mercredi 15 août 2012

Août 1792 : le sacrifice de la garde suisse :


« Plût à Dieu que nous fussions aussi bons Français que les Suisses ! » (Louis XVIII)
Le 10 août 1792. La Garde- Suisse, fidèle entre les fidèles, meurt au palais des Tuileries. Des provinces accouraient des voleurs et des révolutionnaires exal­tés pour renforcer la meute insurrec­tionnelle n’arrivant pas à soulever Paris. « Où s’était recrutée cette armée de l’insurrection ?… Qui la payait, qui l’entrainait ?…. » (G. Lenotre)
On ne va pas se faire tuer de plein gré…
La tourbe des faubourgs, composée de nombreux étrangers, est animée notamment par Danton, le Mirabeau de la crapule. Celui-ci d’ailleurs bénéficiait de l’argent de l’Angleterre, du duc d’Orléans et de la Cour car, comme Robespierre et bien d’autres, il ne recherchait qu’une bonne place au soleil pour tout arrêter. La jalousie et l’envie en feront des bêtes sanguinaires, brûlant ce qu’ils avaient d’abord admiré… De nombreux essais de soulève­ments avaient avorté, le 26 et le 30 juillet ainsi que le 4 août. Paris était sous la coupe d’une minorité d’enra­gés semant terreur et massacres depuis 1789. La majorité frileuse attendait, cachée derrière ses fenê­tres, un retour de l’ordre. Le mani­feste de Brunswick fut le prétexte attendu pour la curée. Il faut préciser que Paris grouillait alors d’agents étrangers, souvent bourrés d’argent et attachés à détruire la monarchie française, par le financement de révoltes que nos livres qualifieront de « populaires ». La Commune rem­place le Conseil général en préten­dant représenter le peuple. Une poi­gnée d’agitateurs prend le pouvoir dans un climat d’abdication totale de la part des élites. Celles-ci discutent, se lamentent, gémissent : « Leur résistance s’évapore en paroles et en écritures » (Gaxotte).
Des milliers d’hommes étaient prêts à prendre les armes pour le Roi et n’attendaient qu’un ordre pour cela… Charles Maurras résumera fort bien le drame de 1789 dans le vide créé par la carence et la chute de toute forme d’autorité, résultat de « cinquante ans de scepticisme et de philosophie larmoyante » (Gaxotte). Les Suisses savent qu’ils vont mou­rir. Ils arrivent aux Tuileries, ayant pris soin au préalable d’enterrer leurs drapeaux. Pendant ce temps et inlas­sablement, les fidèles gentilshommes proposent des plans d’évasion et de contre-révolution au Roi indécis…
On refuse des munitions aux Suisses. Certains n’ont pas mangé depuis 36 heures. Le marquis de Maillardoz et six officiers de sa famille renvoient un cousin pour que le nom ne s’éteigne pas… Les événements vont se préci­piter. Le manque de chef, de coordi­nation, les hésitations du Roi ne vou­lant pas verser le sang, entraîneront le sacrifice des plus braves en faisant échouer tout redressement possible de la situation. Roederer, instrument de Danton, fera tout pour attirer Louis XVI à l’Assemblée pour le déchoir de ses fonctions et ainsi l’éloigner de ses défenseurs. Les Fédérés et la « lie » de Paris se mobilisent. Danton mène le jeu, les fausses informations révolutionnaires circulent pour préparer les conscien­ces et légitimer les horreurs qui se préparent. Les volontaires royalistes, chevaliers de Saint-Louis, arrivent en s’écriant : « Huissier, ouvrez à la noblesse française ! »
Deux bataillons fidèles de la Garde nationale des Petits-Pères et de Saint-Thomas sont là, leur commandant Galiot de Man­dat vient d’être assassiné. Imaginons un instant, comme le dit le député Barbaroux :
« Tout assurait la vic­toire à la Cour si le Roi n’eût pas quitté son poste ; s’il fût monté à che­val; la très grande majorité des bataillons de Paris se fût déclarée pour lui. » Pierre Gaxotte disait aussi :
