Claude Lévi-Strauss, grand ethnologue, est une figure intellectuelle majeure du XXe siècle. Il est particulièrement intéressant de constater que celui qui fut marxiste durant son adolescence a très vite développé une vision de monde différente de ses contemporains qui s'échinaient à nier l'importance du fait identitaire.
Il a en effet affirmé de manière très claire que la préservation de son identité ne pouvait être condamné moralement et il a, tout aussi clairement, considéré mai 68 comme un symbole de la décadence occidentale.
De la même manière, il s'est montré très critique à l'égard de la Révolution française :
Claude Lévi-Strauss : [La pensée de Sartre] s'enracine dans une idéologie qui est celle de son temps, de son milieu intellectuel. La situer elle aussi dans un contexte mythologique qui, en l’occurrence, serait celui de la Révolution française (car, dans notre société, la Révolution de 89 joue véritablement le rôle de mythe fondateur) relativise la pensée de Sartre au lieu de l'universaliser.
Didier Éribon : L'un des problèmes que posait Sartre était en effet celui de la Révolution française et de son rôle fondateur dans notre histoire. Vous reconnaissez tout de même que ce fut un événement important ?
C.L.-S. : Le mot est faible. La Révolution a mis en circulation des idées et des valeurs qui ont fasciné l'Europe puis le monde, et qui procurèrent à la France, pendant plus d'un siècle, un prestige et un rayonnement exceptionnels. On peut toutefois se demander si les catastrophes qui se sont abattues sur l'Occident n'ont pas aussi là leur origine.
D.E. : En quel sens ?
C.L.-S. : Parce qu'on a mis dans la tête des gens que la société relevait de la pensée abstraite alors qu'elle est faite d'habitudes, d'usages, et qu'en broyant ceux-ci sous les meules de la raison, on pulvérise des genres de vie fondés sur une longue tradition, on réduit les individus à l'état d'atomes interchangeables et anonymes. La liberté véritable ne peut avoir qu'un contenu concret : elle est faite d'équilibres entre des petites appartenances, des menues solidarités : ce contre quoi les idées théoriques qu'on proclame rationnelles s'acharnent ; quand elles sont parvenues à leurs fins, il ne leur reste plus qu'à s'entre-détruire. Nous observons aujourd'hui le résultat.
Didier Éribon, De Près et de loin, Odile Jacob, 1998 ; rééd. 2001, pages 165-166.
Il a en effet affirmé de manière très claire que la préservation de son identité ne pouvait être condamné moralement et il a, tout aussi clairement, considéré mai 68 comme un symbole de la décadence occidentale.
De la même manière, il s'est montré très critique à l'égard de la Révolution française :
Claude Lévi-Strauss : [La pensée de Sartre] s'enracine dans une idéologie qui est celle de son temps, de son milieu intellectuel. La situer elle aussi dans un contexte mythologique qui, en l’occurrence, serait celui de la Révolution française (car, dans notre société, la Révolution de 89 joue véritablement le rôle de mythe fondateur) relativise la pensée de Sartre au lieu de l'universaliser.
Didier Éribon : L'un des problèmes que posait Sartre était en effet celui de la Révolution française et de son rôle fondateur dans notre histoire. Vous reconnaissez tout de même que ce fut un événement important ?
C.L.-S. : Le mot est faible. La Révolution a mis en circulation des idées et des valeurs qui ont fasciné l'Europe puis le monde, et qui procurèrent à la France, pendant plus d'un siècle, un prestige et un rayonnement exceptionnels. On peut toutefois se demander si les catastrophes qui se sont abattues sur l'Occident n'ont pas aussi là leur origine.
D.E. : En quel sens ?
C.L.-S. : Parce qu'on a mis dans la tête des gens que la société relevait de la pensée abstraite alors qu'elle est faite d'habitudes, d'usages, et qu'en broyant ceux-ci sous les meules de la raison, on pulvérise des genres de vie fondés sur une longue tradition, on réduit les individus à l'état d'atomes interchangeables et anonymes. La liberté véritable ne peut avoir qu'un contenu concret : elle est faite d'équilibres entre des petites appartenances, des menues solidarités : ce contre quoi les idées théoriques qu'on proclame rationnelles s'acharnent ; quand elles sont parvenues à leurs fins, il ne leur reste plus qu'à s'entre-détruire. Nous observons aujourd'hui le résultat.
Didier Éribon, De Près et de loin, Odile Jacob, 1998 ; rééd. 2001, pages 165-166.
1 commentaire:
Elisé Reclus,l'homme et la terre,la Vérité,sans intérêts,semble y avoir place..«manducation,levirat»,mots utilisés de manière tout a fait banale par Reclus dans cet ouvrage..ouf,il écrivit d'innombrables autres livres,plus simples!
UnLorrain.
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