Jean Chélini, Histoire religieuse de l’Occident médiéval, Fayard, Paris, 2010 (1991).
La rédaction vous propose cette semaine une véritable encyclopédie, des plus complètes, exposant en détails l’histoire religieuse de l’Occident médiéval, depuis la fin de l’empire et la conversion de Clovis jusqu’à la fin du XVe siècle.
L’ouvrage, conséquent, traite de tous les sujets de cette histoire, de façon chronologique et sous tous les aspects. Il représente plus qu’une histoire de l’Église, car il comprend aussi des analyses des différences et des relations entre le temporel et le spirituel, entre rois, empereurs et papes, entre séculier et régulier, entre Églises locales et universalité de l’Église, entre hérésies et orthodoxie, selon les époques et les régions. Avec aussi, et c’est une originalité, des incursions dans l’histoire des piétés et des pratiques religieuses, tout à fait salutaires pour mieux se plonger dans la réalité de ces époques passées.
La force et la particularité de l’œuvre consistent en ce qu’elle travaille à saisir le christianisme dans l’ensemble de la société du Moyen-Âge. L’auteur insiste sur la continuité derrière les changements, et la constance de fond qui correspondent à l’esprit chrétien et médiéval. Pas de « renaissance carolingienne », mais une « restauration carolingienne » ; non pas une « conversion de la gaule » par Clovis, mais une « reconquête de la Gaule par la foi catholique » grâce à Clovis, etc.
Il est très appréciable de rentrer dans cet ouvrage qui nous fait découvrir ce qui constitue le cœur de notre civilisation française et européenne : le « sublime âge » (que d’aucuns appellent le moyen-âge), plein de lumières, dans l’unité de la Foi, la diversité des cultures et des situations, les fruits magnifiques des arts, des lettres et des sciences, et une harmonie conquérante, même dans les tensions et la résolution des conflits. Nous pouvons ainsi pénétrer progressivement dans l’esprit médiéval par la simple description de son histoire et des logiques présidant à son déroulé.
Il y en a pour tous les goûts et il est tout à fait possible de se référer simplement à la partie ou à l’époque qui intéresse, pour ceux qui n’auraient pas le temps. Il constitue aussi un très bel outil de référence, inépuisable, pour se remettre à l’esprit une connaissance de base, droite, et correspondant à l’esprit général de l’époque.
L’auteur allie ensemble l’amour de son sujet d’étude, qui est une condition pour produire de bons ouvrages, qui nourrissent l’esprit et le cœur, et l’objectivité du chercheur chevronné, professeur d’université.
Notons enfin une autre particularité appréciable : l’introduction synthétique mais complète au vocabulaire usuel du christianisme permet de recadrer les fondement essentiels et basiques sur l’Église, la foi, les sacrements, etc. Toute chose certainement évidente pour tout Français il y a quelques décennies, mais qui sont aujourd’hui tout à fait ignorées : cet ouvrage a le grand avantage de s’adresser justement à notre temps, qui ne connaît plus grand-chose, et allie ainsi une immense précision à une forme de vulgarisation pour le plus grand monde. Si tout catholique connaissait bien ne serait-ce que cette partie de l’ouvrage, qui pourtant est élémentaire, la restauration de l’Église et de la France ferait un grand pas…
Nous trouvons aussi de nombreux passages sur la royauté française, qui reste un des fils conducteurs de l’ouvrage, et sur toutes les particularités de la royauté Très Chrétienne, la signification du sacre, la protection de la foi et de l’église, etc, etc.
En définitive, c’est un manuel de fond qui doit se trouver dans toute bibliothèque digne de ce nom.
Que l’on soit chrétien ou non, vouloir parler de la France sans connaître le christianisme est voué à l’échec. Laissons la parole à l’auteur :
« Le christianisme fait partie intégrante du patrimoine de la culture française et européenne. Il a joué un tel rôle dans l’histoire de notre civilisation que le méconnaître revient à la mutiler de ses pages essentielles. L’histoire du Moyen Âge, en particulier, deviendrait incompréhensible si l’on voulait en écarter les aspects religieux. »[1]
C’est dit, et bien dit.
Rémi Martin
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire