Bravo à l'Inrap ! " On ne peut que se joindre à Manuel Valls pour féliciter les archéologues qui viennent de mettre au jour cette tombe absolument extraordinaire. Les fouilles sont toujours en cours. Un état de conservation exceptionnel, un riche mobilier, un chaudron en bronze d'un mètre de diamètre, une cruche à vin (oenochoé) en céramique à figures noires. "Des découvertes comme celles-là, on n'est pas prêts d'en faire avant 20 ou 30 ans", s'enthousiasme un archéologue.
Le cratère, en bronze, comporte quatre anses dans lesquelles s'encadrent de magnifiques représentations du dieu cornu gaulois. Barbu, moustachu, coiffé d'un casque à cornes, l'anse lui tient lieu de torque. Ses oreilles sont celles d'un taureau.
Faut-il y voir une variante du dieu Cernunnos plus habituellement représenté dans le symbole du cerf ? Le cerf est l'animal le plus intelligent, le plus rusé pour échapper au chasseur. De tous les gibiers, il est le plus noble mais aussi le plus mystérieux, apparaissant soudain au milieu des fourrés, puis disparaissant. Dans le chaudron de Gundestrup, l'homme sage s'est représenté dans la position d'un boudha. Il se trouve face à un choix : celui du serpent/péché, à sa gauche, celui du torque/signe d’alliance avec Dieu, à sa droite ; choix entre le bien et le mal. À côté d'un cerf, il est coiffé d'une ramure semblable en forme de branches d’épine noire, symbole d’intelligence (l'épine noire, en latin cervus, est le buisson d'épines que César a utilisé comme obstacle dans son retranchement d'Alésia).
Mais ici, à Lavau, près de Troyes, c'est le symbole du taureau qui a été choisi, ce qui paraît assez logique puisqu'il s'agit manifestement de la tombe d'un chef militaire. Le taureau est l'animal le plus terrifiant qui soit quand il charge. Nul doute que le guerrier de la sépulture s'identifiait à ce symbole quand il chargeait à la tête de ses troupes. Voici ci-dessous, en image semblable, le dieu barbu de Lezoux à oreilles et à cornes de taureau, très bel objet, lui aussi en bronze. Lezoux est le site arverne le plus riche en poteries, notamment décoratives.
Le bord du vase est décoré de têtes de lions ou de lionceaux, symboles du courage militaire (ci-dessous, à droite). Ces têtes de lions sont semblables à celles des chapiteaux de Mont-Saint-Vincent, là où je situe Bibracte, la capitale des Éduens. Le lion est aussi présent dans les chapiteaux du Crest, là où je situe Gergovie.
Oenochoé à figures noires, le vase est parfaitement représentatif d'un art de Gergovie souvent confondu, selon moi, avec la production des ateliers d'Athènes. Son pied est doré, ce qui lui donne une noblesse particulière. Assis à la table du banquet, le défunt fait face à la déesse Gergovie qui le reçoit sous les sarments de la vigne céleste. Seuls, les héros ont droit à cet honneur funèbre. Il apporte avec lui, en offrandes, la vaisselle et le vin, comme le préconise Homère. Boisson des libations terrestres, le vin est également la boisson sacrée des dieux. Lorsque le défunt aura été enterré, les convives festoieront, eux aussi. En même temps, là-haut, le prince élèvera sa coupe, quelque part dans une maison du ciel.
Les Gaulois ne veulent aller ni dans les tristes royaumes du dieu des profondeurs, ni dans les silencieux séjours de l’Erèbe. Ils disent que le corps-âme vit dans l’autre monde (orbe alio). La mort est une phase intermédiaire avant une longue vie. Et le poète Lucain, auteur de ces lignes, ajoute : Ils sont heureux quand la crainte de la mort, la plus terrible de toutes, les talonne. Ils se ruent au combat, l’esprit plein de courage. Leurs âmes sont prêtes à recevoir la mort. Ils savent que leur récompense sera la revie qui sera refusée au poltron.
Suivant l'usage, une femme, ou des femmes, ont été enterrées vivantes aux abords de la chambre funéraire pour accompagner le défunt dans son long voyage.
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