Au
commencement, les hommes vivaient dans des abris sous roche et tiraient
leur subsistance de la chasse, de la pêche et de la cueillette... Peu
nombreux, ils se déplaçaient en petits groupes et jouissaient sans trop
de mal des fruits de la Terre.
Tout
change vers 12.500 ans av. J.-C.. Avec la fin des grandes glaciations,
le Moyen-Orient se couvre de graminées (céréales). Les hommes de cette
région n’ont plus besoin de se déplacer pour quérir leur nourriture. Ils
se regroupent dans des villages pour des raisons sociales, culturelles,
rituelles... et aussi parce qu'ils y trouvent plus de confort. C’est le
cas en particulier des femmes enceintes ou en charge de nourrissons,
des handicapés et des personnes âgées.
Mais
avec le confort, les villages voient leur population s’accroître. Les
habitants doivent chercher la nourriture de plus en plus loin. Pour
s’épargner cette peine, les plus astucieux ensemencent eux-mêmes les
abords de leur village.
C’est ainsi que naît l’agriculture, fille de la sédentarisation. Nous sommes les ultimes héritiers de cette «révolution néolithique».
Nous allons vous raconter ici comment, grâce à l’ingéniosité humaine,
elle a permis de multiplier par mille la population de la planète.
Isabelle Grégor
Que sont nos paysans devenus ?
À
l’occasion des Rendez-vous de l’Histoire (Blois, 2012), Jean-Marc
Moriceau, historien de la ruralité, s’est entretenu avec notre confrère
le magazine Pèlerin sur la famille paysanne et son évolution en France au cours des siècles.Il nous met en garde contre les clichés et rappelle par exemple qu’il était assez rare de voir plusieurs générations sous un même toit, y compris et surtout au Moyen Âge. Il montre aussi l’évolution du statut de la femme et du rôle de l’enfant…
La «révolution néolithique»
Avec
la naissance de l'agriculture, notre ancêtre va doucement bouleverser
son rapport avec la nature, ne se contentant plus de collecter les
richesses du monde environnant, par la chasse, la pêche et la
cueillette, mais choisissant de le domestiquer. Il se met ainsi à
sélectionner plantes et animaux autrefois sauvages pour mieux maîtriser
son approvisionnement. Après le chien, animal de compagnie et compagnon
de chasse, le premier animal domestique est la chèvre.
Le
paysan met son adresse au service de l'élaboration d'outils lui
permettant de travailler la terre et ses productions : bâtons à fouir ou
à battre les épis mais aussi haches, dont la lame polie est moins
cassante, et faucilles en silex dentelé fixées avec du bitume sur des
manches en bois démontables. Il broie les grains dans des mortiers ou
dans des meules qui lui font découvrir les vertus du polissage de la
pierre. Il développe la vannerie, la céramique et la poterie en vue de
trier et stocker les céréales.
Les
hommes tirent-t-ils profit de cette révolution ? Certes, ils se
multiplient grâce à une alimentation plus régulière et de meilleures
conditions de vie induites par la sédentarité. Mais leur état physique
se dégrade (taille, ossature, dentition…) du fait de travaux agricoles
pénibles et répétitifs.
L'arrivée des métaux
C'est
en Anatolie (Turquie actuelle) que le cuivre est d'abord utilisé pour
la fabrication de petits objets ou bijoux. Mais rapidement, au Ve
millénaire en Mésopotamie (Irak actuel),
le travail du métal permet à l'humanité de faire un bond en avant : en
perfectionnant les fours, les artisans parviennent à élaborer des
instruments plus grands et solides. L'innovation conforte en particulier
la menuiserie qui voit ses outils gagner en précision.
Vers cette époque (4.000 av. J.-C.) naît l'araire,
qui permet de creuser des sillons dans la terre pour y jeter les
semences. On ne tarde pas à la compléter par un semoir : les semences
sont versées non plus à la volée mais à travers un tube en roseau fixé
au manche de l'araire. Cet outil-verseur va augmenter de moitié les
rendements céréaliers par rapport au semis à la volée.
