dimanche 20 octobre 2019

LUMIÈRE SUR LE VÉRITABLE LOUIS XI

Un roi cynique et tortueux, toujours couvert de son drôle de chapeau, qui inspectait les cages de fer où étaient enfermés ses adversaires. Il est resté quelque chose de ce cliché du XIXe siècle, empêchant Louis XI d’être un personnage populaire. Au début des années 1970, Paul Murray Kendall, un universitaire américain, lui consacra une biographie (chez Fayard) qui marqua une génération parce que, traduite en français, elle fut, avec 200 000 exemplaires vendus, un des plus étonnants best-sellers de cette période faste pour l’édition d’histoire. Voir un professeur de l’Ohio qualifier Louis XI d’« homme aux capacités exceptionnelles » rompait avec la légende noire installée dans la mémoire nationale. D’autres historiens français ont ensuite relevé le gant, parmi lesquels Jacques Heers (Perrin, 1999), Jean Favier (Fayard, 2001) ou Amable Sablon du Corail (Belin, 2011). Lydwine Scordia, agrégée et docteur en histoire, maître de conférences en histoire médiévale à l’université de Rouen, brosse à son tour un portrait du monarque. Pour ce faire, elle examine d’abord comment ses pairs, du XVe siècle à nos jours, ont perçu Louis XI. Passionnante synthèse historiographique qui reconstitue, époque après époque, les mythes accumulés autour du souverain, alternativement vu comme gallican, absolutiste ou bourgeois. Afin d’approcher la réalité, l’auteur choisit au contraire de « redonner la parole au roi » tout en exposant les derniers résultats de la recherche sur un règne qui a joué un rôle considérable dans l’histoire de France. Affrontement avec les féodaux lors de la guerre du Bien public, rivalité avec la maison de Bourgogne et intégration de son héritage après la mort de Charles le Téméraire, création de nouveaux parlements, unification administrative et fiscale du royaume : ces pages éclairent l’oeuvre immense de Louis XI. Lydwine Scordia insiste sur la religiosité du roi qui, à l’instar de son prédécesseur Saint-Louis, assistait à la messe tous les jours, se confessait chaque semaine, faisait l’aumône et lavait les pieds des pauvres. En conclusion, l’historienne établit une autre comparaison, plus originale : Louis XIV ressemblera à Louis XI, explique-t-elle, parce que, comme lui, il était indifférent à l’opinion d’autrui.
Jean Sévillia
Louis XI, de Lydwine Scordia, Ellipses, 528 p., 26 €.
Sources :  (Edition du  vendredi 15 janvier 2016)

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