«
Tout finira pas disparaître – souffrances, passions, sang, famine et la
mort en masse. L'épée disparaîtra, mais les étoiles brilleront encore
quand il ne restera même plus une ombre de nos corps et de nos actes sur
la Terre. Pas un homme ne l'ignore. Alors pourquoi ne voulons-nous pas
diriger nos regards vers cela ? Pourquoi ? » (Mikhaïl Boulgakov, La Garde Blanche, Moscou, 1923/24)
L'histoire est généralement écrite par les vainqueurs. Les vaincus des affrontements historiques restent nuets, parce qu'ils ont été annihilés et, même, quand, plus tard, ils finissent par prendre la parole ou par écrire, on ne prête plus attention à eux. C'est le sort qui a été infligé au “mouvement blanc” ou à la “contre-révolution blanche” en Russie, qui a tenté, au cours des années de guerre civile, de la fin de 1917 jusqu'à octobre 1920, de s'opposer à la prise du pouvoir par les communistes (les bolcheviques).
L'histoire est généralement écrite par les vainqueurs. Les vaincus des affrontements historiques restent nuets, parce qu'ils ont été annihilés et, même, quand, plus tard, ils finissent par prendre la parole ou par écrire, on ne prête plus attention à eux. C'est le sort qui a été infligé au “mouvement blanc” ou à la “contre-révolution blanche” en Russie, qui a tenté, au cours des années de guerre civile, de la fin de 1917 jusqu'à octobre 1920, de s'opposer à la prise du pouvoir par les communistes (les bolcheviques).
Les
Blancs avaient réussi à enregistrer d'étonnants succès militaires et à
lancer des offensives qui ne se sont enlisées qu'à proximité de Moscou
ou de Petrograd. Sous le commandement d'officiers de l'Armée du Tsar,
les troupes blanches, composées de volontaires anti-bolcheviques, se
sont regroupées, après le coup de force de Lénine, en plusieurs groupes
d'armées : ceux du Nord-Ouest sous les ordres du Général Youdenitch,
ceux de Sibérie sous l'Amiral Koltchak et ceux du Sud, sous les ordres
du Général Dénikine d'abord, puis après son échec et sa démission, sous
le Général Wrangel.
C'était
au départ de petites unités, peu nombreuses — par ex. l'armée des
volontaires du Sud ne comptait pas plus de 3.000 hommes en février 1918,
mais ses rangs se sont étoffés progressivement jusqu'en 1919, pour
monter à plusieurs centaines de milliers d'hommes — mais elles ne se
sont pas recrutées, comme l'affirment péremptoirement les légendes de la
gauche, dans les rangs des “réactionnaires et des grands propriétaires
terriens”.
Dans son roman Le Docteur Jivago,
Boris Pasternak décrit l'attaque d'une unité blanche contre des
partisans bolcheviques, chez qui Pasternak, médecin, avait été contraint
de servir. Qui étaient ces Blancs ? Jivago dit reconnaître dans les
visages des attaquants les traits des hommes de sa propre caste sociale :
« C'était, pour la plupart, des garçons et de jeunes hommes issus de la bourgeoisie de la capitale, flanqués de quelques hommes plus âgés, qui avaient été enrôlés à titre de réservistes. Mais le gros de la troupe était composé de jeunes, d'étudiants, qui n'avaient derrière eux qu'un seul semestre à l'université, ou de lycéens de la 8ième classe qui venaient tout juste de se porter volontaires. Le Docteur (Jivago) n'en connaissait aucun ; mais leurs visages lui paraissaient familiers, comme s'il les avait déjà vu auparavant. Beaucoup lui rappelaient d'anciens camarades de classe... Il croyait déjà en avoir rencontré d'autres au théâtre ou en déambulant dans les rues. Il se sentait apparentés à leurs visages impressionnants, sympathiques. Leur jeunesse et leur haute idée du devoir avaient fait naître en eux un profond enthousiasme, ce qui les avait conduit à l'héroïsme, au mépris du danger. Ils fonçaient en avant, en ordre de bataille, droits et fiers, plus intrépides que les officiers de la Garde ; ils se riaient du danger et ne cherchaient pas à l'éviter en courant plus vite. Le docteur était sans arme, couché dans l'herbe, et observait le déroulement du combat. Il était de cœur aux côtés de ces jeunes gens qui marchaient vers la mort en héros. Presque tous appartenaient à des familles spirituellement proches de lui. Ils avaient été éduqués comme lui, ils étaient proches de lui par leur attitude éthique... ».
