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Cet article a été publié le 19/11/2022.
À l'heure où, après les émeutes historiques de début juillet, on s'interroge sur la capacité de la France à assurer le bon déroulement des Jeux olympiques de Paris l'an prochain, le choix du bonnet phrygien comme mascotte de la manifestation interroge. Un symbole républicain ? Révolutionnaire ?
Avec la présentation, auprès du grand public, de la future mascotte pour les Jeux olympiques de Paris, en 2024, représentant un bonnet phrygien, il est bon de s’intéresser à l’histoire de ce symbole trop souvent réduit à celui de la Révolution française et des terribles sans-culottes.
Avant d’être un couvre-chef de la fin du XVIIIe siècle, le bonnet appartenait au peuple antique des Phrygiens, habitant l’Anatolie, dans la Turquie actuelle. Un simple code vestimentaire qu’il partageait avec d’autres cultures orientales du bassin méditerranéen comme les Thraces, les Scythes ou les Parthes.
Lors de la conquête de ces territoires par Rome, les Romains s’accaparèrent ce symbole et le représentèrent sur leurs monuments afin de symboliser l’Orient et ses habitants mais aussi leur religion. Ainsi, sur de nombreux bas-reliefs, furent sculptés la figure de Mithra, une divinité perse personnifiée comme un jeune homme portant un bonnet phrygien et adoré par de nombreux croyants, même jusqu’au sein de la Ville éternelle et jusqu’au Ve siècle après J.-C.
Mais c’est la valeur sociale et non pas religieuse de cet objet qui poussa, en 1789, les révolutionnaires à faire leur cet objet. En effet, dans la Rome antique, tout esclave affranchi portait un bonnet appelé pileus représentant son bien le plus cher et son statut : la liberté.
Une liberté qui prendra une teinte pourpre au XVIIIe siècle, une couleur dont l’origine remonterait à une révolte bretonne dites des Bonnets rouges, en 1675, et luttant contre l’influence du pouvoir royal. Avec la Révolution française, le bonnet est employé à nouveau comme symbole de liberté mais aussi de toutes les idées révolutionnaires, même les plus extrêmes.
L’importance de l’objet fut telle qu’elle devint la couronne de la République. Ainsi, le 20 juin 1792, les sans-culottes envahirent les Tuileries et forcèrent Louis XVI (1754-1793) à se coiffer du bonnet phrygien comme signe de sa soumission à la Révolution et d’adhésion à ses idées avec l’arrêt du veto du roi contre les projets de loi révolutionnaire. Ainsi la fleur de lys se mêla au bonnet qui devint l’un des blasons informels de la nouvelle nation constituante et un signe de ralliement pour tous les partisans de l’ordre nouveau et une signature pour leurs actes.
Désormais lié à la Révolution puis à ses excès menés au nom de la Terreur et de la vertu, le symbole fut destiné à disparaître, peu à peu, avec la chute de l’Incorruptible, Maximilien Robespierre (1758-1794) jusqu’à ne plus apparaître sous le Consulat puis l’Empire de Napoléon (1759-1821), ce dernier ayant déclaré que « la Révolution est fixée aux principes qui l’ont commencée : elle est finie », ainsi que ses symboles les plus funestes.
Désormais assimilé à un symbole de révolution et non plus de liberté, qu’utilisent comme prétexte les révolutionnaires, le bonnet phrygien ne réapparut que lors des mouvements révolutionnaires de 1830, de 1848 puis de 1870, mais cet emblème, mêlé aux excès de la Révolution, fit détourner le peuple de ce couvre-chef, jugé comme un écho non plus de la liberté et de la paix mais de la violence et de l’anarchie.
Ainsi, il est curieux de voir adopter pour les Jeux olympiques de 2024, aux yeux du monde entier, un tel symbole, non pas porteur de valeurs sportives et de liberté en raison du lien évident avec la période révolutionnaire. Quel message veut-on alors envoyer ? Un autre emblème de notre pays, de sa longue Histoire, n’eût-il pas pu être trouvé, ou la France commence-t-elle et se résume-t-elle à 1789 ? Où sont passés nos mille ans d’Histoire précédant la Révolution française et remontant aux fondations de notre culture et de notre identité ?
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