Lors même que les deux grandes familles totalitaires du XXième siècle, le fascisme et le communisme, sont issues d'un même tronc socialiste, depuis 1945, grâce à ses relais dans la presse, l'édition et l'université, la gauche a réussi à accréditer l'existence d'un risque majeur : le retour de l'hydre fasciste-venu-de-la-droite. Cette mise en scène politique donne à la gauche une remarquable immunité idéologique. Il est temps de rétablir la vérité, d'un point de vue historique et scientifique, pour en finir avec les mensonges de nos adversaires.
Incontestablement, la gauche profite d'un paradoxe : alors même qu'elle a donné naissance au fascisme, elle a également enfanté le mythe antifasciste.
Les origines de gauche du fascisme sont absolument incontestables. Différents types d'analyses, historiques et philosophiques, émanant d'auteurs incontestables, de droite comme de gauche, convergent sur ce point.
Examinons tout d'abord la synthèse idéologique qui a donné naissance au fascisme.
Selon l'historien Zeev Sternhell (1), le fascisme est né de l'évolution d'une fraction du marxisme et du syndicalisme révolutionnaire entre 1880 et 1914. Certains intellectuels révolutionnaires, tels Hubert Lagardelle en France ou Arturo Labriola en Italie constatent en effet que le prolétariat européen, loin de s'appauvrir, s'enrichit, et menace de s'intégrer à la société bourgeoise, perdant toutes ses vertus révolutionnaires. De la même façon, ils observent le patriotisme profond des masses ouvrières lors de l'union sacrée en 1914. Toujours très hostiles au capitalisme, influencés par le théoricien de la violence révolutionnaire Georges Sorel (2), mais ayant pris acte de ce que la nation est un moteur plus puissant que la classe sociale, ces hommes vont substituer la nation au prolétariat comme force révolutionnaire. Ils font alors évoluer une partie de la réflexion socialiste vers un socialisme national animé par une éthique de la violence rédemptrice.
C'est ce complexe idéologique qui, après 1918, formera la vision du monde fasciste, en Italie comme en Allemagne.
Ainsi, le fondateur du fascisme italien, Mussolini, fut d'abord un chef du parti socialiste italien, directeur de l'Avanti, l'organe officiel du parti. En France, les seuls chefs authentiquement fascistes, Valois, Doriot et Déat, furent, le premier un théoricien d'extrême gauche, le second un des responsables du parti communiste, le troisième, un député socialiste successeur présumé de Léon Blum à la tête de la SFIO. Le moins connu d'entre eux, Valois, finira dans les eaux de la SFIO, après avoir fondé le Faisceau, petit parti fasciste français. Pour lui, le fascisme et le marxisme sont deux « variétés du socialisme »(3). En Allemagne, de nombreux communistes furent séduits par les propositions sociales du parti national-socialiste des travailleurs allemands (NSDAP). La vérité historique est évidente: le fascisme a pu séduire, çà et là, quelques hommes de droite. Il n'en reste pas moins fondamentalement issu de l'extrême gauche.
L'étude du projet philosophico-politique des fascistes éclaire encore la lanterne de l'honnête homme. Le fascisme partage avec le socialisme le culte de l'Etat, qui doit entièrement régenter la vie sociale et la croyance dans les vertus de l'économie dirigée. L'influence de l'économiste de gauche Keynes sur la politique de grands travaux du régime fasciste puis sur la politique économique du docteur Schacht en Allemagne, est ainsi très sensible. Le philosophe Friedrich Hayek, dans La route de la servitude (4), consacre d'ailleurs un chapitre entier aux « racines socialistes du nazisme ». En outre, comme le communisme, le fascisme valorise le peuple contre le « bourgeois », le groupe contre la personne. Selon Hannah Arendt (5), cette préférence pour le Tout social contre le particulier est un des éléments constitutifs du totalitarisme.
S'il est piquant de constater que le fascisme vient de la gauche, il faut également voir que le mythe antifasciste en est également issu !
Ce sont les instances dirigeantes de la IIIe Internationale (communiste) qui, dès le début des années 20, ont opéré un amalgame éhonté entre « la droite » et le fascisme, tendant à faire croire que le fascisme était de droite, et la droite plus ou moins « fascisante ».
