La Nouvelle Espagne meurt en 1821 dans les soubresauts
d’émeutes populaires qui se succédaient depuis plus de dix ans...
L’indépendance de fait est proclamée à la suite du Traité de Cordoba du
mois d’août et de l’abdication du dernier vice-roi O’Donaja.
Mais le Mexique va s’enfoncer dans cinquante ans de guerre, de la
pacification interne, menée par le terrible général Santa Anna, à
l’occupation franco-britannique, jusqu’à l’exécution du jeune empereur
Maximilien par les troupes de Juarez à Queretaro en juin 1867.
Si l’on parle aujourd’hui à des "jeunes" d’un épisode fameux
d’héroïque résistance de cette période où une poignée d’hommes
retranchée tint l’armée mexicaine en échec pour permettre aux convois de
passer et aux troupes de se reconstituer, ils répondront invariablement
« Ah oui, Alamo ! » La réponse n’est pas fausse mais elle n’est que partielle.
C’était en 1836. Le Texas, province mexicaine peuplée de 30 000
Américains, souhaitait se séparer de la tutelle dictatoriale du général
Santa Anna et acquérir son indépendance, voire rejoindre les États-Unis.
Pour permettre au gros des troupes texanes de se rassembler, une
poignée de volontaires bloqua l’armée mexicaine devant le fort d’Alamo.
Pas un des défenseurs du fort n’en réchappa - pas même le célèbre Davy
Crockett qui y trouva une mort glorieuse - mais grâce à ce sacrifice,
l’armée texane enfin constituée allait être victorieuse. Le général
Santa Anna fut fait prisonnier à San Jacinto six semaines plus tard, le
21 avril.
Le cinéma, John Wayne et le déferlement de la culture américaine
occultent aujourd’hui dans la mémoire populaire un haut fait d’armes
français - curieusement identique - qui eut lieu trente ans plus tard,
dont le retentissement allait faire entrer un corps militaire récemment
formé dans la légende et le faire accéder d’emblée au rang des troupes
d’élite internationales : la Légion étrangère, créée, en 1831, par
Louis-Philippe.
Nous sommes maintenant en 1861. Le général Santa Anna a
définitivement été évincé du pouvoir en 1855 ; le Texas, devenu
indépendant, a rejoint les États-Unis, et le nouvel homme fort du
Mexique, Benito Juarez, décide de suspendre le règlement des intérêts de
la dette extérieure. Sur les instances du banquier Jecker, soutenu par
le duc de Morny, Napoléon III met sur pied un corps expéditionnaire
franco-britannique destiné à envahir le Mexique et à y instaurer un
empire dont il offrira la couronne à l’archiduc Maximilien.
Les troupes débarquent en janvier 1862 à Vera Cruz, mais les Anglais,
désintéressés par Juarez, rembarquent rapidement, laissant les Français
continuer seuls la lutte.
En avril 1863, trois mille Français commandés par Lorencez font sans
succès le siège de Puebla. Le gros des troupes (28 000 hommes) commandé
par Forey doit leur porter main forte.
Le 30 avril, pour permettre le passage des convois pour le siège,
dans l’attente du gros des troupes de Forey, à l’est de Puebla sur la
route de Vera Cruz, au hameau de Camaron (aujourd’hui Villa tejeda), la
troisième compagnie (64 hommes) du Régiment Étranger, commandée par le
capitaine Danjoux, résistera neuf heures durant à l’assaut de deux mille
Mexicains ! Seuls, trois légionnaires s’en sortiront.
Puebla fut prise par Forey le 17 mai, au terme d’un siège qui avait duré soixante-treize jours.
La résistance héroïque de Camerone allait faire entrer la Légion
étrangère dans la légende et la date anniversaire du 30 avril allait
devenir celle de la fête traditionnelle de la Légion.
Ce 1er Régiment Étranger d’infanterie cantonné en Algérie
sera complété par un second en1884, puis par deux régiments de cavalerie
lors de la première guerre mondiale... et deux régiments parachutistes
après la seconde. Aujourd’hui un septième régiment de génie est en
formation.
De tous les pays du monde des hommes continuent d’y trouver refuge et
fraternité sous le fanion vert et rouge, à l’ombre du drapeau français.
Là l’esprit et l’exemple de Camerone demeurent : « Honneur et Fidélité »,
la devise des hommes au képi blanc, à la grenade flammée à sept
branches et aux épaulettes de laine vertes et rouges est toujours aussi
présente et plus vivace que jamais. Cent vingt nationalités s’y
côtoient.
De Sidi bel Abbès, l’état-major de la Légion étrangère a été
transféré à Aubagne, avec son monument aux morts et surtout son musée où
sont conservées les reliques de tous ses hauts faits d’armes, les
bâtons des maréchaux qui eurent l’honneur d’y commander et bien d’autres
souvenirs de plus de cent soixante-dix ans d’engagement et de combat au
service de la France et de ses alliés.
Chaque année, le 30 avril, une cérémonie émouvante s’y déroule dans
le cadre d’une prise d’armes grandiose : la lecture du récit de Camerone
et la présentation aux troupes de la main artificielle du capitaine
Danjoux...
Cette année est celle du cent quarantième anniversaire de Camerone.
À cette occasion, le 13 mars, un mur-musée consacré à la Légion étrangère a été inauguré à Felicity en Californie.
Le Libre Journal de la France Courtoise - n° 293 du 15 mai 2003
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