vendredi 23 décembre 2011

L’Armistice de 1940, une faute tragique Projet de préface

Au moment où en Vème République déliquescente  les Français sont, à nouveau, plongés dans le malheur, il est utile de leur rappeler la part qu’ils prirent en IIIème République défaillante, à compromettre eux-mêmes, leur destin.
A cet égard, fort opportunément, Jacques Bourdu pose une question qui s’avère décisive par les réponses qu’elle suscite  car celles-ci  évoquent les conditions  de la survie nationale. Pour l’auteur de ce texte passionnant l’armistice de 1940 a bien été une faute tragique puisqu’il a renoncé à la forme interrogative. Au débat, il apporte une solide argumentation qui devrait dissiper toute perplexité. Mais on ne saura jamais ce qui se serait passé si, dès juin 40, les Français avaient « pris le maquis ».
Le 24 octobre 1940, le maréchal Pétain accueille Hitler pour l’entrevue de Montoire
Aujourd’hui, rongés par le virus Jean Monnet et l’utopie européenne, leur identité séculaire  bousculée par les vagues d’arrivants aux mœurs différentes, reniant leur passé, s’accommodant  d’un avenir de précarité et de vassalité auquel les conduit la pratique de désastreuses  Institutions, les Français se laissent évincer du cours de l’Histoire.
Hier, en fin de IIIème République, ils avaient souscrit aux carences  du pouvoir politique qu’ils s’étaient donné comme aux faiblesses d’un haut Commandement, excipant de la légitimité républicaine et du respect du pouvoir civil pour justifier sa passivité  et ses erreurs de jugement.
Carences du pouvoir politique ? Elles sont nombreuses et particulièrement affligeantes lorsque l’on considère les fleuves de larmes et les torrents de sang, qu’en définitive, elles ont – indirectement certes – provoqués.
Au cours des années 30, et en France par faiblesse et imbécile dogmatisme, furent réunies les conditions de la terrible décennie 40, la plus meurtrière qu’ait connue l’humanité.
Été 1936, sur une plage de Normandie: 1er prix d'un concours de châteaux de sable.
En 1929, les illusions qu’avaient fait naître les rencontres Briand-Stresemann, les « finasseries » du second abusant de la crédibilité démagogique du premier, étaient en voie d’être dissipées.
Briand et Stresemann
Quatre ans plus tôt, Hilter avait rédigé « Mein Kampf » et ses menaces commençaient à être prises au sérieux. (l’ouvrage sera traduit en français et publié en 1934 par les Nouvelles Editions Latines).
En première page figurait l’avertissement du maréchal Lyautey : « Tout Français doit lire ce livre ».
De 1932 à 1934, les premiers ministres successifs  de la IIIème République, Herriot, Paul-Boncour, Daladier, Sarraut, Chautemps, Bouisson, Léon Blum, radicaux socialistes  ou socialistes, rivalisèrent en matière de démagogie  en feignant d’ignorer « Mein Kampf » et le péril allemand. La gauche française et ses dirigeants politiques réclamaient la réduction des dépenses militaires et de la durée du service national, la fin de l’instruction des réserves, la limitation des fabrications d’armement et du commerce des armes.
Bien qu’en 1930 Hitler eut déjà obtenu les suffrages de près de 15 millions de ses concitoyens, après avoir écrit dans « Mein Kampf » que la … « France était le principal obstacle à l’obtention des résultats (de son programme) et que ces résultats ne seront atteints ni par les prières au Seigneur, ni par des discours, ni par des négociations à Genève. Ils doivent  l’être par une guerre sanglante », à Paris un irresponsable pacifisme était entretenu. Le 3 juillet 1932 à la Tribune de l’Assemblée nationale Thorez déclarait encore : … « Nous sommes contre la défense nationale. Nous sommes les partisans de Lénine et du défaitisme révolutionnaire ».
Au début du mois de janvier 1936, le programme du « rassemblement populaire, le « Front populaire » sera rendu public.
Victoire du "Front Populaire" en 1936. De gauche à droite: Mme  Blum, Léon Blum (SFIO), Maurice Thorez (PCF), Roger Salengro (SFIO ministre de l’intérieur). Deuxième rang derrière Blum et Thorez, (roulant une cigarette) Edouard Dalladier (Parti Radical , ministre de la Défense).
