samedi 31 août 2024

Contre-Histoire de France, ni romance ni repentance, de Philippe Delorme

 

Bien des idées reçues et des a priori circulent encore aujourd’hui autour de l’Histoire de France, et jamais il n’a été plus nécessaire de démentir les unes et de contredire les autres.

Notre Histoire est en effet redevenue un enjeu majeur du débat politique, sur fond de polémique sur l’identité nationale, de volonté de déconstruction et d’offensive de la cancel culture, un enjeu autour duquel se divise parfois radicalement l’opinion.

   Après Michelet, Lavisse, Keller et Bainville, Philippe Delorme nous propose non une nouvelle histoire de France mais une contre-histoire de notre pays qu’explique le sous-titre : ni romance, ni repentance.

Philippe Delorme est l’historien qui fait aimer l’histoire à travers « ses ombres et ses mystères », selon le titre de l’un de ses meilleurs livres, résolvant des énigmes qui touchent souvent à la grande histoire come ses deux ouvrages sur Louis XVII et le mystère qui entoura sa mort.

Avec lui on passe du quotidien des rois de France à la momie hurlante. Véritable détective de l’histoire, il nous fait découvrir une foule de petits faits qui éclairent toute une période. Mais l’heure de la synthèse était venue. Voici « son « histoire de France. Elle rompt avec le climat actuel : mise en cause de grandes figures comme Colbert pour son Code noir ou Napoléon pour la misogynie du Code Civil. A la limite, c’est toute l’histoire de France qu’il faudrait condamner au nom d’idéaux anachroniques. Philippe Delorme s’y refuse. Il remet les faits à leur vraie place. L’historien ne doit pas condamner mais exposer.  Mais il ne doit devenir chauvin et avoir partis pris. L’auteur sait démystifier la bataille de Bouvines embellie par les chroniqueurs. On aime son portrait nuancé de Du Guesclin. Nuancé aussi son tableau du redressement de la France sous Henri IV. Aucune glorification. Et pas de silence sur les atrocités du « populicide » vendéen. De l’image caricaturale des Gaulois barbares et grossiers, au mythe libérateur et égalitaire de la Commune de Paris, en passant par les idées fausses et mille fois répétées concernant les Croisades, l’esclavage ou la colonisation… voilà un panorama complet de Notre Histoire que parcourt cet ouvrage. Un panorama dans lequel Vercingétorix, Clovis, Charlemagne, saint Louis, Jeanne d’Arc, Henri IV, Louis XIV, Marie-Antoinette, Napoléon, Clémenceau, De Gaulle et bien d’autres sont convoqués sans caricature ni hagiographie.

      C’est toute l’histoire revisitée avec une objectivité qui n’exclut pas la passion du style.
            « Voilà le livre que l’on devrait imposer à la place des manuel scolaires » Jean Tulard.

Dans un style vivant et en puisant aux meilleurs sources, Philippe Delorme aborde ici en 45 entrées les grandes questions de l’Histoire et démolit avec érudition toutes les contre-vérités admises.

Plus d’informations et commande sur LIVRES EN FAMILLE

Contre-Histoire de France, ni romance, ni repentance, Préface de Jean Tulard de l’Institut, Professeur émérite à la Sorbonne, 314 pages, dans une belle édition reliée chez Via Romana, 25 €

https://www.medias-presse.info/contre-histoire-de-france-ni-romance-ni-repentance-de-philippe-delorme/190349/

Asie centrale : nouveau centre du monde ?

vendredi 30 août 2024

Bardo Thodol : le livre des Morts Tibétain

Nietzsche et le dépassement de la métaphysique

 

nietzsche heidegger

Il n'y a nul doute sur le fait que Nietzsche a voulu penser un monde sans arrière-monde, un monde sans principe extérieur à lui-même, un monde sans dualisme entre un créateur et une création. A bon droit, on a appelé cela une critique radicale de la métaphysique. C’est-à-dire de toutes les métaphysiques précédentes, à commencer par celle de Platon, accusée de préférer l’Idée, le Beau abstrait, au sensible, au réel, au déjà-là. Nietzsche, destructeur « au marteau » de la métaphysique : telle est l’image que l’on en a. Une vision que Pierre Le Vigan interroge au regard des analyses de Martin Heidegger.

Martin Heidegger, quelque cinquante ans après Nietzsche, a vu sa pensée comme une nouvelle métaphysique. Et il l’a dit dans des textes qui, dans le contexte de l’époque, voulaient interdire toute récupération de Nietzsche par le national-socialisme allemand. Le surhomme ? La volonté de puissance ? Ce serait la métaphysique ultime. Avec ce thème de la volonté de puissance, Nietzsche aurait contribué à la dernière manifestation de la métaphysique : le règne de la technique. La volonté de puissance comme hypostase (ce qui soutient, ce qui est la substance) de la domination de la technique : voilà le bilan de Nietzsche selon Heidegger. Nietzsche : un philosophe immense, mais qu’il ne faut pas surtout pas suivre ?  Cela mérite d’aller y voir de plus près. D’autant que Heidegger lui-même porte sur Nietzsche un regard plus complexe que ce qui parait au premier abord.

Au-delà de la métaphysique

Dépasser la métaphysique, c’est une affaire, dit Nietzsche, qui exige « la plus haute tension de la réflexion humaine. » La  métaphysique, c’est le lieu qui essaie de penser l’étant, et donc l’être (l’essence) de l’étant. Elle cherche à définir le principe de cet être de l’étant (Dieu comme créateur du monde avec les monothéismes, la coïncidence de l’histoire avec le Soi de l’homme et le Soi du monde avec Hegel, le sens de l’histoire comme sens de l’homme avec Marx, etc). Ce programme parait à première vue légitime. Pourtant, selon Martin Heidegger, ces différentes tentatives de métaphysique tendent à nous éloigner de l’essentiel, qui est l’attention au monde, l’écoute de l’être. Une contemplation. « Il est vrai, écrit Heidegger, que la métaphysique représente l’étant dans son être et pense ainsi l’être de l’étant. Mais elle ne pense pas la différence de l’Être et de l’étant […]. La métaphysique ne pose pas la question de l’Être lui‑même. » (Lettre sur l’humanisme, 1947). Et c’est ici que Nietzsche est rencontré, mais il est rencontré comme un obstacle.

« La pensée de Nietzsche, explique Heidegger, est, conformément à la pensée occidentale depuis Platon, métaphysique. » (Achèvement de la métaphysique et poésie, Gallimard, 2005cours de 1941-42 et 1944-45). En outre, souligne Heidegger, la question : « Quel est l’être (ou l’essence) de l’étant ? » n’est qu’une ontologie régionale (de même qu’il existe des géographies régionales). Le monde ne se réduit pas à ce qui existe, il inclut différentes possibilités d’être. Ou, si on préfère, ce qui existe n’est pas simplement ce qui se voit, ce qui se manifeste.  Il faut aussi comprendre que toute pensée de l’étant existe du point de vue de l’homme. Elle implique donc une anthropologie, elle est aussi une entreprise historiale car l’homme est l’histoire constitutive de lui-même, à la différence de l’animal.

La métaphysique consiste donc à dire quelque chose à propos de ce qu’est l’étant. De ce point de vue, Nietzsche ramène la métaphysique à ce que l’on peut strictement dire de la physique (phusis : la nature). C’est une hyperphysique. Nietzsche est destructeur d’idoles et accoucheur d’étoiles. Pour Nietzsche, l’essence de la physique, c’est-à-dire de l’étant, c’est la volonté de puissance. Son mode d’existence, c’est l’Éternel Retour. Son horizon, c’est le nihilisme qu’il faut faire toujours reculer, mais qui ne doit pas disparaître de notre horizon. S’il disparaît de notre horizon, si nous ne le voyons plus, c’est que nous sommes devenus le nihilisme. C’est que le nihilisme est caché en nous.

