Jamais depuis la première guerre duGolf, l’Europe n’avait connu une telle campagne de propagande : la guerre russo-ukrainienne se mène aussi sur le front médiatique, entre mensonges et opportunisme politique..
Bruno Lemaire a brièvement voulu déclarer « une guerre économique et financière totale à la Russie ». Macron a profité du conflit russo-ukrainien pour poser, tantôt façon Kennedy durant la crise de Cuba, tantôt façon Zelensky, mal rasé, en sweat-shirt des commandos parachutistes de l’Air. La macronie se complait dans la communication guerrière, propice à annihiler la campagne électorale. La guerre russo-ukrainienne est en effet venue à point nommé relancer un climat anxiogène que le Covid peinait à maintenir dans les médias occidentaux.
Ceux-ci ont donc fait leur miel du moindre élément de langage diffusé par Kiev pour sanctifier son Président, Volodomyr Zelensky, et diaboliser l’agresseur. Une campagne de propagande qui rappelle celle de la guerre du Golfe. À la place de l’armée irakienne « quatrième du monde », ils ont servi une Russie belliqueuse face à un Occident et une Ukraine pacifique. Pourtant, Moscou a depuis longtemps appelé à la négociation en vain. S'il est évident que la Russie est coupable d’une agression, toute tentative de l’expliquer est ravalée au rang « propagande russe » par ailleurs bien réelle. L'Ukraine, un pays à « dénazifier » ? C'est abusif, même si le pays compte des milices néonazies (bataillons Azov et Aidar, intégrés à l’armée régulière), Pravy Sektor, etc. Le Donbass, victime d'un « génocide » ? Comme au Kosovo en 1999, le terme n'était que prétexte à une invasion : russe dans le premier cas, otanienne dans le second.
En revanche, dans leur enthousiasme pro-ukrainien, les journalistes occidentaux ont enchainé les fake news made in Ukrania. Le « fantome de Kiev », pilote ukrainien qui aurait abattu une dizaine d'avions russes ? Ses exploits filmés sont issus... d'un jeu vidéo. Quant à certaines images de Kiev dévastée par la guerre, il s'agissait en fait de celles de Beyrouth après l’explosion du port en 2020.
Fake news à gogo
Le mot de Cambronne prononcé par les héroïques défenseurs de I'ile aux Serpents, juste avant d’être tués par les tirs d'un navire russe ? Peut-être prononcés, mais juste avant... de se rendre. Quant au char russe écrasant intentionnellement une voiture Obolon, il était en fait ukrainien et fuyait les combats. Les Russes n'ont pas non plus visé une centrale nucléaire, comme il a été dit, mais des bâtiments proches, pas plus qu'ils n'ont ciblé un mémorial juif, mais un relais téléphonique.
Symbole de la détresse des combattants, les images de cet Ukrainien en pleurs serrant sa femme et sa fille dans ses bras ont fait le tour du monde, jusqu’à ce qu'il passe à la trappe après que l’on a appris qu'il s’agissait en fait d'un habitant du Donbass russophone assistant à l’évacuation de sa famille. Un « deux poids, deux mesures », habituel dans ce conflit. Si les images de frappes russes touchant les civils inondent les médias, celles du bombardement de Donetsk le 14 mars par un missile ukrainien sous-munitions - et leur quarantaine de morts et blessés civils - sont rapidement évacuées.
Evacuées comme l’était I'hôpital pédiatrique de Marioupol pour laisser place des combattants d'Azov, expliquent les Russes.
Une affirmation sujette à caution, tout comme leur démenti d'avoir bombardé cette installation, sise dans une ville à majorité russophone où ils avaient ouvert des couloirs humanitaires. Mais plusieurs éléments dans les images de ce qui ressemble à un crime de guerre permettent aussi de douter de leur véracité : chambranles de fenêtre arrachés comme par le souffle d'une explosion, mais meubles immaculés à l’intérieur, toutes les victimes sortant d’une seule porte de cet imposant bâtiment, etc. L’hôpital de Marioupol est-il la nouvelle maternité koweitienne dans laquelle « les soldats irakiens tuent les bébés dans les couveuses » ? Impossible de se prononcer.
Seule certitude : dans le brouillard de guerre informationnelle qui noie ce conflit, comme le disait Rudyard Kipling, « la première victime de la guerre est toujours la vérité ».
Richard Dalleau Monde&Vie 26 mars 2022 n°1009
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire