Le 7 août 1946 est publié au Journal officiel le discours de Pierre-Henri Teitgen, garde des Sceaux, qui, évoquant l'épuration en cours, a déclaré à la Chambre : « Vous pensez sans doute que par rapport à Robespierre, Danton et d'autres, le garde des Sceaux qui est devant vous est un enfant. Eh bien, si l'on en juge par les chiffres, ce sont eux qui furent des enfants ! » Cette vaniteuse revendication est destinée, dans l'esprit de celui qui la fait, à réaffirmer sans ambiguïté sa détermination : il faut éliminer, physiquement et moralement, les nationalistes. Le démocrate-chrétien Pierre-Henri Teitgen poursuit en effet ceux-ci de sa haine depuis toujours. Il a tout fait dans le cadre du mouvement de résistance de Combat, pour éliminer, contrairement au fondateur de Combat, Henri Frenay, toute référence nationale dans les thèmes de propagande diffusés par la résistance. Son itinéraire comporte, à vrai dire, des zones d'ombre. Arrêté par la police allemande le 6 juin 1944, il a réussi à s'échapper dans des circonstances demeurées mystérieuses. C'est peut-être une raison supplémentaire pour afficher un fanatisme répressif sans faille contre les vaincus de 1944/1945.
Elu député MRP d'Ille-et-Vilaine aux deux Assemblées nationales constituantes (1945/1946), Teitgen est devenu ministre de la Justice et donc, à ce titre, chargé de couvrir de l'autorité de l'Etat les exactions en tous genres commises par les épurateurs lancés à la chasse aux «fascistes» (étiquette commode adoptée, sous la pression communiste, pour, désigner à la vindicte publique les nationaux et nationalistes de toutes nuances.)
L'épuration a été programmée dès 1943, à Alger, par le Comité français de libération nationale dont de Gaulle a pris le contrôle, après avoir évincé Giraud (pourtant l'artisan de la libération de la Tunisie). Le 21 octobre, une ordonnance organise la future répression contre tous ceux qui, de près ou de loin, ont servi ou simplement approuvé l'Etat français du maréchal Pétain. Des juridictions exceptionnelles sont mises en place, en juin et juillet 1944, par le commissariat à la justice du gouvernement provisoire, sous la direction du MRP François de Menton : cours de justice, dans le cadre des départements, chambres civiques et Haute Cour (pour le «gros gibier»). Ces juridictions, représentant une épuration officielle n'entrent, en fait, en fonction qu'en octobre 1944. Ce qui a laissé de longues semaines à une épuration sauvage : une « justice populaire » autoproclamée a constitué des « cours martiales » et « tribunaux militaires » qui décrètent des dizaines de milliers de condamnations et font procéder, en toute impunité, à des exécutions en dehors des normes de la plus élémentaires légalité. Il faut y ajouter les exécutions sommaires, c'est-à-dire les assassinats, perpétrés par des éléments «incontrôlés», couverts par les Comités départementaux de la libération. Ceux-ci ont pour mission officielle « l'anéantissement des agents de l'ennemi ». Une formule qui ouvre la voie aux interprétations les plus sanguinaires.
Entre le 26 août et le 1er octobre 1944, il y eut 600 000 à 700 000 personnes arrêtées sans mandat et incarcérées, dans des conditions souvent ignobles. Et il y a tous ceux dont les restes gisent encore en des lieux anonymes. L'oubli ? Le pardon ? Ni l'un ni l'autre.
P V National hebdo du 3 au 9 août 1995
Elu député MRP d'Ille-et-Vilaine aux deux Assemblées nationales constituantes (1945/1946), Teitgen est devenu ministre de la Justice et donc, à ce titre, chargé de couvrir de l'autorité de l'Etat les exactions en tous genres commises par les épurateurs lancés à la chasse aux «fascistes» (étiquette commode adoptée, sous la pression communiste, pour, désigner à la vindicte publique les nationaux et nationalistes de toutes nuances.)
L'épuration a été programmée dès 1943, à Alger, par le Comité français de libération nationale dont de Gaulle a pris le contrôle, après avoir évincé Giraud (pourtant l'artisan de la libération de la Tunisie). Le 21 octobre, une ordonnance organise la future répression contre tous ceux qui, de près ou de loin, ont servi ou simplement approuvé l'Etat français du maréchal Pétain. Des juridictions exceptionnelles sont mises en place, en juin et juillet 1944, par le commissariat à la justice du gouvernement provisoire, sous la direction du MRP François de Menton : cours de justice, dans le cadre des départements, chambres civiques et Haute Cour (pour le «gros gibier»). Ces juridictions, représentant une épuration officielle n'entrent, en fait, en fonction qu'en octobre 1944. Ce qui a laissé de longues semaines à une épuration sauvage : une « justice populaire » autoproclamée a constitué des « cours martiales » et « tribunaux militaires » qui décrètent des dizaines de milliers de condamnations et font procéder, en toute impunité, à des exécutions en dehors des normes de la plus élémentaires légalité. Il faut y ajouter les exécutions sommaires, c'est-à-dire les assassinats, perpétrés par des éléments «incontrôlés», couverts par les Comités départementaux de la libération. Ceux-ci ont pour mission officielle « l'anéantissement des agents de l'ennemi ». Une formule qui ouvre la voie aux interprétations les plus sanguinaires.
Entre le 26 août et le 1er octobre 1944, il y eut 600 000 à 700 000 personnes arrêtées sans mandat et incarcérées, dans des conditions souvent ignobles. Et il y a tous ceux dont les restes gisent encore en des lieux anonymes. L'oubli ? Le pardon ? Ni l'un ni l'autre.
P V National hebdo du 3 au 9 août 1995
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