dimanche 22 mai 2016

Comprendre l’esprit de la Révolution | Par Pierre Hillard.

La réédition du livre d’Emmanuel Malynski (1875-1938), La guerre occulte, aux Éditions Omnia Veritas, est véritablement une œuvre de salubrité publique.
36b77c_ec5ba9bc7b7c481e871a2c8f2f71c3fe.jpgParu à l’origine en 1936, son auteur est un aristocrate polonais qui a travaillé en liaison avec Léon de Poncins. Sillonnant la planète, maîtrisant plusieurs langues, pilote d’avion de la première heure, le comte Malynski était doté d’une immense culture politique, historique, économique et religieuse. Un classicisme de la pensée allait de pair avec une finesse d’analyse lui permettant de saisir les causes profondes à l’origine des maux caractérisant les sociétés occidentales aux XIXème et XXème siècles. Son livre traite de différents sujets comme « Metternich, champion de la contre-Révolution », « Nationalisme et universalisme », « La Commune et la haine éternelle », « La guerre mondiale », « La révolution de mars 1917 », « Lénine » etc. Il ressort de ces différents chapitres que le fond de tous ces événements reposent sur une lutte titanesque opposant l’esprit du christianisme à celui de la contre-église d’esprit hébraïque sous l’égide de satan. Une véritable métaphysique de l’histoire est subtilement décortiquée et expliquée par Emmanuel Malynski. L’auteur de ces lignes peut dire qu’il a été subjugué par la finesse de l’analyse et la logique des explications. Cet aristocrate polonais nous fait comprendre véritablement ce qu’est l’esprit de la Révolution avec ses conséquences spirituelles et temporelles opposé à celui de la Révélation. La lecture de ce livre est absolument nécessaire pour tout catholique d’esprit (encore) traditionnel car il est l’antidote permettant de saisir la continuité de ce combat bimillénaire surtout à notre époque.

Pierre Hillard
3 avril 2016

Billet intialement publié sur Médias-Presse-Infos.

(1) Les grandes batailles du passé - Alesia (52 av J C )

samedi 21 mai 2016

La garde prétorienne, histoire de l'armée romaine.

La garde prétorienne était une unité de l'armée romaine constituée de soldats d'élite initialement recrutés en Italie. Ces unités tirent leur origine du petit groupe d’hommes dont s’entouraient les magistrats républicains connus sous le nom de préteurs et leur nom du camp des légions romaines où était dressée la tente du commandant de la légion, le prétoire, quand ils partaient en campagne. 
Durant la République romaine il n'existe pas de garde permanente chargée de la protection des officiers généraux. Mais certains officiers choisirent de s'entourer d'une garde de soldats pour assurer leur sécurité, donnant naissance aux premières « gardes prétoriennes ». En cas de bataille, elles interviennent comme une ultime réserve.
Sous l'empire, les prétoriens constituent la garde rapprochée de l'empereur et une partie de la garnison de Rome. Ils sont dirigés, suivant les époques, par un, deux, ou quatre préfet du prétoire et évidemment par l'empereur lui-même. Jusqu'à Vespasien, le préfet du Prétoire est toujours un chevalier, et cette fonction est la plus haute de l'ordre équestre.
Ils tirent plusieurs avantages de leur proximité avec l’empereur : les prétoriens sont les seuls à être admis en armes dans l'enceinte sacrée de Rome ; leur temps de service obligatoire est plus court (12 ans au lieu de 16), et leur solde est plus élevée que celle d’un légionnaire. Sous Néron, la solde d'un prétorien était trois fois et demie celle d'un légionnaire, augmentée des primes de donativum, octroyées par les nouveaux empereurs. De grosses distributions d'argent et de nourriture récompensaient la fidélité des prétoriens après l'échec de chaque complot particulièrement grave (tel celui de Messaline contre Claude en 48 ou de Pison contre Néron en 65).
La garde prétorienne se tenait généralement autour du général ou de l'empereur. Leur rôle était simple, protéger leurs supérieurs hiérarchiques jusqu'à la mort car c'était l'unité d'élite par excellence de l'empire romain qui était capable de faire une percée dans les rangs ennemis ou tenir un flanc par exemple.

La dernière croisade : Saint Louis à Tunis (Xavier Hélary)

Xavier Hélary est professeur en histoire médiévale et auteur de plusieurs ouvrages consacrés à cette période.
la-dernière-croisade-200x300.jpgLa croisade de Tunis a été un échec complet. La préparation en a pourtant été menée avec beaucoup de soin. Les croisés sont suffisamment nombreux, bien équipés, dotés en montures en quantité. Le ravitaillement a sans doute été aussi bien préparé que les conditions logistiques de l’époque le permettent. Les Génois arment une flotte de qualité. La décime sur l’Eglise, les revenus du domaine royal et notamment les aides fournies par les villes ont donné les moyens financiers nécessaires. Tout au long de la campagne, enfin, l’autorité de Saint Louis comme chef de l’armée est unanimement reconnue et respectée, et la discipline règne dans les rangs.
Cette expédition méthodiquement préparée connaît pourtant une issue désastreuse. Xavier Hélary retrace l’ensemble des événements. Le récit commence avec la reprise de la croix par Saint Louis en 1267, et couvre les immenses préparatifs diplomatiques, financiers, matériels et spirituels que le roi de France supervise pendant les trois années qui précèdent son départ. L’auteur narre ensuite le départ des croisés d’Aigues-Mortes, le 1er juillet 1270, le débarquement sur les côtes tunisiennes le 18 juillet, la prise de Carthage le 24 juillet, puis l’épidémie qui frappe les croisés dès le début du mois d’août et qui emporte Saint Louis le 25 août, jusqu’au retour des survivants en France au printemps 1271. 
Ce livre cherche à comprendre les raisons de ce fiasco.
La dernière croisade, Xavier Hélary, éditions Perrin, 317 pages, 22 euros
A commander en ligne sur le site de l’éditeur

Lepante 1571

vendredi 20 mai 2016

Nos ancêtres ? Rien n’a changé, ce sont toujours les Gaulois !

Les fossoyeurs de la France qui sont au pouvoir n’ont de cesse de falsifier la mémoire de notre peuple, voire de la souiller ; à preuve l’épisode tragi-comique de la commémoration du centenaire de la bataille de Verdun où nos « élites » n’avaient rien trouvé de plus symbolique que d’inviter à cette occasion un « rappeur » noir antifrançais.
Cette triste affaire n’est que l’une des nombreuses opérations de harcèlement que mènent nos politiciens de gauche et de droite pour éradiquer de notre mémoire tout ce qui a fait la gloire de notre pays. Ils semblent aussi s’être ligués pour semer la confusion sur les origines de la France afin de mieux la dépouiller de son identité, et c’est ainsi qu’on a pu entendre des déclarations de nos gouvernants qui auraient fait pleurer de rire (ou pleurer tout court) n’importe quel écolier des années 50 ou 60.
Non, les racines de la France ne sont pas musulmanes, comme l’affirmaient Jacques Attali ou Jacques Chirac, elles ne sont pas plus juives, selon les dires de Nicolas Sarkozy, et le ramadan n’est pas « une fête qui fait partie du patrimoine culturel français », comme le prétend le maire de Paris, Anne Hidalgo.
Elles ne sont pas non plus « helléno-chrétiennes » ou « judéo-chrétiennes ».
Les racines sont ce qui nous ramène au plus loin de notre passé et au plus profond de notre vérité et elles ne sont pas fluctuantes. Elles sont le socle immuable de notre croissance.
Les racines de la France sont gauloises, c’est-à-dire émanant du peuple celte qui s’est établi à partir du VIe siècle avant J.-C. sur la totalité du territoire français actuel et une partie de l’Italie du Nord, et qui s’est battu pour son indépendance contre l’envahisseur romain sous la bannière de son héros, Vercingétorix.
Ce substrat ethnique originel a, certes, varié tout au long des siècles qui ont suivi son implantation avec les nombreuses migrations de nos cousins indo-européens qui ont traversé notre territoire et y ont laissé leur trace. Des greffes nombreuses, spirituelles avec le christianisme et la monarchie, techniques et politiques avec les Romains, philosophiques avec les Grecs, ont réussi et ont permis à la France de devenir le phare de l’Europe… jusqu’à la Révolution, qui a détruit une grande partie de notre patrimoine humain, architectural, artistique, spirituel et culturel.
Les universitaires de tous bords (et même du nôtre) évaluent avec condescendance la civilisation celte sous prétexte qu’elle n’a pas utilisé l’écriture (volontairement, pour ne pas figer la mémoire !) et qu’elle n’a pas laissé de grandes œuvres architecturales ou civilisationnelles.
Nous ne sommes pas pour autant les fils d’Homère ou de la Louve.
N’allons pas chercher ailleurs notre héritage, nous n’avons pas à rougir de la spiritualité de nos druides anciens, de la vaillance de nos guerriers, de la créativité de nos artisans et de nos artistes qui ont donné à la France son raffinement et sa place dans le monde.
Pierre-Émile Blairon Boulevard Voltaire :: lien

