Par ORIENTAL REVIEW
Le 23 mars 1940, un bimoteur civil Lockheed-12A, immatriculé G-AGAR, décolle d’un aérodrome de Heston, dans la banlieue de Londres. Le pilote britannique Haig McLane est aux commandes. L’avion met le cap sur Malte; puis après une escale au Caire, il se dirige vers la base militaire britannique de Bagdad. De là, il prend ensuite la direction de la frontière soviétique avec deux spécialistes de la photographie aérienne à bord. Après avoir traversé la frontière à 7000 m d’altitude sans avoir été repéré, l’avion continue vers Bakou dans le cadre d’une mission de reconnaissance aérienne.
De quoi s’agissait-t-il ?
Les photos sont envoyées aux départements appropriés en Angleterre et en France. Elles ont été utilisées pour élaborer des plans pour une attaque surprise contre l’Union Soviétique, qui devait commencer par les bombardements des villes de Bakou, Grozny, Batumi, Maikop et Poti. Le plan prévoyait l’utilisation de 90-100 bombardiers anglais Blenheim et américains Glenn Martin dans l’attaque de Bakou. Le bombardement devait se dérouler jour et nuit, avec des pilotes s’orientant sur les foyers d’incendie. Tous les champs de pétrole, les raffineries et les ports étaient censés prendre feu.
L’URSS avait achevé la rénovation de ses raffineries de pétrole au début de 1940. Mais d’importants collecteurs de pétrole brut – des fosses remplies de pétrole – et un grand nombre de derricks en bois dataient du passé. Selon une évaluation effectuée par des experts américains, le sol dans ces régions était tellement saturé de pétrole que le feu se propagerait à grande vitesse et se déplacerait vers d’autres champs. Il faudrait des mois pour éteindre les incendies et des années avant que la production ne puisse reprendre.
Ce que nous savons de l’écologie aujourd’hui nous dit que ces bombardements auraient créé une catastrophe environnementale. Des colonnes de convection se seraient formées au-dessus des feux, et l’air chaud aurait poussé les produits de combustion dans les couches supérieures de l’atmosphère. Cela aurait produit des pluies acides, perturbé l’échange de chaleur dans l’atmosphère et contaminé la zone avec des substances cancérigènes et mutagènes. Les habitants de Bakou seraient restés sans eau, bien sûr, parce que les produits de combustion auraient empoisonné les puits. Les incendies dans les puits profonds auraient libéré des «eaux mortes» contenant des composés de cuivre et d’azote. Le ruissellement des produits de combustion dans la mer aurait détruit la flore et la faune marine.
C’est horrible à imaginer. Il est incompréhensible que l’Occident «civilisé» planifie froidement de tuer des centaines de milliers de civils avant même les bombardements barbares de Dresde, Hiroshima et Nagasaki. Et c’étaient des civils, parce qu’il n’y avait pas de forces ou d’installations militaires importantes à Bakou, Dresde, Hiroshima ou Nagasaki.
Les préparatifs étaient sérieux
Le 11 janvier 1940, le secrétaire général du ministère français des Affaires étrangères, Léger, écrivait à l’ambassadeur américain Bullitt que la France ne romprait pas ses relations diplomatiques avec l’Union Soviétique et ne lui déclarerait pas la guerre ; elle détruirait l’Union Soviétique si possible, en utilisant des canons si nécessaire.
Le Premier ministre français Daladier proposa d’envoyer un escadron dans la mer Noire pour bloquer les lignes de communication soviétiques et bombarder Batumi depuis la mer. Le 19 janvier 1940, il envoie un document sur l’attaque de l’Union Soviétique au général Gamelin, commandant en chef de l’armée française et vice-président du Conseil suprême de guerre, ainsi qu’à l’amiral de la flotte Darlan. Deux exemplaires du document ont été adressés au général Koëltz, commandant des forces terrestres françaises, et au général Vuillemin, chef d’état-major de la Force aérienne française et commandant en chef de sa force aérienne.
Le 24 janvier 1940, le général Ironside, chef d’état-major de l’Empire britannique, envoya au Cabinet de guerre un mémorandum sur «la principale stratégie de guerre», dans lequel il déclarait que l’Angleterre ne pouvait aider la Finlande de manière efficace que si elle attaquait la Russie sur le plus grand nombre possible d’axes et, surtout, en frappant Bakou – une région de production de pétrole – afin de provoquer une grave crise nationale en Russie.
Autre fait : lors de la réunion des chefs d’état-major de l’Angleterre et de la France à Paris le 31 janvier 1940, le général français Gamelin suggère que les bombes britanniques soient larguées sur des cibles à l’intérieur de la Russie; et le maréchal anglais Pierce, chef d’état-major adjoint de l’aviation britannique, avait soutenu la proposition.
