mercredi 11 septembre 2013

11 septembre, l’autre anniversaire qui prête à la nuance

La crise syrienne nous en offre un nouvel aperçu,  l’étude de l’Histoire nécessite de garder la tête froide et de juger les hommes et les évènements  avec le recul nécessaire.  Elle  s’accommode mal du manichéisme visant à définir de manière abrupte les « bons »  d’un côté » et les « méchants » de l’autre, le  camp du bien et du mal.  Nous savons aussi que même  les « grandes figures » des régimes  qui se sont  réclamées   des  idéologies criminelles qui ont ensanglanté le XXème siécle ont d’ailleurs  souvent obéi  à des  motivations souvent  complexes,  dépassant le cadre strict des  idées qu’elles professaient. La volonté de peindre  l’adversaire sous les couleurs du diable est une   posture, une grille de lecture   qui est celle de tous les totalitarismes. C’est aussi un axe de propagande (toujours efficace ?) utilisée avec constante par la caste politico-médiatique  relayant plus ou moins consciemment les mots d’ordre de leurs bailleurs de fonds mondialistes. En ce 11 septembre,  jour  anniversaire de la destruction des twin towers qui marque  symboliquement  l’entrée du monde dans le XXIème siécle,  nos médias  évoquent aussi le quarantième anniversaire du coup d’Etat qui au Chili  renversa  Salvador Allende trois ans après son élection avec  36,3% des voix. Un événement là aussi qui mérite des jugements nuancés.
 C’est à Salvador  Allende,  icône alors des idiots utiles et  autres militants des   forces de progrès en lutte contre « l’impérialisme américain »,    que  François  Mitterrand,  sitôt élu nouveau Premier secrétaire du PS,  accorda sa première visite en septembre 1971. Un  voyage de soutien  à son homologue socialiste chilien à la tête d’un parti dont l’hymne était La Marseillaise chantée en espagnol, hommage de la révolution chilienne en marche à sa matrice française de 1789…
 En France justement, ce sont de nombreuses municipalités de gauche, notamment communistes,  qui commémorent aujourd’hui la fin brutale  de « l’expérience socialiste » au Chili. Un coup d’Etat  explique Gérard Thomas dans Libération,  qui fut l’aboutissement d’une entreprise de déstabilisation des Etats-Unis.
 « De grèves en conflits sociaux, de coups fourrés américains en retraits massifs de capitaux, le gouvernement finit par battre de l’aile. A l’aube du 11 septembre (…)  l’infanterie de marine se soulève à Valparaiso. Les autres corps d’armées suivent. Le Président a été trahi par Augusto Pinochet, le tout-puissant commandant en chef de l’armée de terre, qu’il a lui-même nommé quelques semaines auparavant (…). Après une vaine résistance, Allende s’y suicide avec la kalachnikov que lui a offerte Fidel Castro lors d’un voyage officiel. Une chape de plomb tombe sur le Chili pendant seize ans. La répression y fera 4 000 morts et disparus. »
 Un internaute sur le site de France Inter tient cependant à préciser   que « le programme politique de l’Unité populaire mené par Allende était très loin d’être un projet progressiste mais modéré qui aurait utilisé la voie démocratique. Il relevait clairement de la classique ligne marxiste-léniniste, avec toutes ses désastreuses conséquences politiques, économiques et sociales. C’est à la demande du parlement chilien que l’armée mettra dramatiquement fin à cette expérience catastrophique pour le Chili. »
 Un rappel historique  qui  n’est pas sans évoquer celui du  plus grand pilote français de la Seconde Guerre mondiale, l’as de la RAF Pierre Clostermann, dans son livre « L’Histoire vécue », qui affirmait qu’Allende  était « vomi par le peuple chilien » au moment du coup d’Etat de 1973.
 Une réalité escamotée par L’Humanité qui rappelle  cette semaine la politique menée alors  par Washington, en pleine  guerre froide,  à l’échelle de  l’Amérique du Sud pour  « exterminer les forces de gauche du continent ». Cela  ne mange pas de pain, le quotidien communiste flatte l’antipapisme de ses lecteurs  en affirmant, péremptoire,    qu’ « en  ce temps là, le pape François, chef des Jésuites en Argentine, ne pipait mot » sur les persécutions dont étaient victimes les militants progressistes…