Sparte - La bataille des Thermopyles

La petite histoire : Le martyr de la Normandie sous les bombes alliées

jeudi 19 mai 2016

Considérations sur la France, de Joseph de Maistre 2/2

Maistre aborde l'inanité des arguments des républicains, plus doués à brasser de l'air qu'à embrasser la réalité du genre humain, et écrit ces lignes intéressantes, a posteriori : « les écrivains amis de la République (…) s'attachent uniquement à prouver aux Français qu'ils s'exposeraient aux plus grands maux s'ils revenaient à leur ancien gouvernement »… ça ne rappelle à personne la tactique des tenants de l'Union Européenne ?
À ses yeux, c'est bien simple : les Républicains sont des guignols. Au début de sesRéflexions, il évoque la capacité de personnages supposément illustres comme Mirabeau et Lafayette à agiter la multitude sans pouvoir la dominer, véritable cachet de la médiocrité dans les troubles politiques. Entre le 1er juillet 1789 et le mois d'octobre 1795, 15479 lois sont votées. Maistre doute que les treize siècles de rois de France aient fait preuve d'un tel zèle… contre-productif : plus on écrit, et plus l'institution est faible, la multiplicité des lois ne prouvant que la multiplicité des chocs et le danger de destruction. Maistre regarde les hommes, et ne voit plus que des enfants qui se font tuer pour élever un grand édifice de cartes. Il jette un œil aux signatures des assemblées primaires qui ont accepté la constitution de Condorcet, et lit sur nombre d'entre elles « acceptée, faute de mieux »… suggérant que c'est là la disposition générale de toute la Nation. Après la terreur, l'apathie. C'est ce qui garde au pouvoir nos dirigeants. Il adjure les Français de se demander s'ils n'ont pas besoin de se faire violence pour donner à ces dirigeants le titre de législateurs, et déplore qu'il n'y ait plus de rang en France, seulement du pouvoir qui ne se tient qu'à la force. Il ne voit plus que mascarade, évoquant « le fonctionnaire public qui, chargé de ces signes déshonorés, ne ressemble pas mal au voleur qui brille sous les habits de l'homme qu'il vient de dépouiller »…
Maistre casse d'autres idées reçues concernant la monarchie, dans une France républicaine où commence déjà à se former une aristocratie d'un type nouveau. « C'est encore une grande erreur d'imaginer que le peuple ait quelque chose à perdre au rétablissement de la monarchie, car [il] n'a gagné qu'en idée au bouleversement général. Il a droit à toutes les places, dit-on ; qu'importe ! Il s'agit de savoir ce qu'elles valent. » Pour Maistre, « la monarchie est (…) le gouvernement qui donne le plus de distinctions au plus grand nombre de personnes. (…) Qu'on se rappelle cette foule innombrable d'emplois que l'ancien gouvernement de France présentait à l'ambition universelle. Le clergé séculier et régulier, l'épée, la robe, les finances, l'administration, etc., que de portes ouvertes à tous les talents et à tous les genres d'ambition ! » Ces affirmations sont sans doute à étudier avec la plus grande minutie, mais la conclusion de Maistre résonne bruyamment dans notre réalité : « le pouvoir est à la portée de tout le monde depuis qu'il est placé dans la poussière »…
Constitutions et rois 
Qui dit république dit constitution écrite par les hommes, et Maistre a un peu de mal avec le concept. Pour lui, aucune constitution ne résulte d'une délibération ; les droits des peuples ne sont jamais écrits, ou du moins les actes constitutifs ne sont jamais que des titres déclaratoires de droits antérieurs dont on ne peut dire autre chose, sinon qu'ils existent parce qu'ils existent. L'ancienne constitution française, la vraie, c'est ce que l'on sentait lorsqu'on était en France, ce « mélange de liberté et d'autorité, de lois et d'opinions, qui faisait croire à l'étranger, sujet d'une monarchie, et voyageant en France, qu'il vivait sous un autre gouvernement que le sien ». On revient à cette prodigieuse abstraction qui ne tient qu'à une chose : Dieu. Ou, en étant un peu moins mystique, le clergé. Maistre trouve à la monarchie française un « certain élément théocratique qui lui est particulier, et lui a donné mille quatre cents ans de durée. » Un élément d'une grande subtilité : tandis que le sacerdoce était en France une des trois colonnes qui soutenaient le trône, et même lorsqu'un prêtre était notre premier ministre, on n'avait point en France de gouvernement de prêtres. Mais Dieu était bien partout, et le roi n'était certainement pas au-dessus de lui.
Maistre est un royaliste, mais un royaliste français, c'est-à-dire un qui, a priori, n'a rien à voir avec un khmer rouge, fier d'entendre, de la bouche d'un Machiavel, que le gouvernement de son royaume est « le plus tempéré par les lois ». Il cite plusieurs passages du Développement des principes fondamentaux de la monarchie française, publié en 1795 par des magistrats sans doute royalistes : « il est des lois que les rois eux-mêmes s'avouent dans l'heureuse impuissance de violer, [ce sont] les lois du royaume »… « la nécessité du consentement de la nation à l'établissement des impôts est une vérité incontestable reconnue par les rois »… « le roi défend d'obéir à l'homme, il n'a pas de plus grand ennemi »… etc. Quelqu'un a-t-il l'impression d'entendre les caractéristiques d'un despotisme ? Maistre écrit : « Dira-t-on que ces belles lois n'étaient point exécutées ? Dans ce cas, c'était la faute des Français, et il n'y a plus pour eux d'espérance de liberté, car lorsqu'un peuple ne sait pas tirer parti de ses lois fondamentales, il est fort inutile qu'il en cherche d'autres. » Machiavel a dit : « Nulle nation ne peut se donner la liberté si elle ne l'a pas ». Et c'est parce que sa soif est difficilement étanchée que la quête conduit souvent à la folie meurtrière. Mais les fantasmes idéologiques ont la peau dure, et le Français contemporain de Maistre est piégé par les grandes idées d'une république qui se sert précisément de ces dernières pour le traiter comme un chien. « Français, c'est au bruit des chants infernaux, des blasphèmes de l'athéisme, des cris de mort et des longs gémissements de l'innocence égorgée (…), sur les débris du trône et des autels, arrosés par le sang du meilleur des rois et par celui d'une foule innombrable d'autres victimes, au mépris des mœurs et de la foi publique, et au milieu de tous les forfaits, que vos séducteurs et vos tyrans ont fondé ce qu'ils appellent votre liberté. (…) Peuple français, écrira-t-il ailleurs, n'écoute plus les raisonneurs : on ne raisonne que trop en France, et le raisonnement en bannit la raison. » Maistre descend cette crapule opportuniste de Voltaire et son Essai sur les mœurs où l'histoire, circonscrite à l'homme et expliquée par sa seule action, est mue par diverses déterminations en l'absence de toute cause transcendante – cette absence de transcendance semble être, pour lui, une cause de violences – comme il s'efforcera de réfuter les arguments développés par Rousseau dans le Contrat Social, et ne loupera jamais un moyen de tirer en ridicule les libéraux Benjamin Constant et Mme de Staël.
