La vie de Jean François-Paul de Gondi, cardinal de Retz
(1613-1679), fut une succession d’intrigues, de complots,
de conspirations et de luttes pour le pouvoir. Libertin, lui qui se
décrivait comme « l’âme peut-être la moins ecclésiastique qui fût dans l’univers »,
n’en rechercha pas moins avec ardeur le chapeau de cardinal. A défaut
d’avoir eu la destinée d’homme d’Etat dont il rêvait, c’est surtout
comme écrivain que sa renommée a traversé les siècles.
Faire une loi et ne pas la faire exécuter, c’est autoriser la chose qu’on veut défendre.
Ses Mémoires dans lesquelles il décrit les péripéties de sa vie
agitée sont une ode à l’esprit de révolte. Les portraits des grands de
son temps et le récit de ses aventures écrits dans un style éblouissant
en font un des plus beaux textes de la littérature française du XVIIe
siècle.
Le cardinal de Retz, dresse de son ennemi Mazarin, un portrait au vitriol saisissant, bien que fort peu objectif :
«Sa naissance était basse et son enfance honteuse. Au sortir du
Colisée, il apprit à piper, ce qui lui attira des coups de bâtons d’un
orfèvre de Rome appelé Moreto. Il fut capitaine d’infanterie en
Valteline ; et Bagni, qui était son général, m’a dit qu’il ne passa dans
sa guerre, qui ne fut que de trois mois, que pour un escroc. Il eut la
nonciature extraordinaire en France, par la faveur du Cardinal Antoine,
qui ne s’acquérait pas, en ce temps-là, par de bons moyens. Il plut à
Chavigny par ses contes libertins d’Italie, et par Chavigny à Richelieu,
qui le fit cardinal, par le même esprit, à ce que l’on a cru, qui
obligea Auguste à laisser à Tibère la succession de l’Empire. La pourpre
ne l’empêcha pas de demeurer valet sous Richelieu. […] »
Né à Montmirail dans une famille d’origine italienne, Jean
François-Paul de Gondi, est appelé à succéder à son oncle, archevêque de
Paris. Il fait de brillantes études théologiques, tout en cultivant son
penchant pour les histoires de conspirateurs et de héros. Très tôt, il
est mêlé aux intrigues politiques.
Il conspire contre Richelieu aux côtés du comte de Soissons en 1636.
Il dut attendre la mort du cardinal et de Louis XIII pour être nommé
coadjuteur de l’archevêque de Paris par la régente Anne d’Autriche, en
1643. Mais c’est la période de la Fronde (1648-1651) avec ses troubles
et ses renversements d’alliances qui va lui permettre de donner toute sa
mesure d’agitateur et de conspirateur. Au premier rang des frondeurs
contre Mazarin en 1648, il tente de prendre la tête des émeutiers
parisiens. Il obtient son chapeau de cardinal au début des années 1650
et s’allie à la reine Anne d’Autriche contre le prince de Condé.
Le retour de Mazarin au pouvoir sonne la fin de ses ambitions.
Emprisonné au château de Nantes, il s’évade, part Espagne, s’exile en
Italie puis en Flandre avant d’accepter de démissionner du siège
d’archevêque en 1662, qui lui revenait en droit depuis la mort de son
oncle, contre l’abbaye de Saint-Denis et l’autorisation de revenir en
France.
La fin de sa vie est consacrée à la rédaction de ses Mémoires. Il
meurt le 24 août 1679, après s’être retiré dans son abbaye de
Saint-Denis où il sera inhumé. Louis XIV interdit qu’on y dresse un
monument, ce qui évitera d’ailleurs la profanation de sa tombe en 1793.
Ses Mémoires publiées en 1717, si elles sont loin d’être impartiales,
n’en révèlent pas moins un écrivain brillant, une des grandes plumes de
son siècle et de la littérature française.
Les premières lignes des Mémoires :
« Madame, quelque répugnance que je puisse avoir à vous donner
l’histoire de ma vie, qui a été agitée de tant d’aventures différentes,
néanmoins, comme vous me l’avez commandé, je vous obéis, même aux dépens
de ma réputation. Le caprice de la fortune m’a fait honneur de beaucoup
de fautes ; et je doute qu’il soit judicieux de lever le voile qui en
cache une partie. Je vais cependant vous instruire nuement et sans
détour des plus petites particularités, depuis le moment que j’ai
commencé à connaître mon état ; et je ne vous cèlerai aucunes des
démarches que j’ai faites en tous les temps de ma vie. Je vous supplie
très humblement de ne pas être surprise de trouver si peu d’art et au
contraire tant de désordre en toute ma narration, et de considérer que
si, en récitant les diverses parties qui la composent, j’interromps
quelquefois le fil de l’histoire, néanmoins je ne vous dirai rien
qu’avec toute la sincérité que demande l’estime que je sens pour vous.
Je mets mon nom à la tête de cet ouvrage, pour m’obliger davantage
moi-même à ne diminuer et à ne grossir en rien la vérité. La fausse
gloire et la fausse modestie sont les deux écueils que la plupart de
ceux qui ont écrit leur propre vie n’ont pu éviter. […] »
Bibliographie :
Les Mémoires du cardinal de Retz sur wikisource
Larousse
BERTIÈRE Simone, La vie du cardinal de Retz, Paris, Ed. de Fallois, 1990, réédité en Livre de poche.
LORRIS Pierre-Georges Lorris, Le cardinal de Retz. Un agitateur au XVIIème siècle, Paris, Albin Michel, 1956.
Les Mémoires du cardinal de Retz sur wikisource
Larousse
BERTIÈRE Simone, La vie du cardinal de Retz, Paris, Ed. de Fallois, 1990, réédité en Livre de poche.
LORRIS Pierre-Georges Lorris, Le cardinal de Retz. Un agitateur au XVIIème siècle, Paris, Albin Michel, 1956.
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