La Guerre de 1914-1918 est fondamentale dans l'Histoire de l'Europe. Avant cet affrontement terrible, la Japhétie domine clairement le monde, directement, notamment par l'emprise coloniale, ou indirectement, par ses capitaux et ses contrôles des marchés extérieurs, des flux commerciaux aux entreprises locales bien souvent. Et sur tous les continents, du Chili à la Chine. Ne lui échappent que deux puissances, encore perçues comme secondaires ou régionales avant 1914, les États-Unis et le Japon. Ce n'est plus le cas en 1918, et encore moins après le deuxième épisode en 1945. La guerre qui éclate à l'été 1914 marque la première étape d'un processus d'effondrement de notre continent, qui non seulement ne pèse plus guère depuis des décennies sur le plan géopolitique, mais perd même sa substance biologique, chose la plus grave et véritablement mortelle. En 1914, il n'y a absolument que des Blancs en Europe. Les rares personnes de couleur sont souvent présentées comme des curiosités dans des spectacles ou des foires, ce qui n'est pas toujours du meilleur goût. Depuis, les choses ont bien changé, pour le pire.
L'équilibre des forces en 1914, fondement d'une guerre longue
La première guerre mondiale éclate en août 1914. Elle débute par une agression claire, mais pas injustifiée, de l'Autriche-Hongrie contre la Serbie, après sa déclaration de guerre le 28 juillet 1914. Les déclarations de guerre se succèdent entre grands États européens jusqu'au 4 août 1914. La Serbie avait toléré en son sein des activités terroristes dirigées contre l'Autriche-Hongrie, autour de la peu discrète organisation secrète panserbe « Main Noire » du colonel Apis (Dimitrijevic). Chose peu connue, le personnage, insupportable, dangereux pour tous, finit fusillé par les Serbes eux-mêmes, en exil à Thessalonique, en juin 1917. Par le jeu des alliances, et les traditions panslavistes et panorthodoxes, la Russie soutient la Serbie. Suivant des promesses explicites de Guillaume II d'Allemagne à François-Joseph, l'Allemagne se décide à venir en aide militairement à l'Autriche-Hongrie, pas de taille à lutter seule contre la Russie. Enfin les imprudences allemandes aidant, la France et le Royaume-Uni entrent en guerre à leur tour contre Berlin, puis Vienne. Sans un ultimatum absolument inacceptable adressé à la France, ou l'invasion de la Belgique, dans les premiers jours d'août 1914, la guerre aurait peut-être pu être restreinte à l'Est de l'Europe, débouchant alors sur une victoire des Puissances Centrales, à l'automne 1914 ou au printemps 1915 au plus tard. Les conséquences auraient été dramatiques alors pour la Serbie, significatives pour la Russie, mais sans commune mesure avec l'ébranlement continental de 1914-1918. Les dirigeants allemands, le haut état-major formulant ses exigences et les politiques les suivant docilement, dont on ne saurait faire les seuls responsables de la guerre, ont clairement manqué de prudence au moment décisif.
En 1914, aucune alliance n'est en mesure de gagner la guerre. À l'Ouest, les armées allemandes l'emportent en août en Belgique et dans le Nord de la France, mais sont battues en septembre 1914 sur la Marne, sans qu'il s'agisse pour autant d'une défaite décisive. À l'Est, après des succès initiaux, les Russes sont battus dès la fin août 1914 en Prusse Orientale, près du site historique médiéval de Tannenberg ; en revanche en septembre-octobre, ils l'emportent sur les Austro-Hongrois en Gallicie. En Serbie victoire autrichienne éclair est manquée à l'automne 1914. Le pays n'est envahi en sa totalité qu'un an plus tard, avec l'entrée en guerre de la Bulgarie.
Aussi, dès l'automne 1914, à l'Ouest, de la Mer du Nord à la frontière suisse, le front s'enterre, la guerre de tranchées s'installe, qui empêche toute percée décisive. L'entrée en guerre de l'Italie au printemps 1915 ne change rien non plus, ses armées se trouvant bloquées par le relief et une défense opiniâtre. Les défenseurs, soldats allemands d'Autriche comme croates, détestent en effet les Italiens et leurs ambitions territoriales sur ce qu'ils estiment être leurs terres. Les réseaux profonds de tranchées demeurent infranchissables, du moins jusqu'à l'invention d'une nouvelle arme, le char d'assaut, enfin à peu près fiable, fonctionnel et, nombreux lors de l'été 1918, typiquement le Renault FT-17. À l'Est, même si les tranchées apparaissent aussi, de la Baltique aux Carpates, le front demeure plus fluide, marqué dans la durée par une progression des Allemands. Toutefois, les généraux allemands commettent l'erreur de ne pas risquer d'offensive potentiellement décisive en 1916 ou 1917, visant Moscou ou Saint-Pétersbourg. Ils maintiennent aussi relativement trop de forces à l'Ouest, l'un étant lié à l'autre. À quoi s'ajoute l'erreur fatale de la guerre sous-marine poussée jusqu'à causer l'entrée en guerre des États-Unis au printemps 1917, après des avertissements explicites pourtant.