De la contre-révolution
Le chapitre IX des Considérations sur la France, jugé prophétique par bien des lecteurs au moment de la Restauration de 1814, fera la réputation de Maistre. On y trouve ce qui est peut-être la phrase la plus emblématique de cet essai, du moins dans le cadre de nos études : « Le rétablissement de la Monarchie, qu'on appelle contre-révolution, ne sera point une révolution contraire, mais le contraire d'une révolution. » On reviendra là-dessus.
On a évoqué, plus haut, l'apathie des Français sur laquelle compte le pouvoir. Maistre y revient en étendant l'inertie à la Nation entière, qui ne désire plus que le repos. « Celui même qui préfère la république à la monarchie préfère (…) le repos à la république », écrit-il. Puis le lecteur a droit au récit d'un possible scénario de restauration, selon lequel tout se passerait comme sur des roulettes – et le pire, c'est que l'histoire lui donnerait (à peu près) raison. Une faction s'emparerait du pouvoir et annoncerait aux quatre coins de la France que le roi y est reconnu, et à partir de là, le château de carte s'abattrait : le peuple de province, majoritairement royaliste, s'empresserait de crier « vive le roy ! », les officiers de l'armée s'imagineraient déjà « général des armées de Sa Majesté Très-Chrétienne » et trouveraient que ça a plus d'allure, les Républicains terrifiés se joindraient hypocritement au concert ou fuiraient à toutes jambes… tout se jouerait en haut. Tout se JOUERA en haut. En bon royaliste, Maistre, tout attaché au peuple français qu'il soit, ne fait pas pour autant de lui l'acteur principal des événements. « On commet trop souvent la faute de raisonner comme si la contre-révolution (…) ne pouvait être que le résultat d'une délibération populaire. (…) Le peuple n'est pour rien dans les révolutions, ou du moins, il n'y entre que comme instrument passif. Quatre ou cinq personnes, peut-être, donneront un roi à la France. »
Les tentatives par moult intellectuels de persuader les Français de s'en tenir à la république, en plus d'être (donc) inutiles, recouraient souvent à une logique absurde : comme la révolution a été un carnage, la contre-révolution en sera un tout pareil. Mais comme le souligne Maistre, « se persuaderait-on que le retour de la maladie à la santé est aussi pénible que le passage de la santé à la maladie ? (…) Pour faire la Révolution française, il a fallu renverser la religion, outrager la morale, violer toutes les propriétés, et commettre tous les crimes. (…) Au contraire, pour rétablir l'ordre, le roi convoquera toutes les vertus (…), et il y sera forcé, [car] son intérêt le plus pressant sera d'allier la justice à la miséricorde. » Il évoque les Observation sur la conduite des puissances coalisées du comte d'Antraigues, dans lesquelles ce dernier explique qu'un pouvoir assis sur des bases sacrées peut, grâce à sa légitimité, se montrer implacable sans choquer ses sujets. Maistre précisera dans une note : « Depuis que cet ouvrage est achevé, le gouvernement français a publié les pièces de deux conspirations découvertes, et qui se jugent d'une manière un peu différente : l'une, jacobine, et l'autre royaliste. Dans le drapeau du jacobinisme, il était écrit : mort à tous nos ennemis ; et dans celui du royalisme, grâce à tous ceux qui ne la refuseront pas. » Décidément, un camp sera toujours plus doué à la violence que l'autre. L'auteur mentionne, non sans pertinence, l'exemple des royalistes anglais qui ont vécu l'exécution de Charles 1er : « Malgré le fanatisme brûlant des républicains, la fermeté réfléchie du caractère national, les terreurs trop motivées des nombreux coupables et surtout de l'armée, le rétablissement de la monarchie causa-t-il, en Angleterre, des déchirements semblables à ceux qu'avait enfanté une révolution régicide ? Qu'on nous montre les vengeances atroces des royalistes ! » Pour Maistre, en aidant à faire tomber la république, le peuple français n'aidera qu'à détruire la destruction. 
Comment avoir peur du chaos lorsqu'on vit déjà en enfer ? Dans la France de 1797, « il n'y a plus d'autorité paternelle, plus d'effroi pour le crime, plus d'asile pour l'indigence. (…) Le peuple se démoralise de la manière la plus effrayante, et l'abolition du culte, jointe à l'absence totale d'éducation publique, prépare à la France une génération dont l'idée seule fait frissonner ». Face à ce péril historique, ce père de la Contre-révolution n'aura jamais attendu que l'action des hommes de bonne volonté. Comme il l'a écrit lui-même, il suffirait d'une poignée d'entre eux. Il suffirait de la trouver. « Les poltrons qui repoussent le roi de peur de la guerre civile en prépare justement les matériaux. C'est parce qu'ils veulent follement le repos et la constitution qu'ils n'auront ni le repos, ni la constitution. » Ça ne vous fait-il pas penser à l'illustre citation de Churchill sur le déshonneur et la guerre ? C'est probablement à la même espèce misérable de gouvernants que les deux hommes s'adressèrent ; une espèce aux commandes de notre civilisation depuis maintenant plus de deux siècles.
Pour le SOCLE
- Il est déconseillé de compter sur la majorité pour faire la contre-révolution.
- Si contre-révolution il y a, elle devra être le contraire d'une révolution (à méditer).
- Le succès de la reconquête dépendra peut-être du degré de violence de son exécution.
- La santé du clergé est cruciale à la survie de la France.
- Un roi n'est pas intrinsèquement un despote.
- Les institutions qui suivront la reconquête devront reposer sur une idée spirituelle.
- Sans céder au providentialisme, croire est peut-être un prérequis de la contre-révolution.
http://lesocle.hautetfort.com/archive/2016/03/22/considerations-sur-la-france-de-joseph-de-maistre.html