Mais au nom de quoi lutter contre le nihilisme ? Au nom du vrai ?  Qu’en est-il alors de celui-ci ? La vérité dans la métaphysique est une notion délicate chez Nietzsche. On pense parfois que Nietzsche récuse la notion de vérité et on passe à autre chose. Nietzsche contre « la vérité » ? Ce n’est pas tout à fait cela. La vérité selon Nietzsche, c’est la justice dans le tragique. C’est l’amour du destin (amor fati). L’être, c’est la vie, Être, c’est vivre, et la persistance de l’être n’est pas autre chose selon Nietzsche que la volonté de vie. « L’être – nous n’en avons pas d’autre représentation que le vivre. Comment alors quelque chose de mort peut-il être ? »

Volonté de vie. Cette volonté produit des valeurs qui sont sans cesse menacées de ruine et doivent constamment être régénérées et métamorphosées. Chaque nouvelle valeur produit de nouvelles vérités. La vérité existe donc, mais elle est historiale. Elle correspond à des époques historiques.  Elle varie en fonction des paradigmes que l’homme se donne et qui lui permettent de se produire et de se reproduire lui-même à différentes époques et en fonction de différentes représentations du monde (notion centrale qui veut dire que le monde se présente à nous différemment en fonction des époques). 

Dans cette perspective, l’éternel retour est éternel retour du surpassement des valeurs et donc de la volonté de puissance. Abolition et dépassement (Aufhebung). Ce qui est vrai, c’est ce qui est juste, et ce qui est juste, c’est ce qui permet la pérennité, et donc la réinvention permanente, de la puissance. Le surhomme est l’horizon de l’homme en tant qu’il nie et dépasse l’homme sans cesse, afin de mieux saisir l’être de l’étant, c’est-à-dire afin de mieux affirmer la vie de l’étant. Le surhomme est Selbstüberwindung, dépassement de soi. Le surhomme est donc au plus près du nihilisme, il est inscrit dans le même horizon, mais il lutte contre ce nihilisme (pour lutter, il faut être au contact). C’est pourquoi l’homme doit accepter d’être cyclique et sphérique comme l’est le monde. « Il me faut, pareil à toi [soleil] décliner… redevenir un être humain. » (Le Gai savoir, XII, 254-255). « Et ce sera le grand Midi quand l’homme sera au milieu de sa route entre la bête et le surhomme, quand il fêtera, comma sa plus haute espérance, son chemin qui conduit au soir, car c’est la route d’un nouveau matin. » (Ainsi parlait Zarathoustra, XIII, 99).

Vérité du sensible ou vérité du supra-sensible ?

Une vérité inscrite dans l’éternel retour de la volonté humaine, telle est la vérité selon Nietzsche. Cette conception de la vérité  est au rebours de celle développée par Platon. Si pour Platon, l’art est une imitation de l’apparence de la vérité (apparence qui n’est pas son essence), pour Nietzsche, l’art est une invention de la vérité. La vérité n’est pas derrière nous, elle est devant nous. C’est à nous de l’inventer. En poussant à peine les choses, on peut dire que pour Nietzsche, il n’y a de vérité que dans l’art. Ce qui est vrai et ce qui est juste, c’est ce qui donne de la force à la puissance. De la puissance à la puissance.

Selon Nietzsche, contrairement à Platon, l’art et le sensible sont plus importants que la vérité et le supra-sensible. Ceci explique que selon Heidegger, Nietzsche renverse le schéma de Platon, mais ne le détruit pas. La volonté sans telos (finalité) devient, selon la lecture de Nietzsche par Heidegger, volonté de volonté, tournant sur elle-même, dans la lignée de la notion d’impetus (théorie expliquant le mouvement et son progressif épuisement). Une preuve que la volonté veut exister à tout prix, indépendamment de tout telos, est énoncée ainsi par Nietzsche : « L’homme préfère encore avoir la volonté du néant que de ne point vouloir du tout. »  (La Généalogie de la morale). 

Mais du point de vue de Heidegger, la volonté de volonté débouche sur la dernière étape de la métaphysique, à savoir le triomphe de la technique. Cela n’a rien d’évident. Pourquoi la volonté de volonté serait-elle le prélude à une métaphysique de la technique plutôt que, par exemple, à une métaphysique de la guerre ? Pourquoi ne serait-elle pas plutôt un conatus spinoziste ? Conatus : énergie de persister. On peut questionner la thèse de Heidegger sur la métaphysique de la technique. Est-elle vraiment sans telos, cette technique qui constitue désormais la trame de notre monde commun ? Ou les hommes qui produisent et maîtrisent la technique ont-ils un telos en vue ? Reste que l’on ne peut contester le constat comme quoi la technique envahit tout le monde humain.

L’idée de la puissance novatrice de la technique se trouve chez Nietzsche lui-même.  « La machine [existe] en tant qu’enseignante. » (Humain trop humain II). Ce qui veut dire que la machine a des choses à nous apprendre, et à nous apprendre sur nous. D’autant que Nietzsche doute que l’on puisse connaître de l’être humain « autre chose que ce qu’il est en tant que machine » (L’Antéchrist). Nietzsche se voit du reste lui-même comme « une machine prête à exploser. » La figure de la machine n’est ainsi pour Nietzsche pas le contraire de la figure humaine, Elle en est une représentation, y compris dans sa dimension d’accident et d’imprévisibilité.  Et la machine fascine Nietzsche : « Je songe beaucoup à m’acheter une machine à écrire » (Lettre à Peter Gast, 17 janvier 1882).

Le moteur comme figure de l’éternel retour

Heidegger relève que « le moteur est une figure très convaincante de l’éternel retour de l’identique » (In Essais et conférence, Gallimard, 2010). Et pour cette raison même,  Heidegger affirme que Nietzsche n’a pas annoncé la fin de la métaphysique mais un nouveau stade de celle-ci, qui serait la volonté de puissance culminant dans l’appel au surhomme. Le nietzschéisme : la forme métaphysique de l’ère de la technique. Nietzsche, dit Emmanuel Chaput suivant les traces de Heidegger, renverse le platonisme « aboutissant à l’accomplissement de la métaphysique dans la figure historiale de la technique ».

Mais la figure du surhomme peut être vue sous différents angles, comme Nietzsche nous apprend à le faire pour toute chose. Heidegger lui-même, après-guerre, voit le surhomme nietzschéen d’une manière moins négative que ce fut le cas auparavant. Le surhomme de Nietzsche ne serait-il pas proche du « berger de l’être », que Heidegger nous demande d’imaginer et d’accueillir ? C’est ce que suggère le texte Qu’appelle t-on penser (1951-1952). C’est aussi l’interrogation de « Pourquoi des poètes ? » qui refait surface (in Chemins qui ne mènent nulle part, 1962) : « Plus la nuit du monde va vers sa mi-nuit, plus exclusivement règne l’indigence, de sorte que son essence [du monde] se dérobe. Même la trace du Sacré est devenue méconnaissable. La question de savoir si nous éprouvons encore le Sacré comme trace de la divinité du divin, ou bien si nous ne rencontrons plus qu’une trace du Sacré, reste indécise. Ce que pourrait être la trace de la trace reste confus (undeutlich : indistinct). Comment une telle trace pourrait se montrer à nous demeure incertain. » (« Pourquoi des poètes ? »in Holzwege-Chemins  qui ne mènent nulle part).

Or, c’est bien de marcher sur cette trace qu’il est question avec le surhomme. « Le surhomme est plus pauvre, plus simple, plus tendre, plus dur, plus calme, plus généreux, plus lent dans ses décisions et plus économe dans sa langue. », dit Heidegger (Qu’appelle t-on penser ?).  Cette révision de la critique de Nietzsche par Heidegger amène à se poser une autre question : Nietzsche se contente-il de renverser la platonisme sans rien changer à sa structure ? Se contente-t-il de valoriser  le sensible en lieu et place du supra-sensible ? Le ressenti au lieu de l’Idée ? Le Zarathoustra ne nous fait-il pas entrer dans un au-delà de la distinction entre le sensible et le supra-sensible ?