Comme on dit, les faibles suivent les forts. Le ministre iranien de la Guerre, M. Nakhjavan, demande aux Britanniques de lui fournir 80 avions et de coordonner les plans de la guerre contre la Russie.
Le 3 février 1940, l’état-major français ordonne au général Jaunaud, commandant de l’armée française en Syrie, d’étudier la possibilité d’une attaque aérienne contre Bakou. Trois jours plus tard, la question est discutée et approuvée lors d’une réunion du Cabinet de guerre de l’Angleterre. À la lumière de la mission assignée, le Comité des chefs d’état-major ordonne la préparation d’un document.
Le 28 février 1940, l’état-major de la France produit un document contenant des calculs précis des moyens nécessaires pour l’attaque de Bakou. L’approche britannique en la matière était complète et proposait d’attaquer notre pays dans trois directions. En fin de compte, tous les détails avaient été coordonnés et des négociations eurent lieu avec l’état-major turc en mars – il était entendu que la Turquie participerait également à l’attaque contre l’Union Soviétique. Un travail encore plus intensif pour coordonner et finaliser les plans des agresseurs a lieu en avril. Reynaud, qui a succédé à Daladier comme Premier ministre, était un faucon encore plus grand que son prédécesseur et exigeait plus d’action de la part des Britanniques.
La machine infernale qui préparait l’attaque de l’Union Soviétique commença à compter les derniers jours et heures avant le bombardement des champs de pétrole de notre pays qui devait avoir lieu le 15 mai 1940. Les stocks de carburant des avions et de bombes explosives et incendiaires furent augmentés sur les aérodromes britanniques et français au Moyen-Orient; les navigateurs avaient indiqué les directions d’attaque sur les cartes pour permettre aux pilotes d’effectuer des bombardements nocturnes. Reynaud téléphona à Churchill le 10 mai 1940 pour dire que la France était prête pour l’attaque du 15 mai.
Ce qui les a arrêtés
Mais … ironie du sort ! Le 10 mai, cinq jours avant que l’Angleterre et la France ne commencent leur guerre contre l’Union Soviétique, Hitler donna l’ordre d’arrêter la ” Drôle de Guerre ” avec la France qui ne comportait aucune opération militaire et lança une attaque décisive. Les Allemands vainquirent les Français en quelques jours, et pour une quelconque raison, une nouvelle campagne russe n’avait plus que peu d’intérêt pour les héritiers de Napoléon. Les Allemands n’ont pas réussi à détruire le Corps expéditionnaire britannique en France et l’ont laissé s’échapper à Dunkerque.
Juste cinq jours – et l’histoire prenait un chemin différent! L’histoire, bien sûr, abhorre le subjonctif, mais nous pouvons être sûrs que le coût de la guerre aurait été complètement différent. Nous aurions repoussé l’attaque des agresseurs britanniques et français. Les dirigeants soviétiques étaient au courant des plans d’attaque de Bakou – et ils étaient prêts à réagir. Des chasseurs de haute altitude MIG-3 avaient été mis au point et mis en service – ils étaient capables d’intercepter des bombardiers britanniques, américains et français à haute altitude. Les avions de combat anglais armés uniquement de mitrailleuses ne représentaient pas une menace pour les bombardiers de combat blindés Il-2, sans parler des avions de combat français. Le raid aérien «allié» n’aurait donc pas causé les désastres, la mort et la destruction qu’ils espéraient. Les relations avec l’Allemagne auraient pu être différentes.
Tôt ou tard, le système politique de l’Allemagne aurait évolué; ses excès auraient été dans le passé, comme les feux de l’Inquisition et les Croisades, la persécution des hérétiques et les bûchers des sorcières.
Bien sûr, une attaque contre notre pays aurait été inquiétante. L’Allemagne aurait compris comment faire cause commune avec l’Angleterre ou la France. D’autant plus que l’Angleterre avait son propre Sir Oswald Mosley – le chef des fascistes britanniques et membre du Parlement et du gouvernement qui connaissait personnellement les rois anglais et belges, ainsi que Hitler et Goebbels. Ils auraient trouvé un langage commun. Nous ne devrions pas oublier: les forces de Hitler comprenaient 200 000 volontaires français qui ont combattu notre pays. Et voici un autre détail intéressant: les derniers défenseurs du bunker d’Hitler étaient des soldats français des SS.
Cinq jours, cinq jours seulement … et l’histoire aurait pris un cours différent …
Traduction : Avic – Réseau International
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