Notes :
(1) La plupart des difficultés et apories de la philosophie et de la théologie catholiques – not. la scolastique et le thomisme – ont leur origine dans le fait que l'esprit des éléments empruntés au platonisme et à l'aristotélisme est irréductible à celui des éléments proprement chrétiens et hébraïques. Cf. L. Rougier, La scolastique et le thomisme, 1925.
(2) A. Dempf, Sacrum Imperium, trad. it., Messine-Milan, 1933, p. 87. F. de Coulanges (Les transformations de la royauté pendant l'époque carolingienne, 1892) remarque à juste titre que si Pépin, Charlemagne et Louis le Pieux se donnèrent le titre de « défenseurs des églises », « nous ne devons pas nous tromper sur le sens de cette expression : elle avait alors une signification assez différente de celle qu'elle aurait de nos jours. Avoir les églises dans sa défense ou dans sa mainbour, c'était, suivant le langage et les idées du temps, exercer sur elles à la fois protection et autorité. Ce qu'on appelait défense ou mainbour était un véritable contrat qui entraînait inévitablement la dépendance du protégé (...). Il était soumis aux obligations de toute sorte que la langue du temps réunissait sous le seul mot de fidélité. Aussi devait-il prêter serment au prince ». Si Charlemagne revendique pour lui la défense de l'Église, il revendique aussi l'autorité et la mission « de la fortifier au dedans dans la vraie foi » (p. 309).
(3) Cf. Émile Bourgeois, L'État et le régime politique de la société carolingienne à la fin du IXe siècle, 1885, pp. 301-308 ; A. Solmi, Stato e Chiesa secondo gli scritti politici da Carlomagno sino al Concordato di Worms, 1901, pp. 24-33, 101-104.
(4) En raison de son aspect fragmentaire et des nombreuses stratifications qu'elle présente, il n'est pas facile de se repérer dans la tradition des Eddas pour qui ne possède pas déjà une orientation appropriée. Ainsi, il est souvent question d'un Muspelsheim transposé, non plus localisé au Nord, et correspondant donc à l'habitat nordique par ses caractères plutôt que par sa localisation, et d'un Niflheim, avec les géants de la glace, situé au Nord. En revanche, quand les puissances du Sud sont réellement rapportées au Muspelheim, celui-ci ne tarde pas à se changer en son opposé, acquérant ainsi une valeur négative : il devient le domaine de Surtr, le “Noir”, qui attaquera les dieux et provoquera la fin d'un cycle. Les fils de Muspel sont précisément des entités ennemies des olympiens, ils font s'écrouler le pont Bifröst reliant terre et ciel (cf. Gylfaginning, 4, 5, 13, 51 ; Völuspa, 50, 51; W. Golther, Handbuch der germanischen Mythologie, 1895, p. 540).
(5) On peut rappeler que cette couleur se conserve dans les noms de l'Irlande et du Groenland (grünes Land = “terre verte”). Il semble que cette dernière était encore couverte, du temps de Procope, d'une végétation luxuriante.
(6) C'est probablement pour cela que les Nibelungen et les géants sont représentés comme les artisans d'objets et d'armes magiques, qui seront ensuite confiés aux Ases ou aux héros – par ex. le marteau-foudre de Thor, l'anneau d'or et le casque magique de Sigurd. Une légende plutôt compliquée parle du lien contracté envers les géants par les Ases, qui eurent recours à eux pour reconstruire la forteresse d'Asgard, laquelle est en même temps celle qui barre le passage aux « natures élémentaires » (Gylfanning, 42).
(7) Selon la conception nordico-germanique originelle, outre les héros choisis par les Walkyries, seuls les nobles, de par leur origine non humaine, jouissent de l'immortalité divine. Il semble que le rite de l'incinération ne s'appliquait qu'aux héros et aux nobles. De toute façon, dans la tradition nordique, seul ce rite, prescrit par Odin, permettait d'ouvrir les portes du Walhalla, tandis que ceux ensevelis (rite méridional) étaient estimés rester esclaves de la terre.
(8) Cf. W. Golther, op. cit., pp. 211-213.
(9) Cette double influence se trouve exprimée de façon typique dans le poème Heliand. D'un côté, nous est représenté un Christ aux traits guerriers et peu évangéliques ; de l'autre, on y trouve le dépassement de la sombre conception du destin – la Wurd – qui, dans la période germanique plus tardive, avait pris tant d'importance qu'elle était sensée exercer son pouvoir même sur les forces divines. Dans le Heliand, le Christ est à la source de la Wurd. Cette force trouve en lui celui qui la domine, elle devient la « puissance magnifique de Dieu ».
(10) Cf. Gobineau, op. cit., pp. 163-170 ; M. Guizot, Essai sur l'Histoire de France, cit., pp. 86, 201 ; O. Gierke, Rechtsgeschichte der deutschen Genossenschaften, cit., vol. I, pp. 13, 29, 105, 111, etc.