Réponse : le monde des phénomènes comporte lui-même la dimension de profondeur qu’on veut lui dénier et à quoi on veut l’opposer. « Mon moi m’a enseigné une nouvelle fierté, je l’enseigne aux hommes : ne plus cacher sa tête dans le sable des choses célestes mais la porter fièrement, une tête terrestre qui crée le sens de la terre. » (Ainsi parlait Zarathoustra). Pour l’ultime Heidegger, la figure de Zarathoustra peut relever d’un au-delà de la métaphysique, et donc d’un au-delà de sa dernière manifestation qu’aurait été la volonté de puissance nietzschéenne. Le philosophe de Sils Maria pourrait lui aussi avoir prôné une écoute de l’être qui est la définition même de ce que Heidegger appelle un « au-delà de la métaphysique ». En tout cas un « au-delà » de toutes les métaphysiques antérieures voulant rendre compte, de manière rationnelle, de l’existence éternellement mystérieuse du monde.  C’est le retour, comme l’écrit Gilbert Durand dans L’âme tigrée, du « grand nocturne du symbole, de la pensée indirecte, [c’est] le renouveau du mythe, la prédilection pour l’intimisme. »

Nietzsche, un Européen face au nihilismeLa Barque d’or, diffusion amazon.

Les démons de la déconstruction. Derrida, Lévinas, Sartre. Au-delà de la déconstruction avec Heidegger, La Barque d’or, diffusion amazon. Aussi sur la boutique de TV libertés.

Le coma français, Perspectives libres – Cercle Aristote

Clausewitz, père de la théorie de la guerre moderne, Perspectives Libres –  Cercle Aristote.

https://www.revue-elements.com/nietzsche-et-le-depassement-de-la-metaphysique/

Des nouvelles des fronts avec Erwan Castel 25 août 2024

Tout ce qu’il faut savoir sur la guerre civile russe

 

par Boris Egorov

Cela a été l’un des conflits politico-militaires les plus violents et meurtriers de l’histoire de l’humanité. Les combats, les répressions et la terreur, la famine et les épidémies ont emporté jusqu’à dix-sept millions de personnes.

En mars 1917, la monarchie en Russie a été renversée en faveur d’une forme de gouvernement républicain. Pourtant, cela n’a fait qu’empirer les problèmes sociaux, politiques et économiques cumulés dans un pays affaibli par sa participation à la Première Guerre mondiale.

En novembre de la même année, la Russie a subi une deuxième révolution, à l’issue de laquelle le pouvoir est passé aux bolcheviks. Cependant, la majorité de la population ne partageait pas les points de vue de ces socialistes fanatiques. C’est pourquoi le début de la guerre civile est lié au 7 novembre 1917 – le jour du coup d’État bolchévique dans la capitale de l’époque – Petrograd (Saint-Pétersbourg).

En voulant sortir à tout prix la Russie de la Première Guerre mondiale, le gouvernement de Lénine a signé le traité de Brest-Litovsk le 3 mars 1918 avec les Allemands. Selon ses rudes clauses, le pays a perdu la Pologne, l’Ukraine et les pays baltes. La dénommée « paix infâme » a été un choc pour la société russe et a drastiquement fait augmenter le nombre d’opposants aux soviétiques, refusant de céder des territoires à l’ennemi. 

Ainsi, à partir de l’été 1918, la guerre civile n’a fait que s’intensifier sur tout l’énorme territoire russe. À part les bolcheviks et leurs opposants politiques directs, de nombreux éléments anarchistes s’y sont joints, des armées rebelles, des États « indépendants » apparus aux extrémités de l’Empire détruit, ainsi que des puissances occidentales qui voulaient tirer un profit maximal de la situation.

Arrestation de l’empereur et de sa famille. Nicolas II avec sa femme dans le parc Alexandre à Tsarskoïé Selo

L’apogée du conflit a eu lieu en 1919, lorsque les combats les plus importants ont eu lieu aux abords de Moscou et de Petrograd. La fin de cette sanglante guerre est attribuée à l’année 1922, lorsque le pouvoir soviétique a été instauré en Extrême-Orient russe.

Par conséquent, le socialisme l’a largement emporté en Russie, ce qui a eu un impact colossal sur toute l’histoire du XXe siècle.

Dans notre article vous allez savoir qui a combattu pendant cette guerre et pourquoi, qui étaient les « Rouges », les « Blancs » et les « Verts », quel rôle ont joué les interventionnistes, et pourquoi, enfin, les bolcheviks sont sortis vainqueurs de cette lutte acharnée.  

Qui sont les « Rouges » ?

Rassemblement des gardes rouges

Les sympathisants de Vladimir Lénine et du Parti bolchévique étaient dans le camp des « Rouges ». La vive couleur du sang est devenue symbole de la lutte révolutionnaire, du mouvement de la gauche, du socialisme et du communisme.

D’abord, les membres volontaires de la Garde rouge sont devenus le support armé du nouveau gouvernement. À la fin de janvier 1918, l’Armée rouge des ouvriers et paysans s’est formée. Malgré son nom, elle comptait aussi des représentants de différentes classes sociales russes, qui partageaient les idéaux révolutionnaires.

Guerre civile. Front de l’Est. Soldats du corps tchécoslovaque avec un fanion capturé du détachement soviétique

Ainsi, un nombre important d’officiers du tsar ont rejoint l’Armée rouge où ils étaient appelés « spécialistes militaires ». Le premier chef suprême des forces armées de la Russie soviétique a été un ancien colonel de l’armée de l’empereur, Jukums Vācietis.

Un grand soutien aux bolcheviks durant la guerre a été accordé par de nombreuses unités de partisans, agissant dans le dos de l’ennemi. Ils étaient autant établis par les organes locaux du Parti que spontanément créés par l’initiative de la population.

Qui sont les « Blancs » ?

Les adversaires des « Rouges » durant la guerre civile étaient les « Blancs » (pendant la révolution française, cette couleur était également assignée aux opposants). Selon les bolcheviks, ils combattaient pour « le pouvoir du tsar, des propriétaires fonciers et des capitalistes ».

Cependant, tous les « Blancs » n’étaient pas dévoués au monarchisme. Le mépris des idées bolchéviques a uni des adeptes de tous partis et bords politiques.

Livraison d’armes par les troupes du général Lavr Kornilov

En prenant compte du caractère spécifique de la guerre civile, il est compliqué d’établir une ligne de front nette. Néanmoins, il existait certaines régions du pays qui ont été contrôlées par différentes parties du conflit durant presque toute la guerre.

Ainsi, les régions de l’Ouest, incluant Moscou et Petrograd, étaient sous le contrôle des Soviétiques, tandis que les « Blancs » se sont installés sur le Don, dans le Sud, en Sibérie, dans l’Est, et, dans le nord, à Arkhangelsk et Mourmansk.

Qui sont les « Verts » ?

La troisième force importante de la guerre civile étaient les « Verts ». Ils comptaient dans leurs rangs des paysans et des cosaques, ainsi que différents anarchistes, qui n’étaient convaincus ni par les « Blancs », ni par les « Rouges ».

Les « Verts » fuyaient la mobilisation des différentes armées et se réfugiaient dans les forêts (d’où leur nom). Souvent, ils réussissaient à établir de grandes formations militaires et à étendre leur pouvoir sur de vastes territoires.

Rébellion de Tambov

Ainsi, en 1920, une rébellion massive a eu lieu dans la province de Tambov, au sud de Moscou, dirigée par Alexandre Antonov. Son Armée partisane unie comptait plus de 50 000 hommes, et les forces soviétiques ont eu du mal à les écraser.

