mercredi 17 juillet 2024

L’URSS : 30 décembre 1922 – 26 décembre 1991

 

Le 30 décembre 1922, l’Union des Républiques socialistes soviétiques, l’URSS, est formée. 

Lors du Premier Congrès des Soviets, des représentants de la RSFSR, des Républiques socialistes soviétiques d’Ukraine et de Biélorussie et de la Fédération transcaucasienne ont signé la Déclaration sur la formation de l’URSS et le Traité d’Union.

Formellement, le nouvel État a été créé en tant que fédération de républiques souveraines avec la préservation du droit de libre sortie et d’accès ouvert à celui-ci. Cependant, le mécanisme de « sortie libre » n’a pas été envisagé. Ils n’y pensaient même pas alors, la Russie rassemblait des fragments de l’empire tsariste, qui gravitaient historiquement vers Moscou ou avaient été acquis lors des conquêtes.

Au départ, il ne s’agissait pas d’une subordination centralisée à Moscou, mais en fait tout le monde avait compris que la RSFSR occupe une position de leader en tant que territoire le plus développé, le plus riche et le plus civilisé. 

Le traité définit formellement les relations entre les Républiques et le Centre.

Les questions de politique étrangère, de commerce extérieur, de finances, de défense, de moyens de communication et de communications ont été transférées à la compétence des organes centraux alliés. 

Le reste est resté sous la juridiction des républiques fédérées. 

Compte tenu de la terrible dévastation après la guerre civile, de la pauvreté de la population et des faibles perspectives de survie dans l’ancien territoire de la Russie tsariste, Moscou a pris la responsabilité de ceux qui avaient rejoint la nouvelle entité.

Dans les années 1920-1930, le nombre de républiques fédérées au sein de l’URSS a augmenté, après la démarcation nationale des républiques d’Asie centrale en 1924-1925, les républiques ouzbèkes et turkmènes sont entrées en URSS en tant que républiques fédérées. Le Kazakhstan et le Kirghizistan reçoivent le statut de républiques autonomes au sein de la RSFSR, et la République autonome tadjike fait partie de la RSS d’Ouzbékistan.

Selon la Constitution de 1936, les républiques socialistes soviétiques de la Fédération de Russie, l’Ukraine, la Biélorussie, la Géorgie, l’Azerbaïdjan, l’Arménie, le Kazakhstan, le Kirghizistan, l’Ouzbékistan, le Turkménistan et le Tadjikistan faisaient partie de l’URSS. En 1940, avec l’annexion des États baltes et de la Bessarabie, les républiques fédérées lettone, lituanienne, estonienne et moldave sont apparues.

À différentes époques, l’URSS comprenait des entités exotiques telles que la République socialiste soviétique de Boukhara, la République socialiste soviétique de Khorezm et la RSS de Carélie-Finlande. La dernière à rejoindre l’État unioniste en 1944 fut la République populaire de Tuva, qui avant la Révolution était la région d’Uryankhai, puis une république non reconnue, coincée entre la Chine, la Mongolie et la Russie.

L’Union soviétique a cessé d’exister le 26 décembre 1991, à la grande joie des États-Unis et de l’Europe, qui ont perdu un adversaire idéologique, un rival économique, un ennemi cimentant leur unité.

En prime

J’assimile la guerre actuelle de l’Occident contre la Russie par Ukraine interposée à la guerre qui a été menée contre la révolution Russe à partir de 1917.

Maintenant comme alors, ce qui est en jeu c’est l’ordre du monde.

L’ordre du milliard doré du capitalisme financier contre l’ordre multipolaire qui émerge de la croissance des Emergents, du Sud global, et de la Chine.

Le filigrane c’est la lutte pour la domination à horizon 2030-2035.

La Russie doit etre vaincue et démantelée d’abord car elle a hérité de la puissance militaire colossale de l’URSS qu’elle a modernisée et elle constitue un ancrage civilisationnel récalcitrant.

L’Occident considéré comme l’Empire Anglo-saxon refuse de partager la domination avec les puissances montantes, il craint aussi et certainement a juste titre l’imperialisme chinois, et il souhaite mener des guerres d’affaiblissement préventives. La guerre contre la Russie qui dispose des ressources rares en fait partie.

La Russie apres la chute de l’URSS a tenté de rallier le bloc occcidental, mais le pillage sans scrupules organisé par les des Anglo-saxons a suscité un rejet et un renouveau national qui se concrétisent maintenant par cette nouvelle guerre.

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Dix armées étrangères contre la révolution russe

Avant même octobre 1917, les Alliés interviennent en Russie pour prévenir la victoire des bolcheviks. Puis, redoutant l’extension de la révolution, Français, Anglais et Japonais donnent la main aux « blancs » contre les « rouges », les Américains étant plus réservés. Après trois années d’intervention économique et militaire, ils sont défaits.

par Marc Ferro

On nomme « intervention étrangère » la croisade menée par les démocraties occidentales pour aider les contre-révolutionnaires « blancs » à triompher de la révolution bolchevique. Lors de la chute du tsarisme, en février 1917 (mars pour le calendrier occidental), les dirigeants de ces régimes sont partagés. D’un côté, ils se félicitent que l’alliance avec la Russie ne soit plus « honteuse » : désormais existerait un front uni des démocraties face aux « empires » de l’Allemagne et de l’Autriche-Hongrie. De l’autre, ils craignent que les soubresauts qui accompagnent nécessairement une révolution n’affaiblissent l’effort de guerre de la Russie.

Cette crainte-là finit par l’emporter, à la suite des troubles qui secouent l’armée et de l’exigence du soviet de Petrograd, l’une des instances du nouveau pouvoir, d’une « paix sans annexions ni réparations ». Plus encore : une opposition bolchevique, animée par Lénine, réclame dès le 4 avril « tout le pouvoir aux soviets, une paix immédiate ».