Considérations sur la France, de Joseph de Maistre 1/2

Le comte Joseph de Maistre est un homme politique, historien et écrivain savoyard né en 1753. En 1792, il doit fuir la France pour échapper aux révolutionnaires et change de nationalité durant sa résidence dans le royaume de Sardaigne ; c'est pourquoi il répètera, dans ses écrits, qu'il n'est techniquement pas français. Mais son cœur n'aura assurément jamais quitté la mère-patrie. Bien que les Lumières gagnent toute l'Europe, c'est sa profonde fibre française qui saigne face au spectacle cataclysmique de la Révolution, que ce traditionaliste voit comme un fait du plus haut degré de corruption connu dont le « caractère satanique (…) le distingue de (…) peut-être tout ce qu'on verra ». Et c'est ce qui motivera son œuvre, au sommet de laquelle se trouve Considérations sur la France. 
Félix Croissant, pour le SOCLE
2559955490.jpgLadite œuvre a fait de lui l'un des plus ardents partisans de ce qu'on appelle la contre-révolution. Une ardeur qui a pu lui donner une image de radical, de sectaire. Ce qui est certain, c'est que les Lumières sont, pour lui, le Mal incarné, et qu'il a tiré de cet antagonisme une opposition frontale à la démocratie, aux sacrosaints droits de l'homme, et au rationalisme du XVIIIème siècle, pour la défense du sens commun, de la foi, et des lois non-écrites. Tourné comme ça, son portrait peut donc choquer l'esprit moderne, mais comme ces deux derniers siècles ont prouvé maintes fois que les pessimistes ont plus souvent raison que les idéalistes, on peut partager l'opinion de l'écrivain George Steiner qui voit dans Maistre un prophète annonçant le malaise idéologique de la modernité en montrant la violence inscrite dès l'origine dans l'émancipation révolutionnaire.
Dieu et le petit théâtre humain 
Les Considérations sur la France sont publiées pour la première fois en 1796. Le tumulte de la 1789 s'estompe et les vallées entières de sang versé par la Terreur a enfin séché. La Révolution est achevée par la volonté même de ses héritiers et les débats vont bon train sur la nature du régime qui va lui succéder.
Voici une des premiers témoignages que Maistre rapporte du bas-monde en ces temps historiques : « Je n'y comprends rien. » C'est ce qu'il entend, dans la rue, autour de lui, encore et encore. Personne n'y comprend rien. Personne n'a rien vu venir. Dans son chapitre intitulé Des révolutions, l'auteur affirme que « La Révolution française mène les hommes plus que les hommes ne la mènent. » Ceux qui ont bâti la république l'ont fait sans le vouloir et sans savoir ce qu'ils faisaient ; ils y ont été conduits par les événements ; un projet antérieur n'aurait pas réussi. « La première condition d'une révolution décrétée, c'est que tout ce qui pouvait la prévenir n'existe pas, et que rien ne réussisse à ceux qui veulent l'empêcher. »
Le seul point de divergence fondamental que j'ai avec Maistre est son providentialisme, croyance selon laquelle la volonté de Dieu est évidente en chaque événement. Cette posture aiguillera une bonne partie de sa pensée, et y faire abstraction n'aura pas été chose aisée. Il n'y a rien à faire : l'homme a la foi. Il croit tellement à la mécanique divine que pour lui, la Révolution est l'œuvre de Dieu, inspiré par Burke, dont les lectures le convainquent que ce moment de l'histoire, loin de se réduire à une folie vide de sens, peut être considéré comme un châtiment régénérateur. « Si la divinité emploie les instruments les plus vils, écrit-il, c'est qu'elle punit pour régénérer. » En 1796, nombre des commissaires de la révolution sont passés à leur propre guillotine. Un début de justice divine pointe à l'horizon, et conforte Maistre dans cette disposition. C'était écrit. Les souffrances du peuple français étaient écrites. Elles l'étaient d'autant plus que le peuple n'aura pas été un parfait innocent dans cette tragique histoire. « Jamais un plus grand crime n'eut plus de complices », écrit l'auteur, avant de poursuivre : « tout attentat commis contre la souveraineté au nom de la nation est toujours plus ou moins un crime national, car c'est toujours plus ou moins la faute de la Nation si un nombre quelconque de factieux s'est mis en état de commettre le crime en son nom. » La majorité des Français ne voulut peut-être pas la mort de Louis XVI, mais elle ne fit rien pour empêcher le carnage. Maistre ne parle de rien de moins que de karma.
Et la mécanique divine continue, sous la forme de l'ordre dans le désordre. Pour Maistre, les coupables de la Révolution ne pouvaient tomber que sous les coups de leurs complices. Si la force seule avait opéré ce qu'on appelle la contre-révolution et replacé le roi sur le trône, il n'y aurait eu aucun moyen de faire justice : l'appareil judiciaire, majoritairement composé de royalistes, aurait eu l'air de se venger, et considérant l'ampleur du crime, la vengeance aurait été un massacre de trois siècles qui aurait gravement terni la Restauration. « Il fallait que le métal français, dégagé de ses scories aigres et impures, parvint plus net et plus malléable entre les mains du roi futur. »
Maistre se montrera un peu trop optimiste, tout au long de son essai. Son providentialisme le persuade que le retour du roi arrivera au plus tard avant la sortie du film éponyme. Tout va bien se passer. Et c'est peut-être pourquoi il est si serein face aux scélérats. « Toute révolution royaliste est impossible avant la paix », écrit-il. La conclusion qu'il en tire n'en est pas moins fondée : si le roi veut réussir son retour, il faut que son règne commence sur de bonnes bases, et donc que la République ait, au préalable, réussi la paix. Quant au clergé de France, il lui recommande de ne point s'endormir. « [ce dernier] a mille raisons de croire qu'il est appelé à une grande mission. (…) S'il ne se fait pas une révolution morale en Europe, si l'esprit religieux n'est pas renforcé dans cette partie du monde, le lien social est dissous ; on ne peut rien deviner, et il faut s'attendre à tout. »
Maistre compte d'autant plus sur la paix qu'il la sait fragile. En fait, il estime que la guerre est l'état habituel du genre humain et que la paix, pour chaque nation, n'est qu'un répit. « Lorsque l'âme humaine a perdu son ressort par la mollesse, l'incrédulité et les vices gangreneux qui suivent l'excès de civilisation, elle ne peut être retrempée que dans le sang. » Il conclue qu'il n'y a qu'un moyen de comprimer le fléau de la guerre : comprimer les désordres qui amènent cette terrible purification. « Nous sommes gâtés par la philosophie moderne qui a dit que tout est bien, tandis que le mal a tout souillé, et que, dans un sens très vrai, tout est mal, puisque rien n'est à sa place. (…) Mais gardons-nous de perdre courage : il n'y a point de châtiment qui ne purifie, ni de désordre que l'amour éternel ne tourne contre le principe du mal. Il est doux, au milieu du renversement général, de pressentir les plans de la Divinité. » 
Digressions sur le christianisme
Pour Maistre, toutes les institutions imaginables reposent sur une idée religieuse ou ne font que passer. Le penseur ne croit pas à la fécondité du néant. Il opposera à plusieurs reprises, dans son essai, le christianisme à la philosophie, puissance essentiellement désorganisatrice. La durabilité de ce qui est repose sur la force qui le sous-tend. De Maistre se lance dans une ode émouvante aux fêtes saintes… pour mieux fustiger, par la suite, l'inanité des puissants républicains, pas fichus d'organiser une simple fête municipale. Deux siècles plus tard, qu'a-t-on de plus que le 14 juillet ? 
Le problème est que le vers est dans le fruit. L'irréligion bat son plein. Il n'y a plus de prêtres, on les a massacrés. Au moment où Maistre écrit son essai, rien n'est écrit, mais il semble n'y avoir plus rien. Il s'adresse à ceux qui ont appelé ce rien de leurs vœux : « Vous craigniez la force de la coutume, l'ascendant de l'autorité, les illusions de l'imagination : il n'y a plus rien de tout cela ; il n'y a plus de coutume ; il n'y a plus de maître ; l'esprit de chaque homme est à lui. La philosophie ayant rongé le ciment qui unissait les hommes, il n'y a plus d'agrégations morales. » Mais la nature a horreur du vide. « Il me semble que tout philosophe doit opter entre deux hypothèses : ou qu'il va se former une nouvelle religion, ou que le christianisme sera rajeuni de quelque manière extravagante. »
Citons cette déclaration qui ne manque pas de flamboyance : « La génération présente est témoin de l'un des plus grands spectacles qui ait jamais occupé l'œil humain : c'est le combat à outrance du christianisme et du philosophisme. La lice est ouverte, les deux ennemis sont aux prises, et l'univers regarde. »
L'impossibilité de la « Grande république » et la nullité de la République française
Dès le début de son chapitre La République française peut-elle durer ?, Maistre annonce la couleur : « la nature et l'histoire se réunissent pour établir qu'une grande république indivisible est une chose impossible. » Il cite deux fadaises que les tenants de la République répètent au peuple français : petit a, rien n'empêche qu'on ne voit ce qu'on n'a jamais vu ; petit b, la découverte du système représentatif rend possible pour nous ce qui ne l'était pas pour nos devanciers.
Au premier point, l'auteur répond par la théorie des probabilités : en plusieurs milliers d'années d'histoire, la grande république n'est jamais arrivée ; elle n'est qu'un fantasme. Il revient à nous, lecteurs câblés, de déterminer si les républiques qui sont apparues dans les deux siècles suivants étaient des grandes ou non.
Au deuxième point, le système représentatif chéri, Maistre rappelle qu'il est une pièce du gouvernement féodal. S'ensuit un cassage en règle des préjugés à l'encontre du Moyen-âge, dans lequel de Maistre rappelle que le système représentatif vient de la création par l'autorité royale des communes, qu'elle appela dans les assemblées nationales par leurs mandataires. Au sujet de la démocratie, ce système dans lequel TOUT le peuple serait représenté, Maistre est catégorique : ça ne réussira jamais. Quand on fait mention de l'Amérique, il traite cette dernière d'« enfant en maillot ».
Et de toute façon, même si elle était possible, la chose ne ressemblerait à rien, en France : « si la république est dans la capitale et que le reste de la France est sujet de la république, ce n'est pas le compte du peuple souverain. » À partir de là, Maistre se demande s'il est de l'intérêt du peuple français d'être sujet d'un directoire exécutif et de deux conseils institués suivant la constitution de 1795 plutôt que d'un roi régnant suivant les formes anciennes. Pour de Maistre, la réponse à cette question se situe dans le mal fondé de la république : comment la liberté pourrait-elle naître d'un système né du crime ? « La barbarie savante, l'atrocité systématique, la corruption calculée et l'irréligion n'ont jamais rien produit. »
À suivre 

