L’Acte d’Établissement (Act of Settlement) interdit depuis 1701 aux catholiques de pouvoir accéder au trône d’Angleterre. Mis en place après la Glorieuse révolution et s’inscrivant dans la suite de la guerre des Deux-Roses, elle avait surtout été votée pour empêcher la dynastie des Stuarts de monter sur le trône. A travers deux chapitres, je vous invite à découvrir l’histoire du légitimisme écossais de 1603 à nos jours.
Edimbourg, le 24 mars 1603. Longtemps préparé à cet événement le roi Jacques VI d’Ecosse attend qu’on lui annonce le décès de la Reine Elizabeth Ière Tudor. Sans enfants, c’est à cet héritier de la rose blanche que doit revenir le trône d’Angleterre. L’histoire s’est voulue factieuse avec les écossais et les anglais, opposés tant sur le plan religieux, politique que dynastique. Ce prolongement de la guerre des Deux-Roses s’est terminé dans le sang. La mère du roi, Marie d’Ecosse, également brièvement Reine de France (1559-1560) a été exécutée sur ordre de sa rivale Marie Tudor. Ses nombreux complots contre la couronne des Tudors auront eu raison de cette ravissante femme aux nombreux amants et qui n’avait que 44 ans au moment du « décollement » de sa tête par le bourreau. Jacques VI sécurisa ses intérêts en jurant fidélité aux Tudors, attendant patiemment son heure. Son règne, qui inaugurait celui des Stuart en Angleterre, sera marqué par une opposition entre le parlement et la monarchie que quelques conspirations (dont celle des Poudres de Guy Fawkes, visant à faire sauter le parlement en 1606) viendront perturber. Se gardant bien d’imposer le catholicisme comme religion d’état, il créera en hommage à la résistance catholique aux Tudors le comté de Northumberland mais échouera à réunir les deux couronnes sous un seul étendard.
Londres, le 30 janvier 1649. Le bourreau vient de trancher la tête de Charles Ier Stuart, roi d'Angleterre, d'Écosse et d'Irlande. L’Europe des rois frémit à cette nouvelle. Depuis qu’il était sur le trône, Charles Ier considérait qu’il était le seul gouverneur suprême de l'Église d'Angleterre et se réclamait d’un absolutisme intégral. En lui léguant le principe de monarchie de droit divin en 1625, son père avait semé les germes de la guerre civile. Les rapports entre le monarque et le parlement vont s’envenimer rapidement. Ce dernier invoque la « Magna carta de 1215 » et le «droit du peuple à résister à la tyrannie », le roi celui de ses « sujets tenus à l'obéissance, et toute rébellion, toute contestation même, est sacrilège, puisque contraire à l'ordre établi par Dieu ». Durant 9 ans, Charles Ier décide de gouverner sans convoquer le parlement qui finalement décide de prendre des mesures quasi révolutionnaires : interdiction pour le roi de rester plus de trois ans sans convoquer un Parlement, annulation de tous les emprunts et taxes illégaux décrétés par le roi depuis 1631, interdiction de dissoudre le Parlement sans l'autorisation des députés. . Le roi est prisonnier de son parlement. C’est l’affrontement et la guerre éclate menée par le parlementaire Olivier Cromwell et ses « Têtes rondes » face aux « Cavaliers » du Roi. Elle va durer entre 1642 et 1649 et tourner à l’avantage du parlement. La monarchie des Stuart tombera au profit d’une république.
Versailles, le 2 janvier 1689. Avec une petite cour, le Roi Jacques II Stuart débarque au palais du Roi-Soleil, son cousin Louis XIV, venu personnellement l’accueillir. Une fois de plus les Stuart ont repris le chemin de l’exil. La République n’avait pourtant pas survécu à son fondateur, le Lord-Protecteur Cromwell, décédé en 1658. Un an après, le général Monk favorisait la restauration de Charles II, le fils du souverain décapité. Non sans des accords au préalable négociés avec le parlement. L’Angleterre fait la guerre à l’Espagne (ce qui permettra à la France de récupérer Dunkerque), Charles II collectionne les aventures féminines et marie sa nièce Marie au prince Guillaume d’Orange. A sa mort en 1685 en pleine cinquantaine, son frère Jacques II lui succède. Contesté par le fils illégitime de Charles II, le duc de Monmouth, son règne commence par une brève guerre civile. Ce catholique convaincu va heurter la sensibilité protestante de ses sujets. En 1687, il fait publier la déclaration d’indulgence qui abroge les lois discriminant les catholiques et les dissidents protestants. L’église et le parlement manifestent leur mécontentement. Un an plus tard (septembre), les nobles révoltés invitent Guillaume d’Orange à venir occuper le trône. Ce champion du protestantisme débarque en Angleterre. C’est la « Glorieuse révolution » qui renversera un Stuart au profit d’un autre. Une guerre des religions déguisée qui trouve son apogée dans la proclamation de l’Acte d’établissement qui interdit en 1701 aux catholiques de monter sur le trône. Fille de Jacques II, la Reine Anne Stuart (de 1702 à 1714) fut la dernière des Stuart à régner sur l’Angleterre devenue Royaume de Grande-Bretagne et d’Irlande en 1704. Jacques II était mort en 1701 à Saint-Germain-en-Laye. Sa tombe subira les affres de la révolution française.
