mercredi 5 janvier 2011

Jacques Cathelineau

Jacques Cathelineau, fils de Jean Cathelineau, est né le 5 Janvier 1759 au Pin-en-Mauge. Sa famille, roturière, est très pieuse et son père occupe la place de sacristain de l’église du village. Jacques eut 10 frères et soeurs, dont 4 seulement vécurent. Jean naquit le 5 décembre 1756, Pierre le 27 décembre 1767, Joseph le 23 Juin 1772 et Marie le 29 Mai 1761. Les enfants de roturiers ne pouvaient prétendre à être scolarisés, tout d’abord parce que la pension coûte cher et ensuite les petites communes des Mauges n’ont pas encore d’école. Mais Jacques, qui sert la messe régulièrement, est intelligent, bien plus que la plupart des enfants de son âge. Le prêtre de la paroisse, remarquant la vivacité de l’esprit de cet enfant, et pour remercier la générosité de son père, il proposa au jeune Jacques de l’instruire, en échange de quelques petits travaux paroissiaux. Jacques Cathelineau quitta donc le Pin-en- Mauges pour vivre à 15 kilomètres de là, dans un petit village du nom de la Chapelle du Genêt.
Jacques va donc grandir et s’épanouir dans cette ambiance scolaire, naviguant entre la paroisse et la maison. On peut supposer que Jacques fut un moment attiré par la vocation sacerdotale car on sait que le jeune Jacques apprit le latin à cette époque par l’abbé Cantiteau.
A 18 ans, le 4 Février 1777, il épouse Louise Godin, de 7 ans son aînée. Ce mariage fut fécond, et Louise mettra au monde 11 enfants, dont 5 vécurent. Maçon comme son père, Jacques Cathelineau se rendit rapidement compte que son maigre salaire ne permettrait pas de nourrir autant de bouches. Il parvint cependant à acheter deux chevaux et une voiture bâchée pour changer de métier et commença à travailler comme marchand voiturier et colporteur. Ses tournées lui permirent de connaître de nombreuses bourgades de la région, et tous les habitants l’estimaient, tant pour sa gentillesse que pour sa probité.
Jacques n’en délaisse pas la paroisse pour autant. Il s’investit dans la vie de l’Église, et y est élu en 1786 syndic de la Fabrique. La vie quotidienne est difficile pendant ces années là, où la disette laisse parfois place à la famine. Les paysans y voient un signe de colère divine, et redoublent de prières et de neuvaines. Début Mars 1793, la Convention vote la levée en masse de 300 000 hommes dans toute la France, sur un système de tirage au sort. Le 12 Mars 1793, les républicains procèdent au tirage au sort à St Florent le Vieil. Malheureusement, les hommes y sont fermement opposés ! Pourquoi aller se faire trouer la peau pour un régime qu’ils ne veulent pas, qui vient d’exécuter leur Roy très Chrétien ? La révolte de la ville de St Florent va vite tourner au lynchage des républicains : la guerre est devenue inéluctable… Cathelineau ne fait pas parti de ces paysans, il n’est pas assujetti à l’appel de la conscription. En effet, celle-ci ne concernait que les jeunes hommes sans enfant, tel qu’Henri de la Rochejaquelein ! Cependant, suivant cette foule qui se révolte contre la république, il décide de prendre son destin en main et prend la tête de l’insurrection des hommes du Pin-en-Mauge.
De partout, des paysans se révoltent, chassent les bleus, et s’unissent. Il faut maintenant organiser cette révolte, il faut des chefs. Le choix se porte sur les aristocrates qui ont reçu une éducation, et qui bien souvent ont connu le métier des armes (tel le comte de La Rochejaquelein ou Charles de Bonchamps). Cependant, il y a deux exceptions : Cathelineau (qui a été sollicité bien avant les aristocrates) et Stofflet qui sont les seuls roturiers à la tête de l’armée. Cathelineau a la stature d’un chef, il a l’intelligence d’un aristocrate, la force d’un maçon, la verve adroite et il sait comment remuer les foules.
Il prend donc la tête de cette armée, et fort de sa foi, il la mène à travers la Vendée. Accumulant les victoires en ce début d’année 1793, il marche avec Stofflet sur Chemillé, Cholet et le 16 Mars sur Vihiers. A Vihiers, l’Armée Catholique et Royale met en fuite tout un bataillon républicain et récupère ainsi leur premier canon. Ce canon, symbole de leur résistance, sera baptisé Marie-Jeanne du nom des deux protectrices de la France : la Sainte Vierge Marie et Sainte Jeanne d’Arc.