Pèlerinage de Pentecôte 2016

[Antiquité] Les grandes batailles de l'Histoire - Alexandre contre les P...

mardi 17 mai 2016

Cette Révolution française, si peu sociale...

La toile est un lieu d’informations et de débats, et il m’arrive d’intervenir dans quelques uns de ces derniers pour dénoncer ou défendre certaines positions politiques ou historiques : je le fais en tant que royaliste engagé, et sans cacher ni mon identité ni mes idées royalistes, même si, parfois, celles-ci me valent d’être censuré ou « bloqué » par des « modérateurs » qui ont une conception fort étrange de la discussion et de la liberté d’expression… Ce n’est pas le cas sur le site du quotidien royaliste « La faute à Rousseau » qui me laisse toute latitude pour réagir et exprimer mes opinions monarchistes, ce dont je le remercie.
Il y a quelques semaines, un contradicteur républicain a engagé et poursuivi le débat sur la Révolution de 1789 et ses conséquences, et j’ai pris la liberté de répondre à quelques uns de ses arguments, en toute courtoisie et cordialité, ce qui a permis d’échanger, au sens fort du terme, et non de polémiquer. Voici ci-dessous quelques éléments que j’ai voulu apporter à la discussion qui, je le souhaite, n’est pas terminée, et qui pourront intéresser quelques lecteurs de mon bloc-notes politique…
Sur la Révolution française :
Sans doute faut-il en finir avec quelques mythes autour de la Révolution et de la République, transmis par une Education nationale qui n'a eu de cesse de légitimer ce régime dont elle n'était que la modeste servante depuis Jules Ferry...
Quelques éléments sur la Révolution, trop souvent négligés par l'historiographie : 1791, et le décret d'Allarde et la loi Le Chapelier, véritables destructions par la nouvelle classe dirigeante bourgeoise de toute protection sociale et ouvrière, au bénéfice des féodalités de l'Argent. En somme, la victoire d'un libéralisme extrême que la République ne fera que fortifier, allant même jusqu'à transformer les semaines de 7 jours en décades (10 jours) pour limiter encore les congés ouvriers... Je suis toujours surpris que ceux qui se prétendent de Gauche défendent une révolution qui va, en définitive, totalement à l'encontre de ce qu'ils disent souhaiter pour la classe ouvrière !!
A part cela, reprenons rapidement quelques éléments évoqués par M. Renaudo (le contradicteur républicain) : non, ce n'est pas le roi qui a déclaré formellement la guerre (il n'en avait pas le droit au regard de la nouvelle constitution de 1791), mais bien l'assemblée législative qui y voyait un moyen de sortir de l'impasse politique interne et de faire oublier ses erreurs. Certains y voyaient même le moyen d'en finir avec la monarchie...
La guerre de la Révolution sera suivie de la guerre impériale, et ne s'achèvera qu'en juin 1815 à Waterloo. Bilan : environ 2 millions de morts violentes en France, ce qui va affaiblir la démographie française qui ne cessera de décliner désormais jusqu'en 1945... 
Quant au roi Louis XVI, il est renversé justement parce qu'il refuse de faire tirer sur le peuple, dont il se veut le père, et parce qu'il veut, jusqu'au bout, respecter la lettre et l'esprit d'une constitution à laquelle il a prêté serment, le 14 juillet 1790, lors de la Fête de la Fédération, date qui est célébrée depuis 1880 chaque 14 juillet, étrangement d'ailleurs car elle est bien peu républicaine...
En revanche, la République, elle, n'a jamais hésité à faire tirer sur le peuple, « au nom de sa défense », que cela soit dans le Berry, en Corse ou en Vendée, mais aussi à Paris en 1795, ou en juin 1848, sans oublier mai 1871 ou les diverses fusillades de Fourmies et Courrières durant la IIIe République, entre autres... Faîtes le bilan et osez la comparaison, les chiffres et les faits, têtus, parlent d'eux-mêmes...
Quant à la "Liberté égalité fraternité", je constate que, aujourd'hui, cette formule est répétée à l'envi par des hommes et des gouvernements qui ne respectent guère les libertés fondamentales (qu'est-ce donc que cet état d'urgence qui permet d'assigner à résidence des écologistes et des contestataires de l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes, dernière lubie républicaine, au lieu de frapper ceux qui soutiennent le terrorisme ?), se moquent de la justice sociale (formule qui, d'ailleurs, a été d'abord formulée, non par les républicains, mais par... Louis XVI !!), et répriment la classe ouvrière, faisant condamner, en janvier 2016, des ouvriers de Goodyear en voie de licenciement et en juste colère à huit mois de prison ferme : drôle de fraternité !!
Dernier point : les libertés sous l'Ancien régime étaient bien plus développées qu'aujourd'hui, en particulier localement, les pouvoirs des provinces, des corporations, des villes ou des universités, étant bien plus importants et décisionnaires qu'ils ne le sont actuellement : d'ailleurs, la dernière réforme territoriale nous a bien montré le peu de cas que faisait la République des doléances des régions, celle-ci décidant de Paris d'un découpage territorial qui n'a aucun sens et ne satisfait personne, de l'Alsace à la Bretagne...
Tout compte fait, mieux vaut la Monarchie sociale, fédérale et "libertale" que cette République jacobine, liberticide et féodale-bourgeoise ! Alors, oui, vive le roi de France, des travailleurs et des provinces libres !
(à suivre, bien sûr…)

Philippe Mesnard - Le transhumanisme

Documentaire Machines de Mort Engins modernes

lundi 16 mai 2016

Significations des Pelerinages - Orages d'acier - 15/05/2016

Histoire & Actualité • Le grand panache du Puy du fou : un hommage aux martyrs de la Vendée

Cette semaine s’ouvre un nouveau spectacle dans une salle unique au monde que les Villiers ont baptisé le Théâtre des Géants.
Inutile de revenir sur l’étonnant succès du Puy du Fou, de son Grand Parc et de sa cinéscénie, qui n’arrête pas de glaner les plus hautes récompenses mondiales et qui a drainé l’an dernier plus de 2 millions de visiteurs.