Plaine de Culloden Moors, le 16 avril 1746. Sur cette étendue verte-rouge printanière de l’Ecosse septentrionale, entourée de montagnes, les tambours, bag pipes et les cornemuses résonnent. Les drapeaux de la maison royale des Stuarts et de l’Ecosse claquent dans le vent. Chaque clan présent porte son tartan. Parmi ces hommes en armes, l’héritier de la dynastie des Stuart, le prince Charles-Edouard surnommé affectueusement par ses partisans, Prince Bonnie Charlie. Il a débarqué il y’a un an et compte bien reconquérir le trône au nom de son père, jacques III (1688-1766) dit le « vieux prétendant » et fils de Jacques II. Charles –Edouard à 26 ans, il est rempli de fougue. Dans ses veines, coule le double sang anglo-ecossais et polonais de ses parents. Arrière-petit-fils du roi Jean III Sobieski, le prince rêve d’une gloire similaire. Le choc entre les partisans des illégitimes Hanovres et ceux des Stuarts sera violent. Sous des trombes d’eau, les 5000 partisans catholiques du prince essentiellement composé d’écossais, de quelques régiments britanniques séditieux et de volontaires français ou irlandais vont se heurter aux 10000 anglais protestants du duc Guillaume-Auguste de Cumberland, également rejoints par des unité écossaises, irlandaises et du duché de Hesse. L’armée du prince est loin d’être aussi de métier que celle de son adversaire plus aguerrie aux combats. Les esprits s’échauffent, le écossais vont au-devant des hanovriens, les provoquent en soulevant leurs kilts à diverses reprises puis les chargent à l’épée, à la hache ou au fusil. Si la charge est belle, elle est aussi désordonnée. Tout en criant « God save the King », les highlanders ne répondaient pas pour autant aux ordres de l’état-major. Un millier de stuartistes tomberont dans la lande, fauchés par la mitraille ou s’empalent sur les baïonnettes des « manteaux rouges ». La cavalerie donne enfin l’assaut forçant la retraite des partisans de la monarchie Stuart. La répression sera sauvage. Le duc de Cumberland ordonne que soient achevés sans distinctions les blessés du camp ennemi, les prisonniers et même des spectateurs venus regarder la bataille. Une grange sera même brulée entièrement avec ses 32 occupants réfugiés à l’intérieur. L’ordre de déportation des écossais est donné et certains vendus comme esclave en Amérique du Nord. Quant au prince, c’est la fuite vers la France qui devra l’expulser au nom du traité d’Aix-La-Chapelle qui mettait fin à la guerre entre les deux pays. Pensant que la solution était la conversation au protestantisme pour retrouver son trône, c’est en 1772 qu’il revient vers la foi catholique grâce à son mariage désastreux avec Louise de Stolberg-Gedern et qui restera sans enfant. Il meurt à Rome en 1788 d’une attaque cardiaque, ayant passé le reste de sa vie à jouir des plaisirs humains de la vie
Rome, le 31 janvier 1788. Les cloches de Saint Pierre de Rome ont retenti dans l’état du Saint-Siège afin de rendre hommage à Bonnie Charles. La succession passe alors entre les mains de son frère titré duc d’York, le cardinal Henri (IX) Stuart (1761-1807). La révolution française qui éclate lui fait perdre l’intégralité de ses revenus fonciers auquel sa charge lui confère et ironie de l’histoire, il devra sa pension annuelle grâce à l’intervention du Roi Georges III de Hanovre. Pour ces derniers, on y voyait un acte de charité, pour les stuartistes la reconnaissance de la dette que devaient les usurpateurs à la légitimité royale. Prétendant effacé, on ne lui connaît que quelques relations homosexuelles d’après des témoignages d’époque et sa mort marquera la fin de la descendance directe d’une dynastie qui avait régné sur l’Ecosse depuis 1371.
Frederic de Natal
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