Aussi, deux mois plus tard, les troupes allemandes réoccupaient la Rhénanie. Les Français ne s’en émurent pas davantage puisqu’en avril 1936 aux législatives, ils donnèrent la victoire au Front populaire. Bien qu’il ait affirmé « qu’il ne laisserait pas Strasbourg sous la menace des canons allemands », A. Sarraut, Premier ministre, s’était incliné. Il est vrai, qu’en France, commençait l’agitation sociale, avec 2 millions de travailleurs en grève, la dévaluation du franc, les occupations des usines, et le recours à Léon Blum dès le début de juin 1936.
Celui-ci s’empressa avec Thorez et Daladier de célébrer le 14 juillet 1936 sous une large banderole avec l’inscription suivante : « Pour le désarmement…. Vive Jaurès ». La signification  des événements survenus en Allemagne lui ayant complètement échappé, 3 ans  après l’accession de Hiltler au pouvoir, Léon Blum était monté à la tribune de l’Assemblée  nationale  pour déclarer : « Contre ce danger (le nazisme), je défie quelqu’un d’entre vous de trouver d’autre parade sûre, d’autre moyen de garantie possible  que le désarmement  de l’Allemagne, accepté volontairement par elle ou qui lui serait imposé par l’accord unanime de toutes  les autres puissances ».
14 juillet 1936
Difficile de faire preuve de plus de naïveté, d’ignorance, voire de sottise et de mieux encourager Hitler à réaliser son programme. Triste bilan du Front populaire : baisse de 5 % de la production française, celle de l’Allemagne augmentant de 17,3 %, le nombre des chômeurs passe, en France, de 400.000 à 850.000, l’industrie en général, et celle d’armement en particulier, est désorganisée, les accords de Matignon établissent la semaine de 40 heures
(60 heures outre-Rhin) et les congés payés, incontestables avantages sociaux dont il faudra que les Français paient le prix par la défaite et l’occupation. Ils n’allaient pas être les seuls à souffrir des ambitions allemandes. Le 14 mars 1938 Léon Blum, à nouveau Premier ministre, assurait l’ambassadeur de Tchécoslovaquie à Paris, solennellement, que la France remplirait ses  engagements  envers son pays. (Selon la Convention signée en 1937 prévoyant l’envoi d’une force aérienne «s’il était porté atteinte à l’ordre établi par les traités »).
En février 1939 Hitler occupera la Tchécoslovaquie. La France s’en tiendra au constat, reniant ses engagements. Entre temps avaient été signés les  accords de Munich (fin septembre 1938) si bien que Daladier avait pu regagner Paris en déclarant : « Je reviens de Munich avec la conviction profonde que cet accord est indispensable à la paix en Europe ». Et la population française  d’applaudir. De souscrire  à la démagogie  des dirigeants  qu’elle s’était donnés, et qui, pour lui plaire, affirmaient n’importe quoi.
De gauche à droite: Chamberlain, Mussolini, un interprète, Hitler et Daladier .
Une explication ? Meurtri au plus profond de lui-même par la « Grande Guerre », le pays tout entier n’aspirait qu’à garder le sol national à l’abri d’une nouvelle invasion. Derrière la ligne Maginot – tenue pour infranchissable – protégée par les Ardennes dont le maréchal Pétain déclarait qu’elles étaient impénétrables, par la Belgique et la Suisse, dont les Allemands n’oseraient violer la neutralité, la France n’avait qu’à se tenir sur la défensive. Le pacifisme à la Briand imposait même, le mot bombardement étant proscrit, de désigner « l’aviation de bombardement » par « aviation lourde ». Et  puis, pensait-on en dernier recours, il y aurait la levée en masse, comme en 1793 et aussi les forces morales et populaires à la Jaurès. Ce climat explique, pour une part, l’étrange passivité du haut commandement avant les hostilités et ses erreurs de jugement soucieux qu’il était d’être – déjà – « politiquement conforme ». Dans une telle
ambiance on conçoit qu’en juin 1940 le compromis ait pu l’emporter sur la poursuite de la guerre.