Mais cette semaine s’ouvre un nouveau spectacle dans une salle unique au monde que les Villiers ont baptisé le Théâtre des Géants. Géant par les 7.500 m² de la nouvelle salle où les dernières technologies permettent de mettre en scène d’autres géants : ceux qui, pour Dieu et le Roi, ont affronté les troupes révolutionnaires et sanguinaires de la Convention de 1793 à 1796. Une guerre civile qui s’est terminée par un véritable « populicide » qui aura coûté la vie de 270.000 à 700.000 Vendéens, décimant cette province de ses habitants et la transformant en champ de ruines brûlantes.


Pour le 20e spectacle du Puy du Fou, Philippe de Villiers et son fils Nicolas ont choisi de rendre hommage à François Athanase Charette de la Contrie, le plus emblématique des chefs royalistes vendéens. Et cet hommage est grandiose. 40 comédiens évoluent dans des décors réels ou virtuels qui reconstituent la vie mouvementée de ce héros oublié de nos livres d’histoire. Un héros qui traversera l’Atlantique pour libérer l’Amérique de ses envahisseurs anglais, puis viendra se battre contre les colonnes infernales de Turreau.
Pour suivre Charette, le spectateur est embarqué dans un gigantesque travelling, comme au cinéma. Il a fallu des mois de réglages pour imaginer un système de rotation conforme aux exigences du récit. La technologie est omniprésente puisque les décors en vidéo projections, les lumières, le son et tous les effets spéciaux suivent l’action à 360°. On se laisse emporter par l’émotion. 33 minutes intenses pendant lesquels les tribunes se déplacent au gré des tableaux.
Le spectacle débute sur l’Ile de Sainte-Hélène où Napoléon rédige ses mémoires et évoque la figure héroïque de Charette. Une belle mise en bouche avant que nous ne soyons emportés sur l’Océan Atlantique reconstitué sur un plan d’eau très agité de 60 mètres de long, sur lequel vogue une frégate à bord de laquelle Charette accompagne Lafayette. Lui qui détestait la mer, il avait été forcé par son père de suivre l’École de Brest. Victorieux des Anglais, il est décoré par le général Washington avant de revenir en France où les paysans lui commandent de mener la révolte contre les bleus qui ont reçu l’ordre de la sinistre Convention d’anéantir les brigands.
Pendant trois ans, Charette sera pourchassé de village en forêt, de ferme en château avant que son destin ne bascule dans une fantastique et tragique épopée. Son ultime combat pour la liberté s’achèvera à Nantes, le 27 mars 1796. Condamné à mort, il ordonnera lui-même de faire feu avec sa célèbre réplique« lorsque je fermerai les yeux, tirez droit au cœur ». Il refusera d’ailleurs de se faire bander les yeux, et fera sienne, avant de mourir, la réplique « Seigneur, entre tes mains je remets mon esprit ». On reconnaît la discrète patte religieuse que Philippe de Villiers impose à tous ses spectacles.

Vous pourrez assister en direct à cette exécution jusqu’au 25 septembre dans ce Théâtre des Géants, après avoir parcouru la tranchée des Amoureux de Verdun qui vient d’être sacrée par les Thea Awards de Los Angeles, « meilleure attraction du monde » ! Nul ne peut douter que ce Dernier Panache lui succédera, l’an prochain.
  
Journaliste
Ancien directeur des rédactions de l’Agence Gamma
Boulevard Voltaire
 

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Les Grandes Inventions de l'Antiquité Incroyables Machines Navales

dimanche 15 mai 2016

Livres • PIERRE BOUTANG, MODE D'EMPLOI

L'oeuvre de Pierre Boutang est un continent dont les falaises abruptes paraissent plonger droit dans les profondeurs de l'océan. Une voie d'accès possible — la plus pénétrante, peut-être — est de le suivre sur les chemins escarpés de sa vie. C'est ce que nous propose Stéphane Giocanti. Dont il est fait ici une remarquable analyse*.
Par Christian Tarente
4107098197.jpg« Vous parlez comme un livre ! » lançait un jour Boutang, moqueur, à un jeune fanfaron. Mieux qu'à nul autre, c'est pourtant à lui-même que cette boutade pourrait s'appliquer à la lettre : il parlait comme il écrivait, d'un même rythme, sans rupture ni rature. L'habitait une sorte de densité permanente, que seuls désarmaient, à certains moments, l'humour ou l'émotion. Ce poids spécifique, propre à sa nature même, issu de quelque grâce inexpliquée, n'est évidemment pas pour rien dans le sentiment répandu que son oeuvre est d'un accès difficile. Aussi est-ce souvent par certains aspects particuliers de son travail, notamment la critique littéraire (Les Abeilles de Delphes, La Source sacrée, La Fontaine politique), que beaucoup parviennent à l'aborder. Avec le risque d'être tentés d'en rester là, de ne pas oser affronter ses autres grands livres - Ontologie du secret, Apocalypse du désir, Le Purgatoire, ou le Maurras... -, dont la lecture peut prendre l'allure d'une épreuve rebutante, voire dissuasive.
DEUX PERSONNAGES CAPITAUX, TOUS DEUX PRÉNOMMÉS CHARLES...
On ne se risquera pas ici à prétendre que Boutang est plus facile à lire qu'on ne le croit. Entrer dans sa vision des choses et dans son mode de pensée implique indéniablement un effort, une ascèse si l'on veut. Il faut l'admettre d'emblée : ce n'était pas un adepte de la clarté classique, son oeuvre ne s'ordonne pas comme un jardin à la française. Non qu'il ne soit pas lumineux, mais la lumière procède chez lui d'harmoniques complexes qui ne demandent qu'à révéler leurs surprenantes richesses. Il y a quelque chose d'essentiellement musical dans la manière dont sa pensée s'élabore et se déploie. Parfums, couleurs et sons s'y répondent d'une manière qui n'appartient qu'à lui, et qu'il va chercher dans tout ce qui a fait la matière même de sa vie.
Né sous la calamiteuse IIIe République, marqué au fer par la Seconde Guerre mondiale, son itinéraire s'est vu éperonné par l'enchaînement diabolique des événements. Deux personnages capitaux, tous deux prénommés Charles, vont y jouer, à des titres bien différents, un rôle déterminant À 14 ans, le jeune Pierre découvre le bouleversant Corps glorieux de Maurras (reproduit dans le Dossier H « Pierre Boutang »), que son père lui lit les larmes aux yeux. Sans encore bien le comprendre, il découvrait l'inquiétude métaphysique du chef de l'Action française. Dès lors, le discours sur l'amour de Diotime dans Le Banquet de Platon suffira à faire de lui un platonicien à vie. Et décider de son destin de philosophe. Le débat Maurras-Boutang sur Platon et Aristote, dialogue d'une vie, restera au coeur de l'étonnante et indestructible fidélité, « jusqu'au bout de son souffle », de Boutang à son vieux maître. En dépit - et peut-être à cause - de l'antisémitisme d'État, de Vichy, de l'épuration, de la prison, de la vieillesse...
L'autre Charles, ce général qui s'est forgé une légitimité de la manière poignarde que l'on sait, sera pour Boutang, loin de sa vie intime certes, l'occasion de grandes rencontres d'idées et de vives espérances pour le pays, mais aussi (surtout ?) de cruelles déceptions et d'amères frustrations.
C'est sur ce fond de décor que les grandes étapes de sa vie vont s'installer, induisant plus ou moins directement la parution de ses oeuvres. 1947 : journaliste à Aspects de la France ; 1950 : lettre de Maurras lui interdisant le découragement (« Il faut que l'arche franco-catholique soit mise à l'eau face au triomphe du pire et des pires ») ; 1955 : fondation de La Nation française, qui paraîtra chaque semaine pendant douze ans ; 1967 : réintégration à l'Université : il devient professeur de lycée ; 1973: soutenance de thèse portant sur l'ontologie du secret ; 1976: nommé professeur à la Sorbonne, malgré la cabale menée contre lui par Derrida, il y enseignera jusqu'en 1989, marquant de son empreinte toute une génération de jeunes philosophes (Marion, Bruaire, Colosimo, Mattéi,...).
LA VIE MOUVEMENTÉE DE BOUTANG, VOIE D'ACCÈS À SON OEUVRE
L'étroite imbrication entre une vie hors du commun et une oeuvre qui ne l'est pas moins forme la substance même de la magistrale biographie que vient de publier Stéphane Giocanti. S'appuyant notamment sur les Cahiers que Boutang a tenus de 1947 à 1997 (des milliers de pages, encore inédites, mais bientôt publiées), il fournit une masse considérable d'informations, des plus simples - notamment les agitations de sa vie personnelle, traitées avec délicatesse - aux plus décisives. Leur grand mérite est de grandement contribuer à éclairer le sens de son oeuvre.
Prenons par exemple Ontologie du secret, son « maître-livre », salué par les plus grands. Simple sujet de thèse ? Non, dit Giocanti, c'est depuis la fin de la guerre qu'il porte en lui un traité de métaphysique tournant autour du « désir de l'origine », et de « l'origine comme fondement du désir » : l'origine absolue, c'est Dieu même, et sa Parole créatrice qui se révèle dans le secret. Au service de sa réflexion, Boutang mobilise des lectures considérables qui touchent à presque toute la culture occidentale : des présocratiques, Platon (le Parménide, qu'il récitait par coeur) et Saint Augustin à Musil et Pound, en passant par tous les grands noms de la philosophie, de Descartes et Kant à Heidegger et Wittgenstein, mais aussi Giambattista Vico (le napolitain de la Scienza nuova, sa grande redécouverte), Dante, Nicolas de Cusa, Shakespeare, Pascal, le cardinal de Retz, Max Scheler, Simone Weil, Freud, Dostoïevski... Pas l'ombre d'une cuistrerie, pourtant : de l'érudition, certes, mais au seul service de ses démonstrations. Sans compter un large appel fait aux rencontres et aux souvenirs personnels.
Comme l'a noté Gabriel Marcel, Ontologie du secret est un périple, une sorte d'Odyssée à la manière, peut-on dire, de James Joyce. D'ailleurs, Boutang s'en souviendra en écrivant Le Purgatoire, ce roman-confession dont Giocanti nous fournit, là encore, et comme il le fait pour l'ensemble de. ses livres, les tenants et aboutissants biographiques.
Avec cet ouvrage, nous disposons désormais de deux outils majeurs d'explicitation de l'oeuvre du Forézien : l'autre est le « Dossier H » publié à L'Âge d'Homme en 2002, sous la direction du même Giocanti et d'Axel Tisserand. Parmi ses contributions, Stéphane Giocanti s'était attaché à explorer le lien entre Boutang et Maurras. Ce lien indéfectible ne cesse de nous interroger. Chez un esprit de cette trempe, la fidélité filiale n'explique pas tout. 
PIERRE BOUTANG, de Stéphane Giocanti, Flammarion, coll. Grandes biographies, 2016, 460 p., 28 euros.
Politique magazine, mai 2016

