Saint Nicolas fut et demeure l'un des saints les plus populaires de la chrétienté. La preuve en est que son culte repose principalement sur des légendes. Noël étant passé, parler de lui est-il encore d'actualité ? Oui, car il se trouve que les Turcs se sont mis en tête d'en réclamer les reliques!
Qui était saint Nicolas ? On ne le sait pas vraiment. Évêque de Myre, en Lycie, au IVe siècle, il mourut vers 350. - Son histoire commence vraiment en 1057, lorsque des marchands italiens dérobèrent ses reliques pour les mettre à l'abri des Turcs seldjoukides, et les placer dans une châsse à Bari.
Cependant, la légende a abondamment suppléé le manque de données historiques. Aujourd'hui, saint Nicolas est vénéré comme le patron des marins, des captifs, et surtout des enfants. Cette dernière spécialité est bien entendu liée à la légende principale le concernant, celle des trois petits enfants enfermés dans un saloir et qu'il ressuscita, légende illustrée par une célèbre ballade populaire : "Il était trois petits enfants, qui s'en allaient glaner aux champs ... "
Oui à la légende, non au mensonge
Donc, saint Nicolas était évêque de Myre, en Lycie ... mais où donc se trouve cette ville ? Dans l'actuelle Turquie! Voilà pourquoi le gouvernement turc c'est mis en tête de « récupérer »ses reliques. Comme si un seul Turc se souciait de saint Nicolas, de sa crosse, de sa mitre et d'aucun des trois petits enfants ressuscités. Mais rien n'est inutile pour tâcher de faire croire que la Turquie ... voyons ... mais c'est presque l'Europe !
Presque... Sauf que les fameux Seldjoukides n'arrivèrent en Anatolie qu'au XIe siècle, et que c'est justement la cruauté dont ils firent preuve en Terre sainte envers les pèlerins qui rendit les croisades nécessaires. Alors que les Arabes s'en étaient emparés quatre siècles plus tôt sans que nul n'y trouve à redire, dès lors que le libre accès aux lieux saints était assuré.
Les mêmes Seldjoukides, qui détruisirent des milliers de chefs d'œuvre de l'art byzantin, n'auraient pas manqué de détruire les reliques de saint Nicolas sans même se demander de quoi il s'agissait.
Peut-être les Turcs espèrent-ils stimuler le tourisme dans leur pays en attirant les pèlerins venus admirer les reliques en question ? De toute façon, ce serait peine perdue, car les traditions populaires que saint Nicolas a fait naître sont tout à fait locales, sans aucun rapport avec sa personne et encore moins avec son évêché de Myre. Les Russes, qui en ont fait leur saint patron, ne se sont jamais donné le ridicule d'en réclamer les reliques, ne serait-ce même qu'un tibia.
Il existe à Montserrat, en Catalogne espagnole, une cérémonie de l'enfant évêque dérivée de la légende de saint Nicolas. Mais, là encore, l'origine « turque »de saint Nicolas n'y joue aucun rôle. Enfin, comme on le sait, en Alsace et dans le Nord, comme dans beaucoup de pays germaniques, saint Nicolas joue le rôle du père Noël. En anglais, le père Noël s'appelle d'ailleurs "Santa Claus". Ce n'est pas pour cela que, malgré les efforts des Turcs, il consentira à faire tirer son traîneau par des chameaux plutôt que par des rennes !
L'Europe unie contre les Ottomans
Mais tout est bon pour trafiquer l'histoire. Un diplomate turc n'invoquait-il pas, pour tenter de prouver la communauté de civilisation entre l'Europe et son pays, le siège de Vienne? Cela dénote en tout cas chez lui un bel aplomb, car les boulets qu'on voit encore aujourd'hui encastrés dans les murs de certaines vieilles maisons de Vienne n'ont pas été conservés en souvenir des temps heureux.
Rappelons au passage que l'angélus qui sonne tous les jours aux clochers est fait pour rappeler la défaite des Ottomans devant le Hongrois Jean Hunyadi, à la bataille de Mohacs. Cela montre l'ampleur du soulagement qui se manifesta dans toute l'Europe. Car la Turquie a bien suscité l'union des Européens, en effet : mais c'était chaque fois qu'il fallait la combattre. Ce qui est arrivé souvent, notons-le.
