À Rochefort, en Charente-Maritime. C’est là que ceux qu’on appelle les martyrs des pontons ont péri en 1794 sur ordre de la Convention nationale et de son terrible système de gouvernement : La Terreur.
Un arrêté du Comité de salut public (25 janvier 1794) organisa le départ des prêtres réfractaires vers les ports de l’Atlantique, pour y être regroupés avant leur déportation. Ceux qui ont été emprisonnés à Nantes ont été noyés dans la Loire par Carrier, et finalement, seuls Bordeaux et Rochefort mettront en œuvre les directives du comité. Les convois de déportés traversèrent la France pendant l’hiver et jusqu’au printemps 1794, parcourant parfois jusqu’à 800 km. Les conditions de voyage (parfois à pied) furent souvent difficiles, en raison des nuits passées en prison aux étapes, et des insultes et brutalités endurées à certaines haltes. Ils seront souvent systématiquement dépouillés.
Dans les faits, la Convention nationale a envoyé à la mort même ceux qui avaient composés avec la nouvelle religion républicaine. Ainsi se trouveront indistinctement : Des prêtres qui ont quitté le sacerdoce, des réfractaires, des jureurs qui ont prêté serment à la Constitution civile du Clergé.
Ainsi, 829 prêtres et religieux du nord de la France furent rassemblés à Rochefort comme on ramasserait des déchets pour faire le ménage de la France. Au printemps 1794, ils seront entassés dans deux navires négriers : « Les Deux Associés » et « Le Washington » en partance pour la Guyane et l’île au Diable où leur seul avenir aurait été de périr de faim et de maladie dans ce terrible camp d’extermination.
Seulement, la situation politique complexe à Paris, qui verra la fin du gouvernement dictatorial de la Convention nationale, retarda le départ. Les navires ne quitteront pas l’estuaire de Rochefort. Ils se transformeront alors, en camps de concentration : tortures, maladies, menaces, avanies… Le décès devient lui-même une épidémie.
Le commandement des navires fut assuré par Laly pour les Deux-Associés et Gibert pour le Washington. Ils appliquèrent avec leurs équipages, les consignes de sévérité avec rigueur, les aggravant même parfois : pas de prière, injures, menaces, brimades physiques, nourriture infecte, pas de conversation. Mais les prisonniers continueront dans le secret une activité religieuse.
Les décès dus aux conditions de détention ne tardèrent pas à s’accélérer. Le scorbut, le typhus firent des ravages. L’épidémie fut telle qu’enfin les prisonniers valides furent transférés sur un troisième navire, l’Indien, tandis que les plus malades furent débarqués sur l’île citoyenne (l’île Madame) où beaucoup périront. L’automne 1794 fut particulièrement rude, et en novembre, le vent renversa les tentes de fortune de l’hôpital installé sur l’île, les survivants furent alors à nouveau embarqués sur les navires. Les conditions matérielles de détention s’améliorèrent quelque peu tandis que la neige et le gel s’installèrent.
En décembre, trois bâtiments chargé de prêtres et provenant de Bordeaux, (le Jeanty, le Dunkerque, et le Républicain) se réfugièrent dans l’estuaire (les Anglais bloquant les côtes).
La chute de Robespierre ne changea pas le sort des déportés. Grâce à quelques initiatives individuelles, le transfert à Saintes des prêtres déportés de Rochefort eu lieu en février 1795. Ils purent y célébrer à nouveau le culte et administrer les sacrements dans les oratoires privés.
Sur les 829 prêtres déportés à Rochefort, 274 survécurent. Les déportés de Bordeaux, d’abord transférés à Brouage, ne furent conduits à Saintes que plus tard. 250 prêtres sont morts sur les 1494 déportés initialement à Bordeaux.
En octobre 1795, le nouveau pouvoir ordonna cependant, après ce bref répit, la réclusion ou la déportation des prêtres réfractaires vers la Guyane. Encore une fois, ces départs n’eurent pas lieu, et un décret du 4 décembre 1796 prononcera enfin la libération des prêtres détenus. Le 18 fructidor de l’an V (4 septembre 1797), un coup d’État des républicains du Directoire (le Directoire avait remplacé la Convention dès la fin 1795) contre les modérés et les royalistes, devenus majoritaires aux élections, fait resurgir la ligne dure à la tête de la République. Le pouvoir exécutif s’en trouve renforcé, au détriment du législatif. Les adversaires politiques sont emprisonnés ou déportés. Les précédentes mesures de détente sont annulées et les décrets de proscription envers les prêtres sont renouvelés. Ils ont à nouveau emprisonnés à Rochefort et quelques-uns sont effectivement envoyés en Guyane, où la mortalité fut particulièrement effrayante. Mais le Directoire se vit obligé de suspendre ces départs, certains navires étant capturés par les Anglais, et les prêtres seront entassés dans les citadelles de St-Martin-de-Ré et du Château d’Oléron jusqu’en 1802.
Le Coup d’État du 18 brumaire de l’an VIII (9 novembre 1799) donne le pouvoir à Bonaparte. Le Consulat, nouveau gouvernement remplaçant le Directoire dota la France d’une nouvelle constitution (celle de l’an VIII), trois consuls sont nommés, dont Bonaparte, 1er consul. Les persécutions des prêtres prennent fin lorsque le Saint-Siège conclut un Concordat avec la France (ratifié le 5 avril 1802). C’est alors la libération des rescapés des camps de concentration.
En 1995, Jean-Baptiste de Souzy (Prêtre du diocèse de La Rochelle) et 63 de ses compagnons présents sur les bateaux ont été béatifiés par Jean Paul II.
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