❐ Charles de Batz de Castel more, comte d'Artagnan, doit ce nom sonore à une seigneurie de Gascogne sise près de Vic-en-Bigorre. Entré en 1640 aux gardes, il revêt la casaque des mousquetaires en 1644, après avoir participé à la campagne du Roussillon. Légitimement fier d'appartenir à un corps d'élite - à qui Alexandre Dumas saura donner une rare aura littéraire - d'Artagnan combat en Flandre avec le vicomte de Turenne. Sous-lieutenant des mousquetaires en 1658, il escorte Louis XIV partant accueillir sa fiancée Marie-Thérèse d'Autriche à Saint-Jean-de-Luz. Après avoir accédé au grade de capitaine de la première compagnie de mousquetaires, il continuera une remarquable carrière, pour finir maréchal de camp et gouverneur de la place de Lille en 1672.
C'est à cet officier prestigieux, à ce serviteur solide, fidèle et incorruptible que s'adresse le roi en 1661 pour lui confier une mission de confiance, hautement délicate : arrêter l'un des plus éminents personnages du royaume, Nicolas Fouquet, comte de Vaux, marquis de Belle-Isle, surintendant des finances.
Face à face, donc, l'homme d'épée et l'homme d'argent. Car c'est sur l'argent, par l'argent que Fouquet a construit une puissance considérable. Trop considérable pour ne pas inquiéter le souverain. Fils d'un riche armateur, maître des requêtes et conseiller d'Etat, Fouquet a commencé sa carrière dans la magistrature. Conseiller au parlement de Metz, puis maître des requêtes, il remplit plusieurs missions d'intendant qui l'amènent à se lier avec Mazarin. Nominé par lui intendant de Paris, Fouquet sert le cardinal avec efficacité et fidélité, sauvant même ses précieuses collections pendant la Fronde. Ces services sont récompensés par la charge de surintendant des Finances.
A ce poste, le ministre utilise à plein le pouvoir de l'argent. Il use et abuse de tous les expédients, dévaluations, anticipations sur les rentrées fiscales, emprunts. Pour renflouer le Trésor, certes ... mais aussi pour se remplir les poches. Car Fouquet a fâcheusement tendance à confondre allègrement ses finances propres et celles de l'Etat : prêtant à l'Etat comme particulier, il se rembourse comme surintendant ! A ce rythme, il accumule en quelques années, grâce à sa charge, une fortune considérable, en particulier en spéculant sur les emprunts, en multipliant les malversations (II empoche, par exemple, de très gros pots-de-vin lors de l'affermage des impôts indirects). Il se fait construire un splendide château sur sa terre de Vaux et joue largement les mécènes en faveur d'artistes et d'écrivains (dont La Fontaine et Molière). Il a groupé. autour de lui une coterie, a des amis partout, pensionne les gens en place - y compris la reine mère. Il est persuadé qu'il est intouchable, que l'argent peut tout.
Exaspéré par les prétentions et les manœuvres de Fouquet, Louis XIV charge d'Artagnan de l'arrêter. Action symbolique : en brisant cette féodalité financière, le jeune roi s'affirme en souverain et inaugure son règne personnel. Enfermé à Pignerol, Fouquet disparaît en 1680 dans des conditions mystérieuses. La charge de surintendant des Finances ne lui survit pas. C'était le temps, l'heureux temps où l'argent n'était pas encore maître du jeu.
✍ Pierre VIAL National Hebdo du 1 au 7 septembre 1994
C'est à cet officier prestigieux, à ce serviteur solide, fidèle et incorruptible que s'adresse le roi en 1661 pour lui confier une mission de confiance, hautement délicate : arrêter l'un des plus éminents personnages du royaume, Nicolas Fouquet, comte de Vaux, marquis de Belle-Isle, surintendant des finances.
Face à face, donc, l'homme d'épée et l'homme d'argent. Car c'est sur l'argent, par l'argent que Fouquet a construit une puissance considérable. Trop considérable pour ne pas inquiéter le souverain. Fils d'un riche armateur, maître des requêtes et conseiller d'Etat, Fouquet a commencé sa carrière dans la magistrature. Conseiller au parlement de Metz, puis maître des requêtes, il remplit plusieurs missions d'intendant qui l'amènent à se lier avec Mazarin. Nominé par lui intendant de Paris, Fouquet sert le cardinal avec efficacité et fidélité, sauvant même ses précieuses collections pendant la Fronde. Ces services sont récompensés par la charge de surintendant des Finances.
A ce poste, le ministre utilise à plein le pouvoir de l'argent. Il use et abuse de tous les expédients, dévaluations, anticipations sur les rentrées fiscales, emprunts. Pour renflouer le Trésor, certes ... mais aussi pour se remplir les poches. Car Fouquet a fâcheusement tendance à confondre allègrement ses finances propres et celles de l'Etat : prêtant à l'Etat comme particulier, il se rembourse comme surintendant ! A ce rythme, il accumule en quelques années, grâce à sa charge, une fortune considérable, en particulier en spéculant sur les emprunts, en multipliant les malversations (II empoche, par exemple, de très gros pots-de-vin lors de l'affermage des impôts indirects). Il se fait construire un splendide château sur sa terre de Vaux et joue largement les mécènes en faveur d'artistes et d'écrivains (dont La Fontaine et Molière). Il a groupé. autour de lui une coterie, a des amis partout, pensionne les gens en place - y compris la reine mère. Il est persuadé qu'il est intouchable, que l'argent peut tout.
Exaspéré par les prétentions et les manœuvres de Fouquet, Louis XIV charge d'Artagnan de l'arrêter. Action symbolique : en brisant cette féodalité financière, le jeune roi s'affirme en souverain et inaugure son règne personnel. Enfermé à Pignerol, Fouquet disparaît en 1680 dans des conditions mystérieuses. La charge de surintendant des Finances ne lui survit pas. C'était le temps, l'heureux temps où l'argent n'était pas encore maître du jeu.
✍ Pierre VIAL National Hebdo du 1 au 7 septembre 1994
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