En
Égypte, sur les sols rendus meubles par les inondations du Nil, les
paysans utilisent bientôt une araire améliorée, avec un versoir qui
rejette la terre sur le côté. C'est une ébauche de la charrue.
La
découverte de la technique de l'alliage, il y a 5.000 ans, permet aux
habitants de Mésopotamie de produire des outils en bronze, mélange de
cuivre et d’étain, plus résistants et faciles à travailler. Avec
l'arrivée du fer, mis au point par les Hittites vers 1.500 av. J.-C.,
les moyens de traction et de défrichement gagnent encore en solidité.
Relativement répandu, le fer devient un composant essentiel du monde
agricole auquel il fournit des outils robustes et finalement assez bon
marché : houe, bêche, pioche... Le Croissant fertile, de la Mésopotamie à l'Égypte, en profitent largement.
La roue fait tourner le monde
Quand,
vers 3.400 av. J.-C., un scribe mésopotamien a reproduit sur sa
tablette un simple rond, il ne savait pas que cette première
représentation de la roue, sous forme de pictographe, allait marquer une
étape majeure dans le progrès technique. Cette création, issue
probablement de l'utilisation de rondins de bois, va susciter
l’apparition du tour du potier, de la charrette et du char de combat.D'abord composée d'un seul bloc puis de trois éléments, la roue est progressivement allégée jusqu'à se constituer de rayons, avec un essieu indépendant, au XVIIIe siècle av. J.-C. en Mésopotamie.
Les Gaulois auront l'idée de renforcer la roue avec un cerclage en fer pour en éviter l'usure. Beaucoup plus tard, au XIXe s. nos aïeux ajouteront un revêtement de caoutchouc afin de minimiser les chocs et améliorer ainsi le confort des voyageurs.
Inconvénient d’une main-d’œuvre servile
Au
Ier millénaire av. J.-C., la montée en puissance des cités grecques
puis de Rome ne débouche sur aucune avancée dans la vie des paysans. Les
ingénieurs, tel Archimède,
emploient leur talent dans les applications militaires ou les
infrastructures urbaines. Pour les durs travaux de la terre, Grecs et
Romains se satisfont de la main-d’œuvre servile procurée par les
campagnes militaires. En matière de progrès agricoles, c'est du nord que
vient l'innovation : les Celtes, autrement dit «nos ancêtres les Gaulois»,
conçoivent le tonneau en bois, plus pratique que les amphores en terre
cuite, pour la conservation et le transport du vin. Ce peuple, très en
avance en matière de charronnerie, met sa maîtrise des métaux au service
du travail de la terre en inventant le soc de «l'araire gauloise» qui permet d'approfondir le sillon tracé et cultiver des sols plus difficiles.
Au 1er s. de notre ère, le vallus, une machine à moissonner, voit même le jour. Elle est décrite ici par Pline : «
Dans les grands domaines des Gaules, de puissantes moissonneuses,
pourvues de dents, sont poussées sur deux roues à travers la moisson par
une bête de trait attelée en sens contraire : elles arrachent les épis
qui tombent dans la moissonneuse » (Histoire naturelle, Ier s.)
La campagne dans l’Antiquité tardive
«
Voici les objets dont on doit se pourvoir à la campagne : des charrues
simples, ou, si le pays est plat, des charrues à oreilles qui, en
élevant davantage les raies du labour, préservent les semences du séjour
de l'eau pendant l'hiver ; des pioches, des houes, des serpes pour
tailler les arbres et la vigne ; des faucilles pour la moisson, des faux
pour la fenaison; des hoyaux, des loups, c'est-à-dire de petites scies à
manche, dont les plus grandes n'aient qu'une coudée, qu'on peut
facilement introduire au milieu des arbres ou des vignes pour les
couper, ce qui est impraticable avec une scie commune; des plantoirs
pour fixer les sarments dans les terres façonnées ; des faux en forme de
croissant affilées par le dos ; des serpettes courbes pour détacher
plus aisément des jeunes arbres les frousses sèches ou trop saillantes ;
des faucilles dentelées pour couper la fougère ; de petites scies, des
sarcloirs et des outils pour se débarrasser des ronces ; des haches
simples ou à pic ; des pioches simples ou fourchues ; des haches dont le
dos ressemble à une herse ; des cautères, des instruments pour la
castration et pour la tonte, ou pour le pansement des animaux ; des
tuniques de peau avec des capuchons, des guêtres et des gants de peau
qui puissent servir dans les forêts ou dans les buissons, tant aux
ouvrages rustiques qu'à l'exercice de la chasse». (Palladius, L'économie
rurale, Ve s.)