Dès les années 30, l'antifascisme est devenu un ferment de l'unité de la gauche européenne, traumatisée par les divisions du mouvement ouvrier allemand face à la montée d'Hitler. En France, l'antifascisme fut en 1935-1936 le moteur du Front Populaire, alors qu'il n'y avait aucun mouvement fasciste français important. Ainsi, le fascisme devint un mythe, « un ensemble lié d'images motrices », c'est-à-dire une construction irréelle de l'esprit remplissant certaines fonctions (l'unité de la gauche). L'épouvantail fasciste fut encore agité par Mitterrand en 1988 et Chirac en 2001, lorsque pour les besoins de leur cause, ils ont fascisé Jean-Marie Le Pen, quasiment transformé, par le jeu du mythe, en fils illégitime des amours contre nature d'Hitler et de Pétain.
On est là, bien sûr, au cœur d'un processus irrationnel.
La droite nationale contre le fascisme
D'un point de vue historique comme idéologique, la droite nationale apparaît en effet comme le principal ennemi du fascisme.
Non seulement le fascisme n'a pas été engendré par la « droite », mais durant l'entre-deux-guerres, il n'a pu se développer que là où elle était trop faible pour lui faire obstacle. En France par exemple, où de l'avis même d'un ex-sénateur socialiste, Philippe Machefer (6), les ligues patriotiques ne peuvent être assimilées au fascisme, la ligue des Croix de Feu a empêché l'émergence et le triomphe d'un grand parti fasciste d'imitation allemande ou italienne. Tout sépare en effet le christianisme social et patriotique du mouvement du colonel (et futur résistant) de la Rocque du socialisme national et européen d'un Déat ou d'un Doriot.
Z. Sternhell insiste longuement sur « la longue lutte entre la droite et le fascisme » (7). Il oppose Franco, représentant de la droite autoritaire et conservatrice, à José Antonio, Mussolini au roi Victor-Emmanuel, Déat à Pétain. De même, en Roumanie ou en Hongrie, c'est la droite elle-même qui a procédé à la « liquidation », partois sanglante, des partis fascistes.
Que les fascistes, violemment anti-marxistes, aient parfois cherché l'alliance avec la droite nationale et conservatrice ne prouve rien du tout, puisque de la même façon, par antifascisme, les partis marxistes se sont alliés à des éléments très libéraux ( parti radical en France, centre gauche en Espagne ... ). Il est donc aussi absurde de contester le caractère socialiste du fascisme en raison de ses alliances à droite qu'il le serait de contester l'authenticité marxiste de la LCR sous prétexte qu'elle a appelé à voter Chirac en 2002.
A la vérité, tout sépare la droite nationale du fascisme. La conception de la nation, tout d'abord. Vers 1940, le fascisme constitue sans doute, avec le communisme, la seule idéologie à la fois révolutionnaire et internationaliste : avec l'essor de la SS, multinationale et européiste, le critère racial supplante le critère national au sein du fascisme. Le fossé qui sépare les fascistes, révolutionnaires et intemationalistes européens, des hommes de droite nationale, attachés aux traditions et nationalistes authentiques, est alors patent.
De la même façon, la conception de l'Etat est radicalement différente. Pour un fasciste, l'Etat est un but en soi. Il incarne et personnifie le peuple ou la race. Le fascisme confond donc délibérément l'Etat et le groupe humain auquel il se réfère, au lieu de voir dans l'Etat un simple outil au service de la nation, chargé d'en garantir la sécurité et d'en maintenir la cohésion, vision qui est celle de toutes les droites nationales du monde.
Enfin, les conceptions de l'homme se différencient nettement : à rebours de la construction d'un homme nouveau, projet propre à tous les totalitarismes dont le fascisme, la droite nationale ne rêve que de préserver l'homme éternel, enraciné dans les traditions et dans les disciplines morales et culturelles qui ont fait leurs preuves au cours des siècles.
Voilà quelques vérités qu'il fallait rappeler. Le débat est lancé. Que ceux qui, à gauche et à droite, veulent en débattre se manifestent.
(1) Zeev Sternhell, Ni droite, ni gauche - L'idéologie fasciste en France, ed. Seuil, coll. Point, 1983.
(2) Georges Sorel, Réflexions sur la violence, 1908.
(3) Voir Zeev Sternhell, p : 244 .
(4) Friedrich Hayek, La route de la servitude, Librairie de Medicis, 1945.
