Dans Présent, Alain Sanders nous rafraîchit la mémoire :
[…] Ainsi a-t-on commencé à rappeler, même dans la presse serve, que l’esclavage a été pratiqué par les Noirs pendant des siècles. Pour leur compte d’abord, puis en revendant leurs esclaves, raflés au fin fond de la brousse, aux négriers européens sur les côtes. Sans la complicité de ces chefs et roitelets africains, rien n’aurait été possible. Sur le sujet, on lira avec profit l’essai d’Arnaud Raffard de Brienne, La Désinformation autour de l’esclavage (Atelier Fol’Fer).
Ainsi a-t-on commencé, bien timidement certes, n’empêche, à évoquer le rôle des négriers arabo-musulmans (ce que la Taubira avait choisi d’étouffer pour ne pas stigmatiser Mohamed et ses congénères…). Du VIIe au XXe siècle, les Arabo-Musulmans exportèrent de 8 à 12 millions de Noirs vers le monde islamique, en connivence avec les middlemen noirs africains.
Ainsi a-t-on osé, bien frileusement certes, n’empêche, parler du Liberia, cet Etat créé par des Afro-Américains en 1822. Déclaré indépendant en 1826, organisé (et mis en coupe réglée) en 1847, reconnu l’année suivante par la France et la Grande-Bretagne, le pays a été immédiatement régi d’une main de fer par les Freemen (soit 3 % de la population) qui feront des autochtones des esclaves employés à travailler les champs de coton. Rebelote au début du XXe siècle quand le caoutchouc et les plantations d’hévéa vinrent asseoir plus encore la fortune des « Noirs civilisés » (comme ils s’auto-désignaient pour se démarquer des « sauvages »). Cet esclavage a duré jusqu’en 1932. Mais de nos jours, à Monrovia, on continue à pratiquer une ségrégation raciale, à peine rampante, entre les descendants des Freemen et les tribus indigènes.
Mais ce dont on ne vous parlera jamais, du moins de ce côté de l’Atlantique où des Blancs honteux s’aplatissent devant les Noirs les plus outrancièrement racistes, c’est l’existence aux Etats-Unis et dans les Caraïbes – et bien avant la guerre dite de sécession – de Black slave owners. A savoir des Afro-Américains qui possédaient des esclaves. Dès 1650, on relève les noms de Noirs (souvent des affranchis) maîtres d’esclaves noirs. On en comptera plusieurs à Boston en 1724. D’autres tout aussi nombreux dans le Connecticut en 1783. Ou encore dans le Maryland où, en 1790, 50 Afro-Américains possédaient 150 esclaves.
Quelques-uns sont passés à la postérité. Comme l’effrayant Nat Butler qui, en plus de posséder des esclaves, s’était fait une spécialité de slave hunter : il traquait les fugitifs et les revendait aux plus offrants. Justus Angel et sa compagne Horry, tous deux Afro-Américains de Caroline du Sud, possédaient 168 esclaves en 1830. La veuve Richards et son fils étaient parmi les Black slave owners les plus riches de Louisiane. La famille Pendarvis employait dans ses rizières quelque 130 esclaves. Marie Metoyer (ancienne concubine noire d’un Français) possédait 287 esclaves en 1830. L’un des plus riches propriétaires d’esclaves de Caroline du Sud, William April Ellison [photo], fut même (ce qui était en principe puni par la loi) un slave breeder (un « éleveur d’esclaves ») : il sélectionnait des procréatrices vigoureuse dont il revendait les enfants…
Un mot particulier sur Antoine Dubuclet (je suis allé sur ses traces il y a quelques années), gentilhomme de couleur très distingué, maître d’immenses plantations de cannes à sucre en Louisiane et bien plus riche que les plus aisés de ses voisins – et amis – blancs… Ce qui ne l’empêcha pas d’être nommé trésorier pendant la Reconstruction (l’occupation du Sud par des gauleiters yankees).
On pourrait parler aussi – peut-être une prochaine fois si « ils » continuent à nous courir sur l’haricot – de la Jamaïque où les Maroons (les « Nègres marrons ») signèrent en 1739 un traité avec les Anglais : en échange de terres et d’une vraie autonomie, ils s’engageaient à capturer les esclaves fugitifs et à les livrer à leurs maîtres.
https://www.lesalonbeige.fr/ces-afro-americains-qui-possedaient-des-esclaves/
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