À la chute de l'empire romain d’Occident, Byzance préserve vaille que vaille l’héritage scientifique de la Grèce hellénistique et va le transmettre aux puissances en devenir, l'Islam et l'Occident chrétien.
Dans
les terres conquises par les cavaliers musulmans, tout comme le
sous-continent indien, les paysans bénéficient de progrès sensibles dans
la gestion de l'eau comme dans l'utilisation des engrais et la
diversification des espèces.
Passé
maître dans de nouvelles cultures (la pistache en Syrie, le café au
Yémen ou l'orange en Andalousie...), le monde arabo-persan ne s'arrête
pas là et crée de nouvelles variétés de fleurs, comme la tulipe.
Il s'intéresse également à leur classification pour pouvoir mieux en
utiliser les vertus médicinales. L'Orient chinois n'est pas en reste en
matière agricole avec l’invention au début de l'ère chrétienne de
l'indispensable brouette puis, au VIe siècle, de la charrue à versoir
avec soc métallique qui permet aux animaux de trait de moins se
fatiguer.
Maîtriser les eaux
Née
en Mésopotamie, dans le pays des grands fleuves, le Tigre et
l’Euphrate, l'agriculture a su très vite apprivoiser l’eau dont elle ne
peut se passer.Dès 5.000 av. J.-C., les habitants de la région créent canaux, vannes et rigoles pour irriguer leurs terres semi-arides en. Dans les régions isolées, ils s'aident d'engins élévatoires appelés chadoufs composés d'un levier, d'un contre-poids et d'un seau pour extraire de leurs puits le précieux liquide. Ces engins rustiques mais efficaces sont encore utilisés sur les bords du Nil.
En Perse, 1.000 ans av. J.-C., des équipes de puisatiers creusent des qanats (tunnels souterrains) à la recherche des nappes phréatiques. Les ingénieurs arabes, quant à eux, exploitent les techniques de l'Antiquité, de la Grèce à l'Égypte, pour mettre au point d'impressionnantes norias. N'y en avait-il pas, nous dit-on, près de 5.000 sur le Guadalquivir (Espagne) au XIIIe siècle ?
De la même façon, les Chinois tirent profit de la souplesse du bambou pour construire des roues à eau et alimenter leurs immenses rizières. Dans certaines régions, des systèmes d'engrenages (saqiya dans les pays arabes) améliorent encore les pompes en diminuant la force de traction nécessaire à leur fonctionnement.
En Amérique au contraire, ce sont les techniques de terrassement et de drainage qui s'avèrent à la pointe du progrès : les Aztèques asséchaient ainsi des zones entières de marais qu'ils protégeaient ensuite par des digues.
Un Moyen Âge inventif
Le
Moyen Âge européen entraîne un foisonnement d’innovations dans le
domaine agricole dont l’une des plus importantes est la charrue.
Grâce à un long couteau en fer, le coutre,
qui ouvre la terre avant le passage du soc et de son versoir, elle
permet dès le VIIIe siècle la mise en culture des sols lourds et
argileux de l’Europe du nord.
Pesante
pour mieux éventrer les lourdes terres, souvent montée sur roues, elle
nécessite des attelages d'au moins huit bœufs avant que prennent la
relève des chevaux de races résistantes, introduits par les Barbares au
VIIIe siècle.