Si
Pasternak, dans ce passage, dresse un monument aux classes moyennes
russes, comme contrepoids au bolchevisme, d'autres témoins contemporains
confirment ses sentiments. Un officier, qui a participé à la guerre
civile en servant sous les ordres de l'Amiral Koltchak, écrivit, bien
des années plus tard, que l'officier de l'armée impériale russe était «
psychologiquement plus proche des simples paysans-soldats que les
intellectuels socialistes ou communistes » (cf. Fedotoff-White, The Growth of the Red Army).
La
plupart des chefs militaires de la contre-révolution blanche venaient
de milieux socialement très modestes. Le Général Anton Ivanovitch
Dénikine — Commandant-en-chef de l'armée des volontaires dans le Sud de
la Russie — était issu d'une famille de serfs. Son père, non libre à sa
naissance, était devenu, après la libération des paysans, officier
subalterne. Dénikine insistait toujours pour dire qu'il était devenu
général de l'armée impériale russe par ses propres efforts et non pas
par naissance, fortune ou relations. Il est intéressant de noter que
Dénikine n'était pas un monarchiste acharné. Il ne tolérait pas la
propagande monarchiste dans ses troupes et utilisait plutôt la formule
de “la Grande Russie, unie et indivisible”, qu'il s'agissait d'arracher
aux griffes des bolcheviques.
Tout
comme Dénikine, l'Amiral Koltchak était un officier de métier sans
fortune, et aussi un explorateur polaire bien connu à son époque ; il
sera trahi par les légionnaires tchèques de l'ancienne armée du Tsar et
livré aux communistes qui l'exécuteront. Le seul baron parmi les chefs
militaires blancs était le Général Piotr Nikolaïevitch Wrangel, mais il
n'avait pas non plus de fortune personnelle. Son père était directeur
d'une compagnie d'assurances à Rostov sur le Don. Sa famille ne
possédait qu'une propriété foncière très modeste. Au départ, Wrangel
aurait dû devenir ingénieur des mines. Il a changé ses plans et opté
pour la carrière d'officier.
Notre objectif, dans cet article, n'est pas de relater les exploits militaires, les victoires et les défaites des Blancs. La critique du mouvement blanc
a été déjà maintes fois formulée : les chefs de l'armée blanche,
souligne-t-on souvent, étaient trop “impolitiques” et ne comprenaient
pas la dimension idéologique de leur combat contre les communistes. Les
Blancs opéraient depuis la périphérie contre le centre, fermement aux
mains des bolcheviques et de Lénine. Les actions des Blancs étaient
insuffisamment coordonnées voire manquaient totalement de coordination.
L'orientation “grande-russe” du mouvement blanc suscita des conflits
avec les mouvements anticommunistes non russes visant l'indépendance des
nations périphériques du Caucase, de l'Asie centrale et des Pays
Baltes.
Quoi
qu'il en soit, on peut poser la question aujourd'hui, après tant de
décennies, après que les acteurs de l'époque soient tous descendu dans
la tombe : une victoire blanche sur les Rouges dans la Russie d'alors
aurait-elle préservé l'humanité d'une succession de souffrances inutiles
? Les Russes et les ressortissants des autres nations tombées
ultérieurement sous la coupe des Soviétiques auraient-ils échappé au
goulag ? Il est même fort probable que bon nombre de communistes,
massacrés pendant les grandes purges de Staline, épurés, auraient plutôt
survécu sous un régime blanc, non communiste, que sous l'emprise de
leur propre idéologie.
Les
communistes et les historiographes de gauche évoquent souvent la
“terreur blanche”, qui aurait fait rage pendant la guerre civile.
