« Dieu
merci, nous n’avons pas à créer cette science de toutes pièces. Il y a
depuis des siècles des maîtres pour l’enseigner et l’appliquer. Une
longue expérience s’est acquise à leur école. Les générations qui se
sont suivies nous lèguent un précieux héritage de lumière. Nous n’avons
quà le recueillir et à le comprendre. Les enseignements qu’il nous
offre demandent à être vérifiés sur le passé par l’histoire et sur le
présent par l’observation. Grâce à ce double travail de vérification,
le vrai se distingue du faux ; le certain, du probable ; le nécessaire,
du contingent. La raison procède donc en politique comme en philosophie
ou en biologie. La politique est une science qui s’apprend par le
travail avec une méthode sous la direction de maîtres compétents. »
Dom Besse
Il n’est pas superflu de rappeler que ces mots ne sortent pas de la bouche d’un positiviste. Ils furent prononcés dans la chaire du Syllabus de l’Institut d’Action française par un moine bénédictin de Ligugé. Recueil d’un an de conférences, Église et Monarchie fut publié en 1910.
Dom Besse montre d’abord que l’Église romaine est une société organisée comme une nation, mais avec un but différent qui donne à chacune des sociétés des caractères distinctifs : « l’une procure le bonheur de la terre, l’autre, le bonheur des cieux. » La politique de l’Église se comprend par l’histoire qui la montre de l’extérieur ; par le droit canon qui en révèle la structure ; par la théologie qui apprend qu’elle est sa vie intérieure dans laquelle la science ne fait que coordonner ce que la foi lui révèle.
L’Église a des droits universels mais elle ne les exerce que sur ses fidèles, et elle n’est pas seule à avoir autorité sur eux : ses temples sont édifiés sur un sol qui appartient à un pays ; ses desservants ont une patrie qui a des droits sur eux. « Ses membres, ses terres, ses édifices appartiennent donc aux deux cités. L’Église n’entend pas les soustraire aux charges communes de la patrie ; il est juste que, de son côté, la patrie reconnaisse leur caractère ecclésiastique. »
Comme l’Église jouit d’une constitution propre, l’État ne peut l’ignorer et des relations de société à société doivent nécessairement être instaurées. La politique de l’Église consiste donc « dans la science et l'art de son gouvernement intérieur et de ses rapports avec la société civile. » Tout cela est lumineux.
Un concordat n’est pas une concession ou un empiétement, c’est l’organisation légitime et nécessaire des rapports entre deux sociétés distinctes mais non séparées puisque les deux cités vivent l’une dans l’autre tout en évoluant chacune dans sa sphère propre. Mais il faut que les deux parties se respectent. Du jour où l’État passe entre les mains des ennemis de Dieu, le concordat tombe de lui-même en fait avant d’être dénoncé en droit. C’est ce qui s’est passé dans le courant du XIXe siècle et au début du XXe.
Contre-Révolution
Nous ne rapporterons pas dans le détail les neuf autres leçons de Dom Besse. Après avoir rappelé les diverses formes de monarchie, traditionnelle ou constitutionnelle, il montre l’origine et le fonctionnement de la monarchie qui dirige l’Église catholique, monarchie élective tempérée d’aristocratie, « monarchie de droit divin, dans toute la force du terme ». Et seule cette monarchie permet l’indépendance des Églises par rapport aux États.
Après avoir défini l’Église, sa politique, sa constitution monarchique, son attitude face à l’État en général, Dom Besse passe aux rapports entre l’Église et la dynastie capétienne : il expose les liens étroits, privilégiés, que l’histoire a tissés entre les deux monarchies. Une leçon entière expose le sacre de nos rois qui fortifie religieusement les liens qui unissent le souverain à son peuple, renforçant et adoucissant à la fois l’autorité et l’obéissance.
La dixième leçon porte sur la Papauté et la Révolution française. Elle montre la rupture de la tradition religieuse de la France, la condamnation pontificale de la révolution ecclésiastique, les insuffisances d’un Concordat que les Gallicans contraignirent la Restauration à reconduire.
Dom Besse conclut donc à l’incompatibilité de l’Église et de la Révolution. « L’Église a politiquement échoué en France ». L’une des causes est le viol de fait du Concordat par des hommes politiques hostiles au catholicisme ; l’autre, moins visible mais plus profonde est que tout, dans la France telle que la Révolution la faite, contrariait l’apostolat social de l’Église. La France fut monarchique et chrétienne dès ses origines ; le trône et l’autel, dit Dom Besse, y possèdent des intérêts communs en vue du Bien commun. L’avenir moral et physique du pays passe donc par la contre-révolution.