(5) Hannah Arendt, Origines du totalitarisme, 3e partie, le Système totalitaire, coll. Point. Ed. Seuil.
(6) P. Machefer Ligues et fascismes en France, PUF, 1974.
(7) Zeev Sternhell, ibid. P. 20.
National Hebdo du 6 au 12 juin 2002
Incontestablement, la gauche profite d'un paradoxe : alors même qu'elle a donné naissance au fascisme, elle a également enfanté le mythe antifasciste.
Les origines de gauche du fascisme sont absolument incontestables. Différents types d'analyses, historiques et philosophiques, émanant d'auteurs incontestables, de droite comme de gauche, convergent sur ce point.
Examinons tout d'abord la synthèse idéologique qui a donné naissance au fascisme.
Selon l'historien Zeev Sternhell (1), le fascisme est né de l'évolution d'une fraction du marxisme et du syndicalisme révolutionnaire entre 1880 et 1914. Certains intellectuels révolutionnaires, tels Hubert Lagardelle en France ou Arturo Labriola en Italie constatent en effet que le prolétariat européen, loin de s'appauvrir, s'enrichit, et menace de s'intégrer à la société bourgeoise, perdant toutes ses vertus révolutionnaires. De la même façon, ils observent le patriotisme profond des masses ouvrières lors de l'union sacrée en 1914. Toujours très hostiles au capitalisme, influencés par le théoricien de la violence révolutionnaire Georges Sorel (2), mais ayant pris acte de ce que la nation est un moteur plus puissant que la classe sociale, ces hommes vont substituer la nation au prolétariat comme force révolutionnaire. Ils font alors évoluer une partie de la réflexion socialiste vers un socialisme national animé par une éthique de la violence rédemptrice.
C'est ce complexe idéologique qui, après 1918, formera la vision du monde fasciste, en Italie comme en Allemagne.
Ainsi, le fondateur du fascisme italien, Mussolini, fut d'abord un chef du parti socialiste italien, directeur de l'Avanti, l'organe officiel du parti. En France, les seuls chefs authentiquement fascistes, Valois, Doriot et Déat, furent, le premier un théoricien d'extrême gauche, le second un des responsables du parti communiste, le troisième, un député socialiste successeur présumé de Léon Blum à la tête de la SFIO. Le moins connu d'entre eux, Valois, finira dans les eaux de la SFIO, après avoir fondé le Faisceau, petit parti fasciste français. Pour lui, le fascisme et le marxisme sont deux « variétés du socialisme »(3). En Allemagne, de nombreux communistes furent séduits par les propositions sociales du parti national-socialiste des travailleurs allemands (NSDAP). La vérité historique est évidente: le fascisme a pu séduire, çà et là, quelques hommes de droite. Il n'en reste pas moins fondamentalement issu de l'extrême gauche.
L'étude du projet philosophico-politique des fascistes éclaire encore la lanterne de l'honnête homme. Le fascisme partage avec le socialisme le culte de l'Etat, qui doit entièrement régenter la vie sociale et la croyance dans les vertus de l'économie dirigée. L'influence de l'économiste de gauche Keynes sur la politique de grands travaux du régime fasciste puis sur la politique économique du docteur Schacht en Allemagne, est ainsi très sensible. Le philosophe Friedrich Hayek, dans La route de la servitude (4), consacre d'ailleurs un chapitre entier aux « racines socialistes du nazisme ». En outre, comme le communisme, le fascisme valorise le peuple contre le « bourgeois », le groupe contre la personne. Selon Hannah Arendt (5), cette préférence pour le Tout social contre le particulier est un des éléments constitutifs du totalitarisme.
S'il est piquant de constater que le fascisme vient de la gauche, il faut également voir que le mythe antifasciste en est également issu !
Ce sont les instances dirigeantes de la IIIe Internationale (communiste) qui, dès le début des années 20, ont opéré un amalgame éhonté entre « la droite » et le fascisme, tendant à faire croire que le fascisme était de droite, et la droite plus ou moins « fascisante ».
