C’est le 26 octobre 1940 que François Duprat naît à Ajaccio dans une famille que l’on pourrait plutôt classer « à gauche ».
Dans les années 50, il suit une scolarité normale, d’abord à Bayonne puis à Toulouse. C’est à cette époque qu’il commence à s’intéresser à la politique. Dans un premier temps, peut-être par atavisme familial, il fricote un moment avec les trotskistes. La raison finissant toujours par l’emporter, en 1958, il commence à fréquenter les « milieux nationalistes ». En 1959, il intègre le Lycée Louis-le-Grand à Paris. Sur les bancs de celui-ci, il y côtoie entre autre Régis Debray ainsi que le fils du dirigeant communiste Maurice Thorez. Mais pour lui l’essentiel est ailleurs. En dehors de ses cours il fréquente assidument le mouvement Jeune Nation, alors animé par les frères Sidos et par Dominique Venner, qui mène campagne tambour battant pour la défense de l’Algérie française. Devenu étudiant, il continue à partager son temps entre la politique et les amphis de la Faculté. Récompense de ses brillantes études, il obtient un diplôme supérieur en Histoire en 1963.
Après la fin de la guerre d’Algérie et l’échec de l’OAS, en 1962, le mouvement nationaliste était à la recherche d’une nouvelle orientation. C’est à ce moment-là que Dominique Venner publie son fameux opuscule intitulé « Pour une critique positive ». Duprat milite alors à la Fédération des étudiants nationaliste qui donnera naissance à la revue Europe Action. Très vite, à la suite de discordes avec les autres responsables de la FEN, proches d’Europe Action, Duprat sera exclu de ce mouvement.
Après une année passée au Congo comme coopérant, année au cours de laquelle il fera quelques déplacements au Nigéria alors confronté à « la sécession biafraise », il reviendra à Paris en 1965 où il rejoindra le tout nouveau Mouvement Occident qui rassemble les militants de la FEN qui ne se reconnaissaient plus dans la ligne proposée par Europe Action.
Dès le milieu des années 60, Duprat commence à collaborer à la revue de Maurice Bardèche, Défense de l’Occident. En 1967, au moment de « la Guerre des 6 jours », conflit opposant Israël à ses voisins arabes, il rédigea un numéro de la revue condamnant « l’agression sioniste ». Position qui tranchait singulièrement avec celles communément adoptées par l’extrême droite d’alors.
Durant les événements de mai 1968 il s’intéresse de très près aux mouvements gauchistes qui tiennent le haut du pavé. Il fera d’ailleurs sensation en publiant quelques mois plus tard Les journées de mai 68, les dessous d’une révolution (préfacé par Maurice Bardèche), le premier ouvrage consacré à ces événements qui ont secoué un instant le régime gaulliste.
Décembre 1969, c’est la création du mouvement Ordre nouveau. Très vite, François Duprat prendra des responsabilités au sein de cette jeune organisation. Il y retrouve un grand nombre d’anciens du Mouvement Occident et de la FEN. Ordre nouveau deviendra en quelques mois la principale force de la Droite nationale. Mais son image activiste, liée à sa lutte salutaire contre les gauchistes, lui empêche de s’affirmer comme un véritable parti politique. D’où la création, à son initiative en juin 1972, du Front national destiné à rassembler les chapelles éparpillées de la famille droitière en vue des élections législatives de mars 1973. En novembre 1972, Jean-Marie Le Pen deviendra Président du FN naissant. Mais, pour Duprat, depuis quelques mois les relations n’étaient plus au beau fixe avec les autres responsables d’Ordre nouveau et, au lendemain des élections, il doit s’éloigner du mouvement.
Ordre nouveau sera dissout par le gouvernement le 28 juin 1973 après avoir tenu au Palais de la Mutualité à Paris le premier meeting nationaliste contre l’immigration sauvage une semaine auparavant. Meeting qui fut marqué par de graves affrontements dans le Quartier latin entre les gauchistes, qui avaient la prétention de l’empêcher de se dérouler, et les forces de police.
En octobre 1973, les militants de l’ex-Ordre nouveau qui, il faut bien le dire, constituaient l’essentiel de l’armature du FN font scission pour protester contre leur marginalisation par Le Pen au sein de l’appareil du FN. Ils créent les Comités Faire front qui donneront naissance, un an plus tard, au Parti des Forces nouvelles. Mais ça, c’est une autre histoire…
Parallèlement, c’est donc à l’automne 1974 que Duprat et ses amis, qui entre temps avaient créé Les Cahiers européens, font leur retour au FN. La manœuvre était habile puisque celui-ci se retrouvait démuni de la plupart de ses militants. Il y avait, comme on dit, « des places à prendre ». Duprat a su profiter de l’opportunité. Il deviendra l’idéologue du Front.
En réalité, François Duprat à une stratégie bien précise qui ressemble à s’y méprendre à celle préconisée par Ordre nouveau au moment du lancement du Front : constituer un noyau nationaliste révolutionnaire influent et homogène au sein de ce qui devrait être (et qui allait le devenir quelques années plus tard…) « un parti de masse », à savoir le Front national.
Pour réussir son projet, il ne lésine pas sur les moyens. Côté force de frappe, il organise donc une structure militante : ce furent les Groupes nationalistes révolutionnaires (GNR). Certes, ceux-ci resteront très squelettiques mais ils ne demandaient qu’à s’étoffer. Côté presse, outre Les Cahiers européens dont la parution devint vite hebdomadaire, il lança plusieurs bulletins de combat : Salut public et Année zéro. Enfin, et afin d’assurer la formation politique et historique des militants, il crée La Revue d’Histoire du fascisme, outil indispensable qui ne manquera pas, bien plus tard, de faire des émules.
Au milieu des années 70, on commence à observer les premiers symptômes d’un rejet grandissant au sein de la population de l’immigration. Duprat comprend qu’il y a là, pour le Front national, un thème original à développer. Mis à part la campagne d’Ordre nouveau en juin 73 sur le thème « Halte à l’immigration sauvage ! », l’extrême droite se contentait depuis des décennies de slogans anti-communistes et anti-gaullistes. En identifiant le Front à la lutte contre l’immigration, Duprat met d’emblée celui-ci sur une vague porteuse. Certes, il faudra un certain temps, mais le message finira bien par passer. On connaît la suite…
Hélas pour lui, François Duprat ne verra pas les résultats de la tactique qu’il avait imaginée. Le 18 mars 1978, à la veille du second tour des élections législatives, un terrible attentat à la voiture piégée mettra fin à ses jours et blessera très grièvement son épouse qui était à ses côtés. On ne connaît toujours pas, ou on nous les cache, les véritables raisons de ce crime. Toutes les hypothèses possibles ou imaginables ont été avancées par les uns et par les autres, et toutes sont discutables. Certes, Duprat n’avait pas que des amis et, dans sa vie tumultueuse, il a dut croiser les chemins de multiples officines qui n’étaient pas vraiment composées d’enfants de chœur, mais est-ce suffisant pour finir assassiné avec des moyens aussi sophistiqués que ceux qui furent utilisés ?
Pour le moment, la mort de François Duprat demeure un mystère. Un jour peut être…
* Introduction du n°2 des Cahiers d’Histoire du nationalisme consacré à François Duprat
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