dimanche 23 octobre 2016

Quelques idées fausses sur notre histoire

Chers amis, je dois vous avouer quelque chose ! C’est un lourd fardeau que je partage avec les historiens et tous ceux qui sont passionnés d’histoire. Des erreurs, parfois gravissimes, parfois légères, sur les faits, les mots et la vie entière d’hommes… Voici regroupées les plus fameuses erreurs et idées fausses !
La royauté est héréditaire en France
Eh bien non ! Elle est successive, et la nuance est de taille ! Car une royauté héréditaire suppose donc qu’il y ait un héritier, ce qui suppose encore que le roi possède la Couronne et qu’il en fasse ce qu’il veut...  Il peut donc la transmettre à qui il veut puisque c’est son bien propre.
La royauté successive désigne quant à elle le régime où le roi a un successeur non-choisi, puisque c’est la Loi Fondamentale qui dit qui peut être roi. Le roi ne peut donc disposer de la Couronne comme il l’entend et la transmettre à son troisième fils parce qu’il le préfère ou à sa fille parce qu’elle est plus âgée. C’est cela qui a relancé le conflit entre catholiques et protestants lorsque le successeur présomptif était Henri de Navarre, c’est encore cette règle qui a fait que le testament de Louis XIV a été cassé car il acceptait que ses fils illégitimes deviennent éligibles au trône en cas d’extinction de sa ligne légitime. 
Les femmes sont exclues de certaines fonctions au Moyen-Age
Une femme veuve reprend l’activité du mari et est le chef de famille, et aucune fonction ne leur est interdite. S’il faut résumer, en théorie la femme est la parfaite égale de l’homme et en pratique il faut souvent être veuve pour exercer en toute souveraineté un travail… Mais dans la paysannerie, c’est-à-dire dans presque tout le peuple, la femme est investie dans les champs tout comme l’homme. Ce sont même dans les couches les plus hautes du Tiers-Etat (paysans riches, bourgeois, gros commerçants) et l’ensemble de la noblesse que la femme est le plus soumis à la pression pour épouser un homme d’un situation égale ou meilleure !
Enfin, les abbayes féminines sont dirigées par des femmes dont l’influence est immense et elles pèsent dans les grandes décisions de leurs ordres. 
Les serviteurs sont toujours de basse condition
Sans doute l’erreur est apparue au XIXe siècle où les régions pauvres se vidèrent en partie pour aller remplir Paris de nourrices et de valets… Le domestique type est d’abord masculin, assez jeune et issu de petite noblesse.
En effet, les fils de seigneurs de 12 à 15 ans sont envoyés pour apprendre autant la vie que les codes tacites de leur monde. Le rôle de domestique devient très féminin bien plus tard, dans la deuxième partie du XIXsiècle. Le poste préféré est celui d’échanson ! La tradition d’envoyer ses garçons en apprentissage chez son suzerain est telle qu’elle perdura jusqu’à la révolution : les cadets de Gascogne en est l’évolution !
Jeanne d’Arc est une bergère de Lorraine qui a entendu des voix qui lui disaient de chasser les Anglais
Tout dans cette phrase est faux ! Le récit national des Michelet et Lavisse en a tant dit que cette phrase résume à elle seule les idées reçues sur l’histoire !
En effet, Jeanne d’Arc est nommée Jehanne Romée, le nom de sa mère, ce qui est la coutume de sa province.
Cette jeune fille n’a jamais été bergère, mais ce métier collait si bien à une envoyée christique ! Fille de gros paysans, son père a d’ailleurs été l’équivalent de maire de Domrémy. Jehanne est donc la fille de l’un des notables, certes non noble, de son village.
Qui a dit que Jeanne d’Arc est lorraine ? Toujours les historiens du début de la IIIe république qui a perdu la Lorraine contre la Prusse… Car Jeanne est du Barrois, ce qui implique deux faits importants :  c’est l’une des rares provinces de l’Est encore fidèle à Charles VII, et c’est surtout une possession du fils de Yolande d’Aragon, laquelle a sans doute donné l’ordre de laisser venir Jeanne jusqu’à Chinon.