« Un chef intelligent eût désarmé et renvoyé les gardes qui n’étaient point sûrs, expulsé du château tout ce qui faiblissait et, avec les quinze cents ou deux mille hommes qui restaient, organisé le champ de bataille. On avait du canon et, avec les dépouilles des gardes, assez de fusils et de balles. Derrière l’épaisse maçonnerie du palais, il était possible de soutenir le siège et d’en sortir victorieux… Mais il n’y avait point de chef. » Le Roi et sa famille partis, contre l’avis de Marie-Antoinette décidée à mourir avec les volontaires du Roi, c’est la débandade chez les défenseurs. Les Suisses des bataillons de Courbevoie et de Rueil restent garder les Tuileries pour l’honneur avec quel­ques nobles. « Rendez-vous à la Nation », crie Westermann, futur bourreau de la Vendée. « Nous nous croirions déshonorés… », répond le capitaine Dürler et le sergent Blaser : « Nous sommes suisses et les Suisses ne rendent les armes qu’avec la vie ! »
La furie attaque en fauchant une pre­mière ligne de Suisses au canon mais les Suisses repoussent la horde, sai­sissent les canons et se rendent maî­tres du terrain. Des renforts du fau­bourg Saint-Antoine arrivent et c’est de nouveau l’attaque. Les Suisses n’ont plus de munitions. D’autre part un message signé du Roi sur pression des députés demande aux Suisses de cesser le feu et de se rendre dans leurs casernes. D’où un indescriptible massacre des jardins au château, fusillades, égorgements, dépeçages, destructions de tout ce qui rappelle la monarchie, cruauté inouïe. Les fem­mes ivres jouent à l’étal de bouche­rie, comme aux Halles, les vêtements sanglants, confectionnant des cocar­des avec les boyaux des malheureux Gardes. Le capitaine d’Erlach a le cou scié lentement par deux femmes. Le même sort attend Rodolphe de Reding, saisi dans la chapelle où il reposait blessé. Quant au lieutenant- colonel marquis de Maillardoz, il fut éventré par d’ignobles femmes jouant avec ses entrailles. « Des corps nus sont empilés sur les pavés, mis au feu, grillés comme des côtelettes… D’autres sont déchiquetés, muti­lés… » (Gaxotte).
On brûle les cada­vres des Suisses. On jette des hom­mes vivants par les fenêtres, qui s’empalent sur les piques. Deux jeu­nes tambours, tenant leur père en sanglotant, sont égorgés, gardes du corps, gentilshommes, cuisiniers, jeunes marmitons bouillis vivants dans les chaudières, toute la panoplie des grandes heures de la Révolu­tion… On comptera 8 à 900 massa­crés et 376 chez les assiégeants. Vers le soir, de très jeunes gens joueront avec les têtes, sous l’œil hor­rifié de Dumas. Dans Les Suisses au service de la France, Jérôme Bodin cite :
« A l’emplacement du château détruit, nulle pierre ne commémore la tragique fidélité des Gardes-Suisses, mais l’âme du régiment martyr habite toujours les Tuileries : en deux siècles de monarchie, il s’était acquis une liste immense de titres de gloire ; ses couleurs avaient flotté dans 71 campa­gnes et les Gardes-Suisses du Roi avaient participé à 154 batailles et à 30 sièges. Un de ses officiers, trans­percé au dernier instant sur la place Louis-XV, s’enveloppa pour mourir dans les plis de ses soies fleurdelisées et cria au caporal qui le reçut dans ses bras : “Laissez-moi mourir et sauvez le drapeau.” Les harpies, qui mutilè­rent sa dépouille en lui arrachant le cœur, commirent bien là un acte sym­bolique : ces hommes, voués à “la religion de l’honneur et au culte de la fidélité”, représentaient bien le cœur du dispositif monarchique… »
De 1477 à 1830, environ un million de soldats suisses servirent la France et 600 000 mourront dans les batail­les. Ils continueront à servir la France jusqu’à aujourd’hui au sein de la Légion étrangère. Ils reçurent sur leurs drapeaux en 1916 la Croix de la Légion d’honneur au drapeau, sept citations à l’ordre de l’armée et 6 renouvellements au drapeau de la Médaille militaire…
Frédéric Winkler http://www.actionroyaliste.com

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