Les carences du haut commandement allaient amplifier les conséquences de l’incapacité gouvernementale. En ce qui concerne, en France le pouvoir politique, l’Histoire en fournit les principales causes. Le 18 brumaire, le coup d’Etat du 2 décembre 1851, plus tard, les ambitions – bien que romanesques – du général Boulanger, ont jeté la suspicion sur le haut commandement. Lorsque, en octobre 1936, le lieutenant-colonel De Gaulle réussit à avoir un entretien avec M. Léon Blum, alors président du Conseil des Ministres, non seulement celui-ci renvoya son visiteur à Daladier et à Gamelin mais déclara, en substance qu’il s’opposait à la mise sur pied des formations blindées celles-ci pouvant être les instruments d’un coup d’Etat.
En revanche, au cours de la guerre de 1914-1918, les exigences de la lutte avaient imposé au pouvoir politique de s’incliner devant la technicité de l’état-major. La France terminait victorieusement les hostilités avec une armée puissante et une doctrine d’emploi efficace. C’est ainsi qu’elle avait réussi à aligner 3000 chars d’assaut Renault et Schneider, les généraux Estienne et Buat déclarant déjà que … « le tank était, incontestablement, l’arme la plus puissante de la surprise, donc de la victoire ».
Char Renault FT17
Ils plaçaient déjà les chars d’assaut en réserve générale du commandant en chef en faisant d’eux les armes d’un corps motorisé spécial « possédant un formidable avantage sur les lourdes unités du passé ».
Mais les leçons de la dernière année du conflit furent oubliées au profit de l’enseignement des trois années précédentes, la stratégie défensive du front continu et la guerre d’usure – relativement – lente des belligérants l’emporta.
Entre 1927 et 1930, le maréchal Pétain et le général Debeney récusèrent la mécanisation souhaitée par De Gaulle. En 1932 le général Dufieux s’éleva contre le concept d’une formation blindée, intervenant directement et décisivement dans la bataille si bien qu’à la suite d’une manoeuvre expérimentale peu concluante, au camp de Mailly, le général Weygand mit un terme à ces exercices. En 1934, lorsque De Gaulle eut publié « Vers l’armée de métier » et argumenté en faveur de la mise sur pied d’une force blindée professionnelle, le général Colson, à l’époque chef d’état-major de l’armée de terre, interdira la diffusion de l’ouvrage.
Le Général Gamelin
Le 6 mars 1936, le premier ministre Albert Sarraut convoqua le général Gamelin : … « Que faire devant l’envoi par Hitler de troupes en zone démilitarisée du Rhin ?
A cette question Gamelin ne fut en mesure que de répondre : …  « envoyer rapidement un corps expéditionnaire français, même plus ou moins symbolique, serait chimérique ».
Et en avril 1938, lors de l’invasion de la Tchécoslovaquie, l’état-major français découvrit qu’il ne pouvait apporter à ce malheureux pays aucun des secours que le gouvernement s’était engagé à lui fournir, y compris même ceux promis un mois plut tôt par Léon Blum.
Ainsi, au cours de cette triste décennie 30, non seulement la France a été le théâtre d’une profonde discorde socio-économique (événements de 1934 et de 1936-1937) mais la discorde était également chez les militaires divisés par une nouvelle querelle des « Anciens »  - les plus nombreux et  les plus haut placés - et les « Modernes », très minoritaires. La discorde n’était pas chez l’ennemi mais bien en France.
La politique et le haut commandement qui eurent à gérer la défaite, responsables  de l’état des affaires du pays, étaient imprégnés à la fois de
leurs échecs  et de la faiblesse morale et matérielle de la France qui en résultait. Profond était le désarroi général. Une réflexion  d’un officier supérieur rencontré à Alger au retour d’une mission en France en témoigne cruellement : « Vous revenez de la métropole…. Vous avez constaté la pagaille… Nous avons reçu une belle raclée… Mais, vous verrez, les Allemands nous remettrons d’aplomb ».
