Il faut lire Renan, dont la pensée n'a été revolutionnaire qu'en matière religieuse selon Maurras.
Le président des États-Unis n'a pas fait la nation, tandis que le roi a fait la nation. Le roi n'est pas une émanation de la nation ; le roi et la nation sont deux choses ; le roi est en dehors de la nation. La royauté est ainsi un fait divin pour ceux qui croient au surnaturel, un fait historique pour ceux qui n'y croient pas. La volonté actuelle de la nation, le plébiscite, même sérieusement pratiqué, ne suffit pas. L'essentiel n'est pas que telle volonté particulière de la majorité se fasse ; l'essentielle est que la raison générale de la nation triomphe. La majorité numérique peut vouloir l'injustice, l'immoralité ; elle peut vouloir détruire son histoire, et alors la souveraineté de la majorité numérique n'est plus que la pire des erreurs.
C'est, en tout cas, l'erreur qui affaiblit le plus une nation. Une assemblée élue ne réforme pas. Donnez à la France un roi jeune, sérieux, austère dans ses moeurs ; qu'il règne cinquante ans, qu'il groupe autour de lui des hommes âpres au travail, fanatiques de leur oeuvre, et la France aura encore un siècle de gloire et de prospérité.
La Réforme intellectuelle et morale
Deuxième partie
Ernest Renan dut aller chercher l'exemple d'un président outre-Atlantique. Joseph de Maistre a dit, rapporte Sisley Huddleston(1), que « la volonté générale est mieux comprise par le gouvernement qu'elle ne l'est par la nation, qui ne sait jamais ce qu'elle veut : c'est une tradition qui vit, qui parle, et qui sait vouloir ». Renan avait bien vu cela ; il avait compris le caractère précieux et exceptionnel du roi, qui, participant à l'action de ses ancêtres, se trouve être comme le père de la nation.
À côté d'un bel éloge de la monarchie, ce texte comporte une véritable mise en cause de la légitimité démocratique : « La majorité numérique peut vouloir l'injustice, l'immoralité. » Nous avons des lois immorales en matière de moeurs, les stupides repentances de nos gouvernants cherchent à détruire l'histoire. Renan ne croit pas au caractère sacré de la loi du nombre.
Il faut lire Renan. On connaît son expression célèbre sur le Code civil, « fait pour un citoyen idéal, naissant enfant trouvé et mourant célibataire ». Dans la préface des Questions contemporaines (1868) où l'on peut lire ces lignes, on trouve également l'expression « banqueroute de la Révolution ».
Nous essaierons d'oublier les sept volumes de l'Histoire des origines du christianisme (1863-1881) pour penser au Renan de La Réforme intellectuelle et morale, des Questions contemporaines, de Qu'est-ce qu'une nation ? (conférence prononcée à la Sorbonne en 1882). Maurras a dit : « La pensée de Renan n'a été révolutionnaire qu'en matière religieuse. » (L'Action Française, 12 mars 1923)
1 - Le Mythe de la liberté. Lyon, H. Lardanchet, 1943.GÉRARD BAUDIN L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2762 – du 1er au 14 janvier 2009
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