Une sinistre volonté mutuelle d'anéantissement
Domine, dès l'été 1914, et ce jusqu'à l'automne 1918, voire le printemps 1919 lors de l'élaboration des traités de paix, une volonté mutuelle d'anéantissement. Les Puissances Centrales comme les Alliés ne tendent à considérer comme acceptable qu'une victoire décisive, ôtant tout danger pour l'avenir. Selon un cercle vicieux, les souffrances endurées justifieraient leur prolongement, afin qu'elles ne se reproduisent plus jamais. Ceci obéit à une certaine logique, mais aboutit largement à l'anéantissement mutuel.
En 1914, un fort patriotisme domine dans les Nations authentiques, en France, en Grande-Bretagne, en Allemagne, en Serbie, en Russie. De façon plus complexe un certain loyalisme envers la dynastie des Habsbourg et l'Etat supranational en place subsistent encore en Autriche-Hongrie, doublé de la crainte d'une invasion russe, partagée par la majorité des peuples. Ce patriotisme dépasse les idéologies, y compris parfois explicitement internationalistes, comme les socialistes allemands et français, premiers partis politiques de leurs pays réciproques, qui se rallient sans difficultés à « l'Union Sacrée ». Le célèbre, du fait de la suite, déserteur russe Lénine, réfugié en Suisse, n'est alors qu'un surexcité sectaire très marginal au sein même du socialisme russe, très majoritairement loyaliste envers sa Nation, et ce jusqu'à l'automne 1917. Ce patriotisme, en soi sain, et l'on en souhaiterait bien davantage aujourd'hui, souffre d'un esprit sinon ouvertement agressif, du moins conspirationniste contre d'autres peuples européens : les Allemands d'Autriche ou d'Allemagne dénoncent le complot panslaviste russe, ou russo-serbe, contre la germanité ; les Russes s'alarment du complot pangermaniste, voire judéo-allemand, contre la Russie ; les Français et les Britanniques craignent le complot allemand contre leurs pays, avec des arguments tirés de la domination croissante des marchés, y compris nationaux, par des grandes entreprises industrielles allemandes. Sur ce thème se développent des haines raciales et nationales suicidaires entre Européens : les pangermanistes tendent à théoriser une prétendue animalité slave, tandis que des scientifiques français de renom se ridiculisent entre 1914 et 1918 en prétendant faire des Allemands des hommes-singes, descendants de Néandertal. Ce dernier est lui-même représenté de façon encore outrageusement simiesque à l'époque.
À côté de ce racisme agressif absurde entre Européens, se développe l'idée que tous les moyens sont permis pour vaincre. Sur le plan strictement tactique, c'est l'usage des gaz de combats. Sur le plan stratégique, c'est l'appel à des Nord-Africains, des Noirs, des Indiens, pour compléter massivement les rangs des armées françaises et britanniques. Dans le camp opposé, les Allemands réussissent à entraîner l'Empire ottoman à leurs côtés dans la guerre en novembre 1914, ce qui se traduit par un appel au djihad mondial par le sultan-calife d'Istanbul. Il n'a heureusement pas été entendu par les musulmans hors de son empire. Mais le calcul n'avait pas paru absurde et il aurait entraîné en cas de réussite de grands massacres de Blancs en Afrique du Nord. De même, Berlin et Vienne sont complices, au moins passives, du génocide arménien, accompli par l'armée turque et ses auxiliaires kurdes à partir de 1915. La France, effectivement en gros besoin de main d'œuvre, inaugure l'immigration extra-européenne sur notre continent, d'une ampleur encore réduite mais déjà significative, avec toutes les perspectives dramatiques de long terme que nous subissons. Pour se détruire réciproquement, les Blancs d'Europe déchaînent des forces qui, sur le long terme, se retourneront contre eux. Chaque camp dénonce alors avec virulence le manque de discernement de l'autre, et celui-là seul, alors qu'ils sont également coupables.
Le premier des trois suicides de l'Europe
Cette lutte à mort, avec pour seule perspective admissible la victoire, empêche toute paix de compromis, malgré de discrètes tentatives allemandes ou austro-hongroises à l'hiver 1916-1917. En 1917, la Russie s'effondre, avec deux révolutions successives, libérale puis bolchevique, en mars et novembre, dites de Février et d'Octobre. L'Autriche-Hongrie frôle déjà l'effondrement intérieur et l'éclatement dans une ambiance dramatique de famine. Les Alliés, grâce à la prépondérance navale britannique, réalisent en effet un strict blocus des Puissances Centrales, effectif en 1915, dont sont victimes avant tout les enfants, nettement moins les soldats adverses, prioritaires dans l'attribution du peu de nourriture disponible. La France et l'Allemagne subissent d'importantes grèves ouvrières, doublées même de mutineries dans l'armée française, vite réduites, avec fermeté et humanité par le général Pétain. L'Italie frôle l'effondrement complet, militaire, politique, économique, suite au désastre de Caporetto d'octobre-novembre 1917. En mars 1918, les Allemands, vainqueurs à l'Est, imposent au gouvernement russe bolchevique le traité de Brest-Litovsk, très dur pour la Russie, reculant ses frontières de 1000 kilomètres vers l'Est. Il sépare les Baltes et Slaves non-Russes, Polonais, Biélorusses, Ukrainiens, de Moscou.