En 1939, affecté au 4ème Bureau (matériel) de l’état-major  du Commandement supérieur de l’air en Afrique du nord le rédacteur de ces lignes a été en bonne position pour juger des armements aériens dont disposaient les trois Commandements de l’Air, au Maroc, en Algérie et en Tunisie. Ils n’étaient pas mieux dotés que ne l’était la métropole, sinon en avions anciens, aux biens modestes  performances. Les appareils américains assemblés  par l’Atelier  Industriel de l’Air de Casablanca étaient envoyés en France, théâtre des opérations, les maigres ressources  de l’AFN étant dirigées vers la métropole. Lorsque l’Italie entra en guerre contre la France une formation d’avions italiens survola Alger sans que la défense aérienne  française intervienne. Le Commandement de l’Air fit enquêter. « Comment pouvais-je intervenir, déclara le chef de l’escadrille de la Maison Blanche, voici plus de cinq mois que je réclame  des pneus pour mes avions Loire qui en sont dépourvus ! ».
Alignement des « Dewatine D.520 » de la 5ème escadrille du GC III/6 à Alger - Maison Blanche, fin juillet 1940. Au premier plan, le n°277 de Le Gloan, sur lequel il a peint la "bande des as". Lieutenant Pierre Le Gloan mort le 11 septembre 1943.
Le 19 juin 1940, deux jours après la demande d’armistice du maréchal Pétain, le général commandant l’aviation d’Afrique du nord envoya une petite mission – trois officiers de son état-major ─ en métropole afin d’y organiser l’envoi des matériels indispensables  à la poursuite des hostilités : pièces de rechanges, équipements divers, matières premières et outillages destinés à l’entretien technique des avions d’AFN afin qu’ils deviennent, ou demeurent opérationnels.  C’est ainsi, par exemple, que l’Afrique du Nord 
n’avait aucun stock de maillechort, alliage de cuivre et zinc utilisé pour la fabrication des maillons  de mitrailleuse. Et pas davantage d’outillage pour produire ces maillons.
Au sud de la France, dans les dépôts de Marseille, Tarbes, Montpellier, la panique était telle que la mission échoua. Mais, à Alger, il y avait eu l’espoir de poursuivre la lutte grâce aux ressources humaines  et matérielles de l’empire. Espoir vite déçu.
Au cours des deux dernières semaines de juin 1940, plusieurs centaines  d’avions de combat franchirent la Méditerranée pour échapper à l’Allemand. Ils atterrirent sur les bases  aériennes d’Afrique du Nord, de Rabat à Tunis. L’état-major d’Alger fit dresser leur inventaire par deux officiers, un mécanicien, le capitaine  Crosnier et un navigant, le signataire de cette préface. La plupart de ces avions n’étaient pas réellement « bons de guerre ». Leur équipement, leur armement étaient défaillants  pour la majorité. Chaque appareil avait été inspecté et environ dix pour cent  d’entre eux déclarés  opérationnels. Lorsque, après Mers el Kebir, Alger voulut exercer des représailles en bombardant Gibraltar, le rassemblement  de quelques dizaines d’avions militairement utilisables  se révéla laborieux.
Peu avant le début des hostilités, comme le Commandement de l’Air en Afrique du nord réclamait de Paris que soient renforcées  les forces aériennes  d’au-delà de la Méditerranée, la Direction du matériel aérien répondait négativement  en usant d’arguments  fallacieux. C’est ainsi, par exemple, qu’à l’évocation des médiocres  performances des avions Potez 25 TOE formant l’essentiel  de la flotte aérienne d’AFN, il fut répondu que la faible vitesse du Potez était un avantage face aux chasseurs italiens  trois fois plus rapides car en virage serré ceux-ci ne pouvaient suivre les évolutions de notre vieux matériel.
Potez 25 TOE
Ou encore, la médiocrité de nos propulseurs  étant soulignée, Paris affirmait que l’armée de l’Air n’avait pas besoin de moteurs de plus de 800 chevaux, alors qu’Américains, Britanniques et Allemands se dotaient de moteurs deux fois plus puissants.
Non seulement  l’extension éventuelle du futur et inévitable conflit n’avait pas été envisagée, mais l’Afrique française avait été tenue pour un théâtre d’opérations secondaires  fournissant, en personnel, un appoint aux forces métropolitaines  mais qu’il n’avait pas lieu de préparer à d’éventuels combats. Cette situation n’était pas ignorée à Paris, ou plutôt à Bordeaux, où le gouvernement s’était réfugié.