Les « Verts » combattaient habituellement tant contre les « Blancs », que contre les « Rouges », mais pouvaient aussi parfois s’allier à l’une des parties adversaires. Le chef de l’Armée révolutionnaire insurrectionnelle ukrainienne, l’anarchiste Nestor Makhno, s’est notamment allié aux bolcheviks, mais, en fin de compte, s’est vu rentrer à nouveau en conflit avec ces derniers, a été vaincu et a fui le pays.

Qui a participé à l’intervention ?

À la suite du traité de Brest-Litovsk, les troupes allemandes ont occupé l’Ukraine et les pays baltes (la Pologne était déjà sous leur contrôle). Seulement après la révolution de novembre 1918 et la défaite du kaiser, ils ont commencé à quitter les territoires de l’ancien Empire russe.

Ce même traité de Brest-Litovsk a conduit à une intervention massive des membres de l’Entente en Russie. Les alliés comptaient faire retourner l’armée russe sur le champ de bataille de la Première Guerre mondiale et ont soutenu les « Blancs » (notamment en armement), qui avaient promis de mener la guerre contre l’Allemagne jusqu’à la victoire, une fois qu’ils auraient récupéré le pouvoir. Des troupes militaires limitées britanniques, françaises, américaines, italiennes, canadiennes, australiennes et grecques ont ainsi débarqué dans les ports du sud, du nord et de l’est du pays.

Interventionnistes américains

Même après la fin de la Première Guerre mondiale, l’Entente n’a pas cherché à évacuer ses troupes, cherchant des profits politiques et économiques dans le chaos russe. Les interventionnistes se tenaient pourtant loin des régions de combats intenses, menant la guerre majoritairement aux partisans. Ils ont commencé à quitter le pays dans la seconde moitié de 1919, lorsque le mouvement « blanc » était clairement condamné.

Un général anglais donne des ordres aux officiers tchécoslovaques

Les Japonais ont été les plus tenaces sur le territoire russe. Leur plan consistait à acquérir de vastes territoires de l’Extrême-Orient russe et de la Sibérie jusqu’au lac Baïkal – soit directement, soit par la création d’un gouvernement factice.

Sans la possibilité d’entrer en conflit armé avec les interventionnistes japonais, les bolcheviks les ont repoussés de leurs territoires par la diplomatie et l’augmentation de mouvements partisans dans le dos de l’ennemi. Le nord de Sakhaline, en revanche, n’a pu être récupéré qu’en 1925.

À quel point la terreur « rouge » et « blanche » était horrible ?

La cruauté est caractéristique de n’importe quelle guerre civile, et le conflit en Russie ne fait pas exception. La violence envers les ennemis de classe et les éléments contrerévolutionnaires a été établie dans la Russie soviétique au niveau gouvernemental le 5 septembre 1918 par le décret « À propos de la terreur rouge ».

Cadavres de victimes de la terreur rouge, 1918

Le nombre de victimes de la terreur « rouge » sanctionnée par l’État a atteint jusqu’à deux millions de personnes. La terreur dite « blanche » a quant à elle emporté la vie de plus d’un demi-million d’individus. Cependant, il ne s’agissait pas d’un humanisme particulier de la part des adversaires des bolcheviks, mais plutôt du fait que les régions contrôlées par ces derniers étaient moins peuplées.Les adversaires ne se différenciaient pas par leur cruauté. Par exemple, dans l’est du pays, la politique de répression menée par les « Blancs » de l’amiral Alexandre Koltchak a conduit à des émeutes massives à l’arrière de ses troupes, ce qui a été l’une des plus importantes raisons de l’échec du régime de cet autoproclamé chef suprême de la Russie.

Alexandre Koltchak dans l’armée

Les forces des interventionnistes ont elles aussi participé à cette terreur. Ils sont responsables de plus de 111 000 morts russes.

Pourquoi les bolcheviks ont-ils gagné ?

L’une des plus grandes raisons de la défaite des « Blancs » dans la guerre civile a été la dispersion de leurs forces. En se trouvant à d’énormes distances les uns des autres, les généraux ne pouvaient pas coordonner leurs actions efficacement. De plus, certaines formations antisoviétiques étaient parfois en conflit ouvert.

Les « Blancs » n’avaient pas d’unité politique, ni d’idéologie formulée (à part l’antibolchévisme et l’intégrité du pouvoir) qu’ils pourraient transmettre à la population. Les bolcheviks, en revanche,  possédaient des programmes politiques, sociaux et économiques travaillés, et savaient faire de la propagande efficace.

Détachement de l’Armée rouge

Des régions industrielles et bien peuplées ont atterri entre les mains des « Rouges », où, par des méthodes violentes, ils ont su construire une structure claire de commandement civil et militaire. Ils ont rapidement établi un système d’entraînement du corps des chefs et spécialistes techniques, et, également, ont recruté autour de 70% des officiers de l’ancienne armée du tsar.

Les bolcheviks ont réussi à mener la guerre civile en force monolithique. Ils réagissaient efficacement aux menaces de tous les fronts et regroupaient momentanément leurs troupes pour les éliminer. Ainsi, après la victoire face à Koltchak au printemps 1919 dans l’Oural, en automne, l’Armée rouge a su successivement éclater l’offensive des Forces armées du Sud de la Russie d’Anton Denikine sur Moscou et de l’Armée du nord-ouest de Nikolaï Ioudenitch sur Petrograd. À la suite de ces lourdes défaites, le mouvement « blanc » était condamné.

source : Russia Beyond

https://reseauinternational.net/tout-ce-quil-faut-savoir-sur-la-guerre-civile-russe/

L’histoire compliquée de l’Ukraine avec ses voisins

 

La semaine dernière, les médias indiens ont publié une étrange thèse géopolitique selon laquelle le récent voyage de sept heures du Premier ministre Narendra Modi en Ukraine, via la Pologne, s’inscrivait dans le cadre d’un effort visant à «combler un chaînon manquant – l’Europe centrale – dans la politique européenne de l’Inde». Selon cette thèse, le voyage du Premier ministre signifiait une «poussée» indienne vers l’Europe centrale et orientale, «démêlant l’engagement de New Delhi dans la région de sa relation avec la Russie».

Cette thèse bizarre porte implicitement l’imprimatur du gouvernement Modi, mais l’esprit cérébral du ministre des Affaires extérieures S. Jaishankar n’a jamais exprimé publiquement un tel courant de conscience. Il est amusant de constater que les académies de formation qui préparent les candidats au prochain examen des services civils se sont également lancées dans l’aventure en proposant des cours sur cette thèse pernicieuse !   

Comme l’auteur de cette thèse est un journaliste chevronné bien connu, la presse indienne n’a pas perdu de temps pour savourer cet exotisme sortant de l’ordinaire. Pourtant, l’absurdité de la thèse aurait dû apparaître au premier coup d’œil à tout esprit érudit.

Pour se plonger dans l’histoire européenne moderne, l’Europe centrale et l’Europe de l’Est ne sont pas vraiment interchangeables en tant que constructions géopolitiques. L’Europe centrale est plutôt une expression géographique, car la région est culturellement très diverse – même si elle partage certaines similitudes historiques et culturelles – et son «réveil stratégique» ne commence en fait qu’avec la fin de la guerre froide et l’effondrement du mur de Berlin.

La région désigne au sens large la partie de l’Europe qui faisait historiquement partie des empires austro-hongrois et ottoman et qui comprend aujourd’hui l’Autriche, l’Allemagne, la Suisse, le Liechtenstein, la République tchèque, la Slovaquie, la Hongrie, la Pologne, la Lituanie et la Slovénie.

Mais l’Europe de l’Est est une sous-région du continent européen, même avec un large éventail de connotations géopolitiques, géographiques, ethniques, culturelles et socio-économiques. Elle comprend les actuels Belarus, Russie, Ukraine, Moldavie et Roumanie, ainsi que les Balkans, les États baltes et le Caucase.

