Charles Pierre Péguy est né le 7 janvier 1873 à Orléans. Il est issu d'une famille modeste. Sa mère est rempailleuse de chaises, son père est menuisier. Péguy est d'abord, comme l'écrira Pierre Dominique, un paysan, un petit gars de la campagne instruit, cultivé, et qui écrira comme on laboure… Il démontre, dès son plus jeune âge, un caractère affirmé. Son proviseur écrit dans son bulletin : « Toujours très bon écolier, mais gardons-nous du scepticisme, et restons simple. J'ajouterais qu'un élève comme Péguy ne doit jamais s'oublier ni donner l'exemple de l'irrévérence envers ses maîtres ».
Rebelle, dès son plus jeune âge… Il prépare le concours de l'École normale supérieure. C'est à la fin de cette période qu'il devient, selon un de ses condisciples, « un anticlérical convaincu et pratiquant ». Il affine ses convictions socialistes. Une vision personnelle faite de rêves de fraternité et de convictions issues de la culture chrétienne. À l'École normale supérieure, il est l'élève de Romain Rolland et de Bergson, qui ont une influence considérable sur lui. Romain Rolland le décrit ainsi : « Il était fils de pauvres gens, mais point, comme Vallès, de petits bourgeois, non, il venait du peuple, paysan et artisan, du peuple en sabots, il avait de la terre orléanaise à ses sabots ». Il ignorait les compromis. Il s'en prit à tout le monde : les républicains, les socialistes, les libres-penseurs, les syndicalistes, les gens de droite, les financiers, la Droite de l'Académie, sa Gauche, et toutes les revues, dont l'Action Française. Péguy s'en prend à Barrès : « Barrès ! En voilà un ! Il a tout, l'Académie, l'État, la Gloire, et il tremble devant n'importe quel morveux de journaliste. Il écrit des quatre pages à de petits imbéciles qui, d'ailleurs, se foutent de lui et qui ont bien raison. » L'inventeur de l'expression « les hussards noirs de la République » ? C'est Péguy. Un polémiste.
Après avoir été Dreyfusard, il, se convertit au nationalisme. Et il s'en prend au « parti intellectuel » : « Ils tiennent tout, tout le pouvoir temporel. » C'est une « Église laïque, radicale… ». Et il dénonce « le caprice, le délire, la démence, la brutalité de quelques despotes. Et même quelquefois leur bestialité. » Pour Péguy, « la race française » est le fruit millénaire d'une correspondance entre un peuple et une terre irriguée par des siècles de christianisme. Un christianisme païen, au sens de paganus (paysan). Il s'oppose fermement à « cet universalisme facile » qui commence, à ses yeux, à envahir le monde. « Je ne veux pas que l'autre soit le même. Je veux que l'autre soit autre », affirme-t-il. Péguy est un combattant. Écoutons-le quand il parle de la foi : « Vae lepidis, malheur aux tièdes. Honte aux honteux. Malheur et honte à celui qui a honte. […] Nulle source n'est aussi honteuse que la honte. Et la peur. Et de toutes les peurs, la plus honteuse est certainement la peur du ridicule, d'être ridicule, de paraître ridicule, de passer pour un imbécile. » Péguy exècre la modernité. Il critique dans la modernité la vanité de l'homme qui prétend remplacer Dieu, et un avilissement moral dû à la part donnée à l'argent et à l'âpreté mise à sa recherche et à son accumulation. Il dénonce ce monde qui tourne le dos aux humbles vertus du travail patient du paysan ou de l'artisan.
Nationaliste, il le fut. Et catholique. Bien qu'il n'eut jamais communié adulte il partit en juin 1912, touché par la maladie de l'un de ses enfants, en pèlerinage à Chartres. Il écrira : « J'ai tant souffert et tant prié… Mais j'ai des trésors de grâce une surabondance de grâce inconcevable ».
Lieutenant de réserve, il part en campagne dès la mobilisation, en août 1914. Il meurt au combat le 5 septembre 1914 Un de ses amis a raconté, qu'avec fierté il avait dit, avant son départ pour le front : « Tu les vois, mes gars ? Avec ça, on va refaire 93 ».
Écoutons ce grand patriote :
« Heureux ceux qui sont morts pour la terre charnelle,
Mais pourvu que ce fût dans une juste guerre,
Heureux ceux qui sont morts dans les grandes batailles,
Couchés dessus le sol à la face de Dieu Heureux les épis mûrs et les blés moissonnés ».
R.S. RIVAROL 22 AVRIL 2011
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