À l'été 1918, l'Allemagne perd militairement la guerre à l'Ouest, du fait de la supériorité technique française avec les chars FT-17, et de l'arrivée de plus en plus massive de divisions fraîches d'infanterie américaine. À défaut d'avoir sur le terrain un rôle stricto sensu décisif, elles créent assurément un grand choc psychologique. Ces réserves humaines considérables rendent toute résistance allemande impossible au-delà du printemps 1919, même en cas de prolongation obstinée de la lutte, chose comprise par les stratèges allemands dès septembre 1918, et connue de tous les milieux dirigeants ou parlementaires.
En novembre 1918 ont lieu des révolutions en Allemagne et en Autriche-Hongrie, renversant les monarchies et provoquant l'explosion territoriale de cette dernière. La certitude de la défaite, discutée dans les parlements, répercutée dans les journaux, précède la révolution et non l'inverse. Toutefois, les élites traditionnelles allemandes, hongroises ou autrichiennes, ont été lamentables, en abandonnant le pouvoir à des libéraux et socialistes, avec un danger communiste réel en perspective.
Les traités dits de la banlieue parisienne de 1919-1920, Versailles, Saint-Germain-en-Laye, Trianon, Sèvres, sont pensés dans la logique d'un affaiblissement durable, voire définitif, des vaincus. Ils s'en approchent sans jamais y parvenir vraiment, d'où le germe de nouvelles guerres, immédiates en Asie Mineure, ou différée de vingt ans ailleurs. Toutefois, il faut reconnaître que les Allemands ont fait subir la même chose un an plus tôt à la Russie. Une paix plus équilibrée, n'imposant pas de recul allemand à l'Est, et préservant la Hongrie historique, aurait été infiniment préférable. Il n'est envisagé par aucun des protagonistes alliés. La guerre a tué plus de 9 millions de soldats européens ; la grippe espagnole frappe en 1918-1919 et emporte autant de vies humaines. La dynamique démographique du continent est brisée. Le discours sur l'immigration nécessaire pour redresser notre démographie domine déjà dans les années 1920, même s'il est encore entendu alors que les immigrés blancs sont plus désirables, ou seuls désirables, selon les couleurs politiques.
Le deuxième suicide de l'Europe est donc la Deuxième Guerre mondiale (1939-1945). Elle reprend l'intensité de la première, en pire. Il est courant d'insister sur l'aspect idéologique de ce conflit, par contraste avec le premier. Ce qui est vrai s'agissant du pouvoir américain, sous l'impulsion de l'idéologue fanatique Roosevelt, franc-maçon spiritualiste et mondialiste, rêvant la future ONU en république universelle, dès 1941. Mais cela est moins pertinent pour les protagonistes européens, tout comme d'ailleurs nippons ou chinois. Significativement le conflit éclate sur la volonté réciproque d'une explication finale entre nations allemande et polonaise. De façon étonnante, les Polonais ont gagné, compensant à l'Ouest les pertes à l'Est face aux Russes, suivant l'échange imposé par Staline. Même l'URSS de Staline bâtit l'essentiel de sa propagande de guerre sur le nationalisme russe, certainement pas le communisme, nullement oublié mais jugé peu mobilisateur, et effrayant potentiellement pour Churchill et Roosevelt. Les pertes humaines sont absolument considérables en URSS, en Allemagne, en Pologne, en Croatie et en Serbie. L'Allemagne ne se remet jamais de ses 8 à 9 millions de morts.
Le troisième suicide n'est pas lié à une guerre, mais offre un exemple unique dans l'Histoire de capitulation sans cause rationnelle. C'est l'ouverture totale des frontières européennes à l'immigration allochtone, non leucoderme, de peuplement. Cette absurdité suicidaire est provoquée certes par l'endoctrinement idéologique imposé après 1945 à travers notamment le mondialisme de l'ONU. Toutefois, les discours sur l'accueil des populations de couleur, ou de sympathie pour l'Islam, prononcés par des officiels, à Paris comme à Berlin, remontent largement à 1914-18, chose trop oubliée.La première mosquée en France, à Paris, date significativement de 1920. Maurras avait eu raison à l'époque de s'y opposer prévoyant la suite.
Toute l'Europe Occidentale est concernée par la colonisation africaine à partir des années 1950, en particulier la France, la Grande-Bretagne, la Belgique, les Pays-Bas, l'Allemagne. Le phénomène s'étend des années 1970 à 1990 de la Norvège au Portugal. Seul l'Est du continent, ruiné durablement par le communisme, et pas rétabli par l'ultralibéralisme, demeure à peu près épargné, pour l'instant.
Avec le recul on comprend mieux à quel point 1914 marque la fin d'un monde et le début de la longue et douloureuse agonie de la civilisation blanche, européenne et chrétienne. Cette guerre fut une folie, un suicide dont nous n'avons pas fini de payer le prix un siècle plus tard.
Scipion de SALM. Rivarol du 11 septembre 2014
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