Les victoires continuent à s’enchaîner, les bleus n’offrant que peu de résistance à cette formidable foule armée de fourches, mené par celui que l’on nomme déjà « le Saint de L’Anjou ». Peu avant la Pâques, Chalonnes tombe. L’armée angevine se disperse, les paysans rentrent chez eux pour passer cette fête en famille. Cathelineau retrouve femme et enfants, et l’abbé Cantiteau, curé du Pin-en-Mauge, peut célébrer la Résurrection de Notre Seigneur Jésus Christ en paix.
Les républicains de leur côté, profitent de cette trêve pour se réorganiser. 4 colonnes de soldats de toute la France se réunissent, prêtes à prendre les Mauges en tenaille. La bataille fait rage, le sang coule et ruisselle, mais les bleus sont trop nombreux ! Les insurgés sont obligés d’abandonner et de se replier jusqu’à Tiffauges.
La conscription continue par ailleurs, et arrive à Châtillon un mois après St Florent. Et, comme à Saint Florent, les habitants de Châtillon ne sont pas enclins à partir mourir pour un régime qu’ils ne soutiennent pas. 4000 paysans se révoltent donc contre la république, et réclame un jeune noble comme chef : Henri de la Rochejaquelein, qui n’a que 20 ans. Cette nouvelle armée se rallie à celle des Angevins de Cathelineau pour former les prémices de la Grande Armée Catholique et Royale, qui ne prend naissance que le 17 Avril.
Motivés par leurs chefs, Cathelineau, Stofflet, La Rochejaquelein, Bonchamps et d’Elbée, les insurgés reprennent Cholet, les Mauges et s’apprêtent à attaquer Bressuire. Dans la prison de Bressuire, il y a le cousin de La Rochejaquelein, le Marquis de Lescure, prisonnier depuis la fin de l’année 1792. L’Armée libère les prisonniers et récupère ainsi deux nouveaux chefs : Lescure et Marigny. Prochaine étape : Thouars. Forte de 10 000 hommes, l’Armée Catholique et Royale se lance à l’assaut de Thouars où les républicains les attendent. L’Armée blanche, menée par la fougue du jeune comte de La Rochejaquelein, triomphe et s’empare de nombres d’armes, 12 canons, et 7000 fusils ! Ils relâchent la quasitotalité des prisonniers et récupèrent de nombreux transfuges, de la ville de Baugé. Ils libèrent le général Quétineau, ardent républicain défenseur de la ville de Thouars, et lui propose de rejoindre les rangs royalistes. Celui-ci refuse l’offre pourtant généreuse, et resta fidèle à la république. L’Histoire a voulu que Quétineau meure quelques temps plus tard, victime de la Terreur instauré par les siens.
Les chefs vendéens n’en oublient pas leur idéal : pureté. Bonchamps, Lescure et Cathelineau donnent des ordres aux vendéens : pas d’excès, ni d’abus, pas de pillages ni de mauvais traitements. Les paysans s’y tiennent pour la plupart, malgré quelques dérapages… Les généraux vendéens ont toujours essayé de traiter les prisonniers bleus avec la plus grande humanité, exception faite de Marigny et Stofflet.
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Le 16 mai 1793, la Grande Armée Catholique et Royale arrive devant Fontenay, petite ville située en vaste plaine. Gros problème : l'armée royaliste, composée essentiellement de paysans, se bat par embuscades et se cachent derrière les buissons. Ici, aucune cache, aucun buisson… Il faudra affronter les républicains en armée régulière, à découvert donc…Le combat tourne à la débâcle, et les royalistes sont rapidement défaits et abandonne canons et munitions sur le champ de bataille… Fin mai, sous l’impulsion de Cathelineau qui croit toujours en la victoire, l’Armée se reforme et reprend confiance en elle. La ville de Fontenay tremble sous les coups de butoirs de l'armée de Bonchamps, les courageux royalistes entonnent leurs cantiques et l'on entend plus dans la ville que les “Vexilla Regis” !
Cathelineau est heureux, c’est une belle victoire et il le sait ! L’ardeur de ses soldats, la confiance qu’ils ont mis en lui et dans la cause royaliste le touche…Il sait que désormais pour les hommes, il est le chef incontournable de la révolte vendéenne.