(11) Cf. Gierke, op. cit., pp. 89-105.
(12) Cf. Guizot, op. cit., pp. 261, 262, 305-307, 308-311.
(13) Cf. A. Dempf, op. cit., p. 143 ; F. Kern, Der rex et sacerdos im Bilde (Forschungen und Versuche zur Geschichte des Mittelalters und der Neuzeit, 1913).
(14) On a relevé avec raison (cf. M. Bloch, Les Rois thaumaturges, p. 186) que, bien que puissant et superbe, aucun monarque du Moyen Âge ne se sentit capable de célébrer – comme les anciens rois sacrés – la fonction du rite et du sacrifice, passée au clergé. Si loin que soient allés les Hohenstaufen dans la revendication du caractère surnaturel de l'Empire, ils ne surent pas recouvrer pour son représentant la fonction primordiale du rex sacrorum, alors même que le chef de l'Église avait fait sien le titre de pontifex maximus propre aux empereurs romains. Dans la doctrine gibeline d'Hugues de Fleury, la primauté, fût-elle sacrale, de l'Empire, est limitée à l'ordo, donc à l'organisation extérieure de la Chrétienté, et exclue de la dignitas, qui ne revient qu'à l'Église.
(15) Cf. E. Kantorowicz, L'Empereur Frédéric II, p. 517-518, où il est question du « sang impérial » par référence aux Hohenstaufen : « Une vertu particulière résidait, selon lui [l'empereur Frédéric], dans cette race, car, à ceux qui en étaient issus, il était donné de “connaître les mystères du royaume de Dieu alors que les autres pouvaient seulement les contempler sous la forme de symboles” (...). C'est la maison divine des Césars romains qui réapparaît avec les Hohenstaufen, la “maison céleste des Divi Augusti, dont les étoiles brillent à jamais”, une race qui descend d'Enée, père du peuple romain, et, de là, conduit par-delà César, à Frédéric et à ses rejetons en descendance directe. Tous les membres de cette race impériale sont appelés divi : non seulement les prédécesseurs défunts, mais aussi les vivants et, d'une manière générale, tous les membres de la dynastie impériale des Hohenstaufen (...). À l'époque de Barberousse, c'était la fonction impériale qui avait pris un caractère divin ; désormais c'était non seulement la personne du seul Frédéric, mais la dynastie Hohenstaufen et le sang Hohenstaufen eux-mêmes qui devenaient peu à peu césariens et divins. Encore un demi-siècle de domination Hohenstaufen et avec l'apparition de Frédéric III, empereur romain promis par les Sybilles et si ardemment désiré, l’Occident aurait vu de nouveau le “Dieu Auguste” en personne faisant son entrée par les portes de Rome, et il aurait brûlé de l'encens et sacrifié à sa statue sur les autels. C'est dans les Hohenstaufen que, pour la dernière fois, l'Occident avait pu contempler une dynastie de dieux ».
(16) Cf. RN Coudenhove-Kalergi, Held oder Heiliger, 1927, p. 68-69.
(17) Cf. Evola, Le mystère du Graal et l'idée impériale gibeline, 1937 [Éd. Traditionnelles, 1967]. Si les « rois du Graal » peuvent être considérés comme le symbole central de la tradition secrète gibeline, la généalogie symbolique fournie par Wolfram von Eschenbach fait apparaître la relation de cette tradition avec l'idée du “Roi du Monde” et avec l'aspect antiguelfe des Croisades. Cette généalogie rattache les rois du Graal au « Prêtre Jean » (qui est précisément l'une des représentations médiévales du “Roi du Monde”) et au Chevalier du Cygne, lequel à son tour fut mis en relation symbolique, on va le voir, avec plusieurs chefs des croisades, dont Godefroi de Bouillon.
(18) Cf. A. Graf, Roma nella memoria e nelle immaginazioni del Medioevo, vol. II, pp. 500-503.
(19) Cf. E. Gebhart, L'Italia mistica, (tr. it.) 1934, p. 117.
(20) Ibid., p. 115.
(21) Cf. Eugène Aroux, Les Mystères de la chevalerie, 1858, p. 93.
(22) Cf. La Chanson du Chevalier au Cygne et Godefroid de Bouillon (XIIe s.), Célestin Hippeau (éd. sc.), 2 vol. [vol. 1 — vol. 2], 1874-1877. Dans le Chevalier du Cygne, dont la patrie est la demeure céleste et qui se soustrait à l'amour d'Elise, on retrouve le thème antigynécocratique propre aux cycles héroïques (cf. les mythes d'Héraclès, Énée, Gilgamesh, Rostam, etc.).
Nota bene : On pourra compléter cette lecture par ces autres courts extraits.
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