D’un point de vue géographique, la région est définie par les monts Oural (en Russie) à l’est, tandis que la frontière occidentale reste nébuleuse, sans limites précises. (L’Europe de l’Est est une partie importante de la culture européenne depuis des millénaires, mais elle se distingue par les traditions des Slaves et des Grecs qui sont des adeptes du christianisme oriental, dont les orthodoxes de l’Est constituent le groupe le plus important.

Bien entendu, le rideau de fer a donné à l’Europe de l’Est une toute nouvelle définition. En effet, la redéfinition a été une caractéristique constante des pays d’Europe de l’Est. Ainsi, la rubrique «Pacte de Varsovie» a été associée à la Pologne, mais à cette époque le groupe de Visegrad n’avait pas vu le jour – l’alliance politico-militaire que la Pologne a tenté de créer en 1991 avec la République tchèque, la Slovaquie et la Hongrie pour faire contrepoids à l’hégémonie des Vieux Européens au sein de l’Union européenne. Le groupe de Visegrad a perdu de sa force lorsque la Pologne et la Hongrie ont élu des gouvernements nationaux-conservateurs, tandis que la République tchèque et la Slovaquie sont restées des démocraties libérales.

Paradoxalement, l’alliance de Visegrad s’est finalement divisée à cause des réactions divergentes des quatre pays aux opérations militaires spéciales menées par la Russie en Ukraine en 2022. Alors que la Pologne et la République tchèque ont fermement adhéré à la stratégie de l’OTAN dirigée par les États-Unis pour mener une guerre par procuration contre la Russie, la Slovaquie et la Hongrie restent ambivalentes et remettent de plus en plus en question la raison d’être de la guerre et ont même récemment commencé à s’y opposer.

Ainsi, lorsque le Premier ministre hongrois Viktor Orbán, en tant que président de la présidence tournante de l’UE, a récemment proposé un plan de paix en consultation avec Donald Trump pour mettre fin à la guerre en Ukraine, l’UE l’a rapidement désavoué (sur ordre des États-Unis, bien entendu).

D’autre part, le Premier ministre slovaque Robert Fico, qui a survécu à une tentative d’assassinat en mai parce qu’il refusait de soutenir le régime de Kiev, se tient aux côtés d’Orbán. Par ailleurs, certains pensent que l’aiguille du soupçon dans la tentative d’assassinat de Fico en mai pointe vers les services de renseignement militaire ukrainiens. Voilà pour la position commune de l’Europe de l’Est sur la guerre en Ukraine – ou sur la Russie d’ailleurs !

En fait, Orbán et Fico prônent tous deux de bonnes relations et la reprise de liens bénéfiques avec la Russie. Ils désapprouvent totalement les sanctions de l’UE à l’encontre de la Russie. Dans ces conditions, comment le gouvernement Modi a-t-il pu être aussi incroyablement stupide que d’imaginer que la voie indienne pour relancer des relations avec l’Europe passait par Kiev et/ou par un désengagement de la Russie ? De toute évidence, il s’agit d’une erreur.

Le problème n’est pas que la position de l’Inde sur l’Ukraine entrave l’expansion des relations économiques avec l’Europe, mais plutôt l’absence d’une diplomatie économique imaginative et solide dans une perspective à long terme.

Bien que l’UE soit le premier partenaire commercial de l’Inde, représentant 124 milliards d’euros d’échanges de marchandises en 2023 (soit 12,2% du total des échanges indiens), les négociations commerciales avec l’UE traînent en longueur depuis plus d’une décennie. L’objectif déclaré de l’UE est «d’œuvrer à la mise en place d’un environnement réglementaire et commercial sain, transparent, ouvert, non discriminatoire et prévisible pour les entreprises européennes qui commercent ou investissent en Inde».

Mais Delhi n’est pas pressé, car les échanges commerciaux connaissent une croissance impressionnante (de près de 90% au cours de la dernière décennie) et le commerce des services entre l’UE et l’Inde atteindra 50,8 milliards d’euros en 2023, contre 30,4 milliards d’euros en 2020 – et, surtout, la balance commerciale reste en faveur de l’Inde.

En réalité, sans attendre la fin de la guerre en Ukraine, Delhi peut s’inspirer de la stratégie chinoise pour pénétrer le marché européen par la porte d’entrée qu’est l’Europe de l’Est. La Chine a créé une plateforme avec les pays d’Europe centrale et orientale, connue sous le nom de «14+1». La Hongrie, la Slovaquie et la Pologne sont des partenaires importants pour la Chine dans ce cadre.

Orbán a adopté les investissements chinois malgré l’appel de l’UE au «dérisquage», tandis que Fico s’apprête à se rendre en Chine. Le plus intéressant, c’est que ce ne sont pas seulement les deux dirigeants actuellement considérés comme les jokers pro-russes de l’UE qui jouent ce jeu. Le président polonais Andrzej Duda, critique virulent de la guerre menée par Moscou contre l’Ukraine, vient également d’achever une visite d’État en Chine, accueillie par son homologue Xi Jinping.

En effet, la Chine poursuit son offensive de charme en Europe centrale et orientale. Une nouvelle étude du réseau européen de think tanks au sujet de la Chine indique que la Hongrie est une «exception» en ce qui concerne les mesures nationales de dérisquage par rapport à la Chine. Le rapport indique que «le gouvernement d’Orbán est fier d’attirer un nombre croissant d’investisseurs chinois dans le pays».

En effet, la Hongrie est en train de devenir la plaque tournante des véhicules électriques en Europe, en courtisant les constructeurs automobiles chinois. Fico est attiré par la voie tracée par Orbán et prévoit de conclure un accord de partenariat stratégique avec la Chine lors de sa visite prévue à l’automne. La Hongrie, la Slovaquie et la Pologne ne savent-elles pas que la Chine et la Russie ont aujourd’hui une quasi-alliance, qui a atteint un niveau sans précédent et ne fait que se renforcer de jour en jour en raison des retombées de la guerre en Ukraine, telles que les sanctions occidentales ?

Nos experts médiatiques ne savent rien de l’Europe de l’Est. Pourtant, ils préconisent le désengagement de l’Inde vis-à-vis de la Russie comme condition préalable à l’établissement de relations chaleureuses avec cette région ! Pourquoi préconisent-ils cela ? Une telle logique perverse ne fait que promouvoir les intérêts américains visant à éroder le partenariat Inde-Russie et, partant, l’autonomie stratégique du pays.

Pour ce qui est de l’avenir, il est encore trop tôt pour dire quelle forme prendra l’Ukraine au sortir de cette guerre. L’Ukraine a des questions de nationalité non résolues. Des territoires de l’Ukraine occidentale appartenaient auparavant à la Pologne (qui a bien sûr été compensée par des territoires de l’Allemagne vaincue) et à la Hongrie avant la Seconde Guerre mondiale.

La Pologne affirme que le massacre en 1943-44 de quelque 100 000 Polonais par les nationalistes ukrainiens est un génocide. Aujourd’hui, le nœud du problème, du point de vue russe également, est que l’identité de l’Ukraine en tant qu’État souverain est construite autour des mêmes organisations néonazies qui ont collaboré avec l’armée d’occupation d’Hitler pour massacrer les Polonais. Il s’agit là d’une véritable boîte de Pandore. L’Inde n’a aucune bonne raison de s’en mêler.

M.K. Bhadrakumar

source : Indian Punchline via Le Saker Francophone

https://reseauinternational.net/lhistoire-compliquee-de-lukraine-avec-ses-voisins/

jeudi 29 août 2024

Il y a 83 ans, la mort sacrificielle d’Honoré d’Estienne d’OrvesIl y a 83 ans, la mort sacrificielle d’Honoré d’Estienne d’Orves

 

COUV 2020 6.jpg

Didier Lecerf 

Le 29 août 1941, le capitaine de frégate Honoré d’Estienne d’Orves, 40 ans, père de cinq enfants, était fusillé au Mont-Valérien, avec deux autres membres du réseau Nemrod, Maurice Barlier et Jan Doornik. Ses deux compagnons et lui-même tombèrent sans haine, en pardonnant à leurs bourreaux.