Le 12 Juin 1793, dans un souci d’unité, les chefs vendéens décident d’élire le « généralissime », le chef incontesté de leur armée, de qui découleraient tous les ordres. A l’unanimité, tous les chefs choisissent Cathelineau comme chef. Pourquoi ? De nombreuses raisons peuvent être présentées :
les chefs vendéens flattent la masse paysanne en mettant un des leurs à la tête de l’armée Cathelineau est un homme profondément pieux, et respectueux de la foi
Il n’a pas d’autres ambitions que sa mission, et il est irréprochable
Il a l’expérience, l’âge et la sagesse pour être un chef incontesté
Il est apprécié des hommes, il est visionnaire et sait remuer des foules entières par ses paroles
Un extrait du brevet de nomination de Cathelineau au poste de généralissime :
Aujourd'hui 12 juin 1793, l'an 1er du règne de Louis XVII, nous soussignés, commandant les armées catholiques et royalistes, voulant établir un ordre stable et invariable dans notre armée, avons arrêté qu'il sera nommé un général en chef, de qui tout le monde prendrait l'ordre. D'après le scrutin, toutes les voix se sont portées sur M. Cathelineau qui a commencé la guerre, et à qui nous avons tous voulu donner des marques de notre estime et de notre reconnaissance. En conséquence, il a été arrêté que M. Cathelineau serait reconnu en qualité de général de l'armée, et que tout le monde prendrait l'ordre de lui.
Fait à Saumur en Conseil, au quartier général, le dit jour et an que dessus.
Signés :
Lescure, De Beauvollier (x2), de Bernard de Marigny, de Hargues, Stofflet, De Laugrenier, Delaville de Beaugé, De la Rochejaquelein, D'Elbée, Duhoux de Hauterive, De Boissy, Tonnelet, Des Essarts, De Bonchamps.
Les victoires royalistes continuent à s’enchaîner, et la ville d’Angers tombe. Le 23 Juin 1793, l’Armée catholique et Royale arrive en face de la grande ville de Nantes. L’Armée blanche, forte de 40 000 hommes et menée par le généralissime Cathelineau, s’avance aux portes de la ville, défendue par plus de 12 000 bleus. Les royalistes piétinent, la bataille s’enlise… Le 29 Juin, Cathelineau entre enfin dans la ville par la porte de Rennes et atteint la place Viarme. Un coup de feu, tiré depuis une fenêtre, le blesse mortellement. Les vendéens qui venaient de voir leur chef grièvement frappé, se retirèrent de la bataille et furent défaits.
Cathelineau fut transporté mourant jusqu’à St Florent le Vieil, ce petit village qui l’avait vu grandir. Au seuil de sa mort, l’abbé Cantiteau lui rendit visite chaque jour. Il écrira que Jacques Cathelineau est resté calme face à la mort. Il rendit son âme à Dieu le 14 Juillet 1793. Son cousin, Jean Blon, aurait annoncé sa mort avec ces mots : « Le bon Cathelineau a remis son âme à Celui qui la lui avait donnée pour venger Sa gloire »… Une partie des restes de Jacques Cathelineau fut réunie au Pin-en-Mauges à ceux de son fils Jacques-Joseph de Cathelineau et de son petit fils Henri de Cathelineau, et l’autre partie repose encore à Saint Florent le Vieil.
Michelet écrira bien plus tard : « La Vendée, frappée du coup, n'alla pas plus loin. Ils l'avaient cru invulnérable; ils furent tous blessés, qu'ils ne s'en sont jamais relevés ».
Victoire de Donnissan de la Rochejaquelein écrira dans ses Mémoires : « Cathelineau commandait les gens du Pin-en-Mauge et des environs. C'était, comme je l'ai dit, un simple paysan qui avait fait quelque temps le métier de colporteur pour le commerce des laines. Jamais on n’a vu un homme plus doux, plus modeste et meilleur. On avait pour lui d'autant plus d'égards, qu'il se mettait toujours à la dernière place. Il avait une intelligence extraordinaire, une éloquence entraînante, des talents naturels pour faire la guerre et diriger les soldats : il était âgé de trente-quatre ans. Les paysans l'adoraient, et lui portaient le plus grand respect. Il avait depuis longtemps une grande réputation de piété et de régularité ; tellement que les soldats l'appelaient le Saint de l'Anjou, et se plaçaient quand ils le pouvaient auprès de lui dans les combats, pensant qu'on ne pouvait être blessé à côté d'un si saint homme »
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