« La civilisation française, héritière de la civilisation hellénique, a travaillé pendant des siècles pour former des hommes libres, c'est-à-dire pleinement responsables de leurs actes: la France refuse d'entrer dans le Paradis des Robots. »Georges Bernanos, La France contre les robots
Cette nouvelle rubrique a pour objet de proposer des textes pour aider tout un chacun à réfléchir sur des sujets précis et si possible, d'actualité, aujourd'hui, à l'heure où le pouvoir politique incapable de gouverner le pays, déclenche une guerre tous les 6 mois, tout en coupant à l'armée française ses moyens: le soldat et sa famille (5)
« Quatre fillettes vinrent m'ouvrir… » (2/3)
(Capitaine Gérard de Cathelineau, Parrain de la Promotion de Saint-Cyr
"Capitaine de Cathelineau", 1976 – 78.)
"Capitaine de Cathelineau", 1976 – 78.)
L'auteur, le Père Gasnier, ne connaissait rien du capitaine de Cathelineau lorsqu'on le pria d'écrire sa vie. Il accepta et se rendit donc chez les parents de l'officier, puis chez sa femme. Voici le récit de ses visites.
Deuxième séjour en Indochine
Dans l'avion qui l'emporte, il est sans doute sensible à la féerie des paysages qu'il survole. Mais sa plume cherche surtout à consoler sa femme par ces lignes empreintes de pensées à la fois grandes et exquises : « Vos préoccupations sont les miennes et les miennes sont les vôtres. Votre vie est la mienne et la mienne est la vôtre. Vos gestes sont les miens et les miens sont les vôtres. Beauté indicible du sacrement de mariage ! Ainsi nos gestes s'unissent dans l'espace, et cette unité est offerte à Dieu, d'autant plus belle que notre peine d'être séparés est plus grande. Plus unis parce que plus éloignés l'un de l'autre. Plus aimés parce que plus unis, et plus fidèles dans la séparation et l'affliction... Si vous vous sentez triste et découragée, appelez Michèle, Béatrice et Odile, demandez-leur de déposer un baiser sur votre front bien doucement, bien tendrement. Ainsi réconfortée, pensant que je suis présent dans ces baisers, levez-vous, allez chercher le quatrième auprès de Guillemette. Si elle dort, donnez-lui ce baiser de maman dans lequel vous aurez mis toute votre tendresse. Dites-vous que ce baiser m'est destiné. Offrez-le à notre Mère du ciel, et croyez que j'en aurai l'ineffable joie... Le ciel a inventé la famille. Demandons-lui toutes les bénédictions qu'il y a attachées. »
Ses diverses activités d'ordre militaire et sa vie mystique portée à ce sommet ne l'empêchent pas de demeurer en contact continuel avec sa famille, plus spécialement avec son épouse à qui il expédie une lettre quotidienne.
« Si courte que soit la lettre journalière,écrit-il à sa femme en septembre 1954, elle traduit en quelques mots des flots d'affection éprouvés au cours de la journée à un instant ou à un autre. Elle est le bonjour et le bonsoir quotidiens, elle est — si insignifiante ou banale soit-elle — le réconfort qui ne manquera pas en cas de découragement ou de fatigue. La lettre quotidienne me met tous les jours face à mon bonheur de te savoir ma femme, au même titre que la prière quotidienne nous remplit de joie par la pensée de l'amour infini de Dieu ».
Nous n'avons que l'embarras du choix pour puiser des textes dans l'abondant courrier. Le 2 février, par exemple, venant de recevoir une photo de sa femme et de ses enfants, il trace ces lignes : « Sous mes yeux, ma famille entière me regarde de ses cinq paires d'yeux intelligents, dynamiques et caressants. Que d'insondables et charmants mystères dans ces regards !... Ma Colette et moi nous avons uni nos deux volontés, nos deux cœurs, nos deux âmes pour toujours, pour cette oeuvre de vie que le Créateur a voulu de nous, pour cette œuvre de vie qui nous émeut ensemble et nous ravit au delà de nous-mêmes, pour cette œuvre de vie qui s'appelle Michèle, Béatrice, Odile, Guillemette, et la liste n'est pas close... Voilà que l'idée de Guillemette effectuant ses premiers pas m'est comme un soutien ».
Il multiplie d'autant plus ses lettres d'affection que la santé de sa femme à cette époque lui donne de lourds soucis. Un certificat médical, signé du Val de Grâce où elle est soignée, lui parvient, qui provoque en sa conscience un dramatique débat. « Il n'est pas douteux, déclare le médecin traitant, que la présence de son mari auprès d'elle contribuerait à apaiser les inquiétudes de Madame de Cathelineau et faciliterait le repos physique et moral qui est indispensable à son rétablissement ».
Ses chefs, auxquels il s'en remet pour prendre une décision, se montrent compréhensifs et tout en exprimant leurs très vifs regrets de le perdre, lui conseillent de faire une demande pour regagner la métropole. Sa demande est agréée et, au début de juillet 1955, il prenait l'avion qui le ramenait en France. Il avait écrit à ses parents : « Pour vous rassurer, je puis vous dire que proposable dès cette année pour le grade de chef de bataillon, j'ai eu droit à d'excellentes paroles du Général Gandoët qui m'a assuré que je partirai sur la liste des proposables avec un numéro, c'est-à-dire désigné plus spécialement, ce qui me met en bonne place pour les années suivantes... Au 1er juillet 1955, ma présence en Indochine aura été de 42 mois, dont 27 du premier séjour et 15 du second. » […]
Père Michel Gasnier, o.p.
Extrait de : "Un officier français, Gérard de Cathelineau".
Nouvelles Éditions Latines – 1960.
Lois Spalwer http://lesalonbeige.blogs.com/my_weblog/web.html
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