A la fois responsables du désastre et chargés de gérer la défaite, les Politiques français étaient bien conscients  de l’état moral et matériel du pays. Les Français traumatisés  par un si rapide échec de leurs armées ne souhaitaient plus guère que la préservation de leur existence  fût-ce dans la précarité, l’Allemagne pillant leurs ressources. Même au prix d’une « soumission  déshonorante » selon l’expression de M. J. Bourdu. Mise à part la Serbie et, dans une certaine mesure l’Espagne refusant à Hitler le passage de ses troupes, les pays de l’ouest européen, s’accommodèrent – provisoirement - de la poigne d’acier du IIIème Reich.
23 octobre 1940 : Franco et Hitler se rencontrent à Hendaye.
Sauf les Serbes. Lorsque le gouvernement de Belgrade fut amené à signer un accord  avec celui de Berlin, à la différence des Croates qui acceptèrent d’en devenir les satellites, les Serbes se soulevèrent et prirent le maquis. Pierre II démissionna  et se réfugia en Grande-Bretagne, la Luftwaffe bombarda Belgrade (6 avril 1941) renforçant la résistance, d’abord dirigée par le général Draja Mihailovic, puis par Tito après que l’Allemagne  eut attaqué l’URSS. Les Serbes mobilisèrent ainsi, contre eux, des divisions allemandes  et aussi italiennes  qui eussent été bien utiles face aux Soviétiques.
Le général Draja Mihailovic 1893–1946. Abandonné par les Anglais…
Si, en juin 1940 la France avait encore les atouts  d’une puissante flotte de guerre, une vaste portion d’Afrique où flottait le drapeau français et aussi si elle occupait une position stratégique  éminente dans l’opposition au IIIème Reich, en revanche, les résistants serbes n’avaient pour eux que le courage des Tchetniks et un territoire au relief favorable à la guérilla. Ils n’avaient pas, non plus, souffert des divisions qui affaiblirent la France et ils menaient une vie assez spartiate pour la sacrifier à l’indépendance  nationale. Ils n’étaient pas malades  politiquement  et socialement  alors que les Français souffraient des maux qu’ils avaient eux-mêmes créés. Comment expliquer autrement la médiocrité des dirigeants politiques  et militaires ?
J. Bourdu met en évidence celle du haut Commandement : Pétain, Weygand, Darlan, Gamelin acceptant un armistice humiliant et même déshonorant, quoiqu’en ait dit le maréchal, tous persuadés que l’Allemagne  avait gagné la guerre et que, longtemps elle règnerait en Europe, l’Angleterre capitulant avant peu. Aucun de  ces « grands chefs » ne tenait compte de la réalité internationale et de son évolution :
- Insulaire, la Grande-Bretagne  est protégée par un vaste fossé anti char, un débarquement étant hasardeux  et exigeant des moyens dont l’Allemagne ne disposait pas.
- Puissance  continentale, le IIIème Reich avait forgé son appareil de combat en donnant la priorité au combat aéro-terrestre, l’aviation appuyant l’action des Panzers.
Progression de Panzers 38(t), après le franchissement de la Meuse.
13-14 mai 1940.
Guderian observant l’action de « Stukas ». 13 mai 1940
Aussi la Luftwaffe était-elle dépourvue de l’aviation stratégique nécessaire  pour détruire l’appareil de production et l’industrie d’armement britannique  ainsi que, dès 1941 Londres se révéla capable de le faire au détriment de l’Allemagne.
-La future rivalité des deux dictateurs, Hitler et Staline n’avait pas non plus été envisagée.
-Pas davantage la mise en route de la formidable machine à produire des armements d’outre-atlantique et l’engagement  militaire qui en résulterait.
Seuls, au sommet, De Gaulle, Dautry, Mandel et quelques autres refusent de s’incliner. En revanche, Pétain et Weygand font la loi : accepter l’armistice  et en appliquer les clauses.
En juin 1940, l’Allemagne triomphait. Depuis Sedan elle a continuellement œuvré, sinon pour rayer la France de la carte, du moins pour l’affaiblir, la vassaliser. Bismarck, Guillaume II, Hitler, Schmitt, Kohl ont pratiqué, à leur manière, cette politique. Le virus Jean Monnet et la « construction européenne destructrice  des Etats-nations  lui permettent d’atteindre cet objectif sans avoir à user de la force des armes.