 A contrario, en décembre 2006, à l’occasion de la mort d’Augusto Pinochet, Piotr Romanov  sur le site d’information russe Ria Novosti,   portait  un jugement équilibré sur cette période. « Les appréciations portées sur l’activité de Pinochet ont été souvent arrachées à leur contexte historique. Par conséquent, on peut qualifier feu Pinochet de grand criminel ou d’excellent homme d’Etat, car l’un comme l’autre est vrai (…) ».
 Comment le nier et l’escamoter, «  l’année 1973 fut marquée par une grande effusion de sang, des milliers de personnes furent tuées, des dizaines de milliers de personnes subirent des outrages et des tortures inhumaines. Personne n’oubliera les escadrons de la mort qui emportèrent des adversaires politiques à demi morts en hélicoptère et les jetèrent dans l’océan. Personne n’oubliera le stade de Santiago où fut torturé l’éminent guitariste, poète et chanteur Viktor Jara: on lui coupa les doigts. Personne n’oubliera les sévices exercés sur les femmes dans les prisons de Pinochet et beaucoup d’autres choses pour lesquelles Augusto Pinochet méritait certainement la peine capitale prévue par la loi. »
 Pour autant  «l’image romantique du socialiste Salvador Allende (…)  ne doit pas être (…), un voile dissimulant le chaos dans lequel avait plongé le pays sous sa direction. Les critiques rappelleront tout de suite le rôle peu reluisant joué alors par les Etats-Unis, et ils auront raison. Mais il faut reconnaître également que l’ingérence américaine ne fit qu’aggraver la crise provoquée par les actions inhabiles de la gauche. Un verre de lait pour chaque enfant, ce qui avait été pratiqué sous Allende, ne pouvait pas remplacer une économie efficace permettant à chaque parent d’acheter lui-même du lait à ses enfants. »
 « N’oublions pas non plus poursuit-il  ce qu’avait fait Augusto Pinochet après le coup d’Etat. Certes, pas lui-même, mais ses assistants: il invita un groupe de garçons de Chicago (les fameux et controversés  Chicago boys  s’inspirant de la doctrine de Milton Friedman, NDLR)  économistes libéraux, qui l’aidèrent à accomplir le miracle chilien envié aujourd’hui par tous les pays d’Amérique latine. Ce miracle avait été accompli au prix du sang, mais il fut tout de même accompli !».
 « (…). Bref, le général accomplit, pour beaucoup, les promesses qu’il avait faites. Son Fonds des pensions protège aujourd’hui dûment les intérêts des simples retraités chiliens. Pinochet lutta contre l’analphabétisme, de même qu’Allende, etc. ».
 « (…) A mon avis, conclut-il,  le Chili d’aujourd’hui est, en fait, l’enfant de deux pères: Salvador Allende et Augusto Pinochet. Le premier lui laissa en héritage l’attachement aux principes démocratiques pour lesquels il a donné sa vie. Le deuxième laissa une économie stable et des instruments sociaux parfaits, sans lesquels la démocratie n’est qu’un moulage. »
 D’ailleurs, Piotr Romanov souligne aussi que «  rien n’empêchait Pinochet de rester dictateur à vie, son pouvoir était absolu. Il accepta lui-même les élections et transmit le pouvoir à un gouvernement démocratique dans un pays déjà stable et prospère. »
 Un constat qui fut aussi celui de l’ex Premier ministre britannique Margaret Thatcher qui s’exprima en 1999 en  faveur de la libération de Pinochet  lors  de la mise en résidence surveillée au Royaume-Uni, consécutivement au mandat d’arrêt international lancé par le juge espagnol Baltasar Garzón pour les violations des droits de l’homme commis sous son gouvernement.  .
 « Je suis bien consciente déclara publiquement Mme Thatcher à l’adresse du général Pinochet, que vous êtes celui qui a amené la démocratie au Chili, vous avez établi une constitution appropriée à la démocratie, vous l’avez mise en œuvre, des élections ont été tenues, et enfin, conformément aux résultats, vous avez quitté le pouvoir »
Oui l’Histoire, les hommes sont complexes, et le blog de Bruno Gollnisch rappelait l’année dernière un pan occulté  de l’histoire du  docteur Salvador Allende, révélé au milieu des années 2000 par l’ouvrage de l’universitaire (de gauche) chilien  Victor Farias, « Salvador Allende, la face cachée » (éditions Grancher).
Il y est exposé sans ambages le racisme, l’antisémitisme et les sympathies de jeunesse du futur président chilien-héros et martyr de la gauche pour les thèses du national-socialisme allemand.  Un livre qui fut accueilli par un silence de mort sous nos latitudes où le nom du défunt président chilien  est donné  à toute une série de rues et de bâtiments  publics…

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