Ces
attelages sont permis grâce à des systèmes d’attelage innovants qui
allègent la peine des animaux ; le harnais de trait et le collier
d’épaule, venus de Chine et introduits en Europe dès avant l’An Mil. À
la même époque se diffuse aussi le fer à cheval (ou à bœuf).
Correctement
attelés grâce au nouveau collier d'épaule et disposés en file indienne
pour additionner les efforts, les chevaux se révèlent efficaces dans des
champs gras où ils dérapent moins que les bœufs. Ils allègent
considérablement le travail du paysan et participent au bond en avant de
l'agriculture médiévale.
Ils
révolutionnent aussi le transport des charges lourdes. Avec le harnais,
une paire de chevaux arrive à tirer jusqu'à six tonnes alors que, sous
l'Antiquité, ils ne pouvaient tirer plus de 500 kilos sous peine
d'étranglement et un édit de l'empereur Théodose avait même fait de
cette limite une obligation légale.
Nantis
d'animaux, les paysans recueillent avec soin le fumier pour amender les
champs. Les moutons sont particulièrement appréciés : leurs troupeaux
sont conduits sur les jachères afin de les enrichir de leurs excréments
et d'aérer le sol de leurs sabots qu'en bons connaisseurs, les paysans
qualifient de «sabots d'or».
Un
outil, la herse, qui ne servait jusqu'alors qu'à désherber, gagne de
l'importance en permettant de recouvrir les semis. Grandes faux et
faucilles - moins chères - demeurent les traditionnels outils de la
moisson. Les épis, une fois coupés, sont battus au fléau de façon à en
extraire les grains.
Les
rendements sont honorables compte tenu des techniques disponibles. Dans
les céréales, on arrive sur les bonnes terres à sept ou huit grains
récoltés par grain semé (contre vingt pour un en moyenne aujourd'hui).
Il
s'ensuit une amélioration des conditions de vie avec une alimentation
relativement riche et variée qui inclut le pain de froment et la viande
dans les régions les plus avancées comme le Bassin Parisien. «Ces
campagnes médiévales d'Occident nourrissent mieux leurs hommes que ne
l'ont fait ou ne le font encore tant d'autres pays où la faim est un mal
de chaque année», souligne l'historien Jacques Heers.
Le moulin remplace le travailleur
Dès
l’Antiquité, pour en finir avec la corvée de la meule qui écrase les
grains, on a cherché à remplacer le travail humain par la force animale
ou la force mécanique. Doté d'une roue verticale ou horizontale, le
moulin utilise selon les régions la force du vent (VIIe siècle, en
Afghanistan), des rivières (IIIe siècle, en Turquie), voire de la marée,
dès le Xe à Bassora (Irak) et le XIIe siècle dans la région nantaise.Gros demandeur en argent et savoir-faire, ce bâtiment en bois ou pierre est vite devenu symbole du pouvoir.
Son développement, freiné pendant l'Antiquité par la disponibilité de nombreux esclaves, a été relancé au XIIe siècle du fait de l'explosion démographique et des ordres religieux, en particulier les Cisterciens et le Chartreux, qui eurent plus que quiconque le souci d’économiser la peine des hommes et comprirent l'intérêt de cette machine pour d'autres secteurs que l’agriculture (textile, métallurgie puis papier).
De la mécanisation à la fin des paysans
Riche
en exploits scientifiques, la Renaissance a peu profité aux paysans.
L'époque ne manque pourtant pas de visionnaires, comme Olivier de
Serres, devenu le père de l'agronomie moderne avec la publication du Théâtre d'Agriculture et Mesnage des Champs
(1599). Dans cet essai inspiré par ses propres expérimentations et les
agronomes romains tel Columelle, il préconise en particulier la
suppression de la jachère (on laisse reposer le sol pendant une année
après avoir récolté les céréales) et son remplacement par un semis de
légumineuses comme la luzerne, des plantes riches en azote qui vont
restaurer le sol et servir à l'alimentation du bétail.