Enfin, ses fameuses voix… n’ont jamais existé ! Jeanne d’Arc a toujours dit voir ses conseils en les personnes de saint Michel, l’archange qui alors le patron de la France, de sainte Catherine d’Alexandrie et sainte Marguerite d’Antioche. L’archange et ces deux vierges orientales ont conduit Jeanne d’Arc non pas à bouter l’anglais mais à faire sacrer Charles VII. La mission divine ne lui a jamais dit qu’elle verrait le royaume délivré, et c’est sans doute dans le deuil de cette belle nouvelle qu’est morte Jeanne.
Par contre, ce qui est vrai c’est que cette vierge est née à Domrémy, le village qui porte le nom de saint Remi qui baptisa Clovis à Reims… Pour celle qui aida le roi à se faire sacrer et à remporter la bataille symbolique, c’est un clin d’œil de la Providence comme Elle seule sait en faire !
François Ier est le Père les Lettres et le grand roi de la Renaissance
Si d’un point de vue artistique, il y a eu renaissance et découverte de l’Antiquité, cela est moins vrai du point de vue politique. Personnellement, je pense que la Renaissance est divisée entre la fin de la féodalité et l’arrivée lente de la monarchie absolue… C’est pour moi loin d’être une période unie et lisse !
Revenons à François Ier dont l’historiographie a fait le héros de Marignan et le mécène génial… D’un point de vue humain, ce roi est insupportable avec presque tout le monde car élevé dans la volonté d’accéder au trône alors qu’il est issu d’une branche cadette et donc n’est pas appelé à régner. Avec les femmes, il s’illustre par son inconduite et son manque total de morale, ne cherchant même pas à ménager les apparences (au moins est-il honnête).
Mais le vainqueur de Marignan est aussi le perdant de Pavie. Prisonnier de Charles Quint, il s’enfuit et donne en échange ses fils… L’on appréciera le père !
Pour ce qui est du mécène, c’est surtout sa mère, Louise de Savoie, qui aime les arts et fait tout pour que son fils fasse venir un certain Leonardo Da Vinci…
L’historiographie a mis en avant ce roi, en oubliant Louis XII qui l’a précédé et Henri II qui lui a succédé, et c’est bien dommage car ces rois oubliés ont fait de belles choses. François Ier est une sorte de balourd pour rester poli, mais pour être honnête, il a tout de même régné avec un éclat assez nouveau et en imposait par sa prestance naturelle.
Louis XIV a dit « l’Etat, c’est moi ! »
Sans doute la phrase historique la plus connue ! Fausse puis que le roi mourant a prononcé des mots qui revenaient à cela : « Je m’en vais, mais l’Etat demeure. » C’est-à-dire l’exact contraire de ce qui lui est attribué !
La monarchie absolue ne m’est pas agréable et je préfère la royauté traditionnelle d’un Charles V mais l’idée que le roi est l’Etat est une idée reçue car le roi est le garant la souveraineté, il est dans sa personne la justice, la gloire, l’autorité, la force, le soutien aux faible, la bienveillance, etc. N’oublions pas que nous sommes dans la religion de l’Incarnation, et que le roi incarne aussi l’Etat mais il n’est pas l’Etat ! Preuve en est qu’il doit obéir au Décalogue et se soumettre à Dieu et ne peut pas faire ce qu’il veut de son pouvoir : s’en décharger ou le transmettre à qui bon lui semble.
L’Etat de droit
« L’état de droit » est un pléonasme, tout comme « descendre en bas » ou « au jour d’aujourd’hui »
En effet, le propre de l’Etat est de faire des lois et du droit, qu’il soit coutumier ou pas, écrit ou oral. En quelque sorte, l’Etat c’est le droit ! Ainsi, au risque de choquer l’Etat Islamique est un Etat de droit, et même un Etat avec énormément de droit puisque tout est réglé : de la musique qu’il faut écouter à la forme des vêtements.
La mode qui consiste à se dire le défenseur de l’Etat de droit face aux menaces est donc est une vaste farce ! Si l’on veut dire par là que l’on veut défendre notre mode de vie, autant le dire : je défends ce que j’estime être supérieur comme valeurs et culture !
Il y a tant à dire encore :  Clémenceau et Foch, qui sont de véritables arnaques historiques, l’oubli du Débarquement de Provence, ou encore l’année O de notre ère (hélas, certains en parlent !)
Fasse qu’un jour, cela ne soit plus la peine d’écrire sur les idées reçues en histoire ! 
Charles D’Antioche

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