La coexistence pacifique des trois communautés musulmane,
chrétienne et juive en al-Andalus est l’un des mythes historiques
entretenus par les politiques et idéologues promoteurs du «
vivre-ensemble ». Dans une Europe comptant une forte minorité musulmane
ne cessant de prendre du poids, présenter l’Islam comme pacifique et
tolérant à travers l’exemple de l’Espagne médiévale, paraît nécessaire
aux tenants du multiculturalisme.
Les fatwas (décisions de justice) ont été jusqu’ici peu exploitées
par les historiens dans l’analyse des sociétés musulmanes médiévales
d’Occident. L’ouvrage de Vincent Lagardère, Histoire et société en Occident musulman au Moyen Âge, présente plus de 2000 fatwas – non commentées – issues du Kitâb al-Mi’yâr,
corpus de consultations juridiques rendues par les juristes de
l’Occident musulman médiéval compilé par le juriste maghrébin
al-Wansarîsî (v. 1430-1508). Constituées de deux parties (la question et
la réponse), certaines de ces fatwas permettent d’appréhender les
rapports entre les différentes communautés religieuses.
Cordoue IXe siècle. Ibn Habîb.
« Un homme laisse un silo ouvert et un porc y tombe et meurt. Peut-on vendre le blé qu’il renferme à un Chrétien ?
Réponse. On ne peut le vendre ni à un Chrétien ni à un Musulman. Son propriétaire ne doit ni le semer ni en tirer profit et il lui faut empêcher que les Chrétiens n’en profitent. »
(p. 168).
Réponse. On ne peut le vendre ni à un Chrétien ni à un Musulman. Son propriétaire ne doit ni le semer ni en tirer profit et il lui faut empêcher que les Chrétiens n’en profitent. »
(p. 168).
Cordoue IXe siècle. Yahyâ b. Yahyâ.
« La maison de tout marchand de vin doit être brûlée. »
(p. 52)
(p. 52)
Kairouan Xe-XIe siècles. Al-Qâbisî.
« Un Musulman a un voisin juif qui a été élevé au milieu des
Musulmans. Ils se rendent des services et quand ils se rencontrent sur
un chemin contigu, ils échangent des propos et sourient. Cet homme
déclare : « Allâh connaît ma haine des Juifs, mais j’ai un doux
caractère ». Que penser de sa conduite ? Quand les Juifs vous saluent,
comment faut-il leur répondre ?
Réponse. Il vaut mieux ne pas fréquenter les gens qui n’ont pas ta religion. Tu peux rendre service à un voisin tributaire [càd Juif ou Chrétien] et lui parler avec gentillesse, mais sans déférence. S’il te salue en disant « Que le salut soit sur toi », réponds-lui « sur toi » sans rien ajouter et tu n’as pas besoin de ses nouvelles ni de celles de sa maisonnée. Conduis-toi envers lui comme on doit le faire envers un voisin, mais avec une certaine réserve. »
(p. 464). [phrase soulignée par la rédaction]
Réponse. Il vaut mieux ne pas fréquenter les gens qui n’ont pas ta religion. Tu peux rendre service à un voisin tributaire [càd Juif ou Chrétien] et lui parler avec gentillesse, mais sans déférence. S’il te salue en disant « Que le salut soit sur toi », réponds-lui « sur toi » sans rien ajouter et tu n’as pas besoin de ses nouvelles ni de celles de sa maisonnée. Conduis-toi envers lui comme on doit le faire envers un voisin, mais avec une certaine réserve. »
(p. 464). [phrase soulignée par la rédaction]
Fès XIVe-XVe siècles. Isâ b. Allâl Al-Kutâmî Al-Masmûdî (cadi de Fès, v. 1420).
« Si un seul tributaire nuit aux Musulmans tous les autres perdent
toute protection ; leurs biens sont pris et assimilés au butin soumis au
quint ; les biens de provenance inconnue reviennent au trésor public
dont l’inspecteur s’occupera. »
(p. 47).
(p. 47).
LAGARDÈRE Vincent, Histoire et société en Occident musulman au Moyen Âge. Analyse du Mi’yâr d’al-Wansarîsî, Madrid, Casa de Velazquez, 1995.
A suivre. http://histoire.fdesouche.com
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