Issu d’une famille profondément catholique, de sensibilité royaliste légitimiste, acquise aux idées, aux actions du catholicisme social ; descendant des généraux vendéens d’Autichamp et Suzannet qui combattirent jusqu’au bout pour "Dieu et le Roi" ; filleul du commandant Driant, le gendre du général Boulanger et héros du bois des Caures en février 1916, Honoré d’Estienne d’Orves peut être rattaché à la droite nationale, monarchiste, catholique et sociale. 

Dans le chaos de 1940, à l’heure où, comme l’a souligné Pierre Nora, « l’occupation (força) les hommes à choisir explicitement leur allégeance », cet officier de la Royale, comme beaucoup de ses camarades, fit son choix. Les valeurs transmises par les siens, sa foi chrétienne, sa conception de l’honneur, son amour de la patrie l’amenèrent, malgré la sanglante attaque britannique contre Mers-el-Kébir, à opter pour la poursuite de la lutte sous les couleurs françaises au côté des Anglais, dans les rangs gaullistes. Pour « la libération intégrale » du pays et le maintien de « l’intégralité de l’Empire français ».

Pour autant, il ne retira pas son respect au Maréchal Pétain et ne voua pas aux gémonies ceux qui, au même moment, firent un autre choix que le sien (parmi lesquels plusieurs de ses amis, dont Paul Fontaine, directeur du cabinet de l’amiral Darlan ou Bertrand de Saussine du Pont de Gault, mort en novembre 1940 à bord de son sous-marin, au large du Gabon, après avoir tenté de couler un aviso anglais )…

Complexité et ambiguïtés de l’époque…

« Que personne ne songe à me venger. Je ne désire que la paix dans la grandeur retrouvée de la France. Dites bien à tous que je meurs pour elle, pour sa liberté entière, et que j’espère que mon sacrifice lui servira. »

Honoré d’Estienne d’Orves, 28 août 1941.

Pour commander le Cahier d'Histoire du nationalisme (n°18) consacré à Honoré d'Estienne d'Orves cliquez ici

http://synthesenationale.hautetfort.com/archive/2024/08/28/il-y-a-83-ans-la-mort-sacrificielle-d-honore-d-estienne-d-or-6512374.html

Être le numéro deux : une histoire des rapports de pouvoir à la tête de ...

Les racines trotskistes du néoconservatisme 5/5

 

weir-NeoconsToday.jpg

Daniel Senor (né en 1971) est issu d'une famille juive d'Utica (État de New York) et a été conseiller du ministère de la défense, conseiller présidentiel et chercheur au Council on Foreign Relations. En 2009, il a cofondé le think tank néocon Foreign Policy Initiative avec Robert Kagan et William Kristol. M. Senor est actuellement rédacteur d'opinion au New York Post, au New York Times, au Wall Street Journal, au Washington Post et à l'ancien magazine néocon The Weekly Standard.

Dan Quayle est né dans l'Indiana en 1947. Il est le petit-fils du riche et influent magnat de la presse Eugene Pulliam. Après avoir étudié les sciences politiques à l'université DePauw et le droit à l'université de l'Indiana, Dan Quayle a siégé à la Chambre des représentants des États-Unis à partir de 1976. De 1989 à 1993, il a été vice-président de Bush père. Le banquier d'affaires Quayle a cofondé le Projet pour le nouveau siècle américain en 1997. Il siège par ailleurs dans divers conseils d'administration de grandes entreprises, est directeur de la banque Aozora au Japon et président de la division Global Investments de la société d'investissement Cerberus Capital Management.

Donald Rumsfeld (1932-2021), né dans l'Illinois, a été pilote naval et instructeur de vol dans la marine américaine de 1954 à 1957. Il a ensuite été employé de deux chambres des représentants (jusqu'en 1960) et banquier d'affaires (jusqu'en 1962), après quoi il est devenu député républicain. En 1969-1972, Rumsfeld est conseiller présidentiel de Nixon. En 1973, il est ambassadeur auprès de l'OTAN à Bruxelles.

Rumsfeld devient chef de cabinet de la Maison Blanche sous le président Ford en 1974. À son instigation, Ford procède à un remaniement en profondeur de son gouvernement en novembre 1975 (ce qui sera surnommé plus tard le « massacre d'Halloween »). Rumsfeld devient secrétaire à la défense. Il met fin au déclin progressif du budget de la défense et renforce les armements nucléaires et conventionnels des États-Unis, sapant ainsi les négociations SALT du ministre des affaires étrangères Kissinger avec l'URSS. Rumsfeld s'est appuyé sur le rapport controversé de l'équipe B de 1976 pour construire des missiles de croisière et un grand nombre de navires de guerre.

Après l'arrivée au pouvoir de l'administration démocrate Carter en 1977, Rumsfeld a brièvement enseigné à l'université de Princeton et à l'université Northwestern de Chicago avant d'occuper des postes à responsabilité dans le monde des affaires. Sous Reagan, il a été conseiller présidentiel pour le contrôle des armements et les armes nucléaires en 1982-1986 et envoyé présidentiel pour le Proche-Orient et le traité sur le droit international de la mer en 1982-1984. Dans l'administration Bush père, Rumsfeld a été conseiller au ministère de la défense de 1990 à 1993. En 1997, il a cofondé le Projet pour le nouveau siècle américain.

Sous la présidence de Bush Jr, Rumsfeld est à nouveau secrétaire à la défense de 2001 à 2006, où il domine la planification des invasions de l'Afghanistan et de l'Irak. Il est tenu pour responsable, tant aux États-Unis qu'au niveau international, de la détention de prisonniers de guerre sans la protection des conventions de Genève, ainsi que des scandales de torture et d'abus qui ont suivi à Abou Ghraib et Guantanamo. En 2009, Rumsfeld a même été qualifié de criminel de guerre par la Commission des droits de l'homme des Nations unies.

Benjamin Wattenberg (1933-2015)  est issu d'une famille juive de New York. En 1966-1968, il a travaillé comme assistant et rédacteur de discours pour le président Johnson. En 1970, avec le politologue, spécialiste des élections et conseiller présidentiel Richard Scammon (1915-2001), il a élaboré la stratégie qui a permis aux démocrates de remporter les élections générales de 1970 et au républicain Richard Nixon de redevenir président en 1972. Dans les années 1970, Wattenberg a été conseiller du sénateur démocrate Henry Jackson. Il a également travaillé comme haut fonctionnaire pour les présidents Carter, Reagan et Bush père. Il a également été associé à l'American Enterprise Institute.

Professeur de sciences politiques James Wilson (1931-2012) a enseigné à l'université de Harvard de 1961 à 1987, à l'université de Californie de 1987 à 1997, à l'université Pepperdine de 1998 à 2009, puis au Boston College. Il a également occupé divers postes à la Maison Blanche et a été conseiller de plusieurs présidents américains. Wilson était également affilié à l'American Enterprise Institute.

Paul Wolfowitz, né en 1943 à Brooklyn, New York, est le fils d'immigrants juifs originaires de Pologne. Son père, Jacob Wolfowitz (1910-1981), professeur de statistiques et membre de l'AIPAC, soutenait activement les Juifs soviétiques et Israël. Wolfowitz a d'abord étudié les mathématiques à l'université Cornell dans les années 1960, où il a rencontré le professeur Allan Bloom et a également été membre du groupe étudiant secret Quil and Dragger. Pendant ses études de sciences politiques à l'université de Chicago, il a fait la connaissance des professeurs Leo Strauss et Albert Wohlstetter, ainsi que des étudiants James Wilson et Richard Perle.

En 1970-1972, Wolfowitz a enseigné les sciences politiques à l'université de Yale, où Lewis Libby était l'un de ses étudiants. Par la suite, il a été assistant du sénateur Henry Jackson. En 1976, Wolfowitz fait partie du groupe d'étude anti-URSS controversé Equipe B pour « réexaminer » les analyses de la CIA sur l'URSS. De 1977 à 1980, Wolfowitz est employé par le ministère de la défense. En 1980, il devient professeur de relations internationales à l'université John Hopkins.

Dans l'administration Reagan, Wolfowitz devient employé du Département d'Etat en 1981 sur l'intercession de John Lehman. Il rejette fermement le rapprochement de Reagan avec la Chine, ce qui le met en conflit avec le secrétaire d'État Alexander Haig (1924-2010). En 1982, le New York Times prédit donc le remplacement de Wolfowitz au département d'État. Mais c'est l'inverse qui se produit en 1983 : Haig - qui est également en conflit avec le ministre de la défense Caspar Weinberger (1917-2006), à moitié juif et virulemment anti-URSS - est remplacé par le néoconservateur George Schultz et Wolfowitz est promu assistant de Schultz pour les affaires de l'Asie de l'Est et du Pacifique. Lewis Libby et Zalmay Khalilzad sont devenus les associés de Wolfowitz. En 1986-1989, Wolfowitz a été ambassadeur en Indonésie.

Au cours de l'administration Bush père, Wolfowitz a été secrétaire adjoint à la défense sous la direction du secrétaire Cheney, avec Libby comme assistant. Ils ont donc été étroitement impliqués dans la guerre contre l'Irak en 1990-91. Wolfowitz regrette vivement que, dans cette guerre, les États-Unis se soient limités à la reconquête du Koweït et n'aient pas poussé jusqu'à Bagdad. Libby et lui continueront à faire pression tout au long des années 1990 pour une attaque « préventive » et unilatérale contre l'Irak.

De 1994 à 2001, Wolfowitz est à nouveau professeur à l'université John Hopkins, où il propage ses opinions néoconservatrices. En 1997, il a cofondé le Project for a New American Century.

Wolfowitz divorce de sa femme Clare Selgin en 1999 et entame une relation avec une employée britannico-libyenne de la Banque mondiale, Shaha Ali Riza (photo), qui lui vaudra des ennuis en 2000 et en 2007 (cfr infra). Pendant la campagne électorale de Bush Jr. en 2000, Wolfowitz faisait partie du groupe consultatif de politique étrangère de Bush, les Vulcains. Lors de l'administration suivante de Bush Jr, Wolfowitz a été nommé à la tête de la CIA, mais cette nomination a échoué parce que son ex-femme, dans une lettre adressée à Bush Jr, a qualifié sa relation avec une ressortissante étrangère de risque pour la sécurité des États-Unis. Il n'est redevenu secrétaire adjoint à la défense qu'entre 2001 et 2005, sous la direction de Rumsfeld.

Wolfowitz a profité des événements du 11 septembre 2001 pour reprendre immédiatement sa rhétorique sur les « armes de destruction massive » et les attaques « préventives » contre les « terroristes ». Dès lors, Rumsfeld et lui ont préconisé d'attaquer l'Irak à chaque fois que l'occasion se présentait. La CIA n'ayant pas donné suite à ses affirmations sur les « armes de destruction massive irakiennes » et le « soutien de l'Irak au terrorisme », elle a créé le groupe d'étude Office of Special Plans (OSP ) au sein du ministère de la défense afin de « trouver » des preuves. Cet OSP a rapidement devancé les agences de renseignement existantes et est devenu la principale source de renseignements du président Bush Jr sur l'Irak, sur la base d'informations souvent douteuses. Cette situation a donné lieu à des accusations selon lesquelles l'administration Bush Jr. créait des renseignements pour amener le parlement à approuver l'invasion de l'Irak.

En 2005, Wolfowitz a été nommé avec succès par le président Bush Jr. au poste de président de la Banque mondiale. Cependant, Wolfowitz s'est rendu impopulaire en procédant à une série de nominations néoconservatrices controversées et en faisant adopter des politiques néoconservatrices au sein de la Banque mondiale. Sa liaison avec Shaha Ali Riza, employée de la Banque mondiale, a également suscité la controverse, les règles internes de la Banque mondiale interdisant les relations entre les cadres et le personnel. En outre, Wolfowitz avait accordé à Riza une promotion assortie d'une augmentation de salaire disproportionnée en 2005. Enfin, en 2007, Wolfowitz a été contraint de démissionner de son poste de président de la Banque mondiale. Il est ensuite devenu chercheur à l'American Enterprise Institute.

Conclusion

Le néoconservatisme est né de l'inimitié virulente des trotskystes juifs qui avaient fui l'Europe de l'Est occupée par l'URSS stalinienne et la Russie. Ils venaient principalement du territoire de l'ancien empire polono-lituanien (Pologne, Ukraine et Lituanie). Ces immigrants juifs se sont principalement installés dans les quartiers new-yorkais de Brooklyn et du Bronx dans les années 1920 et 1930. Aux États-Unis, ils ont formé une communauté très soudée par le biais d'amitiés, de relations professionnelles et de mariages. Certains ont également unifié leurs noms de famille, par exemple « Horenstein » est devenu Howe, « Leibowitz » est devenu « Libby », « Piepes » est devenu « Pipes » et « Rosenthal » est devenu « Decter ». Leurs enfants étudient en masse au City College de New York et forment le groupe trotskiste New York Intellectuals.

Pour lutter contre Staline depuis son exil mexicain, le dirigeant bolchevique en exil Léon Trotski a formé un mouvement communiste rival, la Quatrième Internationale. Détestant le stalinisme, un certain nombre d'intellectuels juifs américains importants de la gauche radicale se sont rassemblés autour de Trotsky dans les années 1930, y compris les jeunes communistes Irving Howe, Irving Kristol et Albert Wohlstetter. Dans les années 1960, ils ont troqué leur trotskisme contre le néoconservatisme.

Ainsi, les principaux idéologues du néoconservatisme sont des marxistes qui se sont réorientés. Les dénominations ont changé, mais les objectifs sont restés les mêmes. En effet, les thèses libérales du néoconservatisme soutiennent tout autant l'universalisme, le matérialisme et l'utopie de l'ingénierie sociale, puisque le marxisme et le libéralisme reposent sur les mêmes fondements philosophiques. Les communistes étaient donc à New York plutôt qu'à Moscou pendant la guerre froide. Le néoconservatisme a également rendu la religion à nouveau utile à l'État.

Le néoconservatisme a été transformé en un véritable mouvement par Irving Kristol et Norman Podhoretz. Ce mouvement néoconservateur peut être décrit comme une famille élargie basée en grande partie sur les réseaux sociaux informels créés par ces deux parrains.

Les néoconservateurs sont des impérialistes démocratiques qui veulent changer la société et le monde. De plus, leur messianisme et leur volonté de répandre la démocratie parlementaire et le capitalisme dans le monde entier sont diamétralement opposés au véritable conservatisme. En effet, les vrais conservateurs n'ont aucune prétention universelle et défendent un non-interventionnisme et un isolationnisme honorables. De plus, les néoconservateurs veulent convertir leur soutien actif à Israël, si nécessaire, en interventions militaires dans des pays qu'ils considèrent comme dangereux pour leurs intérêts et ceux d'Israël.

L'idéal néoconservateur du multiculturalisme implique une immigration massive. Or, les cultures ont des valeurs, des normes et des lois différentes. Ainsi, pour permettre l'interaction sociale, un dénominateur commun est nécessaire. Par conséquent, l'objectif final n'est pas le multiculturalisme mais le monoculturalisme : les néocons veulent donc créer un être humain uniforme et unitaire.

