Le 21 février 1431 s’ouvre à Rouen le procès de Jeanne d’Arc. Le texte intégral du procès a été élaboré à partir des actes authentiques (les minutes). L’avocat et écrivain Jacques Trémolet de Villers est connu pour avoir plaidé de nombreuses affaires médiatiques à caractère politique. Il décrypte les audiences et nous livre son commentaire, jour après jour, du procès de Jeanne d’Arc.
Née vers 1412 à Domrémy, « la Pucelle d’Orléans » avait conduit victorieusement les troupes françaises contre les armées anglaises et ainsi rendu possible le sacre du roi Charles VII à Reims. Mais capturée par les Bourguignons, elle est vendue aux Anglais et emprisonnée dans d’indignes conditions de détention. Elle est enchaînée jour et nuit, défend sa vertu face aux geôliers anglais, est privée de sa messe quotidienne… S’ouvre alors un procès en hérésie conduit par Pierre Cauchon, évêque de Beauvais et ancien recteur de l’université de Paris.
Dès sa première parole, cette jeune fille de 19 ans, seule à la barre, « prend la main » sur le procès. Les fers aux pieds, elle déjoue aisément les pièges d’une cinquantaine d’évêques, professeurs et docteurs de l’Université de Paris. Par la force de sa sincérité, elle déstabilise ses juges et même Cauchon, aveuglé de vanité.
Ses répliques sont restées célèbres. Lorsqu’on lui demande si elle est « dans la grâce de Dieu », elle répond avec majesté « Si je n’y suis, Dieu m’y mette ; et si j’y suis, Dieu m’y tienne ». On ne peut qu’admirer la beauté de la langue qu’elle emploie. Jeanne apparait ainsi dans toute sa vivacité, son charme et son audace. On reste souvent stupéfait face à la profondeur mystique de ses réponses.
Malgré sa défense, à la fin de ce procès entaché de nombreuses irrégularités, elle sera condamnée à être brûlée vive le 30 mai 1431. Mais elle sera réhabilitée par un nouveau procès en 1456, avant d’être canonisée en 1920.
Jacques Trémolet de Villers commente le procès avec sa compétence d’avocat pénaliste. Il analyse la stratégie des juges et les manoeuvres des interrogateurs. Il explique la ligne de défense inspirée de l’accusée. Le résultat est saisissant. On découvre la tension tragique de ce procès politique. Les lumineuses réponses de Jeanne éclairent notre époque obscure. Pour Jacques Trémolet de Villers, il n’y a qu’une seule explication : Jeanne est guidée par les voix de Sainte Catherine et de Sainte Marguerite. Il révèle ainsi qu’ “elle est naturelle jusque dans le surnaturel”.
Kristol Séhec
Jeanne d’Arc, Le procès de Rouen, lu et commenté par Jacques Trémolet de Villers, Éditeur Les Belles Lettres, 320 pages, 24,90 euros.
Crédit photo : DR
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