Indubitablement, des excès ont été commis dans les deux camps, chez les
Blancs comme chez les Rouges : c'est le lot de toutes les guerres
civiles. Mais la terreur, au départ, n'a pas été déclenchée par les
Blancs, qui ne possédaient pas d'instruments de terreur, à l'instar de
la Tcheka, créée par Lénine, c'est-à-dire la “Commission extraordinaire
pour la lutte contre la contre-révolution”, qui a précédé la GPU, le
NKVD et le KGB. Beaucoup d'officiers blancs étaient choqués par
l'extension de l'anarchie, de la brutalité, par la multiplication
exponentielle des assassinats pendant la guerre civile russe. Ainsi,
l'un des principaux commandeurs des troupes blanches, le Colonel
Drosdovski, écrivit le 25 mars 1918 dans son journal :
« Comme les hommes sont détestables quand ils ont peur, ils sont alors sans la moindre dignité, sans style, ils deviennent vraiment un peuple de canailles qui ne mérite plus que le mépris : ils sont sans vergogne, sans pitié, ils méprisent scandaleusement ceux qui sont sans défense ; dans les prisons, ils ne connaissent plus de retenue dans leur déchaînement et leur méchanceté, mais devant les plus forts, ils sont lâches, serviles, rampants... ».
La Crimée, dernier bastion
Après
l'échec de toutes les tentatives blanches de marcher sur Moscou, les
forces anticommunistes n'avaient plus qu'un dernier refuge au début de
1920 : la Crimée, presqu'île de la Mer Noire. C'est justement dans ce
dernier bastion, dans cette “Île de Crimée”, qu'on a pu observer
l'ébauche d'une alternative russe au communisme totalitaire. Homme de
droite, le Général Baron Wrangel, qui prit le commandement en Crimée
après la défaite et la retraite des troupes blanches, a montré qu'il
n'était pas seulement un chef d'armée capable, mais aussi un chef
politique. C'est lui qui a dit qu'il fallait « mener une politique de
droite avec une main de gauche ». Wrangel déclara que « la Russie ne
pouvait plus être libérée par l'effet d'une campagne victorieuse des
Blancs et par la prise de Moscou, mais par l'organisation politique
d'une parcelle — même modeste — de terre russe où régnerait un ordre,
offrant des conditions de vie telles qu'elles séduiraient les hommes
croupissant sous le joug des Rouges ».
Caractéristique de la position politique de ce général blanc est l'appel qu'il a lancé en juin 1920 et qui mérite d'être cité in extenso :
« Écoute, ô peuple de Russie ! Pourquoi combattons-nous ? Pour la foi qu'on nous a souillée et pour les autels que l'on nous a profanés. Pour la libération du peuple russe du joug des communistes, des vagabonds et des criminels qui ont complètement ruiné la Sainte Russie. Pour la fin de la guerre civile. Pour que les paysans, qui ont acquis la terre qu'ils cultivent de leurs mains, puissent poursuivre leur travail en paix. Pour que le travailleur honnête ne doive pas végéter misérablement au soir de sa vie. Pour qu'une vraie liberté et une vraie justice puissent régner en Russie. Pour que le peuple russe puisse choisir lui-même, par élection, son souverain. Aide-moi, ô peuple russe, à sauver la patrie ! ».
Mis
à part le terme “souverain”, qui pourrait être mésinterprété, un
“souverain” que le peuple russe serait appelé à élire, nous avons
affaire ici à un programme qui respecte les critères de l'État de droit,
mais dans une optique conservatrice. Mais la formule de “souverain”
prend une autre connotation quand on la découvre dans le texte original
russe : en effet, ce texte utilise l'expression de “khosyaïn” qui,
traduit, signifie aussi “maître de maison”, “hôte” et “chef naturel”.