De gauche à droite : Jean Monnet, John Foster Dulles, Dirk Spierenburg, Dwight D. Eisenhower, David Bruce, Franz Etzel, William Rand. A Washington, 3 au 7 juin 1953. © United Press Associations, New York
 Et comme en 1940, nombreux sont les partisans de « l’accommodement »  et de la supranationalité  d’une Europe dont elle deviendrait une division administrative. C’est bien ce que  recherchait Hitler.
Gravement malade était la France, en 1940. Poursuivre le combat exigeait  des efforts qu’elle ne pouvait plus fournir. A cet égard lumineuse  est l’analyse  de Jacques Bourdu. Elle témoigne d’un triste passé… et hélas, explique l’état présent  de la nation.
Général Pierre-Marie Gallois, Mars 2007
L'armistice de 1940. Histoire d'une faute tragique
Auteur : Jacques Bourdu
Paru le : 06/12/2007
Editeur : GUIBERT (FRANCOIS-XAVIER DE)
Isbn     : 978-2-86839-843-7 / Ean 13 : 9782868398437
Jacques BOURDU, ancien élève de l'École Polytechnique, après une longue expérience acquise dans des fonctions de responsabilité et de direction d'entreprises, a, depuis quelques années, publié divers ouvrages sur les nécessaires réformes économiques fondées sur l'observation des réalités d'un monde en évolution.
En complément, quelques lectures…
Pourquoi l’échec de l’aéronautique française des années 30 ?
Je me pose cette question en lisant l’article du Fana de l’aviation consacré à l’Aviation Populaire, lancée par le Front du même nom.
Cet échec tient en deux chiffres :
- Caudron 714 : 500 ch,
- Messerschmitt Me-109 Fighter : 1100 ch.
Or, jusqu’en 1934-1935, l’aviation française tenait son rang. Déjà, il y avait quelques signes avant-coureurs, dont je vous ai déjà parlés, du déclin en germe : des Caudron pathologiquement fins pour compenser des moteurs Renault inférieurs au Rolls-Royce, Daimler-Benz, BMW et Wasp.
Puis, alors que les autres puissances (USA, UK, Allemagne) passaient la surmultipliée avec deux innovations majeures :
des moteurs fiables et puissants
des avions conçus dès la table à dessin pour la production de masse
La France restait scotchée, malgré une forte mobilisation. Pourquoi ?
Il convient tout de suite d’écarter les réponses politiques simplistes : on ne sait pas si la droite aurait fait mieux que le Front Populaire. Je ne me pâme pas devant ce dernier, dont le bilan économique est mauvais, mais il se trouve, par exemple, que l’Aviation Populaire était à l’origine une idée de Mermoz, qui était très à droite.
Il y a une réponse, mais elle est trop globale pour être utile. Il s’agit de regarder ce qui a fait la réussite de l’aviation française des années 50 : ouverture (”importation” d’ingénieurs allemands pour l’ATAR, alors que Renault dans les années 30 n’était jamais arrivé à copier un moteur américain), service des programmes fort (les services étatiques de l’aviation d’après-guerre contrastent avec le foutoir d’avant-guerre), industriels, privés ou publics, structurés, recherche organisée et généreusement pourvue et très forte volonté collective.
Tout a été fait à l’inverse de l’avant-guerre, et souvent par les mêmes hommes. Je pense notamment à Marcel Bloch, devenu entre-temps Marcel Dassault.
Ca ne fait donc que déplacer la question : pourquoi pas plus tôt ? Pour l’instant, je ne sais pas.
Le Maréchal Lyautey ne fut pas le seul à savoir lire entre les lignes…
« Nous sommes en 1933, son premier reportage, publié en août, porte un titre éloquent : « A l’ombre de la croix gammée », texte conclu en ces termes :
« Si vous voulez traiter avec l’Allemagne – et surtout avec le IIIe Reich qui dépassera bientôt en puissance tout ce qu’on pourra imaginer-, soyez militairement plus forts que votre partenaire. Ne désarmez sous aucun prétexte… Sinon faites la guerre, faites-là vite ou nous périrons tous. »
L’auteur de ces lignes prémonitoires ?
Xavier de Hautecloque…
« Xavier de Hautecloque est le fils cadet du colonel Wallerand de Hautecloque – Oncle du futur maréchal Leclerc, Philippe de Hautecloque-, tué par les Allemands le 22 août 1914 à la tête du 14e Hussards. Xavier a suivi les pas de son père en s’engageant à 17 ans dans le même régiment. Blessé, il est cité à l’ordre de l’armée. Il finit la guerre de 14-18 comme officier. »
Xavier de Hautecloque entrera plus tard en « plume », avec la même passion et le même goût de comprendre. Il écrira dans « Gringoire ».