Les Déracinés, de Maurice Barrès Partie 2

Ce qui ne trouve en revanche aucun élément rédempteur aux yeux de Barrès, c'est le rationalisme kantien, comprenant le fameux Impératif catégorique issue du Fondement de la métaphysique des mœurs (1785). Le défaut fondamental que lui trouve Barrès est qu'il ne prend pas en compte l'existence de la chair, et qu'il s'attache exclusivement à un idéal de pureté davantage adapté à Dieu qu'à l'Homme, négatif photo du pragmatisme (le kantisme considérant, par exemple, qu'une action ne peut être jugée qu'en fonction de ses motivations, et n'a aucune valeur si elle n'est pas mue par la "volonté bonne", ce qui veut dire qu'on excusera l'enfer, tant qu'il est pavé de bonnes intentions). On a évoqué plus haut la réflexion de Kant : "agis seulement d'après la maxime grâce à laquelle tu peux vouloir en même temps qu'elle devienne une loi universelle" (appréciez la plume aérienne du philosophe). Barrès y voit une démonstration d'égocentrisme absolue. Les Déracinés est une critique du règne de la subjectivité et de la moralité individuelle, à laquelle il oppose la "conscience nationale". L'organique. Ses jeunes protagonistes veulent "devenir des individus", seuls entre eux-mêmes, mauvaise idée à laquelle Barrès oppose une pensée holistique pure (qui consiste à considérer les phénomènes comme des totalités et non comme des sommes de parties, s'opposant, d'un point de vue sociologique, à l'individualisme). La morale de Barrès est celle de la volonté d'accomplir un destin commun, celle de la terre et de la patrie. On retrouve sa légère obsession de la "race", qu'il emploie plus au sens territorial que biologique, comme Charles Maurras. À travers son roman, Maurice Barrès cherche à rendre meilleurs l'homme et la société dans laquelle il se meut, non à partir de concepts abstraits ou d'idées fausses, mais en se fondant sur des réalités tangibles. Aux méfaits du jacobinisme, de l'universalisme, et du centralisme sur les jeunes esprits, en un mot, du déracinement, il oppose les bienfaits de la décentralisation, de la continuité, de "tout ce qui demeure vivant de l'héritage de que nous avons reçus de nos pères", en un mot, de l'enracinement. "Les arbres aux racines profondes sont ceux qui montent haut", écrit Frédéric Mistral dans Les Îles d'or. À l'époque de Barrès, la France avait déjà cessé de monter.
Barrès descend donc l'enseignement de ladite philosophie par le vil Bouteiller, élite formatée n'envisageant pas un instant de remettre en question son bien fondé, comme un croyant face à la vérité révélée. À travers ce personnage, on pressent la venue, lointaine mais sûre, des profs sociaux-libéraux de l'ère soixante-huitarde, et leur qualité de propagandistes solidifiée par leur conviction d'appartenir au Camp des Saints ; mais aussi des amibes technocratiques moralement désertiques comme un Alain Minc, dont les analyses du monde ignorent ses réalités sociales, culturelles, charnelles. Pour Barrès, l'enseignement de la philosophie allemande contribue à détacher la jeunesse française de ses racines. C'est en partie d'elle que se nourrit le cosmopolitisme, concept dément vieux comme l'antiquité mais appliqué depuis peu au monde. L'expression "citoyen du monde" reviendra à plusieurs reprises dans le roman, jamais sous un éclairage positif, naturellement. En tentant d'accéder à l'universel, les petits étudiants vont se défaire de leurs attaches régionales, du lien charnel à la terre, et d'un certain particularisme, devenant des créatures sans passé, employées du grand Capital, bâtards du siècle. On croyait les pages vierges qu'ils étaient remplies des "enseignements" de Bouteiller, mais ces "enseignements" ont été écrits à l'encre sympathique. L'élévation va pour beaucoup se transformer en chute, qu'elle prenne la forme d'une sévère désillusion, ou d'une authentique tragédie comme indiquée plus haut : les plus pauvres des sept jeunes Lorrains, confiants en la justesse du nouveau monde et en l'égalité des chances tant vantée, demeureront au final les perdants, victimes du système qui les aura transformés en Icare de supermarché, aveuglés par les lumières de la capitale, croyant naïvement pouvoir toucher le soleil du doigt ("L'état donne aux jeunes Français des notions exagérées de la place occupée dans le monde par les idées de droit, de justice, de devoir" - p.293). Au lieu de cela, ils auront droit à l'isolement et au vice… ils auront droit aux coulisses de leur nouveau monde.
Les enseignements de l'Empereur
Plus haut a été évoquée la réunion fondatrice des jeunes protagonistes du livre autour du tombeau de Napoléon 1er. Il va sans dire que la figure de l'Empereur occupe une place cruciale dans Les Déracinés, comme ce chapitre constitue un passage charnière du récit. Une façon de rappeler que le bonapartisme doit être une voie explorée attentivement par le traditionaliste à la fois méfiant de la république, et pas entièrement convaincu par la praticabilité de la restauration royaliste (on pense surtout à la notion de dynastie dans la monarchie héréditaire : vers qui se tourner ? Légitimistes ? Orléanistes ?). L'idée de l'homme providentiel émergeant des cendres du combat a de tout temps suscité la fascination des peuples - plus ou moins conscient des risques de dérive dictatoriale inhérents à ce cas de figure. On peut se demander si la tentation césariste est véritablement un danger.