Dès les années 30, l'antifascisme est devenu un ferment de l'unité de la gauche européenne, traumatisée par les divisions du mouvement ouvrier allemand face à la montée d'Hitler. En France, l'antifascisme fut en 1935-1936 le moteur du Front Populaire, alors qu'il n'y avait aucun mouvement fasciste français important. Ainsi, le fascisme devint un mythe, « un ensemble lié d'images motrices », c'est-à-dire une construction irréelle de l'esprit remplissant certaines fonctions (l'unité de la gauche). L'épouvantail fasciste fut encore agité par Mitterrand en 1988 et Chirac en 2001, lorsque pour les besoins de leur cause, ils ont fascisé Jean-Marie Le Pen, quasiment transformé, par le jeu du mythe, en fils illégitime des amours contre nature d'Hitler et de Pétain.
On est là, bien sûr, au cœur d'un processus irrationnel.
La droite nationale contre le fascisme
D'un point de vue historique comme idéologique, la droite nationale apparaît en effet comme le principal ennemi du fascisme.
Non seulement le fascisme n'a pas été engendré par la « droite », mais durant l'entre-deux-guerres, il n'a pu se développer que là où elle était trop faible pour lui faire obstacle. En France par exemple, où de l'avis même d'un ex-sénateur socialiste, Philippe Machefer (6), les ligues patriotiques ne peuvent être assimilées au fascisme, la ligue des Croix de Feu a empêché l'émergence et le triomphe d'un grand parti fasciste d'imitation allemande ou italienne. Tout sépare en effet le christianisme social et patriotique du mouvement du colonel (et futur résistant) de la Rocque du socialisme national et européen d'un Déat ou d'un Doriot.
Z. Sternhell insiste longuement sur « la longue lutte entre la droite et le fascisme » (7). Il oppose Franco, représentant de la droite autoritaire et conservatrice, à José Antonio, Mussolini au roi Victor-Emmanuel, Déat à Pétain. De même, en Roumanie ou en Hongrie, c'est la droite elle-même qui a procédé à la « liquidation », partois sanglante, des partis fascistes.
Que les fascistes, violemment anti-marxistes, aient parfois cherché l'alliance avec la droite nationale et conservatrice ne prouve rien du tout, puisque de la même façon, par antifascisme, les partis marxistes se sont alliés à des éléments très libéraux ( parti radical en France, centre gauche en Espagne ... ). Il est donc aussi absurde de contester le caractère socialiste du fascisme en raison de ses alliances à droite qu'il le serait de contester l'authenticité marxiste de la LCR sous prétexte qu'elle a appelé à voter Chirac en 2002.
A la vérité, tout sépare la droite nationale du fascisme. La conception de la nation, tout d'abord. Vers 1940, le fascisme constitue sans doute, avec le communisme, la seule idéologie à la fois révolutionnaire et internationaliste : avec l'essor de la SS, multinationale et européiste, le critère racial supplante le critère national au sein du fascisme. Le fossé qui sépare les fascistes, révolutionnaires et intemationalistes européens, des hommes de droite nationale, attachés aux traditions et nationalistes authentiques, est alors patent.
De la même façon, la conception de l'Etat est radicalement différente. Pour un fasciste, l'Etat est un but en soi. Il incarne et personnifie le peuple ou la race. Le fascisme confond donc délibérément l'Etat et le groupe humain auquel il se réfère, au lieu de voir dans l'Etat un simple outil au service de la nation, chargé d'en garantir la sécurité et d'en maintenir la cohésion, vision qui est celle de toutes les droites nationales du monde.
Enfin, les conceptions de l'homme se différencient nettement : à rebours de la construction d'un homme nouveau, projet propre à tous les totalitarismes dont le fascisme, la droite nationale ne rêve que de préserver l'homme éternel, enraciné dans les traditions et dans les disciplines morales et culturelles qui ont fait leurs preuves au cours des siècles.
Voilà quelques vérités qu'il fallait rappeler. Le débat est lancé. Que ceux qui, à gauche et à droite, veulent en débattre se manifestent.
(1) Zeev Sternhell, Ni droite, ni gauche - L'idéologie fasciste en France, ed. Seuil, coll. Point, 1983.
(2) Georges Sorel, Réflexions sur la violence, 1908.
(3) Voir Zeev Sternhell, p : 244 .
(4) Friedrich Hayek, La route de la servitude, Librairie de Medicis, 1945.
(5) Hannah Arendt, Origines du totalitarisme, 3e partie, le Système totalitaire, coll. Point. Ed. Seuil.
(6) P. Machefer Ligues et fascismes en France, PUF, 1974.
(7) Zeev Sternhell, ibid. P. 20.
National Hebdo du 6 au 12 juin 2002
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire