Charles, roi d’Aragon
C’est à Vincennes que naît le dernier fils de Philippe III le Hardi. Titré comte de Valois, d’Alençon et du Perche, ce jeune prince grandit dans l’ombre d’un frère aîné, Philippe, que l’Histoire fit connaître comme le roi de fer. Seulement, par un heureux hasard et par son sang maternel, Charles devient son égal en acquérant le trône d’Aragon en 1284. Lors de ce que l’on pourrait appeler un simulacre de couronnement, le cardinal présidant la cérémonie, n’ayant point de couronne à disposition, sacre le prince avec son propre chapeau cardinalice. Cet événement fait ainsi surnommer le nouveau souverain aragonais le « roi du chapeau » par les mauvaises langues. Malheureusement, ce règne fantoche cesse en 1295, lorsque Philippe IV le Bel, désormais roi, renonce à aider son frère à maintenir son pouvoir et son titre. Selon Jacques Bainville dans son Histoire de France, « il jugea bientôt que cette affaire […] était épuisante et sans issue. […] Il n'était pas raisonnable de courir des aventures lointaines lorsque la France n'était pas achevée. »
Charles, empereur de Constantinople
Celui qui est appelé « Monseigneur de Valois » par Maurice Druon dans ses Rois maudits regagne rapidement le royaume de France. Il y obtient une place au conseil royal et s’efforce d’aider de son mieux son frère. Seulement, il doit affronter la cohorte de légistes qui entourent Philippe IV et qui sont issus, non pas de la noblesse, mais de la bourgeoisie. Parmi ceux-ci, Guillaume de Nogaret et Enguerrand de Marigny qui deviennent les némésis de Charles de Valois et dont les tristes noms sont entrés dans l’Histoire de France grâce à l’affaire des Templiers.
Charles cherche néanmoins à regagner sa puissance passée de souverain déchu. Devenu veuf, il réussit, par les liens du mariage, à trouver en 1300 un excellent parti en la personne de Catherine de Courtenay. Cette dernière n’est autre, alors, que l’héritière par droit du sang du trône de Constantinople usurpé. Devenu empereur titulaire, Charles de Valois cherche à gagner cette couronne orientale. Il forge de nombreuses alliances avec la papauté, la Sicile, Venise et l’Aragon et cherche à monter une expédition. Cependant, le décès prématuré de son épouse en 1307 met fin à ses rêves de grandeurs et à sa prétention pour ce trône lointain légué à sa fille Catherine.
Charles, empereur du Saint Empire
Néanmoins, ce nouvel échec ne fait pas perdre à Charles de Valois son ambition. Profitant de l’assassinat de l’empereur du Saint Empire romain germanique, Albert de Habsbourg, en 1308, le frère de Philippe IV le Bel convoite désormais ce trône vacant et apporte sa candidature. Soutenu par la papauté et le royaume de France, Charles pense l’affaire conclue. Cependant, cela ne se passe pas ainsi car c'est un autre prétendant, Henri du Luxembourg, qui est choisi par les princes électeurs.
Lassé après ces nombreuses déconvenues, Charles de Valois retourne en France et reprend pleinement son rôle de conseiller royal. À défaut de pouvoir être roi, il devient alors un guide pour ses neveux, Louis X le Hutin, Philippe V le Long et Charles IV le Bel qui se succèdent en ce début du XIVe siècle avant que ne disparaissent avec les Capétiens directs. Ironie du sort : après avoir tant désiré une couronne, Charles de Valois meurt en 1325 sans voir son propre sang monter sur le trône de France en 1328, ce trône qu’il avait peut-être tant désiré sans jamais croire qu’il pouvait le revendiquer pour lui ou pour les siens. Son fils, Philippe VI, réalisera ce rêve, inaugurera une nouvelle dynastie pour le royaume de France et déclenchera plus d’un siècle de guerre avec l’Angleterre.
Eric de Mascureau
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