« Les fléaux de la pestilence, de la famine, des guerres, des tremblements de terre sont considérés comme une bénédiction pour les nations surpeuplées. Puisqu'ils servent à tailler dans la croissance luxuriante de la population humaine ». (Tertullien, père de l'Eglise, IIIe siècle).
La cabale montée par l'idéologie socialiste et le culte multiracial contre l'Anglais Thomas Malthus (1766-1834) est une des grandes supercheries des temps modernes; on peut encore lire à l'article Malthus de l'International Encyclopoedia of the Social Sciences que sa théorie de la population « est un exemple parfait de métaphysique travestie en science ». Si les néo-malthusiens, depuis Francis Place au XIXe siècle, préconisèrent la contraception, l'homme d'église qu'était Malthus l'a toujours condamnée. Plus d'un sera surpris d'apprendre que dans la seconde édition de son Essai sur le Principe de Population, précisant sa pensée sur la réduction de la natalité, il invoque la « restriction morale ». Qu'il réduit à un mariage tardif accompagné par un « célibat prénuptial » qui n'est autre que « l'abstinence » en train de faire florès aux États-Unis.
En revanche, il ne cessa de déplorer que les moins aptes à survivre se reproduisent le plus. De surcroît, ses théories ont été notablement déformées par ceux qui en firent une analyse mathématique, comme l’agrarienne et économiste danoise Ester Boserup. Pour cette dernière, en effet, les méthodes agriculturales sont directement influencées par l'importance de la population, de sorte que plus celle-ci est nombreuse, plus elle suscite l'innovation et crée l'abondance, alors que pour Malthus, si la nourriture vient à manquer, la population en trop doit périr. Pour lui, les surfaces agricoles conditionnent la survie des populations. Mais ces dernières se multipliant à la mesure de l'espace dont elles disposent jusqu'à atteindre des niveaux insupportables, dès lors la nourriture se raréfie, les famines surviennent, et la démographie s'effondre… Pas du tout, rétorque Boserup, une forte croissance démographique contraint la société à accroître la nourriture en utilisant plus de main-d'œuvre, de mécanisation, d'engrais. Sauf que, en forçant ainsi indéfiniment la production, on aboutit à l'impasse dans laquelle s'est enferrée l'agriculture industrielle contemporaine. « La vigueur de la population, écrit Malthus, est à ce point supérieure à celle que la terre dispense pour nourrir l'homme au 'une mort prématurée doit, d'une façon ou d'une autre, rendre visite à la race humaine. Les vices de l'humanité sont des relais actifs et efficaces de la dépopulation Ils sont les précurseurs de la grande armée de démolition et souvent achèvent eux-mêmes le terrible travail. Si pourtant ils échouaient dans cette guerre d'extermination, les saisons malades, les épidémies, la vermine, la peste avanceraient en ordre terrifiant, Et balaieraient des dizaines de milliers de gens. Si encore le succès n'était pas total une famine aussi gigantesque qu'inévitable surgirait de l'arrière et d'un seul coup remettrait au même niveau population et nourriture. »
Dès les années 1950, les Prix Nobel américains Robert Solow, Paul Samuelson, Edmund Phelps ou Kenneth Arrow exposent une vision très malthusienne de la croissance démographique et de la production. Il n'est d'ailleurs pas nécessaire de citer Malthus pour faire du malthusianisme. Après tout, chacun souhaite que soit préservé du mieux qu'il est possible le plus qu'il est possible. Les économistes cités, notamment Samuelson, sont parmi les scientifiques américains les plus renommés au XXe siècle. Sur la démographie ils s'opposeront à de solides antimalthusiens qu'ils retrouvent pourtant à leurs côtés dans la lutte contre le mondialisme et le libre-échange, tel Lyndon LaRouche, électron libre qui erre entre extrême droite et extrême gauche.
On comprend qu'en ce début de XXIe siècle, si Thomas Malthus n'a jamais été à la fois autant encensé et détesté, il concentre sur lui toute l'inquiétude du monde moderne. Rappelons ici que John Holdren, le conseiller d'Obama sur les questions scientifiques, ne l'a jamais dissimulé : « Nous campons fermement dans le camp malthusien, écrivait-il en 1977 dans Ecoscience, écrit en commun avec Ann et Paul Ehrlich… : contrôle de la population, limitation de la consommation matérielle, redistribution des richesses, transition vers des technologies moins brutales du point de vue social et environnemental qu'elles ne le sont aujourd'hui, orientation vers une forme de gouvernement mondial ».
