Qui connaît la French-American Foundation ou l'Institut Aspen ? C'est pourtant là qu'une bonne partie de l'élite française vient se soumettre de bonne grâce à la férule de l'Oncle Sam.
Il a toujours existé un « parti américain » en France. De droite comme de gauche, même s'il s'incarne plus ouvertement aujourd'hui chez Les Républicains. Cette dénomination, qui à elle seule trahit la proximité états-unienne, a été voulue et imposée par un Sarkozy qui, lors de son quinquennat, a liquidé les derniers éléments positifs de l'héritage gaulliste (notamment avec le retour dans le commandement intégré de l’Otan). Ce n'est pas du tout un hasard si celui qui était alors candidat annonçait, le 12 septembre 2006, devant l'aréopage de la French-American Foundation à New York, vouloir « rebâtir la relation transatlantique ». Cela devait coûter, entre autres, la déstabilisation complète du Proche-Orient et du Maghreb dans le cadre des pseudo « révolutions de jasmin », l'effondrement de nos relations avec la Russie, sans oublier une guerre personnelle contre la Libye dictée, depuis le perron de l’Élysée, par Bernard-Henri Lévy-Botul. La suite était inscrite : établissement, sur instigation des services américains, d'un califat à cheval sur la Syrie et l'Irak, multiplication des actes terroristes en France et déferlante migratoire dont on n'a encore rien vu.
Mais on retrouve également ce tropisme en France au Modem, au parti socialiste, chez les supposés écologistes et même chez les trotskystes, en particulier lambertistes, qui furent sans doute les plus efficaces relais américains de l'antisoviétisme en Europe, y compris au-delà du Rideau de fer (comme en Pologne avec Solidarnosc). Imposer partout et en tout lieu le modèle de la démocratie libérale anglo-saxonne !
Un projet d'autant plus facile à mettre en œuvre aujourd'hui avec un président américain métis, beaucoup plus « acceptable » en particulier à gauche, Barack Obama, aussitôt propulsé Prix Nobel de la paix. On se souviendra de la boutade de Fidel Castro, lors d'une conférence de presse en 1973, à propos d'éventuelles négociations de reconnaissance diplomatique avec les États-Unis : « Les Américains viendront dialoguer avec nous le jour où leur président sera noir et le pape sud-américain. » Nous y sommes, mais Guantanamo est toujours ouvert et les exécutions par drones se sont multipliées. Mais les hommes politiques ne sont que la partie émergée de l'iceberg. Sa face cachée, celle avec laquelle le citoyen lambda n'est jamais en contact, c'est une multitude de revues, d'agents d'influence, de think tanks, dont la French-American Foundation (FAF) et l'Institut Aspen constituent de parfaits exemples.
[Young Leaders, l'enfance des chefs]
Qualifiée de « petit club de l'élite transatlantique » (Le Figaro, 10 octobre 2014), la FAF est l'une des fondations américaines les plus puissantes présentes en France. D'une rare discrétion, elle n'a pas vraiment attiré l'attention des chercheurs, malgré son influence majeure. Et il aura fallu attendre juin 2015 pour qu'un premier long article lui soit consacré dans la revue Charles, « Young Leaders, l'enfance des chefs ». Il y avait déjà eu un précurseur, Pierre Hillard qui signait, en 2007, La Marche irrésistible du Nouvel Ordre mondial (F.-X. de Guibert). L'ouvrage fut boycotté et diffusé presque exclusivement dans le milieu marqué au fer rouge des supposés « complotistes » alors même que l'enquête ne s'appuyait que sur des éléments factuels. L'auteur, qui retraçait la genèse de la FAF, écrivait : « La clef du système d'influence de la French-American Foundation est sa capacité à recruter des personnes appelées à occuper de hautes fonctions. Sa grande force est d'accueillir en son sein les représentants politiques issus de courants qui, officiellement, s'opposent - des socialistes à l'UMP en passant par le gaulliste Nicolas Dupont-Aignan [qui a demandé depuis à être rayé des listes des Young Leaders (NDA)]. »
À l'origine, la FAF doit son existence à l'action d'Américains appartenant au Council on Foreign Relations (CFR), le think tank américain où s'élabore la politique étrangère américaine, quel que soit le président des États-Unis. Le CFR, qui entretient des liens étroits avec l'Otan, l'OCDE ou les Nations Unies et ses satellites, a créé une discrète section de conseillers européens, jamais citée, tous évidemment favorables aux thèses américaines. Faute d'avoir pu empêcher la création de la Communauté économique européenne, l'objectif du CFR a toujours été d'empêcher la création d'une Europe comme puissance impériale et pivot de l'axe du monde, au profit d'un conglomérat d'intérêts économiques et financiers inscrits dans le cadre d'une économie libérale ou sociale-libérale.
Parmi la vingtaine de membres français, on trouve Bruno Le Maire, Bernard Kouchner, par ailleurs élément majeur de l'Institut Aspen France, l'ancien sherpa de Jacques Chirac et de Sarkozy, ex-ambassadeur de France aux États-Unis, Jean-David Levitte, Laurence Parisot ou encore Jean-Claude Trichet (tous membres du Siècle).
Relayant l'action d'organisations très élitistes comme le Bilderberg Group ou la Commission trilatérale, la FAF, lancée en France, en 1982, par des personnalités éminentes du monde de la politique, de l'industrie et des affaires, a joué un rôle majeur pour le retour de la France dans le commandement intégré de l'Otan, convainquant des vertus mondialistes et libérales anglo-saxonnes nombre de futurs ou nouveaux leaders (de droite comme de gauche), les French Young Leaders, invités tous frais payés pour des sessions aux États-Unis.
[Des néo-cons américains à passeport français]
La French-American Foundation tire son origine du système très particulier de sélection des élites s'occupant de politique étrangère aux États-Unis. Le lancement a été effectué en mai 1976, lors d'un dîner à l'ambassade de France à Washington auquel participait le président Giscard d'Estaing, le président américain Gerald Ford et l'inévitable Henry Kissinger, véritable cerveau initial de la Commission trilatérale. Cette politique va se poursuivre puisque, pour ne donner qu'un exemple, aussi bien Alain Juppé (1981), pour le versant français, qu'Hillary Clinton (1983), pour le versant américain, sont des « alumni » (anciens élèves) de la FAF. L'un est candidat aux primaires des Républicains en France, l'autre aux primaires du parti démocrate.
À suivre
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