Désireux de réchauffer l’ardeur belliqueuse des Russes, les Alliés envoient deux délégations à Petrograd – une ambassade de deux ministres socialistes, Arthur Henderson et Albert Thomas, ainsi qu’une délégation composée notamment de Marcel Cachin, Marius Moutet et William Sanders, et chargée de saluer la révolution au nom des socialistes occidentaux. Toutefois, peu à peu emportés par le spectacle d’une révolution réussie, ils se convertissent à l’idéal des soviets. Partis en avocats honteux, inquiets des intérêts de leurs gouvernements, ils reviennent de Russie comme les chantres glorieux de la révolution… Serait-elle contagieuse ?

Envers et contre tout, le nouveau ministre de la guerre, le travailliste (trudovik) Alexandre Kerenski, veut continuer le combat et lance une offensive en Galicie en juin 1917. Vaine attaque qui provoque les manifestations de juillet, plus ou moins animées par les bolcheviks.

Cordon sanitaire

Dès lors, l’état-major russe décide d’abattre Kerenski : c’est le putsch de Kornilov. Les missions alliées à Petrograd pressent leurs gouvernements de liquider les bolcheviks et d’instaurer un régime militaire en Russie. Le Britannique Oliver Locker-Lampson, commandant de la mission, met au service de Kornilov ses véhicules blindés et ses soldats. Mais le coup d’État échoue, les bolcheviks ayant décidé de soutenir Kerenski – « comme la corde soutient le pendu » (Lénine).

En octobre, l’hostilité des Alliés au nouveau régime russe est acquise. Ils refusent les propositions de paix de Trotski et Lénine, de sorte que c’est une « paix séparée » (avec l’Allemagne) que conclut le gouvernement révolutionnaire russe à Brest-Litovsk.

Les Alliés y voient surtout la disparition d’un second front. Ils optent alors pour une intervention dans le Grand Nord russe, à Arkhangelsk, tant pour empêcher les Allemands et les Finlandais de tirer avantage du traité de Brest-Litovsk que pour combattre les « rouges ». Constatant que les « blancs » se renforcent très vite sous l’autorité du général Denikine et qu’en Sibérie les soldats tchèques libérés se rallient à eux, ils décident de les soutenir, dans l’espoir que leurs troupes constitueront un second front après leur victoire.

Mais l’issue favorable tarde. Après leur succès sur la Marne durant l’été 1918, Clemenceau et Churchill définissent donc les nouveaux objectifs de l’intervention alliée. Ce n’est plus l’« ami des Allemands » qu’ils combattent, mais l’« ennemi social ». Le bolchevisme « menace par son Armée rouge, qu’il rêve de porter à l’effectif de 1 million d’hommes ». Il veut « étendre sur toute la Russie, et le reste de l’Europe ensuite, le régime de ces soviets […]. Les Alliés doivent provoquer la chute des soviets […] par l’encerclement du bolchevisme, la constitution d’un « cordon sanitaire » qui [isolera l’URSS] et la condamnera à périr d’inanition », écrit Clemenceau le 23 octobre 1918.

Mutinerie

Une dizaine de jours avant, dans le Kreuz-Zeitung, grand journal chrétien de Rhénanie, on pouvait lire : « La lutte contre le bolchevisme doit servir de lien entre les trois puissances alliées et leurs ennemis. Une Allemagne forte résistera au bolchevisme. Si elle succombe, le pire adviendra à l’Europe ». En France, le maréchal Foch se montre sensible à l’argument.

Déjà, Français et Anglais s’attribuent des « zones d’influence » : aux premiers l’Ukraine et les minerais ; aux seconds le Caucase et son pétrole. À l’autre bout de la Russie, les Japonais débarquent pour s’emparer de la province orientale. Puis c’est au tour des Américains d’intervenir en Sibérie orientale, moins pour soutenir les « blancs » que pour contrôler l’expansion des Nippons.

Cette intervention militaire se réduit à une cinquantaine de milliers d’hommes au total. Elle n’est vraiment utile aux « blancs » qu’au bord de la mer Baltique, leur permettant de menacer Petrograd. Ailleurs, c’est l’aide financière et matérielle qui compte. Efficacité toutefois contrebalancée par une rébellion de soldats français à Arkhangelsk le 15 octobre 1918 : une compagnie du 21e bataillon d’infanterie coloniale refuse de se battre contre les bolcheviks. Puis survient une mutinerie parmi les marins de la mer Noire.

Le résultat essentiel est que, dans la mesure où les « rouges » obtiennent finalement la victoire par eux-mêmes, l’intervention étrangère fait des bolcheviks les « défenseurs de la terre russe ». Ils ne peuvent plus passer pour des « ennemis du peuple ». Voilà ce que Lénine, en 1920, retient avant tout.

Cartographie : Philippe Rekacewicz et Cécile Marin avec le concours de Dario Ingiusto et d’Agnès Stienne.

Bibliographie :

André Gide, « Retour de l’URSS, suivi de Retouches à mon Retour de l’URSS », Gallimard, Paris, 2009
Edward Hallett Carr, « La Formation de l’Union soviétique », Editions de Minuit, Paris, 3 vol., 1969
Marc Ferro, « L’Occident devant la révolution soviétique », Complexe, Bruxelles, 1991
Ewan Mawdsley, « The Russian Civil War, Unwin Hyman », Boston, 1987
Nicolas Werth, « Histoire de l’Union soviétique : De Lénine à Staline », PUF, Paris, 2007

source : Bruno Bertez

https://reseauinternational.net/lurss-30-decembre-1922-26-decembre-1991/

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