jeudi 1 octobre 2015

La religion n’est pas la cause majeure des guerres dans l’histoire – Croyance populaire démasquée

Cette croyance populaire aux fondements aussi nébuleux que tenaces semble, en fait, absolument et scientifiquement fausse voire, n’ayons pas peur des mots,malhonnête. L’athée qui utilise cet argument n’a en réalité aucune base solide pour son assertion.
Bien qu’il soit clair que certaines guerres eurent comme cause première la religion, la vaste majorité d’entre elles sont, factuellement, non-religieuses (1). Dans le livre de référence « Encyclopedia of Wars » de Charles Phillips et Alan Axelrod (voir aussi une autre « Encyclopedia of Wars » pour des chiffres très similaires), l’on peut constater avec étonnement qu’hors des 1763 guerres recensées, seules 123 revêtent un caractère religieux (pour une liste complète de ces 123 guerres, voir ici aux pages 51 à 53). Sans compter que, comme William T. Cavanaugh le démontre dans son ouvrage « Myth of Religious Violence: Secular Ideology and the Roots of Modern Conflict » (à consulter impérativement), il n’est pas toujours évident de qualifier des guerres d’exclusivement religieuses puisque de forts intérêts séculiers (économiques et politiques) s’y entremêlent bien souvent voire les chapeautent. Cependant, sans rentrer dans cette vaste question et si l’on s’en tient à ces chiffres, cela constitue donc moins de 7% de toutes les guerres et moins de 2% de toutes les personnes tuées lors des conflits. En outre, lorsque l’on soustrait des guerres « religieuses » celles commises au nom de l’Islam (66), le pourcentage tombe de moitié à 3.23% (majoritairement « chrétiennes » ; bien que j’estime, comme beaucoup, qu’aucune guerre ne devrait se voir associer cet adjectif… Le Christ commandait en tout premier lieu l’amour du prochain, et ce même de l’ennemi et en faisait la base de la reconnaissance du vrai chrétien).
Renversant n’est-ce pas ? Pour prendre un exemple pratique ayant attrait non pas aux nombres de guerres, mais au nombre de victimes, tandis qu’un à trois millions de personnes furent tués lors des horribles croisades et trois mille sous l’affreuse Inquisition, plus de trente-cinq millions de soldats et civils furent assassinés lors de la guerre hautement séculière, non-religieuse qu’est la Première Guerre mondiale.
De plus, les anciens conquérants, que cela soit les Égyptiens, les Babyloniens, les Perses, les Grecs ou même les Romains sont connus pour avoir généralement bien reçu les croyances de ceux qu’ils conquéraient ; ils ajoutaient même les dieux conquis à leur panthéon. Aucun motif religieux derrière leurs exactions.
Cela ne changera pas avec les guerres modernes : la campagne napoléonienne, la révolution américaine, la révolution française, la guerre civile américaine, la Première Guerre mondiale, la révolution russe, la Deuxième Guerre mondiale ainsi que les conflits en Corée et au Vietnam comptabilisent à elles seules le gros des massacres de l’histoire et étaient purement nationalistes et ethniques, absolument pas religieuses.
Pour clore la réflexion, un certain monstre sanguinaire du nom de Napoléon a apparemment dit que « un bon croquis vaut mieux qu’un long discours », je ne puis donc que vous laisser sur quelques chiffres et noms supplémentaires de « grands » athées pour agrémenter cet article (je ne suis pas l’auteur de ce graphique, aussi non, j’y aurai rajouté Napoléon et d’autres, pas seulement ces dictateurs ; en outre, certains chiffres me semblent légèrement sujets à discussion même si, au fond, ils sont tout de même globalement représentatifs des réalités sous-jacentes) :
« On dirait que l’humanité a oublié les lois de son divin Sauveur, qui prêchait l’amour [et ce, même de l’ennemi] et le pardon des offenses, et qu’elle fait consister son plus grand mérite dans l’art de s’entre-tuer. » – Léon Tolstoï dans son œuvre sublime « Guerre et Paix ».
Note :
(1) Il convient ici de poser deux remarques.
La première concerne la définition du mot « religion » ici utilisée. L’on a défini la religion de façon « classique », « substantive » ou encore « restrictive » (tels sont les qualificatifs attribués à cette approche par la sociologie). La définition suivante pourrait en être donnée : « La religion est un système de croyances et de pratiques relatif à une réalité supra-empirique transcendante qui unit tous ceux qui y adhèrent en vue de former une communauté morale. » (définition donnée par Karel Dobbelaere dans son ouvrage : Secularization: A Multi—Dimensional Concept, Londres, Sage Publications, 1981, p.3). Cette approche exclut donc les religieux plus « diffus ». En effet, si une définition « extensive » de la religion était utilisée, nul doute que l’on pourrait y inclure le nazisme, par exemple, comme système religieux également (système particulièrement haineux à l’égard des juifs et des chrétiens confessants de l’époque d’ailleurs…). Tel n’est pas le cas ici.
Ensuite, la deuxième remarque est une précision quant à la pertinence de cet article. Il ne s’agit pas ici de dire que le religieux était exclu de la plupart des guerres. Il était bien au contraire inclus/caché même dans certaines des guerres les plus athées ! Le dessein de cet article est plutôt de démontrer que bien que présent, il n’a pas été la cause majeure de conflits (telle est l’exacte formulation du titre par ailleurs), le déclencheur principal des guerres dans l’histoire. La « volonté de puissance » en l’homme, comme dirait Nietzsche, a largement suffi pour ce faire (retour au texte).
Voici un autre croquis valant mieux qu’un long discours métaphysique (par Alain Auderset).

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