Annonçant sa mort le 5 avril 1935, Garbuccia, député de Corse et directeur de Gringoire, pouvait dire :
« Il a partagé, au péril de sa vie, l’existence des baleiniers norvégiens en océan Articque. Il a traversé le Sahara tunisien et le pays des Touaregs Azdjers, afin d’observer la guerre des Italiens contre les Sénoussites. Enfin, en 1932, il commença outre-Rhin cette sensationnelle et dangereuse série de reportages qui lui valut d’obtenir le prix « Gringoire » et aussi de réunir sur l’Allemagne la documentation la plus précise, la plus rigoureusement exacte ! »
Et l’année 1933, Xavier de Hautecloque ne ménage pas sa peine : Il revient sur le sujet : l’Allemagne !
Et que nous dit notre ami François-Marin Fleutot, auteur du livre auquel nous nous référons – Des royalistes dans la Résistance- :
« En 1934, il repart pour l’Allemagne et rédige une nouvelle série de reportages encore plus éloquents que ceux de l’année précédente. Sous le titre « Nuit sur l’Allemagne », il publie ses reportages, toujours dans Gringoire, chaque semaine du 23 février au 16 avril 1934. Les lire aujourd’hui fait froid dans le dos. Nous qui connaissons la suite des événements avons du mal à saisir comment nos anciens ont pu ainsi se laisser entraîner dans l’horreur.
Que raconte Xavier de Hautecloque aux six cent mille lecteurs de Gringoire ? Simplement ce qu’il a constaté, un an, juste un an, après la prise du pouvoir par Adolf Hitler :
« S’il suffit à un jeune hitlérien de contempler la silhouette d’un Français, assis pacifiquement à la même table, pour voir rouge, que se passerait-il en cas de conflit, si le choc avait lieu, non pas au café Sturm de Berlin, mais dans les rues d’un de nos villages envahis une fois de plus ? Est-ce que l’immonde menace du S.S. ne deviendrait pas une réalité sanglante ? Quand Monsieur Hitler entraîne militairement, quand il prépare au combat, quand il décide d’armer un million de ses jeunes SA et SS dont nous venons de voir un échantillon, que vaut le pacifisme de Monsieur Hitler ? »
Et Xavier de Hautecloque de dénoncer pêle-mêle le camp de Dachau, le 30 mars 1934, un camp de concentration réservé aux prêtres catholiques réfractaires au nouveau régime, les débuts de la « chasse aux juifs », etc.
Le 6 avril 1934, il conclut cette nouvelle série d’articles par une mise en demeure aux gouvernements des Etats démocratiques :
« Groupant nos alliés actuels, nous sommes les plus forts jusqu’à nouvel ordre. Parlons donc le langage des forts à ceux qui ne respectent que la force. »…
1934…
Et son dernier article, paru après sa mort, lançait aux Français et aux royalistes, cette belle apostrophe :
« Si le roi soleil voyait ce  que devient son enclos de France, durement bâti, farouchement défendu, quelles éclipses, quels coups de tonnerre ! »
Le 11 avril 1935, à 11h30, en l’église Saint-Ferdinand-des-Ternes, lors du service funèbre pour Xavier de Hautecloque, mort à 37 ans, « …pas moins qu’un Maréchal de France, Franchet d’Esperey ; un généralissime de l’Armée française, Weygand… des amiraux et de nombreux généraux… » Et nous tairons tous les vieux noms de France et d’autres encore… tenant à rappeler que le Maréchal Louis Franchet d’Esperey ne cessait de vilipender les défaitistes et qu’il exprimera de son vivant son refus de recevoir des funérailles nationales, s’indignant à l’idée qu’un soldat allemand nazi puisse lui rendre les honneurs posthumes. ( Il décède le 8 juillet 1942).
Maréchal Louis Franchet d’Esperey
1935…

Lire :
« Des royalistes dans la Résistance », de François-Marin Fleutot . Flammarion.



Illustrations  Les Manants du Roi »

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