Quand on parle de bonapartisme, il ne s'agit pas de celui de Napoléon III, le nain qu'aimait moquer Victor Hugo, et qui aura surtout anéanti les chances de formation d'une dynastie en transformant progressivement l'Empire en régime gras, parlementaire et démocratique. Quitte à choisir un sous-courant consécutif à la dissolution du Second Empire, on préfèrera le bonapartisme "blanc" des victoriens ou impérialistes, proches de la droite royaliste et cléricale, opposée à la gauche républicaine. Mais il est conseillé de s'arrêter sur le "vrai" bonapartisme. Et pour retourner à ses  fondements, la voie la plus conseillée est sans doute la lecture du Mémorial de Sainte-Hélène, recueil des mémoires de Bonaparte rédigé par l'historien Emmanuel de Las Cases au cours d'entretiens quasi quotidiens avec l'Empereur, à Saint-Hélène. Ce que l'on peut en lire confirme le fossé qui sépare le bonapartisme du jacobinisme. Présenté à l'inverse par certains comme un libéral, Bonaparte s'en distingue également par son attachement à un exécutif puissant et sa méfiance presque maladive envers le marché (on pense à son fameux "la bourse, je la ferme"). Son antiparlementarisme et sa méfiance envers les assemblées législatives, "sources d'instabilité", accroissent le pouvoir de séduction de sa "monarchie constitutionnelle tempérée" - nous sommes loin du despotisme militaire. Le caractère plébiscitaire de sa gouvernance renforce plutôt qu'elle ne menace sa dimension héréditaire : pour lui, un peuple aspire à une dynastie de régnants, qui trouvera sa raison d'être dans l'incarnation de ses aspirations élémentaires (après tout, ce n'est pas un référendum qui a fait tomber le second empire). Enfin, Napoléon 1er aspire à la fin du règne des partis, un des éléments fondamentaux de la pensée royaliste. Pour fortifier la nation, Napoléon proclame le bien-fondé de la promotion des élites, et aspire à la création d’une aristocratie nationale sans privilèges anachroniques. Une aristocratie à mille lieues de celle, financière, de cosmocrates nomades jouant avec nos vies de leurs dirigeables de luxe.
La gouvernance d'un de Gaulle, seul chef d'état digne de ce nom que nous ayons eu en deux siècles, comporte de nombreux points communs avec celle de Napoléon 1er. Il n'y a pas de coïncidence. Cette somme de constats suggère une réflexion de fond sur un système qui parviendrait à combiner les qualités du monarchisme selon Maurras et celles du bonapartisme originel. Le combat de la critique positive n'est pas près de finir.
Si loin, si proche
Une des choses qui rendent Les Déracinés d'autant plus passionnant vis-à-vis du Socle, c'est le parallèle que l'on peut faire entre nous, ses membres, et les sept jeunes Lorrains. Comme nous, ils se cherchent un positionnement politique et moral dans la société française moderne - c'est là l'ambition supérieure qui les distingue de leurs pairs. Comme nous, ils cherchent une place à la France dans un monde qui l'ensevelit chaque jour un peu plus, et un sens à l'Histoire qui, elle aussi, prend de cours un peu tout le monde. Comme nous, et en dépit de quelques convictions solides comme la primauté de la nation (issue d'une sorte de proto-boulangisme préfigurant à mon sens un socialisme national), ils bâtissent leur vision du monde sur la conscience que ce dernier est complexe, et que son sens menace de leur échapper à tout instant. Comme Barrès, comme nous, ils se nourrissent de leurs doutes et de leurs dissensions cordiales. Il est probable que la majorité des groupes d'action ou de réflexion politique qui se forment dans la France d'aujourd'hui aient, chacun, leur François Sturel, leur Maurice Roemerspacher, et leur Henri Gallant de Saint-Phlin. Certains membres de ces groupes pourront même puiser dans Les Déracinés une certaine inspiration. Au moment d'une réunion, Suret-Lefort dit : "il est évident que chacun de nous a ses vues sur la religion. J'admire Saint-Phlin ; je demande seulement que nul n'ait à endosser les idées de ses collaborateurs. Je ne pourrais écrire à La Vraie République s'il n'était pas entendu que la profession de Saint-Phlin n'engage que lui seul." (p.242) Les multiples divergence entre les membres du journal la Vraie République sont complexes, parce qu'aucun d'entre eux n'a entièrement raison, ni entièrement tort, ce magnifique patchwork illustrant les tourments existentiels de la France d'alors… tourments qui se poursuivent encore aujourd'hui.
Les Déracinés inspirera nombre de réflexions au traditionaliste n'ayant pas encore trouvé parfaitement sa voie. Rejette-t-il la république, tel un Barrès ? Ou bien sa conception de la France pourrait-elle se satisfaire d'une république autoritaire et "virile", quitte à être portée, dans un premier temps, par un tempérament despotique ? Dans le second cas, croit-il que l'instauration d'une sixième république constituerait un début de solution ? Où se situe-t-il face à, d'un côté, les tenants d'un pouvoir centralisé, comme les césaristes, et de l'autre, l'exaltation par un Barrès de la province comme "France réelle" ? Dans le prolongement de cette réflexion, que pense-t-il du principe de subsidiarité ? Au risque d'effrayer son propre pessimisme, ne croit-il pas que la France a, comme les jeunes protagonistes du roman de Barrès, subi un processus de désenracinement déjà bien engagé ? Auquel cas, a-t-il une idée des moyens de la réenraciner, fussent-ils radicaux ? Sans forcément se positionner vis-à-vis de la figure historique de Napoléon, qui a tant inspiré nos jeunes déracinés, que pense-t-il qu'il faudrait garder de l'héritage napoléonien (d'un côté, le bilan matériel et les institutions établies de 1800 à 1804, de l'autre, le bilan mythologique et imaginaire) ? Et une myriade d'autres interrogations tout aussi substantielles.
Pour le SOCLE 
- Face aux menaces extérieures, la république n'a pas les moyens de protéger la France.
- Le parlementarisme est un régime dangereusement instable et aisément corruptible.
- Il n'existe qu'un seul nationalisme : défensif et conservateur.
- Paris, ou du moins le Paris de son époque, est une Babylone nouvelle, dévoreuse d'âmes.
- La Province est la "France réelle".
- L'universalisme et le cosmopolitisme sont parmi les plus grands ennemis de la patrie.
- Le processus de dissolution de l'identité française sous les influences étrangères avait déjà commencé dans la seconde moitié du XIXème siècle.
- La subsistance de la patrie tient à la volonté d'accomplir un destin commun.
- Le rationalisme kantien et son culte de la raison sont fondamentalement mauvais.
- Le "culte du Moi" (épanouissement de sa propre sensibilité) nourrit le patriotisme : en invitant à l'introspection, il induit une célébration de ses propres origines et du passé.
- Il est recommandé de se méfier des professeurs trop exaltés !