Le catéchisme socialo-libéral pourtant ne cesse de le marteler Malthus s'est trompé, l'humanité n'a pas été balayée par la famine. On connaît sa formule les ressources tendent à se développer arithmétiquement alors que la population, si elle n'est pas contrôlée, le fait de façon géométrique. Les premières sont ainsi débordées par la seconde. En somme, « un correcteur naturel des excès provoqués par les intempérances du Progrès ».
Bon. Malthus était toutefois doté d'un véritable « esprit social ». Son père était un ami du philosophe David Hume, un des plus grands écrivains de langue anglaise, et de Rousseau. Attiré par les idées libérales d'Adam Smith, lui-même s'efforça d'appliquer les idées du pasteur William Godwin, disciple de Rousseau et de Condorcet, admirateur des Lumières, considéré comme le premier anarchiste moderne et auteur en 1793 d'un pamphlet qui exigeait plus d'égalité sociale et économique afin d'éradiquer la pauvreté.
Son influence sur Darwin
Pendant des années, Malthus s'occupa des pauvres de sa paroisse frappés par les mauvaises récoltes de 1794 et de 1800. S'engageant dans une sorte d'apostolat fort éloigné de l'image qu'on lui prête, il tira de cette expérience un traité (non publié) en faveur de l'assistance publique. Son admiration pour Godwin ne dura qu'un temps et s'acheva avec la publication par celui-ci d'Enquête sur La Justice politique, où, se laissant emporter par son enthousiasme révolutionnaire, il associait la croissance démographique à un progrès sans fin et à l'épanouissement de la justice sociale. L'Essai sur le Principe de Population de Malthus fut donc écrit en réaction contre cet optimisme outrancier dont il pouvait mesurer autour de lui la nocivité.
Replacer Malthus dans son contexte évite les anachronismes fâcheux. Lorsque paraît l'Essai sur la Population, la Grande-Bretagne est en crise. Les idées caritatives se développent notamment dans le cadre du « Paternalisme Tory » qui relancera les Lois sur la pauvreté, remontant à la peste noire de 1350, et codifiées par les Tudors en 1595 afin d'éliminer les vagabonds. En 1601, elles furent transformées en lois d'aide sociale par Elizabeth 1ère. En 1834 furent enfin votées de véritables lois d'aide sociale à la pauvreté sous l'impulsion du juriste et philosophe Jeremy Bentham - qui devait profondément influencer le mouvement anglo-américain de l’État-providence. Malthus s’y était toujours opposé dans la forme, y voyant une démarche futile ne pouvant déboucher que sur un accroissement du nombre des pauvres. Bentham, proche des premiers socialistes, comme Owen, ou des libéraux, comme James Mill et son fils John Stuart Mill, était également très lié avec l'économiste David Ricardo qui appartenait à l'entourage de Malthus. Il entretenait une correspondance suivie avec Adam Smith, Mirabeau et d'autres chefs de la Révolution qu’il soutint à ses débuts avant de s'en dissocier, révulsé par les « Droits Naturels » et la Terreur.
En 1798, la Terre ne compte que 900 millions d'habitants. Huit ans plus tôt a eu lieu le premier recensement américain. On se déplace à cheval, en voiture de trait ou à pied. Le premier train de passagers roulera en 1825 et le premier vapeur traversera l'Atlantique en 1827 C'est un temps d'optimisme exalté que ne partagent certes pas Dickens, Rousseau ou Thoreau. On se prépare à une ère industrielle qui fait rêver, convaincu que plus on serait nombreux à profiter de cette révolution de l'objet et plus s'imposerait le paradis sur terre. C'est dans ce contexte euphorique que Thomas Malthus publie son brûlot, que les disciples de ses contemporains qui réclamaient sa déchéance ne lui ont toujours pas pardonné, non plus que ses anticipations alarmistes.
L’ennemi public n°1 pour Marx
Aujourd'hui encore, les plus féroces adversaires de Malthus sont les marxistes de tout poil, ce qui explique, étant donné leur omniprésence dans les média, la force de la cabale déchaînée contre lui.
À suivre
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