Louis XVI a 38 ans lorsqu'il est guillotiné le dimanche 21 janvier 1793 sur la place de la Révolution. Éric de Mascureau revient sur les circonstances de cette exécution, l'acte fondateur de notre République, et nous rappelle les derniers mots que l'ancien monarque adresse à son peuple.
Nous sommes le 21 janvier 1793. Paris, recouvert d'un épais brouillard d’hiver, s'apprête à vivre un événement unique de son Histoire. En ce jour funeste, la France va exécuter son ancien roi, le père de toute une nation : Louis XVI (1754-1793).
Après avoir perdu la confiance des révolutionnaires après l'échec de sa fuite à Varennes, Louis XVI demeura à Paris, prisonnier aux Tuileries. La chute du palais, le 10 août 1792, entraîne l’abolition de la monarchie et la déchéance de son roi, le 21 septembre. Devenu simplement Louis Capet, l’ancien souverain est enfermé à la prison du Temple ainsi que son épouse, Marie-Antoinette (1755-1793), sa sœur, Madame Élisabeth (1764-1794) et ses deux enfants : le futur Louis XVII (1785-1795), destiné à une fin tragique, et Marie-Thérèse (1778-1851), unique survivante de la famille royale après la Révolution.
Il faut peu de temps pour que soit annoncé à Louis XVI son procès dont l’accusé connaissait l'issue avant même le début. Il était, en effet, conscient qu’il n’était pas seulement un homme ni un roi mais aussi un symbole : celui du ralliement des puissances étrangères souhaitant le rétablir sur son trône, celui d’un Ancien Régime de privilèges désormais abolis, celui d’un souverain très chrétien soumis à Rome après ses nombreuses oppositions à la Constitution civile du clergé et aussi le père d’un peuple mécontent envers celui qui fut jugé responsable de toutes ses souffrances. Des motivations dont les farouches révolutionnaires, comme l’archange de la future Terreur, Saint-Just (1767-1794), ne se cachent point en demandant le procès de l’ancien monarque : « [Il] doit être jugé en ennemi […] [c’est] un rebelle et un usurpateur, […] [un roi] doit régner ou mourir. » Ainsi, dans l’esprit des ennemis de Louis XVI, il s’agissait d’un combat à mort où l’impartialité n’était pas de mise : tuer ou être tué.
Après un mois de décembre 1792 marqué par des semaines de procès, non plus motivé par la justice mais par la peur, l’ambition politique et la haine, le jugement est rendu à l’accusé, le 20 janvier 1793. Louis Capet est condamné à mort. On lui octroie la permission de voir sa famille, dont il était séparé depuis le début du procès, afin de lui dire adieu. Le 21 janvier, Louis XVI, réveillé à 5 heures du matin, assiste à une ultime messe et confie ses dernières volontés à son confesseur ainsi qu’à son valet : son alliance doit être remise à son épouse. Vers 9 heures, le roi quitte la prison du Temple à bord d’une voiture tirée par plusieurs chevaux, en direction de la place de la Révolution, véritable chemin de croix pour ce souverain considéré comme un martyr par les partisans de la monarchie. Ils tentèrent, jusqu’au dernier instant, de faire évader le souverain malgré la présence 80.000 hommes en armes le long du funeste trajet du condamné. Ce dernier, descendant de son carrosse funèbre, est conduit à l’échafaud où l’attend le bourreau Charles-Henri Sanson (1739-1806). Profitant d’un moment d’inattention, Louis XVI échappe à ses tortionnaires et proclame au peuple ses ultimes paroles : « Je meurs innocent de tous les crimes qu'on m'impute. Je pardonne aux auteurs de ma mort. Je prie Dieu que le sang que vous allez répandre ne retombe jamais sur la France. » Repris par les assistants de Sanson, le supplicié est installé sur la planche de la guillotine et, à 10 h 22, le couperet tombe.
Alors que la tête du monarque était présentée au peuple, résonnèrent dans tout Paris les coups de canon ainsi que les bruits de la foule hurlant « Vive la nation ! » Dans sa cellule du Temple, Marie-Antoinette, seule, pleura mais, n’oubliant pas ses devoirs, elle s’inclina devant son fils, Louis, désormais roi de France selon les lois fondamentales du royaume, car le trône ne saurait être vacant : « Le roi est mort, vive le roi ! » Malgré l’abolition de la monarchie, les révolutionnaires craignaient toujours une restauration. Cette peur les poussa à poursuivre ce qu’ils avaient commencé avec Louis XVI : détruire la monarchie et ses symboles. Une volonté qui les mena à commettre le pire envers celui qui fut surnommé l’enfant du Temple et mourut, abandonné et malade, en 1795. Le sang de la famille royale et celui de nombreuses autres victimes anonymes constituaient le mortier sur lequel devait reposer le nouveau régime, pensaient les révolutionnaires.
Malgré son exécution, le corps de Louis XVI lui-même resta malgré tout un danger pour la Révolution et fut enseveli au plus profond d’une fosse commune, au cimetière de la Madeleine, après avoir été recouvert de chaux vive afin que nul ne puisse reconnaître à jamais celui qui fut un jour roi de France. Son épouse, Marie-Antoinette, le rejoignit quelques mois plus tard, en octobre 1793, avant qu’en 1815, Louis XVIII (1755-1824) fasse élever sur la fosse une chapelle expiatoire. Il avait au préalable fait transporter les restes présumés des souverains à la basilique Saint-Denis, la nécropole des rois de France, pour qu’ils y reposent en paix, loin des querelles politiques dont ils furent les victimes symboliques.
Eric de Mascureau
https://www.bvoltaire.fr/le-21-janvier-1793-sur-lechafaud-louis-xvi-pardonne-aux-auteurs-de-sa-mort/
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