Les débats qui auront lieu en vue de l'admission de la Turquie dans l'Union européenne n'aboutiront pas forcément à une issue tragique (à savoir l'adhésion de ce pays) ; mais, on le voit, ils prendront en tout cas souvent un tour comique. C'est déjà ça.
Pierre de Laubier. Français d'Abord : février 2005
Cependant, la légende a abondamment suppléé le manque de données historiques. Aujourd'hui, saint Nicolas est vénéré comme le patron des marins, des captifs, et surtout des enfants. Cette dernière spécialité est bien entendu liée à la légende principale le concernant, celle des trois petits enfants enfermés dans un saloir et qu'il ressuscita, légende illustrée par une célèbre ballade populaire : "Il était trois petits enfants, qui s'en allaient glaner aux champs ... "
Oui à la légende, non au mensonge
Donc, saint Nicolas était évêque de Myre, en Lycie ... mais où donc se trouve cette ville ? Dans l'actuelle Turquie! Voilà pourquoi le gouvernement turc c'est mis en tête de « récupérer »ses reliques. Comme si un seul Turc se souciait de saint Nicolas, de sa crosse, de sa mitre et d'aucun des trois petits enfants ressuscités. Mais rien n'est inutile pour tâcher de faire croire que la Turquie ... voyons ... mais c'est presque l'Europe !
Presque... Sauf que les fameux Seldjoukides n'arrivèrent en Anatolie qu'au XIe siècle, et que c'est justement la cruauté dont ils firent preuve en Terre sainte envers les pèlerins qui rendit les croisades nécessaires. Alors que les Arabes s'en étaient emparés quatre siècles plus tôt sans que nul n'y trouve à redire, dès lors que le libre accès aux lieux saints était assuré.
Les mêmes Seldjoukides, qui détruisirent des milliers de chefs d'œuvre de l'art byzantin, n'auraient pas manqué de détruire les reliques de saint Nicolas sans même se demander de quoi il s'agissait.
Peut-être les Turcs espèrent-ils stimuler le tourisme dans leur pays en attirant les pèlerins venus admirer les reliques en question ? De toute façon, ce serait peine perdue, car les traditions populaires que saint Nicolas a fait naître sont tout à fait locales, sans aucun rapport avec sa personne et encore moins avec son évêché de Myre. Les Russes, qui en ont fait leur saint patron, ne se sont jamais donné le ridicule d'en réclamer les reliques, ne serait-ce même qu'un tibia.
Il existe à Montserrat, en Catalogne espagnole, une cérémonie de l'enfant évêque dérivée de la légende de saint Nicolas. Mais, là encore, l'origine « turque »de saint Nicolas n'y joue aucun rôle. Enfin, comme on le sait, en Alsace et dans le Nord, comme dans beaucoup de pays germaniques, saint Nicolas joue le rôle du père Noël. En anglais, le père Noël s'appelle d'ailleurs "Santa Claus". Ce n'est pas pour cela que, malgré les efforts des Turcs, il consentira à faire tirer son traîneau par des chameaux plutôt que par des rennes !
L'Europe unie contre les Ottomans
Mais tout est bon pour trafiquer l'histoire. Un diplomate turc n'invoquait-il pas, pour tenter de prouver la communauté de civilisation entre l'Europe et son pays, le siège de Vienne? Cela dénote en tout cas chez lui un bel aplomb, car les boulets qu'on voit encore aujourd'hui encastrés dans les murs de certaines vieilles maisons de Vienne n'ont pas été conservés en souvenir des temps heureux.
Rappelons au passage que l'angélus qui sonne tous les jours aux clochers est fait pour rappeler la défaite des Ottomans devant le Hongrois Jean Hunyadi, à la bataille de Mohacs. Cela montre l'ampleur du soulagement qui se manifesta dans toute l'Europe. Car la Turquie a bien suscité l'union des Européens, en effet : mais c'était chaque fois qu'il fallait la combattre. Ce qui est arrivé souvent, notons-le.
Les débats qui auront lieu en vue de l'admission de la Turquie dans l'Union européenne n'aboutiront pas forcément à une issue tragique (à savoir l'adhésion de ce pays) ; mais, on le voit, ils prendront en tout cas souvent un tour comique. C'est déjà ça.
Pierre de Laubier. Français d'Abord : février 2005
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