide, qui éclate presque aussitôt, fait de cette ligne artificielle un lieu de grande tension internationale.
L'ONU entérine la création de deux États distincts en 1948 :
- La République démocratique populaire de Corée (Corée du nord, capitale : Pyongyang) est dirigée avec une poigne de fer par le secrétaire général du Parti des travailleurs (communiste), Kim Il-sung (38 ans), valeureux résistant à l'occupation japonaise, charismatique et au demeurant bel homme ; il s'empresse de réaliser une grande réforme agraire et de donner la terre aux paysans qui la travaillent ; il réalise aussi une sévère épuration parmi les anciens collaborateurs de l'occupant japonais. 
- La République de Corée, au sud (capitale : Séoul), est dirigée de façon au moins aussi autoritaire par Syngman Rhee (75 ans) ; vieil héros de l'indépendance, c'est aussi un homme vénal et corrompu, incompétent, dont le principal atout aux yeux de ses protecteurs américains est de parler l'anglais ; il se garde de procéder à une quelconque chasse aux anciens collaborateurs.
Là-dessus, Staline annonce l'évacuation de ses troupes et demande aux Américains d'en faire autant. Ceux-ci s'exécutent, ne laissant en Corée du Sud que quelques centaines de «conseillers». Les Soviétiques, quant à eux, réarment à la hâte les Nord-Coréens communistes.
Vive réaction américaine
Le jour même de l'attaque nord-coréenne, le président américain Harry Truman saisit l'Organisation des Nations Unies (ONU). La jeune instance internationale joue sa crédibilité sur ce conflit. Aussi le Conseil de sécurité ne se fait-il pas prier pour condamner l'agression et annoncer la mise en place d'une force internationale pour rétablir la paix dans la région.
Cette décision a été rendue possible par l'absence des Soviétiques qui, depuis plusieurs mois, boycottaient le Conseil de sécurité...
Un corps expéditionnaire sous les ordres du général Douglas MacArthur (70 ans) débarque dans la péninsule et préserve de l'invasion une tête de pont à Pusan, au sud-est. Le général lance sa contre-offensive le 15 septembre, reprend Séoul le 2 octobre, repousse les envahisseurs vers le nord, franchit le 38e parallèle et atteint en un mois la frontière avec la Chine.
Contre-offensive communiste
Dans une situation désespérée, les Nord-Coréens reçoivent l'appui d'innombrables «volontaires» venus de Chine où une révolution communiste a triomphé quelques mois plus tôt. Six armées chinoises d'un total de 180.000 hommes franchissent le Yalou, le fleuve qui sépare la Corée de la Chine.
Le 26 novembre 1950, c'est au tour des Nord-Coréens et de leurs alliés chinois de reprendre l'offensive.
Incapable de faire face à ces brusques vagues d'assaut, le corps expéditionnaire de l'ONU doit se replier au sud du 38e parallèle et au prix de nombreux efforts arrive à se rétablir sur l'ancienne ligne de démarcation. La Chine est condamnée par l'ONU.
Néanmoins, le général MacArthur ne se satisfait pas de cette condamnation diplomatique et réclame une intervention aérienne contre les bases arrières des Nord-Coréens situées en Mandchourie, de l'autre côté de la frontière avec la Chine. Dans les médias, il recommande rien moins que de larguer vingt ou trente bombes atomatiques sur la Mandchourie pour établir une barrière radioactive qui coupe la péninsule coréenne de la Chine.
Le monde tremble. Dans les villes d'Occident, les manifestants envahissent les rues et font signer l'«appel de Stockholm». Cette pétition d'inspiration communiste, rédigée sous l'égide du savant Frédéric Joliot-Curie, a été lancée le 19 mars 1950, peu avant le déclenchement du conflit de Corée.
Au grand soulagement de l'opinion internationale, le président Truman rappelle le turbulent général le 11 avril 1951 et le remplace par le général Matthew Ridgway (56 ans) qui s'en tiendra sagement à une guerre de positions conventionnelle.
«Ridgway-la-Peste» 
Commandant suprême des forces alliées en Europe en remplacement d'Eisenhower, de 1952 à 1953, Ridgway a été accusé (à tort) par la propagande communiste d'avoir utilisé des armes bactériologiques en Corée. Il est affublé du surnom «Ridgway-la-Peste».

La guerre de Corée, 1950-1953 (document : Alain Houot, pour Herodote.net)

Un conflit très meurtrier
Des négociations de paix s'engagent entre les deux parties. Elles traînent en longueur et c'est seulement la mort de Staline, protecteur des Nord-Coréens, qui va débloquer le processus.
Un armistice est signé quatre mois après sa mort, le 27 juillet 1953, à Pammunjon, sur le 38e parallèle. Il est toujours en vigueur dans l'attente d'un hypothétique traité de paix. La division de la Corée est confirmée par la conférence de Genève (1954). Ravagée par la guerre et dirigée jusqu'en 1960 par l'ineffable Syngman Rhee, la Corée du Sud fait figure de grand perdant. Jusqu'en 1974, d'ailleurs, elle paraît économiquement en retard sur sa soeur ennemie, la Corée du Nord.
Vite oubliée, la guerre de Corée reste le conflit le plus meurtrier de la deuxième moitié du XXe siècle. On évalue le nombre de victimes à 38.500 dans les forces onusiennes, à 70.000 dans les forces sud-coréennes et à 2 millions chez les combattants nord-coréens et chinois. À cela s'ajoutent les civils victimes des bombardements, des disettes et des épidémies (peut-être trois millions de victimes en plus des combattants).
Cette guerre illustre la stratégie des deux superpuissances (États-Unis et URSS) pendant la «guerre froide» : maintenir la tension localement en évitant qu'elle ne débouche sur un conflit généralisé. Mais les élucubrations du général MacArthur ont montré que cette stratégie n'était pas sans risque. Les tensions extrêmes occasionnées par la guerre de Corée ont par ailleurs contribué à la «chasse aux sorcières» aux États-Unis.

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