Wrangel a souligné à maintes reprises qu'il ne s'envisageait nullement
comme le “khosyaïn” de la future Russie. Le Général blanc a formulé ce
qu'il envisageait comme forme étatique pour la future Russie non
communiste :
« De l'autre côté du front, au Nord, règnent l'arbitraire, l'oppression, l'esclavage. On peut être d'avis différent quant à l'opportunité de telle ou de telle forme d'Etat. On peut être un républicain, un socialiste ou même un marxiste extrême et considéré malgré tout que la dite “république des soviets” est l'exemple parfait d'un despotisme calamiteux, qui n'a encore jamais existé dans l'histoire et sous le knout duquel non seulement la Russie mais aussi la nouvelle classe soi-disant au pouvoir, le prolétariat, va périr. Car cette classe, elle aussi, comme tout le reste de la population, a été mise au tapis ».
Cette
analyse du Général Wrangel date de 1920 mais, après 70 ans, elle reste
étonnamment pertinente et actuelle. Wrangel a dit, dans le programme
alternatif qu'il opposait au bolchevisme :
« Bien-être et liberté pour le peuple ; introduction des sains principes de l'ordre civil dans la vie russe, c'est-à-dire de principes étrangers à la haine entre classes ou entre nationalités ; union de toutes les forces de la Russie et poursuite du combat militaire et idéologique jusqu'au moment tant attendu où le peuple russe pourra décider lui-même comment la Russie devra dans l'avenir être gérée ».
Le
Général a évoqué “l'ordre minimal” qu'il voulait instaurer dans les
territoires qu'il viendrait à contrôler, « afin que le peuple, s'il le
souhaite, puisse s'assembler librement et dire sa volonté en toute
liberté ». À quoi le commandeur blanc ajoutait : « Mes préférences
personnelles n'ont aucune importance. Au moment où j'ai pris le pouvoir
entre les mains, j'ai mis à l'arrière-plan mes affinités personnelles à
l'endroit de telle ou telle forme étatique. Je m'inclinerai sans
condition devant la voix de la Terre russe ».
Face
au monarchiste V. Choulguine, Wrangel énonçait les objectifs de sa
politique : il voulait, disait-il, sur le territoire de la Crimée, « sur
ce petit bout de terre, rendre la vie possible... En un mot, (...)
montrer au reste de la Russie : vous avez là le communisme, c'est-à-dire
la faim et la police secrète, et, ici, chez nous, vous avez une réforme
agraire, nous avons introduit l'administration locale autonome (la semstvo),
nous avons créé l'ordre et rendu la liberté possible... Je dois gagner
du temps, afin que tous le sachent et voient que l'on peut vivre en
Crimée. Alors il sera possible d'aller de l'avant... Alors les
gouvernements que nous prendront aux bolcheviques deviendront pour nous
une source de puissance... ».
L'héritage de Stolypine
Dans
sa réforme agraire et dans la concrétisation de l'administration
autonome, le Général Wrangel s'est inspiré du grand réformateur
conservateur de l'époque du Tsar, le Premier Ministre Piotr Arcadéëvitch
Stolypine, victime en 1911 à Kiev d'un attentat perpétré par un
révolutionnaire, qui était aussi au service de l'Okhrana, la police
secrète du régime tsariste. L'un des plus proches conseillers politiques
de Wrangel venait de l'entourage immédiat de Stolypine, c'était
Alexandre Vassiliévitch Krivochéine, mort en 1921. Krivochéine était
d'origine paysanne. Son grand-père l'était. Son père était devenu
Lieutenant-Colonel dans l'armée. Sous Stolypine, Krivochéine s'était
penché sur les problèmes de la réforme agraire. Il voulait surtout
renforcer économiquement et socialement les positions des paysans russes
libres, aisés et industrieux. Dans un certain sens, Wrangel a poursuivi
les réformes de Stolypine en Crimée. L'objectif de Stolypine, avant sa
mort violente en 1911, avait été de couper l'herbe sous les pieds des
révolutionnaires en pratiquant une politique de la propriété
intelligente et modérée et en créant une caste moyenne solide composée
de paysans.
Le deuxième conseiller important de Wrangel, qui fut de facto son “ministre des affaires étrangères”, était Piotr Berngardovitch Struve.