Mais le progrès n'est pas linéaire : «La situation alimentaire était, pour les paysans, bien meilleure au temps de Charles VII et de Louis XI que deux siècles plus tard»,
note cruellement Jacques Heers. Jusqu'à l’aube du XVIIIe siècle, les
innovations techniques sont maigres comme s'en plaignent les Encyclopédistes : «Que
l'on compare une charrue à une chaise de poste ! On verra que l'une est
une machine grossière ; l'autre, au contraire, est un chef-d’œuvre
auquel tous les arts ont concouru. Notre charrue n'est pas meilleure que
celle des Grecs et des Romains. […] L'art de la culture des terres a
été négligé, parce qu'il n'a été exercé que par les gens de la campagne.
Les objets de luxe ont prévalu, même en agriculture. […] Nous
connaissons l'architecture des jardins, tandis que la mécanique du
laboureur n'a presque fait aucun progrès» (article «Botanique» de L'Encyclopédie, 1751).
Il faut attendre le Siècle des Lumières pour que le souci de faciliter les travaux des champs et développer les rendements s'impose aux ingénieurs.
La mécanisation s’accélère avec la révolution industrielle au siècle suivant et l’arrivée de la machine à vapeur.
«L'introduction
d'un matériel perfectionné dans une ferme […] est véritablement une
œuvre de progrès et d'humanité et c'est ce but que le Gouvernement de la
République s'attache à poursuivre». Cette circulaire adressée aux
préfets par le ministère de l'Agriculture en 1876 résume bien l'esprit
de ce siècle : il est temps de faire profiter la paysannerie des
avancées techniques considérables qui marquent l'époque.
Paradoxalement,
cela ne va pas sans réticences : n'est-ce pas enlever sa subsistance au
paysan qui, à l'image du laboureur (du latin laborare :
travail), se définit par sa capacité à effectuer une activité manuelle ?
Adam n'a-t-il pas été condamné à vivre à la sueur de son front ?
Par
ailleurs le monde agricole, replié sur lui-même, voit encore d'un
mauvais œil ces techniques nouvelles qui s'adaptent mal aux parcelles
morcelées. Et pourquoi s'endetter lourdement si la main-d'oeuvre
abonde ? Enfin, nombre de paysans ne sont toujours pas propriétaires de
leurs terres : métayers ou salariés, il restent au service de grands
propriétaires qui leur confient des surfaces réduites. La marche du
progrès entraînée par la révolution industrielle ne s'arrête pas à ces
considérations.
Superstitions paysannes
Outil
de travail dont dépend le sort de la famille, le matériel agricole est
l'objet de toutes les attentions de la part de son propriétaire qui
n'hésite pas à faire intervenir l'irrationnel pour le protéger.C'est ainsi que le laboureur, avant de tracer les premiers sillons avec une nouvelle charrue, va tracer une croix de cire sur ses manchons. Il se place ainsi dans la tradition antique : Romulus n'a-t-il pas tracé les contours de Rome à l'aide du charrue comme, avant lui, avait symboliquement fondé la ville d'Éryx (Sicile) en délimitant un espace sacré ?
De leur côté, les moissonneurs appellent la protection de saint Jean sur leurs faux et faucilles en les brandissant au-dessus des traditionnels feux de joie de la Saint Jean-Baptiste (24 juin). Fixer un de ces instruments sur le pignon nord de sa cheminée permet par ailleurs de protéger du mauvais sort, tandis que verser sur la lame l'eau de sa toilette repousse les maladies. Mais attention à ne pas brûler un timon de votre charrue, vous risqueriez une agonie longue et douloureuse !
La
fin du XIXe siècle voit le triomphe de la motorisation dans les
campagnes, encouragée par les sociétés d'agriculteurs, très actives et
enthousiastes, et par les grandes exploitations confrontées au départ de
la main-d’œuvre pour les villes.
Des
fabricants de machines inondent les campagnes de leurs catalogues.
C'est le cas de l'Américain Mc Cormick qui introduit sa moissonneuse en
France en 1851 : de conception assez simple, tirée par un unique cheval,
elle met fin à la corvée du fauchage manuel des champs et se répand
très rapidement dans les fermes.