Parmi les néocons, il y a remarquablement beaucoup d'intellectuels. Ils ne constituent donc pas un groupe marginal, mais forment au contraire le cadre intellectuel de la politique étrangère américaine. Cependant, le président Richard Nixon a eu une approche très différente des deux superpuissances que sont la Chine et l'URSS, par rapport à tous les autres présidents américains de l'après-guerre, à l'exception du président John Kennedy (1917-1963), qui a lui aussi cherché à mettre fin à la guerre froide. À la fureur des néoconservateurs, il a noué des relations avec la Chine et a considérablement amélioré les relations avec l'URSS. Aux États-Unis, Nixon a décentralisé le gouvernement, mis en place la sécurité sociale et lutté contre l'inflation, le chômage et la criminalité. Il a également aboli l'étalon-or, tandis que sa politique en matière de salaires et de prix a constitué la plus grande intervention gouvernementale en temps de paix de l'histoire des États-Unis.

Les néocons ont détesté la détente des années 1970 : ils craignaient de perdre leur ennemi préféré, l'URSS. Après la démission de Nixon à la suite du scandale du Watergate, ils ont donc affirmé que la CIA produisait des analyses beaucoup trop optimistes sur l'URSS. Le remaniement gouvernemental de 1975 dont ils ont été les instigateurs a placé George Bush père à la tête de la CIA, après quoi il a mis sur pied l'équipe B, a priori déjà hostile à l'URSS, pour produire une « évaluation alternative » des données de la CIA. Le rapport controversé et totalement erroné de l'équipe B affirmait à tort que la CIA avait tort.

Bien que le secrétaire d'État Henry Kissinger ait rejeté le rapport de l'équipe B, le secrétaire à la défense Donald Rumsfeld l'a néanmoins diffusé comme une étude « fiable ». Rumsfeld a ainsi sapé les négociations sur la limitation des armements des années suivantes (c'est-à-dire pendant l'administration Carter, de 1977 à 1981). En outre, le rapport de l'équipe B a également servi de base à l'explosion inutile du budget de la défense sous l'administration Reagan.

Lors d'un voyage en Grande-Bretagne en 1978, l'ex-président Nixon a déclaré à propos du scandale du Watergate : « Certains disent que je n'ai pas bien géré la situation et ils ont raison. J'ai tout gâché. Mea culpa. Mais passons à mes réalisations. Vous serez là en l'an 2000 et nous verrons comment je suis considéré à ce moment-là » ...

Avec la chute du mur de Berlin en 1989, le totalitarisme n'a certainement pas été vaincu. Au contraire, il a pris une autre forme - d'apparence conservatrice - et s'est emparé de l'Europe et de l'Amérique du Nord. Les plaidoyers de néoconservateurs de premier plan comme Norman Podhoretz et William Kristol en faveur du Parti républicain, le rejet des politiques du président Obama et l'infiltration de l'appareil de pouvoir autour du président Trump montrent clairement que les néoconservateurs veulent réintégrer le gouvernement américain. Après tout, leur objectif final reste une attaque contre l'Iran et la domination mondiale des États-Unis. La lutte pour notre liberté sera donc longue !

Références :

ABRAMS (N.), Norman Podhoretz and Commentary Magazine : The Rise and Fall of the Neocons, New York, Continuum, 2010, pp. VII + 367.

BALINT (B.), Running Commentary : The Contentious Magazine That Transformed The Jewish Left Into The Neoconservative Right, New York, Public Affairs, 2010, pp. 304.

BRZEZINSKI (Z.), The Grand Chessboard : American Primacy and its Geostrategic Imperatives, New York, Basic Books, 1997, pp. 240.

DRURY (S.), Leo Strauss and the American Right, Londres, Palgrave Macmillan, 1999, p. 256.

EASTON (N.), Gang of Five, New York, Simon & Schuster, 2002, pp. 464.

GREEN (K.), Jew and Philosopher - The Return to Maimonides in the Jewish Thought of Leo Strauss, Albany, State University of New York Press, 1993, pp. XIV + 278.

HOEVELER (D.), Watch on the right : conservative intellectuals in the Reagan era, Madison, University of Wisconsin Press, 1991, pp. XIII + 333.

JEFFERS (T.), Norman Podhoretz : A Biography, Cambridge, Cambridge University Press, 2010, pp. 418.

MEARSHEIMER (J.) et WALT (S.), The Israel Lobby and U.S. Foreign Policy, New York, Farrar, Straus and Giroux, 2007, pp. 496.

SAUNDERS (F.), The Cultural Cold War, New York, New Press, 1999, p. 419.

WALD (A.), The New York Intellectuals : The Rise and Decline of the Anti-Stalinist Left from the 1930s to the 1980s, Chapel Hill, University of North Carolina Press, 1987, pp. 456.

WEDEL (J.), Shadow Elite : How the World's New Power Brokers Undermine Democracy, Government and the Free Market, New York, Basic Books, 2009, pp. 283.

http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2024/07/30/les-racines-trotskistes-du-neoconservatisme.html

Mémoire du royalisme 7

 

You are currently viewing Mémoire du royalisme 7

L’Action française s’impose

Après la mort du comte de Chambord en 1883, le royalisme s’était peu à peu réduit à lui-même. Il disposait encore d’une presse moins puissante mais combattive. En revanche si sa force parlementaire déclinait, ses liens avec le catholicisme social étaient très forts. Avec la mort du chef de la Maison de France, Philippe VII, arrive Philippe VIII, le duc d’Orléans. Le mouvement de la « Jeunesse royaliste » (JR) échoue dans une tentative de coup de force en 1899 et ses responsables s’exilent pour échapper à la Haute-Cour. Maurras lance alorsl’Enquête sur la monarchie et l’Action française va s’imposer.

La « Jeunesse royaliste » s’est fondue, depuis la Haute-Cour, au sein des Comités départementaux traditionnels. L’activité est grande dans tous les domaines : « Librairie nationale », « Congrès monarchiques de presse et de propagande », « Étudiants royalistes », « Dames royalistes », « Action royaliste populaire » encadrant des « groupes ouvriers » et travaillant avec l’« Avant-garde royaliste » (fondée en 1901 par Firmin Bacconnier), nombre de cercles et d’œuvres divers. Que de bonnes volontés ! Que d’efforts ! Il faut lutter contre le manque de capitaux, l’isolement, la concurrence des ralliés de I’ «Action libérale », la tentation de l’apolitisme, particulièrement nette dans la presse provinciale où trop souvent on ne crie « Vive le Roi » que le dimanche.

L’Action française « royalisée » et formée en ligue à partir de janvier 1905, s’impose en trois années et, dès 1907, éclipse toutes les autres organisations traditionnelles ; elle constitue des groupes parallèles aux formations anciennes qui, pour la plupart, se vident et s’assoupissent, mais certaines résistent à l’emprise. La presse en place pâtit aussi du succès rapide, à partir de 1908, du nouveau quotidien. Conscients du génie maurrassien, et du dynamisme des néophytes qu’il a convertis, les anciens cadres royalistes sont d’abord reconnaissants mais s’inquiètent aussi de la démarche positiviste de Maurras et des thèses biopolitiques de Bourget. Maurras répond qu’il ne faut pas opposer ce qui peut être composé : la propagande d’idée et de doctrine et la propagande de sentiment. Tout le monde s’accorde sur la nécessité de royaliser les esprits et, d’abord, de convertir les nationalistes afin de pouvoir exploiter efficacement une nouvelle affaire Dreyfus ; il s’agit d’élargir au maximum l’opération qui vient d’être réussie au sein de l’Action française. Quels chefs seraient mieux qualifiés pour mener cette entreprise que ceux de cette même Action française ?

https://www.actionfrancaise.net/2024/08/29/memoire-du-royalisme-7/