Au départ, Struve était marxiste, mais redevint plus tard orthodoxe, ce
qui contribua à faire de lui un conservateur et un nationaliste russe
éclairé. Struve a défendu la cause de Wrangel et celle de la “Crimée
blanche” auprès des alliés occidentaux, les Britanniques et les
Français, que devaient évidemment solliciter les “forces combattantes de
Russie méridionale”. Mais les négociations avec les Français et les
Britanniques ont été décourageantes et humiliantes pour les Blancs :
Paris posait des conditions pour accorder son aide militaire et pour
livrer des vivres, notamment essayait d'obtenir de Wrangel qu'il
promette de rembourser les dettes que l'Empire russe avait contractées
auprès de la France. Les Britanniques en avaient assez de la guerre
civile russe dès 1919. Ils menaçaient Wrangel de mettre un terme à
toutes leurs aides et d'abandonner les Russes anti-communistes à leur
sort, si l'armée blanche osait lancer une offensive contre les
Soviétiques.
Beaucoup
d'officiers de l'armée blanche soupçonnaient alors les puissances
occidentales, et surtout les Britanniques, de n'avoir pas d'autre
intérêt que de laisser les Russes s'entretuer dans une longue guerre
fratricide et de ne pas vouloir accorder aux Blancs une aide
substantielle, car, disaient-ils, l'Occident ne voulait pas d'un régime
fort non communiste en Russie.
Dans
les premiers jours de novembre 1920, les Rouges attaquèrent avec des
forces nettement supérieures en nombre l'ultime bastion “Crimée”.
Wrangel, à ce moment-là, venait encore de se rendre utile à l'Occident
ingrat : pendant la guerre polono-soviétique, il a mobilisé en face de
lui des troupes rouges si bien qu'en été 1920, l'armée rouge, aux portes
de Varsovie, fut contrainte, faute d'effectifs suffisants, à reculer et
à se replier, lors du fameux “miracle de la Vistule”.
Après
la fin de la guerre polono-soviétique, le gouvernement de Lénine lança
immédiatement toutes les forces rouges disponibles contre la Crimée. La
percée soviétique à travers l'isthme de Perekop décida du sort de
Wrangel et des Blancs : toutefois, le dernier des commandeurs blancs
réussit encore à sauver 145.693 personnes, soldats et civils, en les
embarquant sur des navires qui mirent le cap sur Constantinople. C'est
ainsi que commença la première grande émigration russe. Dans une
dernière allocution prononcée sur le sol russe devant des
élèves-officiers, Wrangel déclara le 1er novembre 1920 à Sébastopol :
« Abandonnée par le monde entier, notre armée exsangue quitte la patrie, après avoir combattu non pas seulement pour notre cause russe, mais pour la cause du monde entier. Nous partons pour l'étranger, non pas comme des mendiants qui tendent la main, mais avec la tête haute, conscients d'avoir accompli notre devoir jusqu'au bout ».
Dans un entretien accordé au journal Velikaïa Rossiya (La Grande Russie), qui paraissait sur le “territoire libre”, Wrangel avait déclaré le 5 juillet 1920 :
« L'histoire honorera un jour le sacrifice et les efforts des hommes et des femmes russes en Crimée, car, dans la solitude la plus complète, sur le dernier lambeau libre de la Terre russe, ils ont combattu pour le bonheur de l'humanité et pour les lointains bastions de la culture européenne. La cause de l'armée russe de Crimée, c'est de se constituer en un grand mouvement de libération. Nous combattons une guerre sainte pour la liberté et pour le droit ».
Et,
à l'époque, Wrangel fut prophétique : tant qu'il n'y aura pas en Russie
une « véritable puissance étatique », de quelque orientation que ce
soit, une puissance reposant sur « l'aspiration pluriséculaire de
l'humanité à vivre sous une loi, à bénéficier de droits personnels et de
propriété [et sur] le respect des obligations internationales », il n'y
aura pas de véritable paix en Europe.
Émigré
en Yougoslavie, Wrangel est mort en 1928. Son corps fut enseveli dans
la petite église russe de Belgrade. Quand les communistes prennent le
pouvoir en Yougoslavie, la pierre tombale et l'inscription sont
recouvertes d'un tableau.
► Carl Gustav Ströhm, 1989. (article tiré de Criticón n°115, sept.-oct. 1989)
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