En
1875, apparaissent aux États-Unis les premiers tracteurs à moteur à
explosion. Mais, chers, complexes et peu pratiques, ces monstres d'acier
peinent à prendre la place des premières locomobiles. Les faucheuses
(1822), batteuses (1818) et faneuses (1816) rencontrent plus de succès.
Elles permettent aux campagnes d'accéder à l'autosuffisance alimentaire
tout en les affranchissant de la pénurie de main-d'oeuvre, attirée en
ville par la révolution industrielle.
Après
la création en 1881 du ministère de l'Agriculture, les travailleurs de
la terre trouve une nouvelle aide précieuse dans l'apparition des
syndicats agricoles, en 1884, qui les soutiennent pour les achats en
commun. L'État reprendra l'initiative après 1918 pour relever le monde
agricole, saigné par la Grande Guerre, en facilitant le remembrement
tout en multipliant la production de tracteurs.
En
1939, la moissonneuse-batteuse fait son apparition mais, comme
l'ensemble du matériel agricole moderne, il lui faudra attendre les «Trente Glorieuses» de la seconde moitié du XXe siècle pour s'imposer.
Après la Seconde guerre mondiale, en effet, «L'agriculture française sera moderne ou ne sera pas», pour reprendre l'expression de l'agronome René Dumont.
La
mécanisation devient une des priorités du plan Monnet qui ambitionne de
doter les campagnes de 200 000 tracteurs et d'y répandre l'utilisation
des engrais. Les forgerons et inventeurs d'antan laissent alors la place
aux groupes internationaux qui approvisionnent les nouvelles
coopératives, soutenues par les banques.
Les
tracteurs se font alors plus petits pour permettre à un homme seul de
les utiliser tandis que des engins géants mettent en valeur les plus
grandes propriétés. La mécanisation s'impose aujourd'hui dans la plupart
des activités agricoles, en Europe et dans les pays émergents.
Pour répondre au principe de «toujours plus, plus vite»,
l'informatique et les hautes technologies sont entrées dans les
fermes transformées en petites entreprises : services de météorologie,
logiciels de déclarations et cadastres sont désormais accessibles en un
clic.
Les
rendements à l'hectare explosent mais c'est trop souvent au prix d'une
dégradation des sols et de la biodiversité ainsi que d'une consommation
massive de ressources fossiles (hydrocarbures). Les conditions de vie
des derniers paysans s'améliorent et se rapprochent de celles des
citadins mais parfois au prix de leur asservissement au secteur
agro-industriel et à la grande distribution.
Sources bibliographiques
- «L'Homme et la machine» (Les Cahiers Science et vie, n°132, octobre 2012).
- Jacques Heers, Le travail au Moyen Âge, (Que sais-je? PUF, 1965).
- Marie-Claire Amouretti et Georges Comet, Hommes et techniques de l'Antiquité à la Renaissance, éd. Armand Colin, 1993.
- Georges Duby, L'Économie rurale et la vie des campagnes dans l'Occident médiéval, Flammarion, 1962.
- Jacquetta Hawkes, Atlas culturel de la préhistoire et de l'antiquité, Elsevier, 1978.
- Rosine Lagier, Il y a un siècle... la France paysanne, Ouest-France, 2003.
- Christophe Lefébure et Alain Baraton, Les Outils et travaux de la ferme, Flammarion («La Maison rustique»), 2006.
- Jacques Heers, Le travail au Moyen Âge, (Que sais-je? PUF, 1965).
- Marie-Claire Amouretti et Georges Comet, Hommes et techniques de l'Antiquité à la Renaissance, éd. Armand Colin, 1993.
- Georges Duby, L'Économie rurale et la vie des campagnes dans l'Occident médiéval, Flammarion, 1962.
- Jacquetta Hawkes, Atlas culturel de la préhistoire et de l'antiquité, Elsevier, 1978.
- Rosine Lagier, Il y a un siècle... la France paysanne, Ouest-France, 2003.
- Christophe Lefébure et Alain Baraton, Les Outils et travaux de la ferme, Flammarion («La Maison rustique»), 2006.
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