Gérard Baudin L’Action Française 2000 du 21 décembre 2006 au 3 janvier 2007
* Dom Besse : Église et Monarchie, Jouve & Cie Editeurs. Paris. 1910.
Dom Besse
Il n’est pas superflu de rappeler que ces mots ne sortent pas de la bouche d’un positiviste. Ils furent prononcés dans la chaire du Syllabus de l’Institut d’Action française par un moine bénédictin de Ligugé. Recueil d’un an de conférences, Église et Monarchie fut publié en 1910.
Dom Besse montre d’abord que l’Église romaine est une société organisée comme une nation, mais avec un but différent qui donne à chacune des sociétés des caractères distinctifs : « l’une procure le bonheur de la terre, l’autre, le bonheur des cieux. » La politique de l’Église se comprend par l’histoire qui la montre de l’extérieur ; par le droit canon qui en révèle la structure ; par la théologie qui apprend qu’elle est sa vie intérieure dans laquelle la science ne fait que coordonner ce que la foi lui révèle.
L’Église a des droits universels mais elle ne les exerce que sur ses fidèles, et elle n’est pas seule à avoir autorité sur eux : ses temples sont édifiés sur un sol qui appartient à un pays ; ses desservants ont une patrie qui a des droits sur eux. « Ses membres, ses terres, ses édifices appartiennent donc aux deux cités. L’Église n’entend pas les soustraire aux charges communes de la patrie ; il est juste que, de son côté, la patrie reconnaisse leur caractère ecclésiastique. »
Comme l’Église jouit d’une constitution propre, l’État ne peut l’ignorer et des relations de société à société doivent nécessairement être instaurées. La politique de l’Église consiste donc « dans la science et l'art de son gouvernement intérieur et de ses rapports avec la société civile. » Tout cela est lumineux.
Un concordat n’est pas une concession ou un empiétement, c’est l’organisation légitime et nécessaire des rapports entre deux sociétés distinctes mais non séparées puisque les deux cités vivent l’une dans l’autre tout en évoluant chacune dans sa sphère propre. Mais il faut que les deux parties se respectent. Du jour où l’État passe entre les mains des ennemis de Dieu, le concordat tombe de lui-même en fait avant d’être dénoncé en droit. C’est ce qui s’est passé dans le courant du XIXe siècle et au début du XXe.
Contre-Révolution
Nous ne rapporterons pas dans le détail les neuf autres leçons de Dom Besse. Après avoir rappelé les diverses formes de monarchie, traditionnelle ou constitutionnelle, il montre l’origine et le fonctionnement de la monarchie qui dirige l’Église catholique, monarchie élective tempérée d’aristocratie, « monarchie de droit divin, dans toute la force du terme ». Et seule cette monarchie permet l’indépendance des Églises par rapport aux États.
Après avoir défini l’Église, sa politique, sa constitution monarchique, son attitude face à l’État en général, Dom Besse passe aux rapports entre l’Église et la dynastie capétienne : il expose les liens étroits, privilégiés, que l’histoire a tissés entre les deux monarchies. Une leçon entière expose le sacre de nos rois qui fortifie religieusement les liens qui unissent le souverain à son peuple, renforçant et adoucissant à la fois l’autorité et l’obéissance.
La dixième leçon porte sur la Papauté et la Révolution française. Elle montre la rupture de la tradition religieuse de la France, la condamnation pontificale de la révolution ecclésiastique, les insuffisances d’un Concordat que les Gallicans contraignirent la Restauration à reconduire.
Dom Besse conclut donc à l’incompatibilité de l’Église et de la Révolution. « L’Église a politiquement échoué en France ». L’une des causes est le viol de fait du Concordat par des hommes politiques hostiles au catholicisme ; l’autre, moins visible mais plus profonde est que tout, dans la France telle que la Révolution la faite, contrariait l’apostolat social de l’Église. La France fut monarchique et chrétienne dès ses origines ; le trône et l’autel, dit Dom Besse, y possèdent des intérêts communs en vue du Bien commun. L’avenir moral et physique du pays passe donc par la contre-révolution.
Gérard Baudin L’Action Française 2000 du 21 décembre 2006 au 3 janvier 2007
* Dom Besse : Église et Monarchie, Jouve & Cie Editeurs. Paris. 1910.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire